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See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.net/publication/228935647 Analogie et lexique construit : quelles preuves? Article · January 2003 CITATIONS 4 READS 61 1 author: Georgette Dal Université Charles-de-Gaulle Lille 3 44 PUBLICATIONS 198 CITATIONS SEE PROFILE All in-text references underlined in blue are linked to publications on ResearchGate, letting you access and read them immediately. Available from: Georgette Dal Retrieved on: 18 July 2016 Cahiers de Grammaire 28 (2003), « Morphologie et Lexique », pp. Analogie et lexique construit : quelles preuves ?* Georgette Dal∗∗ Après un bref historique de la notion d’analogie avec une insistance particulière sur les périodes du générativisme et du post-générativisme, la première partie du présent article fait apparaître que le contexte théorique actuel est propice à la réémergence du concept dans le champ de l’étude de la formation du lexique construit. La seconde partie essaie toutefois de rassembler quelques preuves en sa faveur : car, si le consensus se fait pour admettre qu’il œuvre bien comme principe régulateur de formes lexicales jugées immotivées, les preuves sont plus discutables – et plus discutées – dès qu’il s’agit de la formation même du lexique construit. This paper begins with a brief historical review of the concept of analogy, with special attention to generative and postgenerative work. In the first part it is argued that, within the present theoretical context, it would be fruitful to explore further the possible uses of analogy in the context of word- formation. The second part of the paper presents a series of arguments in favour of the relevance of analogy. Indeed, though there is a consensus with respect to the idea that analogy is indeed a regulating principle for unmotivated lexical items, there has been much discussion as to its relevance in the more general context of regular word formation. * Je remercie mes deux relecteurs anonymes, dont les remarques précieuses m’ont contrainte à retravailler certains points. Merci également à Dany Amiot pour sa relecture attentive, et à Philip Miller pour ses compétences d’anglophone. Les incohérences résiduelles sont entièrement de mon fait. ∗∗ UMR 8528 « SILEX » (CNRS & Université de Lille 3) et GDR 2220 dal@univ-lille3.fr Georgette Dal Cahiers de Grammaire 28 (2003) 2 Introduction Alors que la majorité des travaux consacrés au lexique construit a fait la part belle à l’analogie jusqu’au milieu du XXe siècle, le concept s’est peu à peu éclipsé jusqu’à devenir invisible, voire indicible, pendant ce que, par commodité, j’appellerai les années dures du générativisme. En ce début de XXIe siècle, on connaît les attaques qu’a subies le générativisme, avec, entre autres, la remise en cause de la notion de règle. On peut donc s’attendre à ce que, par le mouvement de balancier dont elle est coutumière, l’analogie renaisse de ses cendres. De fait, comme je le ferai apparaître dans le § 1., c’est le cas, avec l’émergence de théories linguistiques nouvelles qui donnent une prime à l’existant et proposent un traitement surfacique des données. Le § 2. se demandera toutefois quelles preuves réunir en faveur du concept dans le champ de la construction du lexique : car, s’il ne fait aucun doute qu’il œuvre bien comme principe régulateur de formes lexicales jugées aberrantes ou immotivées (par exemple, vousoyer, corrigé en vouvoyer avec reprise de la consonne initiale sur le modèle de tutoyer, bien que le second /t/ y duplique accidentellement le /t/ initial, ou l’ancien français giflu, supplanté par joufflu, qui hérite sa syllabe graphique initiale de joue)1, les preuves sont plus discutables – et plus discutées – dès qu’il s’agit de la formation même du lexique construit. 1. De la résurgence du concept d’analogie dans les théories linguistiques contemporaines2 De la fin du XVIIe siècle au milieu du XXe siècle, il est banal d’évoquer le concept d’analogie dès qu’il s’agit de lexique construit : ainsi, la première édition du Dictionnaire de l’Académie déjà nous apprend en 1694 que « le mot ambitionner est formé par analogie d'ambition, comme passionné est formé de passion » (s.v. analogie), tandis que, quelque cent cinquante ans plus tard, la sixième édition de ce même dictionnaire ajoute que « [l]es mots nouveaux ne peuvent guère s’introduire qu’à l’aide de l’analogie » (s.v. analogie)3. Au début du vingtième siècle encore, F. de Saussure lui fait jouer un rôle central dans la formation du lexique construit, considérant, comme avant lui Paul (1880), que les mots construits nouveaux sont le résultat du calcul de la quatrième proportionnelle selon laquelle le quatrième terme d’une proportion est déductible des trois autres4. Ainsi donne-il l’exemple du 1 Pour un point sur la notion de changement analogique, cf. le chapitre que Bloomfield (1933) consacre à la notion, ainsi que, plus récemment, les travaux de B. Joseph, en particulier Joseph (1998) et Joseph & Janda eds. (2003). 2 Ce paragraphe synthétise et complète Dal (à paraître). 3 Les diverses éditions du dictionnaire de l’Académie ont été consultées en ligne sous l’URL : http://www.atilf.fr/_ie/index_dictionnaires.htm. 4 Le principe de la quatrième proportionnelle renoue avec la conception aristotélicienne du concept, qui le définit comme une égalité de rapport. La Analogie et lexique construit : quelles preuves ? Cahiers de Grammaire 28 (2003) 3 néologisme répressionnaire, dans lequel il voit le résultat de l’équation suivante (1916 : 225) : réaction:réactionnaire = répression:x. x = répressionnaire. On retrouve encore le concept dans Bloomfield (1933), où il prend toutefois une valeur différente. L. Bloomfield assimile en effet analogie et schéma grammatical, où un schéma est un « type de phrase, construction ou substitution » (1933 : 258). Au sein des analogies, il oppose ainsi les analogies régulières, qui « permet[tent] à un locuteur d’énoncer des formes de discours qu’il n’a pas entendues », et les analogies irrégulières, qui peuvent « englober un certain nombre de formes, mais un locuteur énoncera rarement une forme nouvelle par analogie avec celles qu’il a entendues ». Il établit de la sorte un continuum allant des unes aux autres, en passant par des cas intermédiaires d’analogies peu susceptibles de donner lieu à de nouvelles formations (cette tripartition n’est pas sans rappeler celle que d’autres font entre schémas productifs, improductifs et semi-productifs : pour une synthèse sur ce point, cf. Bauer (2001 : 16-18)). Disparaissent cependant peu à peu de la scène morphologique aussi bien le concept d’analogie que le terme à partir du milieu du XXe siècle avec la montée du générativisme. Deux raisons principales à cela : – le point de vue adopté n’est plus celui du locuteur « inventeur de sa langue » (Bréal (1890 : 328)) – le locuteur-auditeur de la grammaire générative est une abstraction, puisqu’il est « idéal » –, mais celui du linguiste descripteur de la langue : or, le concept d’analogie se situe nettement du côté du locuteur ; – le concept d’analogie, qui repose sur une formation d’après l’existant, est incompatible avec les règles de la grammaire générative transformationnelle : (i) par le type de procédure mis en œuvre (paradigmatique vs syntagmatique), (ii) par le niveau d’intervention (surfacique vs profond), (iii) par le type d’unité linguistique postulé (mot vs morphème : cf. van Marle (2000 : 226))5. Selon les morphologues s’inscrivant dans ce courant linguistique, l’analogie est soit totalement occultée (le concept est par exemple absent des index de Scalise (1984), Corbin (1987), Di Sciullo & Williams (1987) ou définition du concept en mathématiques (a/b = c/d) revient à Euclide (-3e siècle), au sein d’une théorie de la proportion reprise à Eudoxe (-408, -355). Une application connue de ce principe en mathématiques est la « règle de trois », ou « règle de proportionnalité », définie comme la recherche, dans une proportion, du quatrième nombre, les trois autres étant connus. 5 Les faits sont en fait plus complexes que ce que décrit J. van Marle, puisqu’il existe des morphologues générativistes qui préconisent une morphologie basée sur le lexème. Georgette Dal Cahiers de Grammaire 28 (2003) 4 Lieber (1992)), soit évoquée seulement pour les cas jugés rétifs aux règles de construction de mots (cf. l’exemple des dérivés anglais en -ee développé dans Bauer (1983 : 249)). Alors que, jusque là, analogie impliquait régularité6, le concept est donc désormais associé à celui d’irrégularité (non-prédictibilité), mais aussi à celui de non-productivité. On assiste en effet pendant la même période à un second glissement consistant à opposer analogie et productivité, ce glissement étant d’autant plus curieux que la définition de Schultink (1961), qui fait office de standard en matière de productivité y compris chez les morphologues générativistes, associe intimement les deux concepts (pour un point sur la notion de productivité, cf. Dal (2003)). En guise d’illustration, on peut se reporter à Fradin (1994 : 16) qui cite l’analogie au titre des créations erratiques sous la branche « non productif » d’un diagramme montrant l’indépendance de la lexicalisation, des modes de construction et de la productivité, ou à Dressler & Ladányi (2000), qui opposent productivité par règle et analogie de surface. La même opposition se retrouve dans Booij (2002 : 10-11) : selon lui, un patron est productif quand il uploads/Philosophie/ cahiers-de-grammaire-pdf.pdf
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- Publié le Mar 02, 2021
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