Aoristo))))) International Journal of Phenomenology, Hermeneutics and Metaphysi

Aoristo))))) International Journal of Phenomenology, Hermeneutics and Metaphysics Jean-Claude Gens Toledo, n˚3, v. 1(2019) p. 67-83 67 Les catégories diltheyennes de signification et de force Diltheys Kategorien von Bedeutsamkeit und Kraft Prof. Dr. Jean-Claude Gens Université de Bourgogne1 RÉSUMÉ Pendant la construction de sa philosophie Dilthey montre qu’une de sa principale tâche est le travail con les catégories de la vie que, différemment de les catégories formelles de l’entendement, ne se comprennent pas isolées, mais comme part d’un tout. Même si ce tout soit donné comme la plus grande expression de la histoire, la signification est plus une catégorie de la vie que une catégorie de la histoire, parce que le concept de force, que est originalement de la vie comme ce qui la move contre la pression exercé par le monde, se trouve aussi dans le monde historique, quand elle est l’essai du présent à solutionner les problèmes du passé. MOTS-CLÉS Dilthey; signification; force; catégories diltheyennes ZUSAMMENFASSUNG Den Aufbau seiner Philosophie entlang zeigt Dilthey, dass eine seiner Hauptaufgaben die Bearbeitung der Lebenskategorie sei, die anders als die formellen Verstandeskategorien nicht isoliert zu verstehen sind, sondern als Teil eines Ganzen in Bezug aufeinander. Sogar wenn dieses Ganze wie der größte Geschichtsausdruck gegeben ist, die Bedeutsamkeit ist mehr eine Lebenskategorie als eine Geschichtskategorie, weil der Kraftbegriff, der ursprünglich aus dem Leben herkommt als das, was es gegen den von der Welt geübten Druck bewegt, sich auch in der geschichtlichen Welt befindet, wenn sie der Versuch der Gegenwart ist, die Probleme der Vergangenheit zu lösen. 1 Email: gens.jc@clubinternet.fr Aoristo))))) International Journal of Phenomenology, Hermeneutics and Metaphysics Dossiê Estudos Dilthey Les catégories diltheyennes de signification et de force SCHLÜSSELDWÖRTER Dilthey; Bedeutsamkeit; Kraft; Diltheys Kategorien INTRODUCTION Dans la préface du Monde de l’esprit sous-titré «Introduction à la philosophie de la vie», Dilthey jette un regard rétrospectif sur ses travaux pour déclarer que la «tâche de [sa] vie» a été de «pénétrer toujours plus profondément dans le monde de l’histoire» et d’«en comprendre l’âme» (DILTHEY, 1924, p.4; DILTHEY, 1947, p. 10). Et, dans le cadre de sa méditation des configurations culturelles et historiques, il invite à penser la vie effective, celle qui nous est donné à vivre ou à éprouver, à l’aide de catégories issues de la vie elle-même, qu’il appelle pour cette raison des «catégories de la vie»2. Parmi ces catégories figurent non seulement la signification et, ou, la signifiance, mais encore la compréhension, le développement, le tout et les parties, la valeur…, chacune de ces catégories ne s’entendant qu’en relation à toutes les autres, ce qui fait qu’on ne saurait espérer pouvoir les définir isolément comme on le fait pour les catégories formelles de l’entendement. Dilthey n’est pourtant pas sans accorder un certain privilège à la signification. Mais, à la différence du travail le plus quotidien de l’historien qui interroge la signification d’évènements historiques donnés, Dilthey questionne précisément la nature de cette notion et notre quête de signification ou de sens. Il conviendra ici de commencer par rappeler l’acception la plus communément répandue de la notion de signification pour mieux mettre en évidence l’originalité et la force de la position diltheyenne. Deux autres temps seront respectivement consacrés à la conception diltheyenne de la signification et à la nécessité d’en corréler le sens à ce qui constitue l’essence de toute chose en tant qu’elle devient et se transforme: la force. 1. Si, comme le font aussi William James et Bergson qui célèbrent le vague3, Dilthey ne procède pas à des distinctions terminologiques rigides y compris en 2 Sur la dernière version diltheyenne des catégories de la vie, voir Dilthe (1927), p. 232-246; Dilthey (2014), p. 64-79. 3 Voir par exemple, James (2003, p. 121): «Il faut rendre au vague et à l’inarticulé la place qui leur revient dans notre vie mentale». Aoristo))))) International Journal of Phenomenology, Hermeneutics and Metaphysics Jean-Claude Gens Toledo, n˚3, v. 1(2019) p. 67-83 69 ce qui concerne les notions de sens, de signification et de signifiance, l’une des originalités de sa pensée par rapport à la tradition antérieure tient à la manière dont il opère si ce n’est une distinction entre ces deux dernières notions, du moins à un déplacement de la notion classique de signification (la Bedeutung) en direction de la significativité ou de la signifiance (la Bedeutsamkeit) – un déplacement ou une distinction qui oblige à aller au-delà de l’idée classique selon laquelle la signification est, ou serait, évidemment relative à des énoncés, à un discours4. C’est cette supposée évidence qui caractérise par exemple la pensée kantienne dans la première Critique comme, plus près de nous, une position comme celle de Rudolf Carnap – l’une et l’autre semblant relever de l’évidence pour le sens commun. Le sens ou la signification d’une phrase tient en ce sens au fait qu’elle désigne effectivement quelque chose «qui est susceptible de nous être donné dans une expérience sensible», avance la Critique de la raison pure5, par exemple le soleil se lève renvoie à une réalité phénoménale donnée; autrement dit, si c’est la désignation qui est ici essentielle, ce qui est dénué de sens effectif, c’est ce qui ne renvoie à aucune donnée de l’intuition sensible. Il en va de manière analogue de l’acception positiviste de la signification, dont l’intention antimétaphysique est évidemment polémique (je pense par exemple à la critique de la notion de néant par Carnap), bien que Kant fasse néanmoins place à une autre possibilité de signifier dans la mesure où il nous faudrait admettre que des concepts sont susceptibles de signifier une existence possible à condition qu’ils ne soient pas contradictoires – ce qui est le propre de la signification des noumènes. Mais – et c’est manifestement autre chose – le sens ou la signification tient encore à sa Meinung, à ce qu’il ou elle veut dire, c’est-à-dire à son intention : comprendre le sens d’une phrase, c’est comprendre dans quelle intention elle est énoncée, dans quelle intention est désignée une existence effective ou possible. Si je dis table, c’est pour signifier une possibilité de s’y asseoir pour écrire ou pour partager un repas, ou encore si je dis mon verre est vide, c’est pour signifier que j’aimerais bien qu’on me le remplisse… Autrement dit, le renvoi est d’ordre pratique ou vital. Si l’on en reste à la première dimension de la signification en tant qu’elle désigne, c’est-à-dire renvoie à un étant donné, table 4 Le terme de Bedeutsamkeit se trouve aussi chez Droysen, mais n’est pas expressément distingué de la Bedeutung, voir par exemple: Droysen (1977), p. 27, 166, 280. 5 La Critique de la raison pure précise ainsi à propos des concepts que «notre intuition sensible et empirique peut seule leur procurer sens et signification», c’est-à-dire leur accorder une «réalité objective» (B 149, Akad. III, 118, et, en ce sens encore, voir B 299, Akad. III, 205). Aoristo))))) International Journal of Phenomenology, Hermeneutics and Metaphysics Dossiê Estudos Dilthey Les catégories diltheyennes de signification et de force signifie, alors que centaure serait dénué de signification; en revanche au regard de la seconde dimension du terme de signification, ce qui compte pour que table signifie, c’est le contexte de son énonciation, puisque si ce terme est prononcé hors de tout contexte «sensé», son énonciation peut être considérée comme dénuée de signification. En tant que la signification demande à être pensée en termes d’intention, donc, le sens ou la signification est très proche de la finalité qui, pour Dilthey, est une autre catégorie de la vie. C’est à ce niveau que mérite d’être introduite la notion de significativité, ou, pour le moins, d’être élargie l’acception de la notion de signification; car dès lors que la signification est susceptible d’être essentiellement pratique ou vitale, c’est-à-dire de concerner véritablement celui qui la saisit, elle caractérise de manière très générale et plus originairement non pas des énoncés, mais la perception elle-même. Contrairement à l’abstraction de la conception empiriste classique qui voudrait que le donné perceptif soit constitué d’impressions sensibles discrètes, percevoir, c’est percevoir des significations, par exemple l’abri qu’est susceptible de signifier un arbre, ou la menace de mort que signifie la perception d’un prédateur. Dans une telle perspective, la signification ne caractérise pas une chose, elle n’est pas de l’ordre d’une désignation impersonnelle, mais est toujours fonction d’une subjectivité vivante, fonction du genre de relation qui lie le percevant et le perçu, par exemple l’antilope et le tigre, ou le marteau et ce qui est à frapper, un morceau de métal sur une enclume. Cela veut encore dire que la vie s’articule, est structurée (BOLLNOW, 2009, p.31) et, par la signification, se centre «autour d’un point médian par rapport auquel tout ce qui est extérieur se comporte comme à un intérieur». (DILTHEY, 1927, p.249; DILTHEY, 2014, p. 83). Une telle significativité est d’ordre non seulement intellectuel, mais encore affectif et pré-linguistique. Ce sont ces significations vécues, ces significations qui concernent la vie, que dit de manière plus claire le terme de significativité ou de signifiance, par exemple encore dans la langue de Heidegger des années vingt, lorsque ce dernier pointe le caractère uploads/Philosophie/ aorist-les-categories-diltheyennes-de-signification-et-de-force-diltheys-kategorien-von-bedeutsamkeit-und-kraft.pdf

  • 26
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager