L'Information Grammaticale Mécanismes de la langue en psychomécanique du langag

L'Information Grammaticale Mécanismes de la langue en psychomécanique du langage et étude de la langue au collège Annette Vassant Citer ce document / Cite this document : Vassant Annette. Mécanismes de la langue en psychomécanique du langage et étude de la langue au collège. In: L'Information Grammaticale, N. 126, 2010. pp. 32-36. doi : 10.3406/igram.2010.4104 http://www.persee.fr/doc/igram_0222-9838_2010_num_126_1_4104 Document généré le 06/01/2016 32 L’Information grammaticale n° 126, juin 2010 Annette Vassant Mécanismes de la langue en psychomécanique du langage et Étude de la langue au collège Les lumières de la fin éclairent les ténèbres du commencement Gustave Guillaume Hier, le système de la langue, aujourd’hui, les mécanismes de la langue, les textes officiels 1 pour l’enseignement du français au collège manifestent leur ambition déterminée d’inscrire leurs directives dans le cadre de données théoriques de haute portée. L ’analyse en psychomécanique du langage peut contribuer, nous le verrons, à l’explicitation de certains objectifs assignés à cet enseignement. Ce sera l’occasion, en ce cinquantième anniversaire du départ de G. Guillaume (dorénavant GG) vers des cieux plus cléments que ceux qu’il a connus à la fin de sa vie – ses écrits portent témoignage de sa fatigue et de son amertume d’être l’objet de terrifiantes injustices (GG, 1982, LL5 : 161) 2 – de rendre hommage à l’illustre théoricien, si attachant, si particulièrement enrichis- sant et stimulant. Les Instructions Officielles (IO) pour l’enseignement de la langue en 1979 et en 2009 En 1979, le premier numéro de l’Information Grammaticale accueillait ma contribution « Quelle grammaire enseigner ? » J’y faisais l’éloge des nouvelles IO pour l’enseignement du français au collège et de leurs directives de relier l’étude de la forme et de la fonction avec le sens (IG 1 : 28, c. 3). Mais j’observais aussi que ces IO manifestaient un point de vue trop ambitieux, voire décourageant, par leur objectif de faire de l’étude méthodique du système de la langue le cadre dans lequel ces directives devaient s’inscrire. Le problème n’est-il pas, hier, comme aujourd’hui, de savoir ce que l’on entend par système de la langue ? Les récents Programmes pour le français au collège recom- mandent, pour l’Étude de la langue, grammaire, orthographe, lexique, au chapitre grammaire, un objectif ambitieux encore, et d’une ambiguïté remarquable : enseigner la grammaire au collège, c’est conduire les élèves à comprendre les 1. Nous nous référons à la brochure du CNDP dans la collection Textes de référence, collège, mars 2009. 2. Nous référerons aux ouvrages de GG en indiquant leur année de publi- cation accompagnée de la mention LL pour les Leçons de Linguistique ; de LSL pour Langage et Science du langage ; de PLT pour les Principes de linguistique théorique, 1973 ; de Essai pour l’Essai de mécanique intuitionnelle ; de Prolég I ou II pour les Prolégomènes à la linguistique structurale I et II. mécanismes de la langue, à maîtriser la terminologie qui sert à les identifier et à les analyser, afin de les amener à réutiliser ces connaissances pour mieux s’exprimer à l’écrit comme à l’oral et mieux comprendre les textes lus (nous soulignons). La question est de savoir en quoi consistent ces mécanismes et comment il faut les comprendre. Généralement les IO sont suivies de « compléments » permettant d’en interpréter le sens. Rien de tel encore aujourd’hui. En linguistique guillaumienne ce sont des termes clefs. Aussi, profitant de la publication récente d’inédits nous introduisant à une meilleure compréhension d’analyses guillaumiennes, ce qui conforte certaines des nôtres 3, nous allons tenter de dire ce que ces termes recouvrent qui pourrait aider à les exploiter dans la pratique pédagogique préconisée. La démarche guillaumienne, qui s’inscrit dans le sillage de celle de F . de Saussure, a pour originalité d’en proposer un dépassement, son objectif étant, non seulement de démontrer que la langue est un système, mais de décrypter les raisons d’être de ce système par lesquelles se comprend et s’explique qu’il soit ce qu’il est, un système permettant de transmettre mécaniquement du sens, à travers lexique, morphologie et syntaxe. À partir d’une hypothèse sur la genèse des mots en langue, GG formulera une théorie de la systématique de la langue, ses nombreux sous-systèmes et leurs articulations ; parmi eux, le système des parties du discours, celui du verbe, du nom, et de ce que représentent le système de l’article et des autres déterminants du nom, etc. De fil en aiguille, c’est une explication de cette donnée fondamentale qu’est l’association d’un sujet de nature personnelle (espace) et d’un verbe (temps) pour produire une phrase (GG, 1998, LL15 : 105 sv.), un sens complet, qui nous est livrée. Tout cela nous 3. Nos précédentes publications, celles de 2005, en particulier, ont expli- cité le sens de la démarche guillaumienne en montrant, à la suite de Jean Stéfanini, comment elle s’inscrit dans le mouvement historique qui, depuis Aristote, en passant par les modistes, les grammairiens philosophes des xviie et xviiie siècles, a développé et poursuivi une réflexion sans cesse renouvelée sur la définition des parties du discours. La théorie de l’incidence proposée par G.G. pour rendre compte de la catégorisation des mots en parties du discours a donné lieu à des interprétations contradictoires. Nous avons rendu compte de cela. Nous avons aussi proposé une solution allant dans le sens de la cohérence de la théorie. Mais, soit que nous n’ayons pas été nous-même tout à fait attentive au message guillaumien, soit que la publication récente d’inédits de textes tardifs, par l’apport d’une information nouvelle allant dans le sens de nos hypothèses, nous ait incitée à relire nombre de textes antérieurs pour repérer l’origine de nos hésitations, ce qui nous a confirmée dans notre solution, nous reviendrons sur cette question pour en compléter l’analyse, laissant le soin à nos lecteurs de se reporter à nos études antérieures pour la problématique (cf. bibliographie). L’Information grammaticale n° 126, juin 2010 33 permet de comprendre comment le sens circule à travers le fonctionnement des formes, par la mise en évidence du sens même de ces formes, dans leur relative réciprocité. La tâche accomplie a été immense, tout en demeurant ouverte à réflexion, ce que GG n’a cessé de dire lors de ses tâtonnements déclarés 4. Ces derniers ont concerné, entre autres choses, la définition de la préposition dans le système des parties du discours, l’établissement du système du pronom, la recherche d’une définition appropriée de ce que représente l’article dans l’actualisation du substantif – ce n’est que dans des écrits de 1954 qu’apparaît la notion d’extensité (cf. Vassant, 2007) –, de toute partie de langue ou du discours substantivée etc. Mais les textes de GG, malgré ce qui en a été dit, ne font jamais état d’une contradiction entre la définition du substantif par l’incidence interne virtuelle de langue, dans le cadre d’une théorie du mot, et son aptitude syntaxique ou syntactique (GG, 2003, Prolég I : 196-197) à occuper des fonctions soit de construction directe (toutes celles qu’inclut le « cas synaptique » [GG, 1973 b, LL3 : 225 sv., entre autres]) soit de construction indirecte, prépositionnelle, dans le cadre d’une théorie de la phrase (GG, 1971, LL2 : 141 sv. ; 157 sv. ; 165), une fois réalisée en discours son incidence à l’article 5. Il s’est expliqué plus d’une fois à ce sujet. Son explication est d’une cohérence absolue quand on veut bien le suivre dans son raisonnement. C’est, hélas, ce qui n’a pas eu lieu (cf. note 3). Des doutes étant encore émis sur la distinction entre support virtuel et effectif, entre « incidence morphologique » et « incidence syntaxique » 6 – GG parlerait plutôt d’incidence de langue (d’aptitude syntactique), et d’incidence syntaxique (GG, 1973 b, LL3 : 228) –, nous allons revenir sur cette question qui est au cœur de ce que l’on appelle les mécanismes de la langue. Mais signalons d’abord un problème de terminologie qui se pose à la lecture de GG ou d’autres linguistes contemporains. Problème de terminologie Lorsque, par exemple, GG traite d’énoncés tels que Pierre marche, l’enfant marche en dénommant « substantifs » Pierre et l’enfant (1973 b, LL3 : 67) alors qu’il s’agit de Npr dans un cas, de GN dans l’autre, on est surpris. GG ne ferait-il pas de distinction entre le substantif de langue enfant et son actualisation en discours par l’article sous forme de GN ? entre le Npr Pierre et le substantif qu’il dénomme ailleurs nom commun ou nom, ou groupe nominal, alors que ses analyses font état de ces distinctions ? Cette curiosité m’avait souvent perturbée (pour une synthèse remarquable des études sur 4. Pour un historique de ses avancées théoriques, cf. 2007, Essai I : 295-301. 5. Cf. 1971, LL2 : 151. 6. Sur ce point GG dit : Lorsqu’on parle d’incidence, il faut bien se repré­ senter qu’il s’agit toujours de quelque chose de virtuel. Dans la langue, le mot apporte avec lui, liée à lui, une prévision d’incidence à lui destinée. Cette incidence in posse liée au mot dès la langue est le déterminant majeur de la partie du discours uploads/Philosophie/ igram-0222-9838-2010-num-126-1-4104.pdf

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