Michel Desmurget TV LOBOTOMIE Max Milo La vérité scientifique sur les effets de
Michel Desmurget TV LOBOTOMIE Max Milo La vérité scientifique sur les effets de la télévision « La télé est dangereuse pour les hommes. L’alcoolisme, le bavardage et la politique en font déjà des abrutis. Était-il nécessaire d’ajouter encore quelque chose ? Le mal est fait... Personne ne pourra empêcher maintenant la marche en avant de cette infernale machine. Adieu travail ! Demain, on pensera sans effort, puis on ne pensera plus et on crèvera enfin de la plus triste vie. » (Louis-Ferdinand Céline, Cahiers 1957-1961*) AVERTISSEMENT Le lecteur découvrira, au fil du texte, deux types de notes. Les notes de bas de page, signalées par des exposants alphabétiques (exemple ‘)> précisent certains points sémantiques et méthodologiques qui pourraient poser problème aux non-spécialistes. Les notes de fin d’ouvrage, signalées par des exposants numériques (exemple 0, présentent la référence des articles mentionnés à l’appui de telle ou telle affirmation. Ces dernières références sont utiles à deux niveaux. Premièrement, pour l’auteur, elles constituent un précieux garde-fou : lorsque chaque assertion se doit d’être étayée, il est moins facile de dire n’importe quoi et de faire passer des boniments de camelots pour des faits avérés. Deuxièmement, pour le lecteur, elles permettent de remonter à la source des évidences présentées et ainsi de vérifier ou d’approfondir des propos qui pourraient être jugés suspects ou engageants. Ces notes de fin d’ouvrage ne sont nullement nécessaires à la compréhension du texte. Elles peuvent être totalement ignorées ou consultées sur un mode ponctuel et parcimonieux. INTRODUCTION « Le problème des intellectuels, c’est qu’ils reprochent à la télévision de n’être pas assez bonne. Ils sont suspects de vouloir mettre Arte sur toutes les chaînes et d’imposer leurs préférences culturelles à tout le monde. Pour ma part, je ne crois pas qu’il y ait une bonne ou une mauvaise télévision - je préfère qu’il n’y ait pas de télévision du tout. » (Alexandre Lacroix, philosophe 2) « Parce que les influences médiatiques sont subtiles, cumulatives, et qu’elles adviennent sur une longue période de temps, parents, pédiatres et éducateurs peuvent ne pas être conscients de leur impact. » (Victor Strasburger, professeur de pédiatrie, école de Médecine, université de New Mexico 3) Je suis chercheur. En tant que tel, j’apparais dans le répertoire de diffusion des principaux journaux scientifiques liés au champ des neurosciences fondamentales et cliniques1. A chaque nouvelle parution, ces journaux m’envoient leur sommaire, afin que je puisse identifier les travaux susceptibles de m’intéresser. Depuis 15 ans, il ne s’est pas passé une semaine sans que j’extraie au moins un ou deux papiers relatifs aux effets délétères de la télévision sur la santé psychique, cognitive et somatique de l’enfant. La tendance est tellement massive que certains spécialistes n’hésitent plus à évoquer un véritable problème de santé publique4. Des voix commencent même à s’élever pour réclamer l’extension, aux grands groupes audiovisuels, des poursuites pénales originellement diligentées contre les industriels du tabac et de la malbouffe5. L’analogie est loin d’être incongrue. En effet, l’industrie du tabac fut condamnée en son temps pour avoir indûment stimulé le caractère addictif de produits dont elle connaissait le danger6. De nos jours, le complexe médiatico-publicitaire dépense des sommes faramineuses pour identifier et manipuler les ressorts d’une dépendance cathodique dont il devient de plus en plus difficile de nier l’existence7'12. Psychologie, neuro-imagerie, éthologie, ethnologie, sociologie, aucune branche des sciences humaines et médicales n’est dispensée d’apporter son obole à la Cause mercantile1'21. Depuis quelques années, le neuro-marketing s’érige en nouveau graal manipulatoire. Son credo : aller chercher les failles les plus intimes de notre cerveau pour asservir, à notre insu, nos comportements, nos désirs, nos peurs, nos pulsions, nos représentations, nos décisions. Dans un ouvrage récent, deux spécialistes du sujet résument ainsi l’approche : « Visez le petit. Préparez votre cible. Marquez-la au front le plus tôt possible. Seul l’enfant apprend bien [...] Les cigarettiers et les limonadiers savent que plus tôt l’enfant goûtera plus il sera accro. Les neurosciences ont appris aux entreprises les âges idéaux auxquels un apprentissage donné se fait le plus facilement. »22 Pouvons-nous tolérer ce genre d’abjection ? Pouvons-nous rester impassibles lorsqu’une armée de cupides charognards mobilisent tous les outils de la recherche moderne afin d’offrir à Coca-Cola « du temps de cerveau humain disponible »23 ? Pouvons-nous accepter qu’un « troisième parent cathodique »24 pénètre subrepticement l’intimité psychique de nos enfants afin de susciter chez eux des comportements de dépendance ou d’achat aux effets sanitaires dévastateurs ? Bien des gens semblent penser que non, parmi lesquels des universitaires 16,25, des journalistes 131718’26j des spécialistes de la convention internationale des Nations unies sur les droits de l’enfant27 et de nombreux artistes, cadres ou dirigeants de l’industrie audiovisuelle qui refusent de livrer leur précieuse descendance aux affres de « la boîte à images»28'31. Comme le résume Liliane Lurçat avec son talent coutumier, « quelle est la liberté des enfants, si ce n’est d’être des enfants, et au nom de quoi peut-on se permettre d’agir sur eux avec une telle puissance ? Quelle est la liberté des adultes, si ce n’est de pouvoir comprendre, et pourquoi alors cibler l’émotion plutôt que la raison ? »25 Petits précis de balivernes ordinaires En théorie, les éléments précédents devraient a minima causer quelque 1 inquiétude aux parents et spectateurs que nous sommes. Pourtant, en pratique, l’écrasante majorité du corps social se désintéresse souverainement du problème. Pour déconcertant qu’il soit, ce constat n’est guère surprenant. En effet, critiquer la télévision c’est, en bout de chaîne, éreinter celui qui la regarde. Si vous dites « la télé affecte profondément notre rapport au monde », le consommateur lambda entendra « je ne suis qu’un veau aboulique et crétin ». De même, si vous affirmez « la télé est toxique pour les enfants », la fameuse ménagère de moins de 50 ans traduira « je suis une mauvaise mère et j’éduque mal mes gosses ». Ce genre d’idées passe d’autant plus mal qu’une armée d’« éminents spécialistes » s’évertuent à saturer l’espace public de propos lénifiants et de tribunes gluantes. De saisissants verbiages en tragiques logorrhées, nos savants diafoirus catéchisent ardemment les louanges de saint Tube cathodique. La télévision aide nos enfants à grandir32. Elle est un instrument extraordinaire de culture démocratique33. Les images qu’elle produit sont bienfaisantes34. La profonde sagesse des décideurs nous préserve du pire35. Les contempteurs de la petite lucarne sont démagogues36, incompétents37, réactionnaires38, hystériques34, névrosés 39,40, vantards 41, méprisants42, jaloux43 et, pour tout dire, débordés par une « modernité [qui] nous renvoie au temps qui passe et à la crainte de l’inconnu » 40. En dénonçant la télévision, les sombres empêcheurs de regarder en rond « se donnent bonne conscience »36 et tentent de « se refaire une virginité sur le dos des médias »34. Ceux-ci sont alors pris « comme boucs émissaires »44. Comment ne pas souscrire à ces idées, quand on consulte la liste des critiques les plus sévères de la chose cathodique : Noam Chomsky45’46, Karl Popper47, Pierre Bourdieu48, Liliane Lurçat 25,49-5], Neil Postman52, Dany-Robert Dufour 24,53, Alain Bentolila54. Un terrible ramassis de crétins illettrés (sic) ! Heureusement que les évangélisateurs du fait audiovisuel sont d’une autre stature. Prenez Catherine Muller et François Chemel par exemple32. La première est « docteur en psychologie et psychanalyste. Elle intervient régulièrement dans les émissions de télévision et de radio ». Le second est « diplômé de Sciences Po, MBA du CFPJ Paris-Dauphine »‘ et « rédacteur adjoint de Télé 7 Jours. En télévision, il a participé au lancement de Paris Première ». De pedigrees 1 Si vous n’avez aucune idée de ce que sont un MBA ou le CFPJ, pas de panique, ces acronymes ne sont pas là pour être clairs, mais pour sonner pompeux. En donner le sens n’aurait dès lors aucun intérêt (MBA : Master of Business Administration - tout cela est tellement plus ronflant en anglais ! -, CFPJ : Centre de Formation et de Perfectionnement des Journalistes). 15 aussi enthousiasmants, on ne pouvait attendre moins qu’un propos documenté, objectif et loyal. Un propos dont la publication récente offre aux parents inquiets les clés du « bon usage » cathodique. En parcourant les mots de Muller et Chemel on apprend, par exemple, que la télévision est « attentive aux besoins des enfants », qu’elle aide « à une prise de conscience en montrant le monde tel qu’il est, dans sa réalité, pas toujours facile à accepter », qu’elle est « un lubrifiant social [...] tant elle permet à des gens, qui n’auraient rien eu à se dire, de se parler entre eux », et qu’elle représente un fantastique support pédagogique lorsqu’elle stimule « nos deux cerveaux » et permet ainsi aux enfants d’acquérir plus aisément de nouvelles connaissances en associant ces dernières « avec des souvenirs heureux, des moments privilégiés où ils se sont sentis grands et forts. Comme quand ils ont appris à lire sans effort en regardant Des chiffres et des lettres avec Papy et Mamie. Analyser des signes, les mémoriser et apprendre à les assembler pour qu’ils aient un sens : cortex uploads/Management/ tv-lobotomie-medecine.pdf
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- Publié le Aoû 13, 2021
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