1 Cours n°2 Qu’est-ce que la sociolinguistique ? Introduction : Initialement dé
1 Cours n°2 Qu’est-ce que la sociolinguistique ? Introduction : Initialement décrite comme une des branches de la linguistique externe par le fait qu’elle serait une sorte de rencontre entre une théorie linguistique et une théorisation sociale, voire sociologique du fait linguistique, elle tend à devenir – au moins dans les pratiques de recherches – une discipline autonome et distincte de la linguistique parce que son objet de recherche n’est plus le même. En effet, même si le terme langue est commun aux deux disciplines, pour la seconde, langue renvoie à un objet tendanciellement homogène (sans exclure les variations… du système), pré- existant à ses usages, posé comme un outil de communication bref à un système dont il convient surtout de faire la description, quand pour la première, langue renvoie à un objet nécessairement hétérogène, nécessairement produit des usages sociaux, plurinormé, engageant fondamentalement la construction des identités, la socialisation, le rapport au monde, bref un objet complexe qu’il importe bien entendu de décrire mais en lien avec la recherche d’une intelligibilité sociale tant de la description elle-même que des rapports entre les phénomènes langagiers et les phénomènes sociaux. Définir la langue d’un point de vue sociolinguistique Suivant une tradition scientifique bien établie en linguistique interne (contestée par la sociolinguistique), ne peuvent prétendre au statut de langue que des systèmes linguistiques tendanciellement homogènes. Le terme langue renvoie d’un point de vue sociolinguistique à ce que Philippe Blanchet (1998 : 50) définit comme un réseau minimal (du point de vue linguistique) de variétés (en quelque sorte un système de systèmes) identifié par un même terme et une conscience linguistique spécifiques. Autrement dit, des individus et/ou groupes d’individus décident, selon une dynamique sociale qui peut être fort diverse, de survaloriser des traits de proximité entre variétés (et non plus de faire l’inverse) pour construire la conscience d’une intelligibilité suffisante pour activer les discours métalinguistiques permettant son amplification et le sentiment d’une unité identifiante ; qu’ils proposent ou choisissent de dénommer ce processus, alors implicite, pour le distinguer des autres processus d’identification, fait de ce processus une langue. Dit autrement (Bulot, 2004), une langue est ainsi non seulement une pratique discursive (une pratique du discours) mais encore des pratiques discursives sur ce discours (un discours sur la pratique) ; cela implique d’avoir des outils de description et d’interprétation qui appartiennent à ces deux niveaux et, qui plus est, procèdent de l’un et l’autre. Cela signifie que le concept de langue renvoie en l’état à une production tierce, c’est-à-dire : 1. nécessairement sociale : une langue n’existe que parce que les locuteurs intériorisent son existence via des/leurs pratiques linguistiques tant représentées qu’effectives ; effectivement, deux systèmes linguistiques identiques sont des langues différentes si leurs locuteurs respectifs les construisent ainsi. Le concept même de « frontière linguistique » n’échappe pas à cette détermination (Bavoux 2003 : 25) : les langues sont construites distinctes pour assurer, en toute hétéronomie, la part identitaire de chaque communauté sociale qui à la fois se l’approprie et la produit (Bulot, 2004), UNIVERSITE HASSIBA BENBOU ALI –CHLEF- DEPARTEMENT DE FRANÇAIS Module : Sociolinguistique Enseignante : Melle. MEDANE Niveau : 3éme année LMD 2012-2013 2 2. diverse et hétérogène : son usage varie localement, socialement, selon les types d’interaction, le sexe des interlocuteurs, les genres de discours, etc. 3. constituée par et pour un système d’interactions entre des locuteurs sur une aire territorialisée, c’est- à-dire un espace de légitimité sociale que les mêmes locuteurs construisent comme étant celui d’une légitimité d’usage linguistique. Qu’est ce que donc la sociolinguistique ? Définir la sociolinguistique n’est pas une tâche véritablement aisée dans la mesure où si ce que l’on appelle la linguistique est relativement consensuel ou pour le moins socialement identifié, ce que les chercheur-es nomment telle renvoie à des pratiques de recherche, des positionnements théoriques, des rapports aux idéologies, à l’intervention, à l’éthique qui diffèrent. Non seulement parce que chaque communauté linguistique a ses propres questionnements, mais encore parce que si on ne se cantonne qu’à la seule dimension francophone, la diversité des approches peut laisser croire à une dilution du champ. Dans les faits, la sociolinguistique francophone est plus récente encore dans la mesure où elle constitue une critique radicale (Marcellesi, 2003) mais en même temps constructive et active des premiers moments et des limites de la linguistique. L’une des façons de formuler la distinction entre linguistique et sociolinguistique est d'opposer deux formulations : le linguistique qui observe et décrit la langue , se pose essentiellement la question de savoir comment ça marche, tandis que le sociolinguiste, tout en se posant cette question (ce qui signifie qu’être sociolinguiste implique des compétences quant aux outils descriptifs des formes) doit compléter son questionnement; pourquoi ça marche comme cela (qui implique qu’être sociolinguiste suppose des connaissances théoriques et méthodologiques en plus et hors du seul champ linguistique) ". Dans l’état actuel, la sociolinguistique est admise comme une discipline où l’on admet le travail pluridisciplinaire (ethnologie, anthropologie, psychologie, philosophie, histoire, géographie, linguistique). Son objet d’étude est orienté vers l’étude des rapports langue / société vis-vers ça. A ce titre beaucoup de question surgissent, ce qui pousse lentement la sociolinguistique à étudier le rituel ethnique et son rapport avec le linguistique ou encore à étudier la situation sociale des langues tout en essayant de décrire ou d’expliquer ou à faire entrer en jeu des facteurs sociaux tel que la dominante politique ( décision, officialisation), prestige culturel, courant économique, mouvement des populations, démographie ….etc. Mais à un moment donné, le débat sur la délimitation de l’objet d’étude de la sociolinguistique et le choix d’une dénomination exacte a connu une diversité de propositions d’où un désaccord entre plusieurs écoles de pensée. Malgré le désaccord entre les uns et les autres une attitude de compromis a permis de donner fin à cette crise et à admettre la possibilité de regrouper sous le terme sociolinguistique plus d’une douzaine de domaines : standardisation et planification des langues, comportement bilingue et multilingue, stratification sociale du langage, structure de la communication, attitude envers le langage, ethnographie de la communication, pidginisation, créolisation, stylistique, variation linguistique, chargement linguistique en cours, analyse du discours… Quelques définitions de la sociolinguistique : - Meillet, Antoine : "L’état actuel des études de linguistique générales", leçon inaugurale au Collège de France (13 février 1906), repris dans Linguistique historique et linguistique générale, Paris, Champion, 1921 (rééd. 1965, p. 17) : "Du fait que la langue est un fait social il résulte que la linguistique est une science sociale, et le seul élément variable auquel on puisse recourir pour rendre compte du changement linguistique est le changement social." - H. Boyer dans Sociolinguistique. Territoire et objets (Delachaux et Niestlé, 1996) : 3 Il essaye dans l'article introducteur, "Les domaines de la sociolinguistique", pp. 9-34, de préciser comment situer la sociolinguistique par rapport aux disciplines voisines : "En première approximation, il faut reconnaître que le territoire du sociolinguiste au sein de la "linguistique" conçue comme ensemble disciplinaire est un territoire perméable aux ensembles disciplinaires connexes : anthropologie, psychologie, philosophie, ethnologie, sociologie, histoire... Perméable également aux autres linguistiques : sémiotique et linguistique textuelle (qui s’intéressent à l’organisation et à la cohérence des discours), pragmatique linguistique et analyse conversationnelle (attentives à la structure des échanges et aux interactions qui s’y réalisent), psycholinguistique (qui étudie en particulier les mécanismes psychologiques liés à l’appropriation et à l’utilisation du langage), ethnolinguistique (attachée à décrire toute sortes de langues) et dialectologie (qui s’est donné pour tâche de répertorier la variation géolinguistique en fonction des parlers toujours en vigueur ou des substrats de langues actuelles), sans oublier la sociologie du langage, au sens strict du terme. Cette dernière discipline, du reste, chevauche largement l’un des pôles du domaine, celui de la macro-sociolinguistique. Ce pôle peut être défini comme celui de la sociolinguistique des institutions, de la structure sociale, des types de variations, des pratiques linguistiques de groupes. L’autre pôle, celui de la micro-sociolinguistique, concerne davantage les pratiques "à la base", les enjeux circonscrits à telle pratique de communication, à telle interaction entre deux ou plusieurs interlocuteurs." (pp. 9-10). - Labov, William, Sociolinguistique, Ed. de Minuit, 1976 : "[...] notre objet d’étude est la structure et l’évolution du langage au sein du contexte social formé par la communauté linguistique. Les sujets considérés relèvent du domaine ordinairement appelé "linguistique générale" : phonologie, morphologie, syntaxe et sémantique. Les problèmes théoriques que nous soulèverons appartiennent également à cette catégorie, tels la forme des règles linguistiques, leur combinaison en systèmes, la coexistence de plusieurs systèmes et l’évolution dans le temps de ces règles et de ces systèmes. S’il n’était pas nécessaire de marquer le contraste entre ce travail et l’étude du langage hors de tout contexte social, je dirais volontiers qu’il s’agit là tout simplement de linguistique." (p. 258) Conclusion Au final, l’une des façons rapides et commodes de définir la sociolinguistique est de dire qu’elle étudie la co-variance entre langue et société. Autrement dit, on cherche à comprendre les rapports dialectiques qui existent entre le changement linguistique (ce que l’on appelle les langues mais plus encore tout uploads/Philosophie/ cours-de-sociolinguistque-n2-1.pdf
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- Publié le Oct 17, 2021
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