Bon, c’est parti. [Pause, divers bruits] Cette année, je vous propose le thème
Bon, c’est parti. [Pause, divers bruits] Cette année, je vous propose le thème suivant : Leibniz comme philosophe baroque. Alors vous verrez si vous continuerez à venir. Ceux qui continueront à venir, je leur demande un travail, ce n’est même pas un travail. C’est une manière de suivre la lecture de n’importe quoi de Leibniz, tout ce que vous voulez. [1 :00] C’est bon, si vous ne savez pas quoi, je vous propose l’un ou l’autre de deux opuscules très courts – Leibniz écrivait beaucoup par petits opuscules – soit la Monadologie, tout petit vous voyez ? Mais j’ai une toute petite édition, n’importe quelle édition est bonne. [Deleuze regarde une édition d’un étudiant] En un an, ça peut se lire. [Rires] La Monadologie, ou bien un peu plus gros, mais pas beaucoup, le Discours de métaphysique. Il y a une édition aux Presses… non, chez Vrin, je crois, mais peu importe, qui réunit les deux, pour ceux qui voudraient lire les deux, mais je précise surtout que si vous lisez d’autres choses. [2 :00] Alors je parle toujours en fonction de ceux qui continueront à venir, s’il y en a parmi vous qui a la moindre formation mathématique, lisez n’importe quoi des œuvres mathématiques de Leibniz. S’il y en a parmi vous qui a une formation musicale, on verra à mesure qu’on avance en quoi les questions de musique sont très, très profondément inscrites dans le système de Leibniz. Bon, on verra tout ça. Ce cours est abstraitement ou idéalement divisé en deux parties, dont la première s’adresse aux [étudiants de] premier cycle et la deuxième partie aux [étudiants de] deuxième et de troisième cycles, mais la ligne de séparation est idéale, bien que tout à fait effective et administrative. [3 :00] Elle sera marquée tantôt par une recréation [Rires], tantôt par quoi… tantôt par un jeu de lumières. On y va. Mais je voudrais savoir qui est-ce qui est arrivé parmi les premiers ici. Soyez gentils. La salle était ouverte ou pas ? [Réponses diverses ; « on l’a ouverte »] Claire Parnet : On a demandé à l’ouvrir d’un type du ménage qui a refusé de l’ouvrir parce que, il a dit, que le cours commençait à 9 heures. [Deleuze : Aha, c’est ça, c’est ça] et visiblement il avait des consignes de ne pas l’ouvrir. GD : Et comment vous l’avez persuadé ? [Rires] Non, c’est bien, ça, c’est bien, parce que je vais vous raconter… Dans cette université, si on n’avait pas entendu ça, [4 :00] il y a un schéma tout à fait étrange qui s’est imposé, où je suis censé quand j’arrive aller voir un vigil ; je donne au vigil un petit macaron, et il me donne la clé de la salle, et il garde mon macaron. Après, je dois refermer la salle et rapporter la clé, et il me rendra mon macaron. Alors, j’étais inquiété… c’est très grotesque, très tordu comme solution. Et bien, vous savez pourquoi ? C’est parce qu’il faut empêcher les étudiants de prendre des chaises dans les autres salles. Alors, j’étais très étonné que la salle soit ouverte, mais je comprends. Il faut essayer de faire ça chaque fois. [Rires] [Un étudiant parle] : Et il faut la mettre en ordre, en plus, parce que quand on arrive, [5 :00] les places ne sont jamais comme ça. Les premiers qui arrivent – Michel et quelques autres – c’est [inaudible] … et depuis des années ! GD : Ah, depuis des années ! [Rires] Oui, ce n’est pas juste. Ça, il ne faudrait pas tout… Bon, allez. Alors, pourquoi ce sujet ? Je voulais faire « Qu’est-ce que la philosophie ? », et puis je n’ai pas pu. C’est un sujet tellement sacré, « Qu’est-ce que la philosophie ? », que je n’ose pas 1 l’affronter. Mais, c’est presque une introduction à « Qu’est-ce que la philosophie ? ». Pourquoi ? La vie de Leibniz est tout simple : 1646-1718. Je vous dis ça parce que c’est tout ce que j’ai à dire sur sa vie. C’est juste pour que vous le situiez. [6 :00] Donc, il naît tout près de la seconde moitié du dix-septième siècle, et il meurt au dix-huitième siècle déjà bien entamé. Pour tout renseignement complémentaire concernant sa vie, qui est d’ailleurs très intéressant, vous vous rapporterez aux introductions d’usage. Qu’est-ce qu’on peut dire sur l’avènement fracassant de Leibniz en philosophie ? On peut dire très sommairement que c’est l’entrée de la philosophie allemande, que c’est la philosophie allemande qui arrive. C’est l’entrée de la philosophie allemande en Europe, mais comment [est-ce qu’] elle se marque, cette entrée de la philosophie allemande en Europe ? [7 :00] Elle se marque par l’avènement du système. C’est avec Leibniz que le mot « système » va [inaudible] l’ensemble de la philosophie, ou l’ensemble d’une philosophie, celle de Leibniz. Avant, « système », on l’employait en astronomie, au sens du système du monde ; il est employé en biologie, en histoire naturelle au sens du système de la nature, mais il ne désigne pas la philosophie comme telle, si bien que cela sera pour nous une question importante : savoir ce que Leibniz entend par « système » et qu’il peut s’identifier à la philosophie comme telle. La philosophie se fait allemande en devenant système. [8 :00] Bon. Est-ce que le système serait la forme baroque de la philosophie ? On nous dit qu’un tel mot ne peut être employé qu’avec beaucoup de précautions, et que le mot même de « Baroque » soulève plus de problème qu’il n’en ait de solutions. On nous dit qu’il faudrait savoir si c’est une catégorie esthétique ou si c’est une période historique. On nous dit qu’il faudrait savoir quel rapport exacte « Baroque » a avec « Renaissance », avec « classicisme », avec « gothique », etc. On nous dit qu’il faudrait savoir quel lieu [9 :00], quel temps et quel lieu… un Baroque espagnol, un Baroque d’Europe centrale. Leibniz est né près de l’Europe centrale, à Leipzig ; il est très proche de l’Europe centrale. On nous dit mille choses qui… on nous dit même [sur] le terme « Baroque », si on l’emploie rigoureusement, à quoi il convient, peut-être à l’architecture, à certains aspects de l’architecture, en tel lieu, à tel moment… Mais est-ce qu’on peut parler d’une littérature baroque, d’une musique baroque ? On nous fait toutes sortes de difficultés d’avance. Je dis que ce ne sont pas des problèmes pour nous. Pour nous, je demanderais juste une petite chose : avoir une idée vague, ou une idée confuse, [10 :00] de ce qu’on pourrait appeler « Baroque », une idée très, très simple, qu’on peut traiter comme une hypothèse, et puis on chercherait les conséquences de l’hypothèse ; on développerait l’hypothèse, et puis on verrait si ça marche. Il faudrait une hypothèse fonctionnelle ; je veux dire, non pas définir une essence du Baroque, mais définir quelque chose que le Baroque serait supposé faire, une opération. Je crois qu’on échapperait à tous ces problèmes qui nous fatigueraient d’avance, c’est-à-dire, qu’est-ce que veut dire le mot « baroque » ? Est-ce que cela renvoie à ceci ou à cela ? A quelle condition peut-on l’employer utilement ? Si on avait une hypothèse opératoire [11 :00], qu’est-ce que fait un homme baroque ? Et mon hypothèse est très simple, à condition que cette opération ne coïncide ni avec une opération qu’on pourrait appeler de la Renaissance, ni avec une opération qu’on pourrait appeler classique, ni avec une opération qu’on pourrait appeler romantique, etc. Au niveau opératoire, il faut chercher une certaine spécificité du Baroque. Si je formule ainsi l’hypothèse très générale, j’ai déjà la réponse. Je ne m’interroge pas sur l’endroit où le Baroque fait ceci, essence musique, essence architecture, essence littérature ; je dis une chose toute simple : le Baroque fait des plis, [12 :00] le Baroque fait des plis. C’est 2 une hypothèse. Le pli est donc le caractère essentiel du Baroque compris comme un acte opératoire. Pour moi, pour ceux qui étaient là l’année dernière, ça m’assure être la transition toute naturelle de notre travail de l’année dernière ; nous avions beaucoup parlé du pli, mais d’un autre point de vue. Car, cette année, nous nous trouvons devant la nécessité, peut-être, la nécessité, à confirmer, d’essayer de construire un concept de pli, lequel concept évidemment, si tout va bien, doit suivre toutes les sinuosités [13 :00] de la philosophie de Leibniz. Et en effet, si cette philosophie est sous le signe du pli, il est normal que je parle d’une philosophie sinueuse. Qu’est-ce que ça veut dire tout ça, le Baroque, c’est ce qui fait des plis ? Je ne peux pas savoir. Je dis, il y a Baroque là où la matière ne cesse de se replier, de se replier sur elle-même et où l’âme ne cesse de se replier, les replis de la matière et les plis de l’âme. [ce sont uploads/Philosophie/deleuze-le-pli 1 .pdf
Documents similaires










-
25
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Oct 26, 2022
- Catégorie Philosophy / Philo...
- Langue French
- Taille du fichier 0.4878MB