Giuseppe Bianco (éd.), La signification du concret. Psychologie, philosophie et

Giuseppe Bianco (éd.), La signification du concret. Psychologie, philosophie et politique chez Georges Politzer 1 Giuseppe Bianco (éd.), La signification du concret. Psychologie, philosophie et politique chez Georges Politzer Giuseppe Bianco (éd.), La signification du concret. Psychologie, philosophie et politique chez Georges Politzer 2 Giuseppe Bianco (éd.), La signification du concret. Psychologie, philosophie et politique chez Georges Politzer 3 Introduction 4 1. Critique et discours universitaire 4 2. Une science sans « Je » 7 3. Erreurs géniales 9 4. Oblitération par incorporation 13 5. Le culte de la personnalité 17 6. Georges Politzer, « lui-même » ? 20 Politzer, Kant et la critique 23 1. Le début de la fin 23 2. Philosophie et psychologie 25 3. Anthropologie 27 4. Le « double Je » 30 5. L’intériorité impossible 35 6. Les conditions d’une réforme 36 7. L’abstraction du concret 40 Le concept de drame dans l’œuvre de Georges Politzer 42 1. Un concept et ses bords 42 2. L’homme « concret » et l’action 43 3. Le théâtre psychanalytique 46 4. De la théorie à la pratique 49 5. Raison et liberté 52 Le défi de Politzer 56 1. Vie 56 2. Le réalisme de Bergson 56 3. Politzer et ses lecteurs 58 4. Critique et politique 61 Sartre et la critique des fondements de la psychologie 63 1. Une inspiration commune 63 2. Existence humaine 66 3. Divergence : psychanalyse 70 4. Phénoménologie 73 5. Conclusion 75 Une introduction à la Critique des fondements de la psychologie 77 Introduction 77 1. Psychologie subjective et psychologie objective 77 2. Trois courants critiques 81 3. Psychanalyse 84 Première partie 85 1. Le fait psychologique 85 2. Le second récit 89 Deuxième partie 94 1. L’inconscient 95 2. L’antériorité de la pensée conventionnelle 98 Troisième partie 103 1. De la psychologie à la psychanalyse 104 2. Révolution copérnicienne 104 3. Deux exemples 105 Georges Politzer (1903-1942) 111 Bibliographie et sources 117 Les auteurs 124 Giuseppe Bianco (éd.), La signification du concret. Psychologie, philosophie et politique chez Georges Politzer 4 Introduction 90 ans de psychologie concrète (1925-2015) Giuseppe Bianco 1. Critique et discours universitaire De manière inattendue, le 21 janvier 1970, au cours du séminaire L’Envers de la psychanalyse, Jacques Lacan évoque l’« étrangeté significative » d’un livre, la Critique des fondements de la psychologie, de Georges Politzer, mort vingt-huit ans auparavant. Invitant ses auditeurs à le lire1, Lacan critique les modalités de sa réédition, en 1967, par les Presses Universitaires de France, dans la collection « À la pensée », dirigée par Philippe Garcin2. La réédition en livre de poche de « ce petit ouvrage » anticonformiste3, par un éditeur universitaire, avait été effectuée, rétorque Lacan, sans « que l’auteur [l’]eût lui- même approuvé[e] […] alors que chacun sait le drame qu’a été pour lui l’accablement des fleurs sous lequel a été couvert ce qui d’abord se pose comme cri de révolte4 ». Originairement publié en 1928 par Le Rieder dans la collection « Esprit » dirigée par le jeune poète et philosophe Paul Morhange, ce « petit livre » avait été, pendant quarante ans, presque introuvable, tant que après la Libération les normaliens marxistes se disputaient la seule copie disponible5. En 1967 réapparaît aussi La Fin d’une parade philosophique : le bergsonisme. Publié sous le nom de François Arouet chez le petit éditeur Les Revues en 1929, et ensuite republié en 1947 par les Éditions Sociales sous une version mutilée6, le livre est repris par Jean-François Revel dans la collection « Libertés » qu’il dirige chez Jean-Jacques Pauvert. Si l’éditeur s’était déjà occupé de la réédition d’œuvres oubliées, proscrites ou considérées comme marginales, le directeur de collection, de sa part, avait déjà exprimée son admiration pour Politzer dans son pamphlet et best-seller Pourquoi des philosophes ?7 La parution des deux livres de Politzer suscite quelques réactions8, et provoque, en 1969, la publication de la presque totalité des autres Ecrits de l’hongrois9 par les Éditions 1 Lacan reprend une invitation faite par Althusser à ces élèves lors d’une conférence de 1964 et à laquelle, peut-être, Lacan avait assisté. Althusser avait dit : « Vous devez le lire, parce que c’est fondamental pour la culture de notre temps ». Louis Althusser, « La place de la psychanalyse dans les sciences humaines », in Psychanalyse et sciences humaines deux conférences (1963-1964), Paris, Librairie générale, 1996, p. 35. 2 Le livre sera réédité en 1974, avant d’être publié, en 1998, dans la collection « Quadrige ». 3 Pour une histoire des philosophes anti-institutionnels en France, cf. J.L. Levent, Les Anes rouges. Généalogie des figures critiques de l’institution philosophique en France, Paris, L’Harmattan, 2003. 4 J. Lacan, Le séminaire, T. XVII : L’envers de la psychanalyse, Paris, Seuil, 1998, p. 72. 5 D. Eribon, Michel Foucault, Paris, Flammarion, 1991, p. 48. 6 G. Politzer, Une mystification philosophique: le bergsonisme, Paris, Editions sociales, 1947. 7 J.-F. Revel, Pourquoi des philosophes?, Paris, Julliard, 1957. Dans ce livre, profondément inspiré par l’écriture pamphlétaire de Politzer, Revel soutient que la philosophie, une fois épuisé son rôle historique qui était celui de donner naissance à la science, s’est réduite à un genre littéraire sans aucun contact avec la réalité. 8 J.-F. Revel, « Le Pascal du matérialisme », L’Express, 15-21 mai 1967. D. Voutsinas, « Psychologie abstraite et psychologie concrète : en relisant Georges Politzer » Bulletin psychologique, 1967, XXI, p. 67- 120 ; J.M., « Georges Politzer, la Critique des fondements de la psychologie », La Nouvelle critique, n. 32, 1967 ; G. Lanteri-Laura, « Nizan et Politzer quarante ans après », Critique, n. 255-256, 1968. Dans une note d’un compte-rendu du livre de Jean Piaget, Biologie et connaissance, publié dans le n. 28 (15 mai 1967) de la Quinzaine littéraire, André Akoun signale la réédition de ce qu’il définit un « texte fondamental » « qui fut révolutionnaire dans la grisaille de son époque » et qui « nous parle encore aujourd’hui ». Cf. aussi J. Florence, « Propos sur les fondements de la psychologie », Revue Philosophique de Louvain, t. 68, n. 100, 1970, p. 483-506. 9 Cf. le compte-rendu publié dans France nouvelle n. 1256 du 3 décembre 1969. Giuseppe Bianco (éd.), La signification du concret. Psychologie, philosophie et politique chez Georges Politzer 5 sociales, alors dirigées par Guy Besse10. La maison d’édition du PCF avait déjà publié, en 1947, un volume intitulé La crise de la psychologie contemporaine, contenant la plupart de ses articles sur la psychologie. L’année de la publication des Ecrits de Politzer, un camarade de Michel Foucault et de Louis Althusser à l’École normale et membre du comité central du Parti communiste, Lucien Sève, publie Marxisme et théorie de la personnalité. Dans ce livre il place la psychologie dans la ligne droite des coordonnées indiquées par Politzer dans la Critique, qu’il cite et loue tout au long de son ouvrage11. Sève, cadre du parti, annonce en outre que la psychanalyse peut être enfin « assimilée sous certaines conditions par le matérialisme historique, c’est-à-dire reprise de façon critique et dans certaines limites12 ». D’une part, le personnage de Politzer – qui, dans les rangs du PCF, n’avait été jusqu’alors mentionné qu’en tant que militant communiste mort héroïquement et en tant que dénonciateur du caractère bourgeois de « l’idéologie » psychanalytique, et dont l’importance, dans le champ psychologique et philosophique, était presque méconnue – remonte à la surface dans toute sa complexité13. D’autre part, les événements de mai 1968 semblent donner une nouvelle actualité aux pages iconoclastes de Politzer qui, se revendiquant des mots d’ordre d’un marxisme encore acerbe, avait vomi la philosophie et la psychologie académiques. Mai 1968 avait été accompagné non seulement par un genre inédit de critique des savoirs et des modalités de leur transmission, mais aussi par l’annonce d’une nouvelle alliance entre Freud et Marx. C’est en ce moment que les textes du « freudo-marxisme » – d’abord ceux de Herbert Marcuse, ensuite ceux de Wilhelm Reich – commencent à se diffuser en France14. Ce mouvement, né pendant la deuxième moitié des années 1920 comme une branche hérétique de l’Ecole de Francfort, soutenait l’existence d’une racine sociale de la névrose et la corrélation entre les troubles de la fonction génitale, le désordre psychique et la condition matérielle des patients. En 1933, le freudo-marxisme est accueilli de manière bienveillante par certains membres du mouvement surréaliste15 qui, à son tour, s’était constitué à partir des influences croisées de Freud et de Marx. Peu plus tard la même année, le freudo-marxisme est enterré par Georges Politzer, alors en position centrale au PCF. Dans un article sulfureux16, où il traitait le freudo-marxisme comme un « masque grossier pour l’attaque contre-révolutionnaire contre le marxisme », l’hongrois faisant écho aux critiques soviétiques et à celles du parti communiste allemand. C’est ainsi que, suite à la critique déflagrante de Politzer, pendant les années 1930, 1940 et 1950, les travaux de Reich et Marcuse restent pratiquement inconnus en France17. C’est seulement après les événements de Budapest que certains marxistes français commencent à se s’intéresser aux courants hétérodoxes uploads/Philosophie/ guiseppe-bianco-2016-la-signification-du-concret.pdf

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