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See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.net/publication/280098267 Algèbre et logique symboliques: arbitraire du signe et langage formel Chapter · January 2014 CITATIONS 12 READS 1,063 2 authors: Amirouche Moktefi Tallinn University of Technology 88 PUBLICATIONS 358 CITATIONS SEE PROFILE Marie-José Durand-Richard Université de Paris 27 PUBLICATIONS 41 CITATIONS SEE PROFILE All content following this page was uploaded by Amirouche Moktefi on 27 January 2017. The user has requested enhancement of the downloaded file. 1 This is the final draft before editing of: M.-J. Durand-Richard & A. Moktefi, 2014, “Algèbre et logique symboliques: arbitraire du signe et langage formel”, in J.-Y. Béziau (ed.), La Pointure du Symbole, Paris: Pétra, pp. 295-328 For an off-print of the published version, please contact me at: amirouche.moktefi@ttu.ee Algèbre et Logique Symboliques : Arbitraire du Signe et Langage Formel Marie-José Durand-Richard SPHERE, UMR 7219 CNRS-Université Denis Diderot Paris 7 & Amirouche Moktefi IRIST, Université de Strasbourg ; Archives H. Poincaré, Nancy-Université Depuis Ferdinand de Saussure (1857-1913), la question de l’arbitraire du signe est considérée comme une articulation majeure de la pensée linguistique. Et la sectorisation disciplinaire propre au 20ème siècle tend à l’y cantonner. Elle s’est pourtant explicitement posée dans le domaine scientifique au cours de différentes tentatives de formalisation, à commencer par celle des mathématiques, d’abord au 16ème siècle lorsque s’installe la symbolisation de l’algèbre, et surtout au 19ème siècle lorsque l’algèbre commence à concurrencer fortement la géométrie comme science de référence. Certes, les termes en lesquels se pose cette question en mathématiques ne sont pas strictement les mêmes que ceux dans lesquels Saussure l’aborde. En remplaçant les nombres par des lettres, l’algébriste renonce à spécifier une signification à ce qu’il persiste cependant à appeler « symbole ». Et pendant toute la période d’élaboration de l’algèbre, les débats se multiplient sans trancher pour autant quant à la nature et la validité des entités ainsi produites, allant des « quantités moindres que rien » – les négatives – aux quantités « sophistiques » de Rafael Bombelli (1526-1572) – à savoir les racines carrées des précédentes. Les algébristes anglais de la première moitié du 19ème siècle seront nombreux à soutenir ce renoncement à la signification des nombres et des opérations, au nom d’un arbitraire du signe déjà affirmé par John Locke (1632-1704) dans cette même Angleterre, au nom d’une conception empiriste de la pensée et du langage. D’abord revendiquée haut et fort par des auteurs relativement peu connus comme Charles Babbage (1791-1871) et George Peacock (1791-1858), elle débouche avec George Boole (1815-1864) sur la première tentative d’algébrisation de la logique, conçue comme un « système de signes » représentant les « opérations du langage », et constituant par le fait même un « instrument de raisonnement ». Pour ce courant de pensée, le caractère arbitraire du signe est constitutif du « système » que forme le langage ainsi formalisé, et détermine la subordination de la signification des 2 symboles – alors qualifiée d’ « interprétation » – à des lois opératoires envisagées comme celles des « opérations de l’esprit ». Dans la seconde moitié du 19ème siècle, cette idée d’une subordination systématique de la signification des symboles aux lois abstraites d’un calcul logique ne cessera d’interroger les auteurs concernés par la formalisation de l’algèbre et de la logique. C’est dire que le débat sur les fondements des mathématiques et de la logique se trouve engagé bien avant l’explicitation des paradoxes de la théorie des ensembles au tournant du 20ème siècle et les travaux de Georg Cantor (1845-1918), Gottlob Frege (1848-1925) et Bertrand Russell (1872-1970) auxquels ce débat est traditionnellement associé. La question de la signification du symbolisme en mathématiques et en logique demeure, quant à elle, un problème ouvert, et qui renchérit sur celle plus générale de la signification d’une recherche scientifique de plus en plus fondée sur des modes de formalisation calculatoire. Pourquoi et comment fonder l’algèbre comme science ? Si les mathématiques interviennent aujourd’hui massivement sous la forme opératoire d’un calcul algébrique, il importe de rappeler ici à grands traits les jalons essentiels par lesquels ce calcul s’est imposé comme fondement possible des mathématiques, et des sciences où celles- ci interviennent. Les recherches engagées par les algébristes anglais de la première moitié du 19ème siècle sur la nature du symbolisme algébrique interviennent à un moment précis de cette histoire. Il s’agit donc de préciser le cadre problématique dans lequel elles se situent, afin de saisir les enjeux auxquels est censée répondre l’affirmation de l’arbitraire des symboles algébriques, et l’indépendance des propriétés opératoires à leur égard. L’algèbre, on le sait, émerge dans la civilisation arabo-musulmane comme un corps de méthodes de résolution de problèmes types, exprimées par des équations canoniques, dès le 9ème siècle pour le second degré, avec les travaux d’Al-Khwarizmi (vers 780 - vers 850), et dès le 12ème siècle pour le troisième degré, avec les travaux d’Al-Khayyam (vers 1048 - vers 1131). Comme la géométrie grecque avant elle, cette algèbre s’exprime totalement dans le langage. En dehors de l’écriture des nombres, elle est dépourvue de toute expression symbolique. Associée à la dénomination de l’ « inconnue » ou « racine », l’énonciation algorithmique de ces procédures canoniques fonde cependant une remarquable méthode d’analyse pour des problèmes de toute nature, qui ont longtemps fait écran au remarquable travail de mathématisation de ces travaux aux yeux des historiens des mathématiques. La symbolisation de cette algèbre se produit localement au 16ème siècle, à partir des places européennes économiquement les plus dynamiques, essentiellement en Italie et en Hollande, avant que La Géométrie (1637) de René Descartes (1596-1650) ne propose une unification des notations qui s’imposera. Il n’empêche, comme l’indique bien d’ailleurs le titre de cet ouvrage de Descartes, que cette algèbre reste une méthode d’analyse, qualifiée d’« analyse algébrique », au service de la géométrie. Depuis les Eléments d’Euclide (3ème siècle avant J.- C.), celle-ci est en effet reconnue comme la science mathématique par excellence, en raison de la rigueur logique de son mode d’exposition théorique, où les théorèmes sont systématiquement déduits des définitions, axiomes et théorèmes. Face à la rigueur de cet édifice géométrique, les algébristes osent manipuler des entités nouvelles, qui restent d’autant plus suspectes qu’elles contreviennent aux définitions et aux propriétés usuelles de l’arithmétique : les quantités « moindres que rien » et « impossibles » déjà indiquées, mais aussi les « quantités infiniment petites », auxquelles se réfère le calcul 3 infinitésimal, né au 17ème siècle des travaux d’Isaac Newton (1642-1727) et de Gottfried W. Leibniz (1646-1716), et qui permet à la nouvelle physique de se développer comme théorie du mouvement depuis les Principes Mathématiques de la Philosophie Naturelle (1687) de Newton. Pour des raisons trop complexes pour être développer ici sans sortir du cadre de cet article, les mathématiciens anglais du 18ème siècle sont restés fidèles à la notation newtonienne, fluxionnaire, tandis que le « Continent » déployait l’efficacité de la notation leibnizienne, différentielle1. Au tournant du 19ème siècle, la publication des premiers volumes du Traité de Mécanique Céleste de Pierre-Simon de Laplace (1749-1827), qui approfondit substantiellement la théorie newtonienne par le biais de la notation différentielle, persuade un groupe d’étudiants, réunis autour de Babbage à Cambridge, de l’urgence absolue d’impulser une réforme globale du curriculum. Pour cette jeune génération, il s’agit d’ailleurs tout à la fois de faire accéder les mathématiciens anglais au niveau de compétitivité des mathématiciens continentaux – français en l’occurrence –, et d’adapter l’université anglicane aux valeurs nouvelles issues de la Révolution Industrielle anglaise. Face à la critique des universités traditionnelles, menée par le courant utilitariste, l’opérativité de l’algèbre est alors bien plus signifiante que la rigueur déductive de la géométrie. Il n’empêche qu’imposer l’algèbre en lieu et place de la géométrie en tant que propédeutique à l’université de Cambridge, comme l’ambitionne explicitement Peacock, suppose d’établir son statut de science, un statut qui lui fait alors défaut, aussi bien sur le plan sociologique qu’épistémologique. Née de pratiques opératoires souvent développées hors des lieux officiels de savoir – universités et académies –, elle ne cesse d’introduire des entités dont l’existence même contredit les propriétés usuelles des opérations de l’arithmétique, pour lesquelles des calculs comme (3 – 7) ou –1 sont tout à fait insensés, au sens propre du terme. Et elle le fait par le biais de modes de pensée, comme l’analogie ou l’induction, tout à fait absents de l’édifice euclidien, et exclus du champ de la rigueur déductive. La conception symbolique mise en place par les jeunes algébristes de Cambridge au début du 19ème siècle tente précisément de répondre à ces contraintes. Algèbre symbolique et arbitraire du signe En dehors du cercle restreint des historiens des mathématiques, cette première approche des processus opératoires est aujourd’hui oubliée, du fait qu’elle n’a pas directement débouché sur des résultats directement tangibles, sur quelque théorème de Babbage ou de Peacock. Les historiens ne leur associent pas les résultats de Boole ou d’Augustus de Morgan (1806-1871) en logique. Babbage est reconnu comme inventeur d’une « machine analytique » aujourd’hui perçue comme « ancêtre de l’ordinateur » sans que uploads/Philosophie/ durand-richardmoktefi-2014-algebreetlogiquesymboliques.pdf
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- Publié le Mar 08, 2021
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