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Retrouver ce titre sur Numilog.com STRUCTURE ET FONDEMENT DE LA COMMUNICATION HUMAINE Retrouver ce titre sur Numilog.com Retrouver ce titre sur Numilog.com U N I V E R S I T É D E P A R I S — F A C U L T É D E S L E T T R E S STRUCTURE ET FONDEMENT DE LA COMMUNICATION HUMAINE Essai critique sur les théories contemporaines de la communication T H È S E P R I N C I P A L E P O U R L E D O C T O R A T È S L E T T R E S P R É S E N T É E A L A F A C U L T É D E S L E T T R E S D E L ' U N I V E R S I T É D E P A R I S par René SCHÉRER ancien élève de l'École Normale Supérieure agrégé de philosophie SEDES 5, Place de la Sorbonne PARIS - Ve Retrouver ce titre sur Numilog.com Retrouver ce titre sur Numilog.com INTRODUCTION La communication, une passion ou une technique de notre temps ? « Parce qu'ils sont partis loin d'eux-mêmes tou- jours » (J. W A H L , Poèmes). Il a toujours été plus facile d'entrer en contact avec les dieux qu'avec les hommes. Car les dieux ne manquent jamais de donner une réponse favorable, ou du moins conforme, à la question qui leur est posée. C'est pourquoi les dieux constituent l'environnement privilégié de l'homme, les présences qu'il sollicite et qu'il invoque sans risque d'être déçu. Et ce sont aussi des sortes de dieux que les forces secrètes de la nature, qu'elles aient pris ou non une forme personnelle, que les morts et les ancêtres, présents dans les sépultures, ou, familièrement, dans les lieux que l'on habite sous la forme de ces « crânes bienveillants » dont parle Leenhardt, qui garnissent les murs de la demeure papouasienne. Les ethnologues ont révélé, dans les cérémonies de la plupart des peuples, leurs danses, leurs rythmes, leurs rites et leurs mythes, dans les cryptogrammes de leur art, des tech- niques de communication avec l'invisible, à travers une symbolisation qui, si elle paraît s'adresser à l'homme, a pour fonction essentielle de capter comme par des antennes les messages qui lui viennent des dieux Mais il n'y a là rien qui puisse nous étonner. L'abondante documentation rassemblée à l'heure actuelle par l'ethnologie, dans laquelle l'homme contem- porain se plonge avec une sorte d'avidité, frappe au contraire par le senti- ment d'étrange familiarité qu'elle suscite en nous. C'est que l'invocation des dieux n'est pas l'apanage des peuples primitifs ou lointains dans l'espace et dans le temps : nous vivons constamment parmi des puissances invisibles mais réelles qu'il nous faut conjurer. C'est à travers elles que notre entourage humain se bâtit. Le geste, la parole, l'art, l'argent, ne deviennent instruments de communication entre les hommes qu'en passant par une première rela- tion, sinon avec le divin, du moins avec le magique. Nous savons, par la psychanalyse essentiellement, que le langage apparemment naturel de notre désir, orienté au premier abord directement vers l'autre, se dissimule sous des masques dont les symboles sont aussi variés que les tatouages dont les volutes ornent les faces océaniennes. Et il fait signe à l'autre d'aussi loin, des profondeurs dont le secret nous échappe, il invoque des présences qu'il a pour fonction de rendre favorables. Que les porteurs habituels de signification, les mots, les signes plastiques, musicaux, s'appauvrissent jusqu'à n'avoir d'autre contenu que celui d'une 1. G. BURAUD, Les masques, Paris, 1948. Retrouver ce titre sur Numilog.com communication interhumaine trop immédiate, trop évidente, et ils sont remplacés par d'autres signes, plus propres à l'invocation du sacré. L'en- gouement pour les arts exotiques et primitifs, qui ne peut s'expliquer par une simple curiosité ou par un simple désir de connaissance, répond à une exigence de cet ordre. La fonction propre d'un art qui, dans son hermétisme, a pour rôle d'assurer une communication avec le sacré nous attire, même si nous échappe le sens précis de cette communication. Quelque perdu que soit le code, il ne laisse pas de régner, en son absence même, sur la face sensible du symbole ; et, sur la base de celui-ci, des codes nouveaux se réinventent. Comme dans l'univers de Paul Klèe une sorte de symbolique « à l'état libre », dépourvue de table de référence, de tradition précise, de conventions bien définies, empruntée aux signes morts des anciennes cultures regarde vers le mystère des choses et éveille en nous des résonances sans objet. En tout cas cet objet n'est pas cet autre avec lequel nous échangeons les signes de notre langue, que rendent suspects l'usage trop naturel de leur code, ni ce monde objectif qui règle nos actions. Contact ou communication avec les dieux ? Il serait donc vain de croire que l'homme et par excellence l'artiste interprète de ses passions profondes, se propose d'entrer d'abord en communication avec d'autres hommes pour leur offrir sa simple image, ou recevoir la leur. N'est-ce pas pour cette raison que l'on ne pourra jamais tirer l'art, pas plus que la cérémonie d'ailleurs ou que la fête et tout ce qui touche en général le voisinage des dieux, d'une simple fonction de communication sociale ? Une interprétation purement sociologique, justifiée dans ses lignes les plus générales, est spécieuse, parce que d'autant plus facilement universalisable qu'elle est vide. Si la commu- nication des hommes entre eux était l'unique souci et la loi inconsciente de l'espèce, si l'homme, selon la curieuse expression couramment employée, et qui semble aller de soi, était « un animal capable de communiquer »x, puisque nous connaissons de plus en plus d'espèces animales dont les moyens de communication sont également, sinon mieux, adaptés aux besoins, l'homme ne se distinguerait pas de toute autre espèce. Mais surtout, depuis longtemps déjà, l'espèce humaine se serait immobilisée dans une parfaite satisfaction d'elle-même. Qu'importe en effet pour un individu ou une société l'extension des communications, le désir d'expérimenter au-delà de ses propres expé- riences, en quoi l'on situe parfois l'ouverture des temps modernes sur d'autres cultures, si les communications suffisent, qui les lient à leur milieu naturel immédiat ? Il est vrai qu'en l'homme même subsiste la nostalgie d'une telle satisfac- tion, et que c'est elle peut-être, qu'on la nomme subjectivement nostalgie précisément, ou plus objectivement, et en recherchant son fondement on- tologique, tendance à la répétition ou désir de mort, ou encore, en l'ex- trapolant en une loi générale de la physique, tendance à l'augmentation de l'entropie d'un système, qui colore les communications purement humaines d'inauthenticité. La technique des communications humaines ne suffit plus là où la communication s'impose comme une passion. Mais cette passion est-elle divine ? Le sens déposé en elle, et qui nous est apparu de prime abord comme éveillé par la sollicitation des dieux, ne 1. Colin CHERRY, La mathématique des communications sociales, Bulletin international des sciences sociales, VI, 4, 1954, p. 673. Retrouver ce titre sur Numilog.com se perdrait-il pas alors lui aussi dans une forme de satisfaction inféconde : le retour à l'un originel, aux sources supra-terrestres de l'homme, la nostalgie d'un Paradis perdu 1 ? Comment pourrait-on d'ailleurs prendre totalement au sérieux en notre temps l'idée d'une communication avec le divin ou le sacré, interpréter à partir d'elle l'élargissement de notre sensibilité esthétique, que nous venons de choisir comme exemple, puisque nous savons, d'une part, que le monde, repris pour notre compte, des symboles, ne devient une des composantes de notre vision propre qu'en tant qu'il tombe dans le champ de la sensibilité même qui l'adopte, d'autre part, que jamais nous ne pourrons revivre ces symboles suivant leur code, et que les efforts tentés pour en créer de nou- veaux sont tout autre chose que la réactivation de ceux-ci 2 ? Car la commu- nication avec le divin repose elle aussi sur une technique qui n'appartient déjà plus au plan sur lequel se situe notre passion. Que le mouvement de notre passion rejette, bien plus qu'il ne la retient. L'homme n'est pas un animal dont la fonction est de communiquer. Mais pas plus simplement avec les dieux que simplement avec les hommes, si l'on entend par communication la technique qui, la précisant et l'achevant, la limite. Prise en ce sens toute technique est une négation du contenu. Mais à chaque fois que l'exigence du contenu ressurgit, quels que soient les symboles ou les formes qu'il emprunte, il devient clair qu'en elle c'est l'homme et rien d'autre qui est visé. Car l'homme seul est créateur de formes 3, dans lesquelles son activité se concrétise, et il s'oriente à travers elles vers l'autre, son semblable, par un détour capable de donner à cette orientation un sens et un contenu toujours nouveaux. Dans l'œuvre l'homme s'arrache à l'hébétude et à la contemplation de l'image sommaire que lui renverrait de lui-même l'autre, si celui-ci était naturellement et immédiate- uploads/Management/ scherer-comunicacao.pdf

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  • Publié le Jui 15, 2021
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