Revue d'histoire des sciences Premières recherches sur l'origine et la formatio
Revue d'histoire des sciences Premières recherches sur l'origine et la formation du concept d'économie animale M Bernard Balan Citer ce document / Cite this document : Balan Bernard. Premières recherches sur l'origine et la formation du concept d'économie animale. In: Revue d'histoire des sciences, tome 28, n°4, 1975. pp. 289-326; doi : https://doi.org/10.3406/rhs.1975.1179 https://www.persee.fr/doc/rhs_0151-4105_1975_num_28_4_1179 Fichier pdf généré le 08/04/2018 Résumé RÉSUME. — Le concept d'économie animale, dont l'emploi au début du xixe siècle permet de comprendre l'introduction du principe de la division du travail en physiologie, comme le montre l'opuscule de Roget, indique l'existence d'un modèle social de l'organisation des êtres vivants, distinct du modèle mécanique qui lui est contemporain depuis le xviie siècle. Ce concept apparaît dans la littérature médicale au xvie siècle dans deux contextes : l'Ecole hippocratique de Paris, et auparavant les élèves de Paracelse. Ces derniers semblent avoir assuré la convergence entre un emploi théologique que Michel Servet reprend à Tertullien, et par conséquent à la philosophie stoïcienne dont ce dernier est tributaire, où le corps vivant, comme le monde, est une cité, ou même un atelier, semblable à la forge de Vulcain, dont les soufflets sont vivants, et un emploi alchimique où le concept d'économie, au sens d'opération, a rencontré le concept d'organisme, au sens d'appareil à distiller, chez les alchimistes grecs, rencontre importante pour l'interprétation du destin ultérieur des deux termes, et pour la distinction en médecine de deux courants : anatomique et mécaniste, chimique et vitaliste, dont le dernier est marqué par la présence de ces deux mots. Abstract SUMMARY. — The concept of animal economy, the use of which at the beginning of the XIXth century is a way to understand how the principle of the division of labour was introduced in physiology, as it is shown by the book of Roget, points out a social model of the organization of living beings at variance with the mecanistic model contemporary of it from the XVIIth century. There is two main occurences of this concept in the medical literature of the XVIth century : the hippocratic school of Paris, and the pupils of Paracelsus. The latter have apparently made to converge a theological use, which Michel Servet takes back from Tertullian, and by this way, from the stoic philosophy, where the living body, as the world, is a Town, even so a Vulcan smith's shop, where the bellows are alive, and an alchimic use, where the concept of economy meaning an operation, met with the concept of organism, meaning a distilating apparatus with the greek alchimists, important meeting for the following fortune of the two words, and for the distinction of two streams of thought in Medecine : anatomical and mecanistic, chimical and vitalistic, whose latter is characterized by the presence of these words. BEV. HIST. SCI. 1975-XXVHI/4 Premières recherches sur l'origine et la formation du concept d'économie animale RÉSUME. — Le concept d'économie animale, dont l'emploi au début du xixe siècle permet de comprendre l'introduction du principe de la division du travail en physiologie, comme le montre l'opuscule de Roget, indique l'existence d'un modèle social de l'organisation des êtres vivants, distinct du modèle mécanique qui lui est contemporain depuis le xvne siècle. Ce concept apparaît dans la littérature médicale au xvie siècle dans deux contextes : l'Ecole hippocratique de Paris, et auparavant les élèves de Paracelse. Ces derniers semblent avoir assuré la convergence entre un emploi théologique que Michel Servet reprend à Tertullien, et par conséquent à la philosophie stoïcienne dont ce dernier est tributaire, où le corps vivant, comme le monde, est une cité, ou même un atelier, semblable à la forge de Vulcain, dont les soufflets sont vivants, et un emploi alchimique où le concept d'économie, au sens d'opération, a rencontré le concept d'organisme, au sens d'appareil à distiller, chez les alchimistes grecs, rencontre importante pour l'interprétation du destin ultérieur des deux termes, et pour la distinction en médecine de deux courants : anatomique et mécaniste, chimique et vitaliste, dont le dernier est marqué par la présence de ces deux mots. SUMMAR Y. — The concept of animal economy, the use of which at the beginning of the XlXih century is a way to understand how the principle of the division of labour was introduced in physiology, as it is shown by the book of Roget, points out a social model of the organization of living beings at variance with the mecanistic model contemporary of it from the XVIIth century. There is two main occurences of this concept in the medical literature of the XV 1th century : the hippocratic school of Paris, and the pupils of Paracelsus. The latter have apparently made to converge a theological use, which Michel Servet takes back from Tertullian, and by this way, from the stoic philosophy, where the living body, as the world, is a Town, even so a Vulcan smith's shop, where the bellows are alive, and an alchimie use, where the concept of economy meaning an operation, met with the concept of organism, meaning a distilating apparatus with the greek alchimists, important meeting for the following fortune of the two words, and for the distinction of two streams of thought in Médecine : anatomical and mecanistic, chimical and vitalistic, whose latter is characterized by the presence of these words. Le xixe siècle voit apparaître le concept de division physiologique du travail, produit d'un traitement métaphorique du corps vivant, considéré comme une manufacture, conformément au modèle qui a été décrit par Adam Smith, pour illustrer l'importance de la division du travail pour l'amélioration de la puissance produc- T. XXVIII. — 1975 19 290 В. BALAN trice de l'industrie. Il s'agit donc d'un concept d'origine technologique et économique. Le modèle utilisé par Adam Smith est celui d'une manufacture d'épingles, qu'il reprend à Y Encyclopédie, où Delaire décrit les 18 opérations distinctes qui permettent de produire 36 milliers d'épingles par jour dans un atelier où la fabrication est répartie sur autant de machines spéciales, servies par autant d'ouvriers, tandis qu'une production artisanale serait limitée à un chiffre qui ne dépasserait pas quelques dizaines (1). Milne-Edwards introduit ce concept en France en 1827 (2), mais il existait déjà en Angleterre, où Peter Roget l'utilise dans un texte de vulgarisation scientifique (3), texte qui montre clairement comment l'idée (1) Delaire, art. « Epingle », in Diderot et (I'Alembert, Encyclopédie, Paris, 1 755, t. V, p. 804-807. Selon Blanqui, Beccaria aurait indiqué les avantages de la division du travail dès 1769, dans son cours d'économie politique professé à Milan, mais c'est Adam Smith qui en a démontré la portée en 1776. Voir A. Blanqui, Note, in A. Smith, Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Paris, éd. Garnier, 1859, t. I, liv. I, chap. 1, p. 94. Les chap. 1, 2, 3 de ce livre sont consacrés à l'exposition de la division du travail. (2) H. Milne-Edwards, art. « Organisation », in Dictionnaire classique d'histoire naturelle, Paris, 1827, t. XII, p. 340-344. (3) P. Roget, An introductory lecture on human and comparative Physiology, London, 1826 ; l'exemplaire du Muséum sur lequel j'ai travaillé est dédié à Georges Cuvier : il n'avait pas encore été découpé entre les p. 60 et 80, et c'est entre ces pages que Roget expose le principle of the division of labour. Ceci pose un problème : à supposer que Cuvier, ou le collaborateur auquel il aurait pu confier l'ouvrage, aient interrompu leur lecture à cause d'une visite, ou de l'heure du repas, il n'en reste pas moins que leur intérêt n'a pas été suffisamment éveillé pour qu'ils jugent bon de la reprendre. Un semblable détail pose tout le problème, non seulement de la distance que Milne- Edwards avait pu prendre, dès 1827, par rapport à son maître, mais encore et surtout de l'attitude de Cuvier par rapport à la physiologie comparée qui se développait en Angleterre dans le cadre théorique défini par Hunter. Owen proteste, en effet, contre le peu d'intérêt que Cuvier manifeste pour l'œuvre de Hunter dans YHisloire des progrès des sciences naturelles depuis 1789, jusqu'à ce jour (t. I, p. 301-302), en signalant qu'il ne le connaît qu'à travers des textes « destinés à développer des principes généraux de Physiologie, plutôt qu'à exposer les détails des observations anatomiques sur lesquelles il les fondait » (J. Hunter, Œuvres, trad. Richelot, Paris, 1841, t. IV, p. 15). Ce sont justement les détails qui intéressaient Cuvier, parce que la physiologie générale ne semble avoir été pour lui que le fondement des principes de l'anatomie comparée, et parce que l'anatomie comparée, se définissant comme instrument de la recherche physiologique par substitution à une expérimentation jugée impossible, rend inutile une physiologie comparée proprement dite. Par ailleurs, le traitement global de l'organisation comprise comme celle d'une manufacture ou d'un laboratoire a le tort de réactiver une conception scalaire du règne animal à un moment où Cuvier est convaincu de la distinction des quatre plans (Roget, ibid., p. 80 sq.). Il est donc concevable que Cuvier n'ait vu dans l'ouvrage de uploads/Philosophie/ balan-premieres-recherches-sur-l-x27-origine-et-la-formation-du-concept-d-x27-oeconomie-animale-pdf.pdf
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