18/11/22 18:52 Charles Péguy - Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonien

18/11/22 18:52 Charles Péguy - Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne - Presses universitaires de Liège Página 1 de 44 https://books.openedition.org/pulg/7203?lang=es OpenEdition Books Presses universitaires de Liège Philosophie Charles Péguy Note sur M. Bergson et la philoso... Presses universitaires de Liège Charles Péguy | Charles Péguy Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne INICIO CATÁLOGO DE 13424 LIBROS EDITORES AUTORES OPENEDITION SEARCH 18/11/22 18:52 Charles Péguy - Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne - Presses universitaires de Liège Página 2 de 44 https://books.openedition.org/pulg/7203?lang=es 1 2 3 4 p. 23-47 Texto completo À la mémoire de notre vieux maître M. Humbert1 qui nous enseignait au lycée d’Orléans une si bonne philosophie. Tous ces débats qui se livrent depuis deux ou trois ans sur et pour et contre M. Bergson et la philosophie bergsonienne eussent été fort éclairés, (mais voulait-on les éclairer), si on avait consenti à examiner ce que nous entendons par intellectualisme. On a feint de croire que la querelle faite à l’intellectualisme était une querelle faite à la raison, à la sagesse, à la logique. Et à l’intelligence. La philosophie de M. Bergson est presque aussi mal comprise par ses adversaires que par ses partisans. Et ce n’est pas peu dire. D’abord la raison n’est pas la sagesse et ni l’une ni l’autre n’est pas la logique. Et les trois ensemble ne sont pas l’intelligence. Ce sont trois, — et quatre, — ordres, ce sont trois, — et quatre, — royaumes, et il y en a beaucoup d’autres. Or la révolution, l’invention bergsonienne n’a point consisté à déplacer ces royaumes mais à y opérer une révolution de l’intérieur. Et il n’est pas étonnant que cette philosophie, qui est une philosophie de l’intérieur, aboutît non point à déplacer des royaumes par un mouvement extérieur, par une translation externe, par une substitution extrinsèque, mais à les rénover, à les creuser, à les rendre eux-mêmes en y opérant une interne révolution. La philosophie bergsonienne n’est point une physique du transfert, une mécanique, une cinématique de la translation. C’est une organique. Et même une réorganique. Et c’est une dynamique. Il y a des ordres, il y a des royaumes, il y a des règnes, il y a 18/11/22 18:52 Charles Péguy - Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne - Presses universitaires de Liège Página 3 de 44 https://books.openedition.org/pulg/7203?lang=es 5 6 7 8 9 10 des disciplines. Il y a la foi ; il y a l’amour ; il y a l’art ; il y a la philosophie ; il y a la morale ; il y a la science. Et sans doute il y en aurait d’autres. Et même il faudrait dire qu’il n’y a pas seulement des royaumes : il y a des provinces, Et qui sont peut-être autant séparées que des royaumes. Car il n’y a peut- être rien qui soit aussi contraire aux arts plastiques que les arts musiciens. Et il n’y a peut-être rien qui soit aussi contrarié aux « sciences » mathématiques que les « sciences » naturelles. Et dans la morale je distinguerais peut-être une civique qui aurait mes préférences. Le bergsonisme n’est point une géographie, c’est une géologie. Il ne s’agit point que la Bretagne soit la Provence et que la reine Anne soit le roi René. Il s’agit que la Lorraine soit bien la Lorraine et que l’Île-de-France soit encore plus l’Île-de- France et soit bien le cœur et la tête. Le bergsonisme n’est aucunement une philosophie de métathèse et de métonymie. Ou pour parler un langage platonicien et anteplatonicien, il ne s’agit pas que l’un soit l’autre. Il s’agit d’approfondir l’un, et d’approfondir l’autre. Le bergsonisme ne fait pas des cartes compartimentées. De même que les révolutions de l’anatomie et de la physiologie dans les sciences naturelles n’ont point consisté à opposer le règne animal au règne végétal ou réciproquement mais à poursuivre parallèlement dans les deux règnes une certaine resituation de la pensée en face de deux réalités parallèles, ainsi la révolution de la philosophie bergsonienne n’a point consisté à opposer ni à déplacer les royaumes de la pensée ni de l’être. Elle a consisté à poursuivre parallèlement dans tous les royaumes, dans tous les ordres, dans toutes les disciplines une certaine resituation de la pensée en face de 18/11/22 18:52 Charles Péguy - Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne - Presses universitaires de Liège Página 4 de 44 https://books.openedition.org/pulg/7203?lang=es 11 12 ces réalités parallèles. Il ne faut donc pas dire que le bergsonisme soit une philosophie pathétique ni une philosophie du pathétique ni qu’elle oppose le pathétique ou le pathétisme au logique, ou au mathématique, ou au scientifique, ou au rationnel, ou à la sagesse, ni qu’elle essaie ni qu’elle se propose de substituer le pathétique à tout cela. C’est à l’intérieur même du pathétique qu’elle opère, comme c’est parallèlement à l’intérieur du logique ou du mathématique. Car il y a un intellectualisme du pathétique comme il y a un intellectualisme du logique, ou du mathématique, ou de tous les autres. Et, partout, c’est le même. Il faut renoncer à cette idée que le pathétique forme un royaume inférieur. Il est comme les autres, il est comme dans Molière, il est inférieur quand il est inférieur, et il n’est pas inférieur quand il n’est pas inférieur. Il ne fait pas exception à ces règles générales de niveau. Il n’est point inférieur en lui- même, parce qu’il est le pathétique. Il est inférieur quand il est de mauvaise, de basse qualité. Quand il est du bas pathétique. Il n’est pas inférieur quand il n’est pas de basse qualité. On ne me fera jamais dire que le comique est un genre inférieur. Quant au tragique j’avoue que je ne vois rien d’humain qui soit supérieur au pathétique de Sophocle et que pour un demi-chœur d’Antigone je donnerais les trois Critiques précédées d’un demi-quarteron de Prolégomènes. Et par là je ne veux pas dire seulement, ce qui est entendu, que je les donnerais en beauté, sub specie pulchri, mais que je ne les donnerais pas moins en vérité, en réalité, sub specie rei ac realitatis. Et qu’il y a dans ce pathétique infiniment plus et autrement que dans cette critique une connaissance, un approfondissement de la nature, de la réalité de l’homme et de la fatalité. 18/11/22 18:52 Charles Péguy - Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne - Presses universitaires de Liège Página 5 de 44 https://books.openedition.org/pulg/7203?lang=es 13 14 15 Il faut renoncer à cette idée que la passion soit trouble (ou obscure) et que la raison soit claire, que la passion soit confuse et que la raison soit distincte. Nous connaissons tous des passions, qui sont claires comme des fontaines et des raisons au contraire qui courent toujours après les encombrements de leurs trains de bagages. On ne peut même pas dire que la passion est riche et que la raison et que la sagesse est pauvre, car il y a des passions qui sont plates comme des billards et il y a des sagesses et il y a des raisons qui sont pleines et mûres et lourdes comme des grappes. Il faudrait renoncer une fois pour toutes à cette idée de constituer une fois pour toutes des hiérarchies où ce seraient les différents ordres, les différents royaumes qui seraient non seulement échelonnés mais fixés dans leur échelonnement. Cette solution est une solution de paresse, cette fixation est une fixation de paresse. C’est à l’intérieur des différents ordres, des différents royaumes qu’il faut chercher, qu’il faut poursuivre, qu’il faut reconnaître des hiérarchies, des subordinations, des coordinations parallèles. De valeur, de mérite, de clair, de trouble, de distinction, de profondeur. Des hiérarchies parallèles, comparables, correspondantes, et sans doute communicantes. Ici encore les uns et les autres se trompent, ou plutôt les uns et les autres abusent. Mais de la même erreur et du même abusement. Au lieu de convenir qu’il y a des passions profondes et des passions superficielles les romanciers veulent que ce soit la passion, comme telle, qui soit elle- même, en son essence, profonde. Ils veulent qu’elle n’ait qu’à se montrer, à être la passion, pour être profonde. Parce qu’ils veulent qu’eux-mêmes n’aient qu’à se montrer, à traiter et même à parler de la passion pour être des profonds et des mystérieux. Et par contre et encontre les antiromanciers, les 18/11/22 18:52 Charles Péguy - Note sur M. Bergson et la philosophie bergsonienne - Presses universitaires de Liège Página 6 de 44 https://books.openedition.org/pulg/7203?lang=es 16 17 18 19 20 critiques veulent que ce soit la critique, comme telle, qui soit, elle-même, en son essence, claire. Ils veulent qu’elle n’ait qu’à se montrer, à être la critique, pour être claire. Parce qu’ils veulent qu’eux-mêmes n’aient qu’à se montrer, à traiter et même à parler de critique pour être des clairs et des illuminateurs. Mais moi qui n’ai aucun système et qui à cause de cela ne ferai aucune fortune, (je dis même intellectuelle), je suis forcé d’avouer que je vois des critiques fort uploads/Philosophie/ charles-peguy-note-sur-m-bergson-et-la-philosophie-bergsonienne-presses-universitaires-de-liege.pdf

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