1 Troisième Journée du Marketing Agroalimentaire à Montpellier Session 1. Le co

1 Troisième Journée du Marketing Agroalimentaire à Montpellier Session 1. Le consommateur entre nostalgie et découverte LE DESIGN EST-IL COMESTIBLE ? Auteurs : GALLEN Céline Maître de Conférences en Gestion Université de Nantes Atlantique Université de Nantes Institut d'Economie et de Management de Nantes - IAE Centre de Recherche en Gestion de Nantes Atlantique Chemin de la Censive du Tertre BP 52231 - 44322 Nantes cedex 3 France Tél : 02 40 14 16 58 e-mail : celine.gallen@univ-nantes.fr SIRIEIX Lucie Professeur de Gestion U.M.R. MOISA SupAgro Montpellier Département Sciences Economiques, Sociales et de Gestion 2 Place Pierre Viala 34060 Montpellier Cedex 1 Tél : 04-99-61-27-19 e-mail : sirieix@supagro.inra.fr Remerciements: Les auteurs remercient Stéphanie SAGOT, créatrice du projet Bouchées Doubles, pour sa collaboration à l’étude. 2 LE DESIGN EST-IL COMESTIBLE ? Résumé : Cet article s’intéresse à la perception par les consommateurs du design appliqué aux produits alimentaires. L’étude portant sur deux produits conçus par des designers et des artisans montre que le design peut être source de distance perçue avec le consommateur. Des médias sont alors envisagés pour favoriser l’appropriation du produit. Mots-clés : Consommation alimentaire, design produit, représentations mentales, distance perçue. Abstract : This article focuses on consumers’ perception of design applied to food products. Two products conceived by both designers and artisans have been studied. The results show that design can generate a virtual distance between the product and consumers. Authors then suggest solutions to facilitate appropriation process of this kind of products by consumers. Key-words : Food-consumption, product design, mental representations, perceived distance with product. 3 LE DESIGN EST-IL COMESTIBLE ? INTRODUCTION A travers les produits alimentaires qu’ils commercialisent, les fabricants de produits agro- alimentaires cherchent de plus en plus à créer du sens, à stimuler l’imaginaire et à susciter l’émotion. L’aliment est détourné pour une consommation dans des lieux inhabituels et les signes immatériels faisant directement appel à nos représentations deviennent des constituants du monde réel. Manger devient un prétexte pour expérimenter quelque chose d’unique, à l’instar des grands chefs qui ne vendent plus uniquement des repas mais des œuvres d’art mettant en éveil tous les sens du consommateur (Hetzel, 2004). Même si les fabricants utilisent encore beaucoup la publicité et le packaging pour raconter une histoire, ils commencent à s'intéresser au produit en lui-même. Ainsi, les recettes, les aspects visuels, les saveurs, les textures font de plus en plus l'objet de recherches innovantes. Aussi, le design produit constitue un axe de différenciation et d'innovation majeur pour les fabricants. Mais qu’en est-il de la perception des consommateurs ? Des recherches en marketing sur le design ont montré que les attributs esthétiques du produit sont souvent évoqués comme des facteurs incitatifs à l’achat (Magne, 2004), l’expérience de consommation alimentaire visant à approcher un univers fort et original. Néanmoins, la nouveauté perçue d’un produit peut avoir des effets négatifs sur les intentions d’achat (Roehrich, 1987). En effet, si le choix et la consommation des produits constituent des actes où les facteurs rationnels interviennent (la qualité, le prix, la présentation, le goût…), l’acceptation d'un produit dans le domaine alimentaire n'est pas toujours fondée sur des choix rationnels (Fischler, 1990 ; Gallen, 2005 ; Sirieix, 1999). La perception de ces produits intègre des dimensions à la fois cognitives et affectives (Pantin-Sohier et Brée, 2004). Aussi, nous nous sommes demandés si le design, en provoquant une forme de dissonance cognitive chez les consommateurs, ne pouvait pas générer une distance perçue avec le produit, celui-ci empruntant alors le statut d’œuvre d’art ou d’objet décoratif et non consommable. Pour le vérifier, quatre tables rondes ont été organisées afin d’étudier la perception de deux produits conçus par un centre d’art consacré au design appliqué à l’alimentation : un pain reliant une miche et une couronne et un duo de fromages de chèvre (l’un fourré de coulis miel-fraise, l’autre de billes de chocolat) (photos en annexe 1). Avant de présenter les résultats de cette étude, nous définirons le concept de design en marketing et ses potentialités, nous étudierons les réponses esthétiques des consommateurs et le rôle du design dans l’activation des représentations mentales, nous montrerons la préférence des individus pour les produits modérément incongruents et nous poserons la question de la distance perçue que peut susciter le design entre le produit et les consommateurs. La fin de l’article sera consacrée à la discussion des résultats et aux perspectives managériales. 4 CADRE CONCEPTUEL Le concept de design et ses potentialités Le design constitue un outil de gestion majeur car il agit au niveau de la stratégie d'innovation, de la communication et de l'image de marque (Magne, 1997). C'est également un enjeu important pour le lancement de nouveaux produits (Magne, 2004). En effet, c'est un élément de différenciation, un moyen de communiquer des informations sur les autres attributs et la performance du produit, il engendre du plaisir sensoriel et de la stimulation, il confère au produit des effets durables en contribuant à l'inscrire dans la mémoire collective (Bloch, 1995). Il permet également de répondre aux consommateurs en attente d'aliments innovants, de nouvelles expériences et de gratifications hédoniques. Ainsi, face à la standardisation des produits et services en termes d'attributs tangibles et fonctionnels, les fabricants renouvellent les axes de différenciation du produit et ont recours à des attributs plus symboliques et affectifs pour construire ou consolider leur positionnement. Or, le concept de design relevant de l'approche sensorielle (Magne, 1997), permet à l'entreprise de «sophistiquer son concept en créant du sens, de la signification pour le consommateur» (Hetzel, 2004). En effet, le produit ou le packaging constitue un outil stratégique dont le premier rôle est de donner des consignes ou instructions (par des stimuli verbaux ou iconiques) au consommateur pour qu'il forme des «représentations mentales» qui s'inscrivent fortement dans un registre d'ordre affectif, émotionnel (Daoudi et Thialon, 1993). En Marketing, quatre dimensions caractérisent le design selon Magne (1997) : le design graphique, le packaging, le design produit, le design d'environnement ou d'ambiance visuelle. Magne (2002) qualifie de forme-design du produit ou du packaging l'ensemble des stimuli visuels1 perceptibles, interprétables par le consommateur avant la prise en main du produit. Le design est donc une conception liant forme, usage, fonction, et ne se réduit pas à la forme, ainsi que le terme est malheureusement souvent utilisé. ("ce meuble est design" pour parler d'un style contemporain par exemple). C'est à ce concept large de design, appliqué à un produit alimentaire, que nous nous référons dans cet article. Les réponses esthétiques des consommateurs 1 Magne (2002) distingue cinq stimuli visuels : une composante morphologique (forme globale ou apparence dont la couleur), une composante verbale (typographie, couleur des caractères), une composante iconique (image, photo, dessin), une composante rhétorique (elle peut être verbale ou iconique et est un agencement d'arguments figuratifs destinés à convaincre), la dernière composante est l'interaction entre ces éléments. Ce sont surtout les trois premières composantes qui transmettent un message et connotent le produit. 5 L'expérience esthétique définie comme le «plaisir éprouvé par le consommateur lors de la consommation de l'objet, au regard de la dimension esthétique du produit ou du packaging» suscite une réponse attitudinale ou préférence appelée « réponse esthétique» (Magne, 2002, 2004). Il s'agit d'une prédisposition à éprouver du plaisir esthétique associée à l'évaluation du design, à des formations imaginaires et à des états émotionnels (Magne, 2002). Ainsi, l'interprétation des stimuli esthétiques engendre l'émergence de représentations imagées et des réactions émotionnelles (Daoudi et Thialon, 1993). Le design peut induire de nouvelles croyances, de nouvelles représentations et influencer les préférences (Magne, 2004). Il est alors le vecteur d'une communication qui opère par le canal des représentations mentales et l'efficacité du packaging ou du produit dépendra de la qualité et de la nature de l'image mentale du produit suggéré. En effet, les stimuli esthétiques semblent «favoriser la formation d'une imagerie mentale que la psychologie cognitive appelle représentations» (Magne, 2004). Le design est ainsi un agrégat d'unités signifiantes (attributs physiques) auquel sont associés des signifiés (représentations mentales) sous l'interprétation des consommateurs (Magne, 1997). Ceci conduit alors à postuler que si l'objet issu du design peut être analysé comme un système de signes, les approches sémiologiques ou sémiotiques ne suffisent pas à appréhender le phénomène de perception esthétique ; il faut intégrer l'apport de la psychologie cognitive qui appréhende le rôle des représentations mentales (Magne, 1997, 2004). Ceci s'inscrit dans les axes de recherche contemporains d'analyse des comportements caractérisés par l'intégration des dimensions affectives, des émotions et des représentations imaginaires grâce aux apports de la psychologie sociale, de la sociologie et de l'anthropologie (Filser, 1996). Le design à l’origine de représentations mentales Les consommateurs essaient de comprendre un produit en le plaçant dans une catégorie existante par comparaison du produit avec les représentants de la catégorie (Bloch, 1995). Le design et ce qu'il véhicule permet une catégorisation perceptuelle dans des catégories familières ce qui permet d'identifier d'autres attributs moins identifiables (confort, fraîcheur, qualité) et d'inférer des croyances (Pantin-Sohier et Brée, 2004). Le design est donc à l'origine de représentations mentales au sens où les définit Gallen2 (2005a) et source d'inférence pour le uploads/Marketing/ jmam-2007-j3-articlesee.pdf

  • 25
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Dec 31, 2022
  • Catégorie Marketing
  • Langue French
  • Taille du fichier 1.0612MB