Chapitre III_______Enjeux, finalités et perspectives philosophiques Introductio
Chapitre III_______Enjeux, finalités et perspectives philosophiques Introduction La comparaison entre la philosophie et la science aboutit souvent au rejet de la philosophie perçue comme une discipline inutile, une réflexion vide et une spéculation qui n’aboutit à rien. Cette image qu’on a souvent de la philosophie est fausse, et la preuve nous sera donnée lorsque nous répondrons à la question « pourquoi philosopher ? ». Pour terminer, nous verrons si la philosophie est utile ou inutile dans un monde qui subit de plus en plus l’impérialisme de la science ? I- Les pensées de la philosophie (ou pourquoi philosopher ?) On peut philosopher pour avoir l’esprit critique, rechercher la vérité, atteindre le bonheur, pour bien se conduire, bien vivre etc. Avoir l’esprit critique, c’est avoir la capacité de tout soumettre à une analyse rigoureuse avant de croire à quoi que ce soit. La critique est la fonction principale de la philosophie comme le dit Vladimir Jankélévitch : « la fonction de la philosophie c’est de critiquer, son destin c’est d’être critiquée ». La critique fait donc partie de la philosophie, elle n’épargne aucune forme de connaissance, que ça soit la religion, la philosophie, les croyances et traditions sociales etc. Tout doit être soumis à une analyse critique, c’est pourquoi Marcien Towa affirme que « toute pensée aussi vénérable soit-elle ne peut être admise sans être passée au crible de la pensée critique ». D’autre part, pour accéder à la vérité, l’esprit doit se débarrasser des préjugés. Le préjugé est une vérité établie sans analyse, et il revient à la philosophie de nous débarrasser des préjugés qui nous empêchent d’accéder à la vérité. La philosophie a également pour fonction d’éclairer notre vie. D’ailleurs, Descartes lui assigne la mission d’éclairer et de réguler la vie. Il écrit : « C’est proprement avoir les yeux fermés, sans tâcher jamais de les ouvrir que de vivre sans philosopher (…) ». Il ajoute que la philosophie « est plus nécessaire pour régler nos mœurs et nous conduire en cette vie, que n’est l’usage de nos yeux pour guider nos pas ». Préface aux principes de la philosophie. Descartes dégage ici l’importance de la philosophie, car elle permet à l’homme d’avoir une bonne conduite et une vie bien réglée. Enfin, à la question « pourquoi philosopher », on peut dire que c’est pour rendre l’homme sage. A ce propos, Socrate affirmait que « la philosophie ne consiste pas tant dans la connaissance d’une multitude de choses qu’à rendre l’homme tempérant (vertueux) », et il ajoute : « La philosophie ne vaut que lorsqu’elle est vécue ». Aux yeux de Socrate, la philosophie est un art de vivre. En d’autres termes, la philosophie ne se dit pas simplement, elle se vit aussi. C’est ce que les stoïciens et les épicuriens ont enseigné. Pour eux, il faut vivre la philosophie pour atteindre le bonheur ou l’ataraxie. Epicure le dit clairement : « Celui qui 1 prétendrait que l’heure de philosopher n’est pas encore venue ou qu’elle est déjà passée, ressemblerait à celui qui dirait que l’heure n’est pas encore arrivée d’être heureux ou qu’elle est déjà passée ». Leibniz s’inscrit dans cette même lancée en s’interrogeant ainsi : « A quoi sert-il de philosopher, si la philosophie ne me permet pas d’être heureux ? ». Mais il y a lieu de se demander pourquoi l’homme en général et le philosophe en particulier recherchent le bonheur. Deux raisons peuvent être avancées pour répondre à cette question. La première, c’est qu’il existe chez tout homme une aspiration à la paix profonde de l’âme et du corps. La deuxième raison tient du fait que le monde dans lequel nous vivons pose problème. C’est surtout quand il y a un manque profond, un déchirement ou un désespoir que l’homme sent et exprime le besoin d’autre chose. En effet, c’est lorsque les repères sont perdus ou que le trouble s’installe chez l’individu ou dans la société que naît véritablement le besoin de philosopher pour rechercher le bonheur. Texte : Pourquoi philosopher ? La philosophie naît (…) d’une conscience angoissée, d’une conscience sommée de s’adapter à un univers devenu étranger, inhabituel, un univers dont le silence, parce qu’il nous laisse démunis, inquiète et trouble. La philosophie naît des situations troubles. S’il y a donc un besoin de philosophie, c’est qu’il y a un manque dans la réalité, de l’irréalité dans la réalité, de l’inhumain dans l’humain. La philosophie vient de ce qu’il y a un désir d’autre chose, d’une autre organisation de la société, et de ce que ce désir ne peut s’affranchir des vieilles formes sociales. C’est à partir du manque que nous discernons dans le réel que nous philosophons comme pour résoudre, supprimer l’insatisfaction née de la prise de conscience de ce manque ou de cette absence. La philosophie n’est pas, ne saurait être cette spéculation brumeuse détachée de la réalité et des problèmes concrets des hommes, concrets dans les situations elles-mêmes concrètes… L’initiative philosophique est in détachable des préoccupations pratiques. Et l’initiative philosophique ne saurait être qu’une intention créatrice de grande envergure à l’échelle des sociétés humaines. Ebénezer Njoh Mouelle, Jalons, Ed. Clé, 1970 Sujet La philosophie promet-elle le bonheur ? La réflexion philosophique nous détache-t-elle du monde ? Suffit-il de prendre la vie avec philosophie pour philosopher ? La philosophie n’est pas seulement une réflexion libre, elle est aussi une « discipline de libération ». Qu’en pensez-vous ? 2 III- La philosophie aujourd'hui Il s’agit de se demander si la philosophie joue encore un rôle ou si elle a toujours sa place dans la société. Inévitablement, il se pose la question de son utilité pratique, car l’incertitude de ses résultats l’empêche de prétendre à une science exacte. L’absence de progrès dans le domaine de la philosophie nous amène à nous interroger sur l’utilité de cette discipline. La philosophie semble, par ailleurs, inutile si l’on sait que les domaines qui lui étaient traditionnellement réservés sont désormais investis par diverses sciences telles que la linguistique, la sociologie et la psychologie. Malgré cela, la philosophie demeure présente. Comment et où elle est présente ? Dans le passé, la philosophie a occupé tout le champ de la connaissance au point qu’Aristote a pu la définir comme la connaissance de la totalité dans la mesure du possible. Ainsi, jusqu’au 17ème siècle, les diverses sciences étaient partie intégrante de la philosophie. Mais lorsque celles-ci se sont détachées de la philosophie et ont commencé à produire des résultats observables, il commença alors à exister une sorte de compétition entre la philosophie et les sciences. Nonobstant cette compétition, la philosophie est demeurée présente, en témoigne l’influence des philosophes des 18ème, 19ème et 20ème siècles. C’est pourquoi, en dépit du reproche qui lui a été fait de ne pas aboutir à des résultats concrets lorsqu’on la compare avec la science, la philosophie demeure actuelle. D’abord, la philosophie occupe une place importante dans la politique, car elle réfléchit sur les projets de société et les idées qui gouvernent le monde. La preuve, combien de chefs d’Etat sont-ils à s’inspirer du marxisme ou du machiavélisme ? Ensuite, le développement des sciences engage la philosophie dans une réflexion sur les méthodes, la portée et les finalités de l’activité scientifique. Nous avons alors affaire à la philosophie des sciences ou épistémologie. La philosophie réfléchit sur les enjeux de la science, car le savant n’est pas toujours le mieux placé pour percevoir toutes les implications de ses découvertes ou de ses recherches. La tâche de la philosophie est donc importante parce que réfléchissant sur les conséquences des découvertes scientifiques. Les changements ou les bouleversements que la science produit dans la société et dans l’humanité invite l’homme à s’adapter vite, à trouver ses repères mais aussi à se prémunir contre les dangers qui peuvent menacer la vie ou simplement l’environnement. Les questions éthiques se posent à l’homme parce qu’elles s’imposent. Doit-on laisser la science sans contrôle ni surveillance ? Doit-on la laisser mener des recherches dont les résultats peuvent menacer l’existence de l’humanité ? Doit-on, au nom de la liberté, permettre à l’homme de modifier l’ordre de la création (manipulations génétiques) ? Ce sont là quelques questions qui interpellent le philosophe et qui fondent la réflexion épistémologique et éthique. Voilà pourquoi beaucoup de philosophes ont réfléchi sur les dangers de la science. Réfléchissant sur les dangers liés à la science, Edgar Morin et Paul Langevin considèrent que la science doit être enchaînée comme ce fut le cas autrefois de 3 Prométhée pour avoir donné le feu aux hommes. En analysant les faits et méfaits de la techno-science, Roger Garaudy a soutenu que les sciences et les techniques nous ont certes permis de lutter contre des maladies comme la peste et le paludisme et de sauver des millions de personnes. Mais en même temps, les sciences et les techniques ont permis la destruction de plusieurs milliers de personnes comme ce fut le cas en 1939 à Hiroshima avec la bombe atomique ? Luc Ferry, quant à lui, a axé sa réflexion sur l’idée de progrès scientifique. Il uploads/Philosophie/ enjeux-perspectices-et-finalites-de-la-cfie.pdf
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- Publié le Sep 15, 2021
- Catégorie Philosophy / Philo...
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