QUE SAIS-JE ? Le management RAYMOND-ALAIN THIETART Avertissement ette nouvelle

QUE SAIS-JE ? Le management RAYMOND-ALAIN THIETART Avertissement ette nouvelle édition reprend la structure des éditions précédentes : planification, organisation, activation, contrôle ; quatre fonctions qui recouvrent les tâches du management. Ces fonctions sont imbriquées dans l’action quotidienne et la présentation linéaire qui en est faite n’est qu’une construction artificielle d’une réalité plus complexe. Une autre aurait pu y être préférée. Le choix a été fait d’une logique reconstruite où le management se conçoit comme un ensemble d’intentions (la planification), transformées en actions par une bureaucratie (l’organisation) et des acteurs (l’activation), actions régulées par un système de pilotage (le contrôle). C Introduction « Il n’y a rien dans le monde qui n’ait son moment décisif, et le chef- d’œuvre de la bonne conduite est de connaître et de prendre ce moment. » Jean-François Paul de Gondi, cardinal de Retz. e management, mot magique et galvaudé de la fin des années 1960, tant de fois utilisé pour expliquer la supériorité économique d’un pays ou l’efficacité d’une entreprise, recouvre une réalité dont les composantes sont plus simples et les conséquences plus importantes que ce que l’on peut imaginer. Le management [1], action ou art ou manière de conduire une organisation, de la diriger, de planifier son développement, de la contrôler, s’applique à tous les domaines d’activités de l’entreprise. L’entreprise doit être perçue ici dans son sens le plus large. Le gestionnaire d’organisation, qu’elle soit privée, publique, à but lucratif ou non, doit mettre en œuvre des moyens techniques, financiers et humains pour accomplir sa tâche et réaliser les objectifs de cette dernière. La mise en œuvre de ces moyens s’articule autour de quatre activités principales : la planification, l’organisation, l’activation et le contrôle. Ces activités sont les bases du management. Toutefois, sans la prise en compte des spécificités de l’organisation et de ses finalités articulées au sein de la stratégie, le management demeure un exercice vain. La main visible du management, pour reprendre l’expression d’Alfred Chandler [2], ne vient infléchir, sans cette condition, la main invisible du marché, pour façonner l’évolution de l’entreprise. Idéalement, le management s’appuie sur la stratégie qu’il contribue en retour à nourrir. Par stratégie, il faut entendre l’ensemble des décisions et des actions concernant le choix de ressources et leur articulation en vue d’atteindre un objectif. Et c’est dans le choix et l’articulation de ces ressources que le L management va trouver sa pleine dimension. Le management varie aussi suivant le « champ de bataille », c’est-à-dire l’activité, retenue. Par exemple, le « champ de bataille » peut être celui des médias ou celui des logiciels ou bien encore celui des aciers plats. Gérer dans divers contextes technologiques et concurrentiels, induits par la stratégie, requiert des réponses adaptées en matière de management. Les modes d’organisation, d’établissement des plans, de direction et de contrôle sont ainsi différents pour une entreprise de conception de logiciels de ceux adoptés pour un hôpital ou bien encore de ceux d’une compagnie aérienne. Si la stratégie influence le mode de management, le management conditionne également cette dernière [3]. En effet, en raison de l’inertie de décisions antérieures, de la déformation de l’information lorsque celle-ci passe par les divers filtres de l’organisation, de différentes situations de pouvoir, du processus de prise de décision, le management (c’est-à-dire, l’organisation, le processus de planification, les systèmes de contrôle et le mode de direction) exerce une grande influence sur le choix d’orientations nouvelles et de stratégies adoptées. Aussi, le management est-il à la fois conséquence et cause des engagements stratégiques pris par l’entreprise. Conséquence, car le management se doit de participer à l’articulation des ressources et la mise en œuvre de démarches dans le but d’orchestrer la stratégie. Cause, car la stratégie est pensée et décidée par ceux-là mêmes qui organisent, planifient et contrôlent. Relation biunivoque, processus itératif, certes ! Mais la question de savoir quel management adopter demeure entière. Quel doit être, par exemple, le degré de décentralisation de la prise de décision au sein d’un laboratoire de recherche et développement ? Doit-il être plus ou moins élevé que celui au sein d’une entreprise de production d’énergie ? Quels doivent être les mécanismes de coordination d’une compagnie de transport aérien ? Doivent-ils être plus ou moins formels que ceux adoptés par une société de conseil ? À ces questions, des réponses ont été apportées ; réponses qu’un survol de travaux parfois anciens nous permet de mieux cerner tout en les replaçant dans leur contexte historique. Tournons-nous vers ces derniers. L’origine contemporaine du management remonte au début du xxe siècle où des hommes tels que Henri Fayol [4], en France, ou Frederik Taylor [5], aux États- Unis, créèrent des mouvements, de pensées et d’orientations différentes, dont l’influence se fait encore sentir de nos jours. Le mouvement de la théorie administrative, conçue par Fayol et développée de manière parallèle aux États-Unis par Mooney et Reiley [6], Gulick et Urwick [7], Follett [8] et, en Allemagne, par Weber [9], part de l’hypothèse qu’il existe une manière idéale pour organiser le travail. L’entreprise est perçue comme étant une grande machine gouvernée par des lois universelles. Ces lois, ou plus modestement ces principes, se résument ainsi : spécialisation des tâches, standardisation des opérations, uniformité des procédures, unité de commandement, limitation de l’éventail de supervision ou de contrôle, centralisation de la prise de décision, organisation par département. Selon ce mouvement, les tâches doivent être spécialisées afin qu’une expertise se développe dans leur exécution. Les opérations doivent être standardisées, puisqu’il existe une meilleure manière pour fabriquer un produit ou fournir un service. Des règles et des procédures doivent être adoptées, afin qu’il y ait une bonne coordination et que tout soit planifié. Toujours dans ce même but, un seul homme est responsable et centralise la prise de décision. Néanmoins, comme tout contrôler est impossible, le nombre de subordonnés directs est limité. Enfin, afin d’éviter la duplication des fonctions, ces dernières sont regroupées au sein de départements dont la vocation unique est de satisfaire l’ensemble de l’organisation. On trouve le meilleur exemple d’application de ces principes dans l’organisation militaire. Toutefois, ces principes sont utilisés dans tous types d’organisation et continuent d’inspirer un bon nombre de praticiens. La gestion scientifique, autre branche du mouvement classique du management, trouve ses bases dans les travaux de Taylor [10], ainsi que parmi ceux de Babbage [11], de Gantt [12] et de Gilbreth [13]. Plus que la théorie administrative, la gestion scientifique se propose de définir de façon très précise la manière selon laquelle les tâches doivent être organisées. Ici encore, l’énumération de principes fondamentaux sert de base à cette approche. Il s’agit, d’une part, de rechercher la meilleure méthode pour réaliser une tâche ; de sélectionner l’individu le mieux à même d’accomplir cette dernière et de le former à la méthode particulière retenue ; ensuite de mettre en place un système d’incitation financière variant en fonction du travail réalisé ; et enfin, de séparer les tâches de planification et d’exécution entre le responsable et son subordonné. Les hommes, dans la gestion scientifique, sont considérés comme les « adjoints des machines » [14]. Leurs mouvements, leur fatigue, leur temps de récupération, leur comportement sont perçus comme pouvant être analysés scientifiquement. De nombreuses observations soutenant cette approche existent. Ainsi en est-il de la célèbre expérience de Taylor, qui réussit à faire augmenter le tonnage moyen manipulé par un manœuvre de 16 à 59 t après une augmentation de son revenu moyen journalier de 1,15 à 1,88 $. De même Gilbreth, étonné par la diversité des méthodes utilisées par les maçons dans la pose de briques, décida de reprendre le problème à la base en s’inspirant des principes de la gestion scientifique. Après avoir défini une nouvelle méthode, spécifié les standards, déterminé les outils nécessaires, il put diminuer le nombre de mouvements pour réaliser une même tâche de 18 à 5, et obtint un accroissement de la productivité de 120 à 250 briques à l’heure. Toutefois, les approches classiques du management (théorie administrative et gestion scientifique) possèdent de nombreuses limites comme Massie [15] le met en évidence. Tout d’abord, la seule mesure prise en considération est l’efficacité, ou la production, sans prise en considération des facteurs humains. Selon cette approche, les hommes préfèrent être dirigés plutôt qu’avoir la liberté de décider et d’agir. Leur motivation est fondée sur la seule satisfaction de leurs besoins économiques et, par conséquent, le système de récompense doit être de nature monétaire. Les hommes « n’aimant pas travailler », les cadres dirigeants doivent les mener avec fermeté et équité, afin d’éviter qu’ils ne tombent dans un « mauvais travers ». L’approche classique possède ainsi une vue très mécaniste de la réalité et a une conception particulière de l’homme dans son cadre de travail. Aucune place n’est accordée aux problèmes de pouvoir, de groupes informels, de motivation. L’approche classique considère l’organisation comme une machine tournant, en quelque sorte, sur elle-même selon des règles préétablies. Cette approche fut tout d’abord contestée par des hommes tels que Barnard [16], Simon [17] et Merton [18]. Ils firent remarquer que dans l’organisation, ce uploads/Management/1683-le-management-thiertart-raymond-alain.pdf

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  • Publié le Apv 22, 2022
  • Catégorie Management
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