Argumentation et Analyse du Discours 7 | 2011 Approches de l’AD et de l’argumen
Argumentation et Analyse du Discours 7 | 2011 Approches de l’AD et de l’argumentation au Brésil L’argumentation dans le discours d’information médiatique Argumentation in Media Discourse Wander Emediato Édition électronique URL : http://journals.openedition.org/aad/1209 DOI : 10.4000/aad.1209 ISSN : 1565-8961 Éditeur Université de Tel-Aviv Référence électronique Wander Emediato, « L’argumentation dans le discours d’information médiatique », Argumentation et Analyse du Discours [En ligne], 7 | 2011, mis en ligne le 15 octobre 2011, consulté le 23 septembre 2019. URL : http://journals.openedition.org/aad/1209 ; DOI : 10.4000/aad.1209 Ce document a été généré automatiquement le 23 septembre 2019. Argumentation & analyse du discours est mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International. L’argumentation dans le discours d’information médiatique Argumentation in Media Discourse Wander Emediato Introduction 1 Cet article présente quelques éléments de réflexion et d’analyse qui me semblent essentiels pour le développement d’une étude sur l’argumentation dans le discours, et, en particulier, sur le discours d’information médiatique. Sans préjuger d’autres orientations possibles, on définira ce dernier comme le produit d’un processus complexe de transformation des faits sociaux en discours, en événement. Avec Charaudeau (1997), je voudrais rappeller que l’information médiatique est pure énonciation, soumise à des contraintes externes (les conditions sociales et matérielles de production du discours des médias) et internes (les conditions énonciatives et communicatives de la mise en scène de l’information). Maurice Moullaud et Jean- François-Têtu vont dans le même sens lorsqu’ils soulignent qu’entre la captation des faits in situ par l’instance médiatique et sa représentation publique dans un jounal, il y a un processus de transformation de l’information de la source lié à la spécificité de l’entreprise de presse et à son environnement particulier qui comprend, bien sûr, les valeurs et l’identité attribuées à l’instance de réception. Si les conditions externes (sociales) renvoient aux conditions de production de l’information médiatique, les conditions internes (discursives) renvoient aux genres textuels (éditoriaux, titres, nouvelles, articles d’opinion, etc.) et aux procédés de mise en discours de l’information (mise en récit, mise en description, mise en argumentation, mise en énonciation). Notre position reprend l’essentiel de la problématique développée par Patrick Charaudeau dans Le discours d’information médiatique. La construction du miroir social (1997). Ajoutons que, tout en restant dans le champ de l’argumentation dans le discours, notre recherche prendra en compte les problèmes relatifs aux domaines de la pensée et de la langue. L’argumentation dans le discours d’information médiatique Argumentation et Analyse du Discours, 7 | 2011 1 2 On sait que le discours d’information médiatique est très hétérogène et comprend aussi bien des genres textuels descriptifs et narratifs, comme les titres de journaux et les reportages (news), que des genres textuels opinatifs et argumentatifs, comme les éditoriaux et les articles d’opinion. Si les premiers ont une visée dominante d’information ou de faire-savoir, les seconds auraient plutôt une visée de faire-croire (Charaudeau 2000). Les textes analysés ici correspondent aux premiers types : ils sont prétendument informatifs et se présentent le plus souvent à l’appréciation du lecteur comme ayant une visée d’information. Ils ont, en géneral, une configuration assertive et le locuteur assume le plus souvent le rôle de rapporteur. Il rapporte un fait (fait rapporté) ou un dire (discours rapporté). Mais nous savons bien que si l’assertion est censée décrire le monde tel qu’il est, elle n’en fait pas moins circuler un point de vue, car il est rare qu’un énoncé ne comporte pas d’attitude modale1. Et pour ce qui est du discours d’information médiatique, l’interprétation du point de vue exprimé ou implicité suppose toujours une éthique ou une symbolique culturelle, car les assertions dans ce domaine ne valent que par rapport à ses implications relativement au contexte social2. Ces actes de langage possèdent donc une dimension argumentative dans le sens qu’Amossy donne à cette notion (2010 [2000]). La dimension argumentative permet à l’analyste de rendre compte de nombreux discours qui n’ont pas de visée argumentative avouée mais qui ont néanmoins l’intention d’agir sur les croyances et sur les représentations d’autrui. 3 Comme il s’agit ici de dégager des stratégies argumentatives dans des textes qui n’ont pas de visée argumentative avouée, on ne traitera ni des éditoriaux ni des articles d’opinion. On va s’attacher aux titres, ces éléments qui entourent un texte en le présentant, en le commentant et qui, selon Philippe Lejeune (1975), commandent toute la lecture. Gérard Genette rappelle que cette « frange de texte, toujours porteuse d’un commentaire auctorial ou plus ou moins légitimée par l’auteur, constitue, entre texte et hors texte, une zone non seulement de transition mais de transaction » (1987 : 8). Ces éléments se situent par rapport au texte (l’article) mais ils revendiquent une certaine autonomie, car ils se présentent au lecteur comme une représentation fidèle, synthétique et macrostructurale des faits et de l’article. C’est pourquoi il est important d’y déceler une dimension argumentative qui en l’occurrence est double : persuader le lecteur de continuer à lire l’article ; le persuader de voir d’une certaine façon les faits et les dires rapportés. 4 Dans ce cadre, cet article poursuit deux objectifs complémentaires : l’un, d’ordre géneral, consiste à montrer comment les trois approches de l’argumentation (logique, linguistique et rhétorique) sont à la fois différenciées, et étroitement imbriquées dans l’analyse du discours de presse ; le second concerne le fonctionnement du discours d’information dans la presse et la façon dont il met en place, par des opérations de cadrage, d’effacement énonciatif, d’ellipses, etc. l’orientation argumentative voilée dont parle Amossy. 1. Les trois approches de l’argumentation 5 Il est très courant, lorsqu’on travaille sur le problème de l’argumentation, de se situer par rapport aux trois approches qui marquent souvent le lieu d’où parle le chercheur. Elles racontent en effet l’histoire même de ce champ d’études. L’argumentation dans le discours d’information médiatique Argumentation et Analyse du Discours, 7 | 2011 2 6 La problématique rhétorique, la plus ancienne des trois, est tournée vers les discours. À ses débuts, elle s’intéressait aux pratiques judiciaires, politiques (déliberatives) et épidictiques qui ont émergé dans les cités grecques vers le quatrième siècle avant notre ère. Sa figure de proue était le sophiste, ce savant qui maîtrisait la parole et la discussion des thèmes les plus généraux, de la morale à l’esthétique, de la politique aux questions judiciaires, sans être forcément un expert en ces matières, du moins dans le sens moderne du terme. Corax et Gorgias fondent et enseignent un art de bien parler. Le premier privilégie une rhétorique des conflits et de la discussion persuasive, alors que le second développe une rhétorique des figures et du beau parler. Des sophistes comme Protagoras sont connus par une pensée assez élaborée que l’on pourrait même confondre avec une philosophie de la morale et de la vertu. Les cyniques, comme Diogènes Laerce, ont côtoyé les sophistes avant de se construire une philosophie critique de la morale, des coutumes et de la liberté. D’une façon ou d’une autre, ils étaient à l’opposé de la philosophie apodictique proposée par Platon. 7 L’approche rhétorique est reprise aujourd’hui par les travaux qui s’orientent vers le discours et ses objets les plus divers, comme l’espace du débat public, les auditoires concernés, la subjectivité et les intentions des sujets, la visée persuasive et tout ce qui a trait, comme le suggèrent Perelman et Olbrechts-Tyteca (1958), à l’établissement, par le moyen du langage, de liens entre les esprits. La rhétorique est la discipline qui fournit le plus grand nombre des éléments conceptuels nécessaires au développement d’une problématique de l’argumentation dans le discours, comme la notion d’ethos, qui renvoie à l’identité du sujet argumentant, ou celle de pathos, qui renvoie à sa relation avec le destinataire du discours. Ces dimensions ne sont cependant pas prises en compte par la plupart des théories de l’argumentation. 8 La problématique de la pensée relève de la philosophie telle que Platon l’a conçue : elle affirme l’autonomie de la pensée par rapport au langage, posant qu’elle se développe au gré d’opérations de raisonnement qui ne dépendraient pas du langage. De par sa nature subjective et ambiguë, ce dernier constituerait d’ailleurs un obstacle à l’expression de la pensée pure. Il en résulte qu’il faut évacuer toute ambiguïté au profit d’inférences logiques calculables, que n’entachent aucune intervention et aucune intention humaines. L’objet d’analyse est la proposition, sa fonction dans le raisonnement logique, ses valeurs de vérité. La logique traite donc de l’analyse des rapports entre propositions en vue d’une définition exacte du concept de démonstration. À la philosophie qui est en quête de Vérité absolue incomberait la tâche, prétendument plus noble que celle de la rhétorique, de chercher les moyens d’arriver à cette Vérité par la pensée raisonnante, logique, épurée de la rhétorique qui se contente du vraisemblable, de l’apparence et de l’efficacité discursive. De nos jours, la logique s’est taillé une place à part dans les sciences et dans la philosophie. En théorie de l’argumentation, la question de la pensée a été reprise par les travaux d’analyse critique d’origine anglo- saxonne comme ceux de Woods et Walton (1982), uploads/Philosophie/ aad-1209.pdf
Documents similaires
-
12
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Fev 15, 2021
- Catégorie Philosophy / Philo...
- Langue French
- Taille du fichier 0.3863MB