Chapitre 4 : LA COLLECTE DES DONNÉES 1. Les fonctions de collecte de données 1.

Chapitre 4 : LA COLLECTE DES DONNÉES 1. Les fonctions de collecte de données 1.1. L’information du concepteur 1.2. La constitution de supports pédagogiques 2. Comment collecter les données culturelles 3. Quelques exemples de collecte de données A. Agriculteurs ukrainiens B. Guides touristiques jordaniens C. Personnels hôteliers D. Agronomes égyptiens 4. Ressources pédagogiques sur Internet 5. La collecte des données et les adaptations nécessaires 6. Réflexion personnelle sur la collecte des données Étude de cas : proposition de réponse 7. Annexes 7.1. Témoignages de collecte de données 7.2. Collecte des données - mode d’emploi La collecte des données est probablement l'étape la plus spécifique à l’élaboration d'un programme de FOS. C'est en quelque sorte le centre de gravité de la démarche. D’une part, parce qu’elle confirme, complète, voire modifie largement l’analyse des besoins faite par le concepteur, laquelle reste hypothétique tant qu’elle n’est pas attestée par lei terrain. D’autre part, parce qu’elle fournit les informations et discours à partir desquels sera constitué le programme de formation linguistique. C’est celle qui conduit l’enseignant à sortir de son cadre habituel de travail pour entrer en contact avec un milieu qu’il ne connaît pas, a priori, et auquel il doit expliquer ses objectifs et le sens de sa démarche pour obtenir les informations dont il a besoin. 1. Les fonctions de collecte de données 1.1. L’information du concepteur Lorsque les demandes de formation sont précises, chaque cas est particulier en termes de situations de communication, de contenus, de types de discours et d’arrière-plan culturel. Travailler au plus près de ces réalités suppose pour le concepteur un travail de découverte du milieu concerné et de recueil de données afin de constituer un programme de formation en fonction des réalités culturelles et linguistiques découvertes. Cette démarche n’est d’ailleurs pas différente de celle réalisée parla méthodologie communicative lorsqu'il s'est agi de rapprocher les discours des méthodes de FLE de la réalité des discours quotidiens. Avant de faire apparaître dans les méthodes des dialogues entre copains ou à la terrasse de cafés, il a bien fallu procéder à des enregistrements, ou tout au moins à des observations, pour pouvoir ensuite produire des dialogues plus authentiques que ce qui avait prévalu à une époque où les discours oraux ne faisaient pas encore l'objet de recherches particulières. Un programme de FOS confronte le concepteur à des domaines qui, le plus souvent, ne lui sont pas familiers. Si les situations de tourisme sont globalement connues des enseignants, il en est tout autrement dans des domaines qui n'appartiennent pas au quotidien de tout un chacun. D'où la nécessité de se livrer à un travail d'enquête sur le terrain. Qui peut imaginer de constituer, sans données de terrain précises, un programme de formation linguistique pour des juristes cubains ayant à suivre des conférences de droit en français ? Que sait-on des actions et des échanges langagiers qui constituent l'univers professionnel d'un médecin étranger venant faire un stage dans un hôpital français ? Cette étape de prise de contact avec le milieu suppose que le concepteur paie de sa personne : qu'il se déplace, prenne des rendez-vous, explique sa démarche et obtienne la collaboration de ses interlocuteurs. Les nombreuses expériences réalisées dans ce domaine montrent que la difficulté ne réside pas tant dans l'établissement des contacts, où peu de cas d'échecs sont enregistrés, que dans le temps que cela prend et les aléas qui retardent souvent la démarche. Nous le verrons à travers des témoignages de collecte des données à la fin de ce chapitre. La première fonction de la collecte des données est donc d'informer l’enseignant- concepteur sur le domaine à traiter, ses acteurs, ses situations, les informations et les discours qui y circulent. C'est la collecte des données en milieu hospitalier qui a permis au concepteur travaillant sur un programme destiné à des infirmières espagnoles de découvrir un certain nombre de situations telles que « la relève entre deux équipes » ou des discours écrits comme « la charte du patient » ou « la fiche de soins infirmiers ». C'est en interrogeant des étudiants en anthropologie que l’on découvre l’organisation des études dans ce domaine, ou encore en interviewant un agriculteur que l'on prend connaissance du système des GAEC (Groupement agricole d’exploitation en commun). C'est en enregistrant des cours magistraux que l'on prend conscience de la complexité discursive de ces productions orales. Nous pouvons illustrer cela à travers un exemple concret. Les transcriptions ci- dessous rapportent des discours échangés sur un chantier de fouilles archéologiques. Nous analyserons, après les avoir lues, ce qu'elles nous révèlent d'une situation peu familière à un enseignant de langue. • Extrait 1 Béatrice : Sur ton radier et en fait en élévation, tu aurais que ce que tu as là. Et du coup, le parement extérieur… Ben, peut-être ; là. Les galets là, euh, faudrait que je dégage mieux. Ben là c’est sûr. Et est-ce que le contrefort n’est pas venu justement, euh, s'appuyer... Ça pourrait être ça. Parce que là effectivement on n'est pas forcément dans quelque chose très bien construit. Et pourtant on à le mortier, on a tout ce qu'on veut mais… Tu vois ça par contre, c'est plausible hein ! Effectivement ils se sont servi d’une partie de l'abside pour... ils ont conservé cette partie-là en fait pour s'en servir comme radier. L'autre partie ils en avaient plus besoin mais cette partie-là, ils en avaient besoin pour construire leur mur. Aurélie : Non mais ça en plus ils ont… qu'après... Béatrice : En plus... Aurélie : Ça pouvait être encore plus haut. Béatrice : Ça leur fait une sorte de banquette le long et puis après ; quand ils ont fait le contrefort, ben, c'est pareil ils ont gardé juste cet angle, enfin juste cette partie-là parce qu’ils en avaient besoin et pour leur mur et pour, euh, et puis pour le contrefort en fait. Du coup le reste ça a pu être détruit aussi: pour construire, ben, peut-être le mur, d'ailleurs. Ils ont ; peut-être réutilisé ça [...] Cet extrait illustre une dimension fondamentale de la recherche et des discours archéologiques qui est l’interprétation, la recherche du sens à donner à ce que l'on découvre. Les premiers discours tenus sur les fouilles sont des hypothèses (est-ce que le contrefort est pas venu justement, euh, s'appuyer ?... Ça pourrait être ça), des arguments en faveur de telle ou telle interprétation (tu vois ça par contre, c'est plausible hein ! Effectivement ils se sont servi d'une partie de l'abside), des reconstitutions encore incertaines (le reste ça a pu être détruit aussi pour construire, ben, peut-être le mur d'ailleurs), l'expression de problèmes également, face à des données apparemment paradoxales (on n'est pas forcément dans quelque chose très bien construit. Et pourtant on a le mortier, on a tout ce qu'on veut mais...). Seule la collecte de données réelles permet de prendre la mesure de l'importance de ce phénomène interprétatif. • Extrait 2 Béatrice : C'est quoi ? Adeline : Alors c’était un... Béatrice : Tu dis que c’est démolition, Aurélie, ou radier de fondation ? Adeline: Non radier plutôt. Béatrice : Radier de fondation. Donc tu vas Voir « niveau de construction ». Alors tu caches là et tu mets « radier de fondation ». Donc là c’est forment compact et homogène. Ensuite les sédiments, c’est fait en quoi ? Adeline : Ben, c'est du galet. Béatrice : C’est du galet. Adeline : La couleur elle est... Béatrice ; C’est du gris puisque y a du galet donc euh Adeline: Gris ouais. Béatrice : Inclusion, ben, y en a pas, hein ? Adeline : Non apparemment. Y a du mortier, non ? Béatrice : Oui mais comme c'est une démolition en fait... comme c’est un radier de fondation en fait t’as forcément du mortier qui relie le tout. Adeline : Donc sépulture, non». Béatrice : Prélèvement... tu voudras faire un prélèvement du mortier de ton radier ? Aurélie : Ouais. Béatrice : Donc on marquera, tu te souviens on est à combien là ? Tu n’en as pas fait de prélèvement dans le sondage de... Adeline : C'est le deuxième. …/… Béatrice : Donc c’est UE2 dans ton cahier de fouillés. Donc UE2. Mobilier, y en a pas. Fouilleur c'était Aurélie. C'était hier, on était le 5 ? Adeline : 7. Béatrice : 7. Ce discours montre une des activités des champs de fouilles qui consiste à relever les données sur des fiches en remplissant les rubriques préétablies. Un exemplaire de la fiche vient naturellement compléter ce dialogue lors de la collecte des données. Signalons au passage que le concepteur du programme a, d'une certaine manière, été aidé dans sa collecte de discours, en ce sens que la présence d'une stagiaire, Adeline, en formation sur le site, a amené la responsable du chantier à verbaliser une activité qui d'habitude se fait silencieusement. • Extrait 3 […] Béatrice : On va prendre le risque de le laisser en place ce soir. Normalement... Adeline : Pourquoi le risque ? Béatrice : Et ben parce que uploads/Philosophie/ 3-collecte-de-donnees.pdf

  • 19
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager