Yvon PESQUEUX CNAM Professeur titulaire de la Chaire « Développement des Systèm

Yvon PESQUEUX CNAM Professeur titulaire de la Chaire « Développement des Systèmes d’Organisation » 292 rue Saint Martin 75 141 PARIS Cédex 03 France phone ++ 33 (0)1 40 27 21 63 FAX ++ 33 (0)1 40 27 26 55 e-mail pesqueux@cnam.fr site web www.cnam.fr/lipsor Le « nouveau management public » (ou New Public Management) Parler de « New Public Management » comme on le fait aujourd’hui au lieu de nouveau management public, c’est indiquer une bifurcation par rapport au management public stricto sensu dont, avec A. Bartoli1, on rappellera la définition : « l’ensemble des processus de finalisation, d’organisation, d’animation et de contrôle des organisations publiques visant à développer leurs performances générales et à piloter leur évolution dans le respect de leur vocation ». Et pourtant, avec le management public, il s’agissait déjà, depuis la thématique du PPBS (Planning Programming Budgeting System) – la RCB en français (Rationalisation des Choix Budgétaires) d’acter la prise en compte des catégories managériales dans le fonctionnement des administrations publiques en remplacement de la tradition « administrative » déclassée sur la base de l’argument péjoratif de la bureaucratie. 1 A. Bartoli, Le management des organisations publiques, Dunod, Paris, 1997 Yvon PESQUEUX 1 Qu’il s’agisse du « normal » ou du « new », le management public poursuit un objectif d’efficacité. Il marque l’entrée des catégories d’une régulation organisationnelle dans les administrations publiques, régulation définie comme « un processus par lequel les actions anti-organisationnelles sont contrées par des forces antagonistes assurant le maintien du système ou de l’organisation »2. Ces forces antagonistes actent l’existence des tensions qui opèrent entre la dimension institutionnelle de l’administration (sa vocation à remplir des missions indiscutables et permanentes de service public) et une dimension managériale conduisant à questionner le fonctionnement des services publics au nom des enjeux de flexibilité et des conditions de travail. Cette discussion est marquée par l’introduction de logiques de compétitivité dans les services administratifs du fait de systèmes d’évaluation et d’incitation applicables aux administrations publiques comme à leurs fonctionnaires. L’autonomie alors accordée aux services publics tend à faire passer le rôle managérial des agents publics devant les objectifs politiques du fonctionnement des services administratifs par référence à une stratégie qui doit alors être formulée explicitement. Dans la perspective du management public (« normal » ou « new »), l’action publique doit considérer comme prioritaires les conditions de réussite de l’efficacité (cohérence gestionnaire) sans pour autant oublier le caractère public dans lequel s’inscrit cette action (cohérence politique). Cela suppose de réunir certaines conditions : la définition d’un objectif mesurable (et du résultat attendu à l’échéance), par référence à un moyen/long terme défini, pertinent, cohérent par rapport à la mission et à la vocation du service concerné, la cohérence des moyens engagés, l’évaluation de la satisfaction des citoyens, l’identification des effets pervers, la coordination entre les différents services de l’État étant alors constitutifs du New Public Management. Le management public comprend classiquement : - La gestion des agents publics qui repose sur des règles, des procédures et statuts constituant un référentiel pour les pratiques de GRH. Le New Public Management va mettre l’accent sur la notion de mérite, 2 Y . Emery & T. Giauque in La motivation au travail dans les services publics, T. Duvilliers & J.-L. Genard & A. Piraux (Eds), L’Harmattan, collection « Logiques de gestion », Paris, 2003 Yvon PESQUEUX 2 l'individualisation des rémunérations, l'appréciation du personnel sur la base des entretiens annuels d’évaluation. - La gestion financière et comptable. Le New Public Management met l’accent sur le développement du contrôle de gestion avec des analyses en termes de « coûts – performances » des activités, en particulier avec une attention portée sur la réduction des effectifs (downsizing venant toucher et les effectifs en eux-mêmes en liaison avec les modes d’organisation). - On ajoute aujourd’hui, dans une forme de débordement, par la prise en compte des thématiques débattues dans le cadre de la « responsabilité sociale de l’entreprise » (en particulier des attentes des « parties prenantes », du développement durable, etc.). Le New Public Management va insister sur la programmation, la coordination, la contractualisation, l’évaluation des décisions (ex ante et ex post). Plus concrètement, il se caractérise par la mise en œuvre d’indicateurs d’activité, d’outils de gestion budgétaire et comptable, d’outils de mesure des coûts dans la perspective de répondre à trois logiques d’action : celle de l’efficacité socio-économique (les objectifs énoncent le bénéfice attendu de l’action de l’Etat), celle de la qualité de service (les objectifs énoncent la qualité attendue du service rendu à l’usager), celle de l’efficacité de gestion ou d’efficience (les objectifs énoncent, pour le contribuable, l’optimisation attendue dans l’utilisation des moyens employés en rapportant les produits ou l’activité obtenus des ressources consommées). La performance résulte de l’alliance « efficacité – efficience » au regard d’un référentiel mais compte tenu de marges de manœuvre accordées aux administrations. Le New Public Management va conduire à redéfinir les modalités de l’action de la fonction publique, d’où ses conséquences en termes de gestion des ressources humaines appliquées aux fonctionnaires, une révision des organigrammes, l’instauration d’un nouveau rapport « administration – politique », le politique s’instaurant alors dans la thématique du contrôle (comprendre « contrôle de gestion ») par un face à face ainsi établi entre fonctionnaires et parlementaires. Le projet du New Public Management est d’insuffler « l'esprit d'entreprise » dans l’appareil d'Etat en introduisant des logiques de marché dans son Yvon PESQUEUX 3 fonctionnement, perspectives de la gouvernance privée comprises3, c’est-à- dire en faisant comme si la concurrence qui est toujours citée comme étant fondatrice de l’efficience du marché puisse tenir lieu de principe politique. Un tel projet s'est mis en place à partir de la décennie 80, d’abord en Grande- Bretagne, du fait des promesses politiques de réduire les impôts mais aussi du fait de la volonté de désengagement de l'Etat. Une troisième raison de son développement est apparue depuis avec la nécessité ressentie d'une plus grande responsabilité économique des services publics. Le New Public Management repose sur le fait de considérer l'aspect financier comme étant central et sur la volonté du « pouvoir central » de contrôler « à distance », d’où le slogan qui lui est propre et qui repose sur les trois « E »4 : « Economie », « Efficacité » et « Efficience » et du très « thatchérien » Best Value for Money érigé comme « cauchemar » bureaucratique adressé à la supposée rigidité des services publics. Un rôle particulier se trouve dévolu à l’Etat qui est de savoir comment organiser un Etat-minimal qui soit en même temps un Etat-organisateur et un Etat-stratège, en particulier des conditions de la fluidité du marché en en appliquant les catégories à lui-même, le développement des entreprises étant considéré comme étant la preuve matérielle du développement des sociétés (son Welfare). Avec le New Public Management, il y a donc passage du Welfare State à l’Etat-organisateur dont la flexibilité et l’efficience sont alors considérées comme métonymiques de l’efficience de la « société d’entreprises » dont il est considéré comme étant un des aspects. Les contours de l’Etat-stratège ont été définis dans un rapport de 2004 5. Il y est acté la reconnaissance du fait que l’Etat n’est plus et n’a plus à être le seul détenteur de la légitimité politique, au moins du fait de la supra-nationalité d’organisations internationales (délégation de souveraineté à des entités telles que l’union Européenne par exemple) et de l’existence d’entités telles que les ONG, entités participant elles aussi à la réalisation du « Bien Commun ». C’est ce qui conduit, du fait de l’indépendance de la justice, à 3 cf. O. Hughes, Public Management and Administration : an Introduction, Palgrave MacMillan, Basingstoke, 2003 (3rd edn) ou encore L. M. Salamon (Ed.), The Tools of Government : A Guide to the New Governance, Oxford University Press, New-York, 2002 4 M. Power, La société de l’audit : l’obsession du contrôle, Editions La Découverte, Paris, 2004 5 J. Picq (dir.), L ’Etat en France – servir une nation ouverte sur le monde, Documentation Française, Paris, 2004 Yvon PESQUEUX 4 l’injonction de placer les citoyens au cœur de l’action publique afin d’éviter le développement d’une société contentieuse, d’où l’appel à la disparition d’un Etat-opérateur et à la transformation de l’Etat-providence en Etat régulateur. Les contours de l’Etat-stratège vont se réclamer de la défense du temps « long », de la déconcentration en matière d’organisation. Les contours proposés à l’Etat-stratège sont alors les suivants : être visionnaire en concertation avec la société civile, être garant de l’intérêt général (services publics, régulation des activités, utilisation des fonds publics), assurer la cohésion sociale par une décision publique rationnelle et transparente, s’organiser pour atteindre ses objectifs (adaptation des structures administratives) et rendre l’initiative aux citoyens (démocratie participative). L'activité publique est considérée comme consistant principalement dans la fourniture de services. Elle comporte toutes les caractéristiques de l'activité de services à savoir : l’immatérialité de la prestation, la simultanéité de la production et de l'utilisation, le contact direct entre prestataire et utilisateur donc l’importance de uploads/Management/le-nouveau-management-public.pdf

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  • Publié le Mar 25, 2021
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