La conception stoïcienne du bonheur et du désir Le bonheur paraît alors possibl
La conception stoïcienne du bonheur et du désir Le bonheur paraît alors possible, si on se contente de cette définition-là. C’est ce que nous montre la philosophie stoïcienne, école de l’antiquité grecque (Epictète, Marc-Aurèle). A- Il y a les choses qui dépendent de nous, et celles qui n’en dépendent pas Epictète, Manuel, § 1, ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous 1- Il y a des choses qui dépendent de nous et d'autres qui ne dépendent pas de nous. Ce qui dépend de nous, c'est la croyance, la tendance, le désir, le refus, bref tout ce sur quoi nous pouvons avoir une action. Ce qui ne dépend pas de nous, c'est la santé, la richesse, l'opinion des autres, les honneurs, bref, tout ce qui ne vient pas de notre action. 2- Ce qui dépend de nous est, par sa nature même, soumis à notre libre volonté; nul ne peut nous empêcher de faire ni nous entraver notre action. 5- En conséquence, dès qu'une chose te semble douloureuse, songe à objecter aussitôt : "c'est une idée que je me fais, ce n'est pas du tout en réalité ce que cela paraît être". Ensuite, étudie cette chose, juge là à la lumière des principes que tu t'es donnés, et de celui-ci surtout qui est le premier : est-ce que cela fait partie des choses qui dépendent de nous ou non ? Et si cela fait partie des choses qui ne dépendent pas de nous, qu'il te soit facile de dire : "cela ne me touche pas". 1) Ce qui dépend de nous L’esprit, avec ses représentations, ses désirs, ses pensées, etc., est une sorte de « citadelle intérieure », le domaine dans lequel nous pouvons exercer notre liberté. Mais on aurait tendance à objecter aux stoïciens : ce n’est pas possible ! Les désirs, avons-nous dit, ne dépendent pas de nous… Comment pouvons-nous être à l’origine d’un sentiment, de notre rapport au monde, etc. ? Nous ne décidons pas d’apprécier ou pas le ciel bleu, de voir tout en rose ou tout en noir…. C’est d’ailleurs pour cela qu’il y a des anti-dépresseurs, ces petites pilules du bonheur comme on les appelle souvent ! Alors, pouvons-nous vraiment dire que l’attitude de notre esprit face au monde dépend de nous ? C’est justement ce genre de questions que se sont posée les stoïciens. Mais encore : comment être heureux, si le cours du monde ne dépend pas de nous ? Comment trouver le bonheur, puisque par définition on ne peut être toujours à l’abri des « coups du sort », des infortunes ? On peut perdre un être cher, c’est même quasi inéluctable (sauf si bien entendu on meurt avant mais alors on le perdra tout de même) ; on peut se retrouver à la rue, etc. 2) « Changer ses désirs plutôt que l’ordre du monde » Mais justement, les stoïciens répondent que la seule solution, si l’on ne veut jamais être déçu par ce qui arrive, et donc, avoir toujours l’esprit tranquille, est de travailler sur nos représentations, ie, sur la manière que nous avons d’accueillir les événements, sur les jugements que nous portons sur eux. Sur nos désirs aussi : demandons-nous si nos désirs sont rationnels ou pas, et s’ils ne le sont pas faisons effort sur nous-mêmes pour ne plus les avoir… Un mot d’ordre : « changer ses désirs plutôt que l’ordre du monde » ! La solution est d’accepter les événements tels qu’ils arrivent. La seule chose qui dépende entièrement de nous, ce sont les représentations que nous nous faisons des choses. Les représentations ne sont pas dans les événements eux-mêmes. Elles viennent de moi. L’illusion est de croire que ce qui vient de moi vient de l’événement. Ce ne sont pas les événements qui troublent les hommes, mais les jugements qu’ils portent sur les événements. Par exemple, je tombe malade. En soi, ce n’est ni heureux, ni malheureux. Je ne suis malheureux que si je juge que je ne devrais pas être malade. Il suffit donc de changer ce jugement pour ne plus être malheureux. Donc : pour éviter d’être déçu par ce qui arrive, il suffit de ne rien attendre de ce qui peut arriver. On retrouve l’indifférence par rapport au réel que prônaient les sceptiques grecs. B- Approfondissement de la philosophie stoïcienne : le monde est pour eux un cosmos, un ordre 1) La divinité du monde (le panthéisme) Marc-Aurèle, Pensées, « Dieu est en tout » Toutes choses sont liées entre elles, et d’un nœud sacré ; et il n’y a presque rien qui n’ait des relations. Tous les êtres sont coordonnés ensemble, tous concourent à l’harmonie du même monde. Il n’y a qu’un seul monde, qui comprend tout, un seul Dieu, qui est dans tout, une seule matière, une seule loi, une raison commune à tous les êtres doués d’intelligence, enfin une vérité unique, n’ayant qu’un seul état de perfection pour des êtres de même espèce, et qui participent à la même raison. - Dieu est en tout : il est intimement présent à toutes les parties du monde (y compris à nous-même) ; c’est le panthéisme - Il assure l’unité du monde : tout se tient ; tout est harmonieux ; - il y a un ordre des choses - Dans l’ancien stoïcisme, Dieu était le feu qui circulait en toute chose ; ici, il s’agit d’un Dieu rationnel, qui est raison Donc tout ce qui arrive, arrive selon un ordre nécessaire… et cette nécessité est rationnelle ! 2) Cette nécessité est une nécessité qui s’apparente au destin Diogène Laërce, Vies et opinions des philosophes Toutes choses ont lieu selon le Destin (…) Le destin est une cause des êtres où tout est lié ou bien la raison selon laquelle le monde est dirigé. Cicéron, De la nature des dieux, II, xxx : il est prouvé que les dieux gouvernent le monde Je dis que le monde et toutes ses parties ont été établis dès le principe par la providence des dieux et qu’ils sont toujours gouvernés par elle. 3) Objections Problème : en quoi est-ce encore une liberté que d’adhérer à ce qui arrive sans rien vouloir y changer ? Cf. exemple du chien attaché à une charrette : s’il va dans le même sens que la charrette, il ira plus vite que s’il ne le fait pas ! Le bonheur résidera dans l’apathie puisque le stoïcien voudra au bout du compte la mort des désirs et des passions considérés comme une maladie N’est-ce pas alors un idéal inhumain ? Ce qui est, est, point ! Ce n’est ni bon ni mauvais en soi, certes, mais tout accepter peut mener à accepter l’intolérable uploads/Philosophie/ la-conception-stoicienne-du-bonheur-et-du-desir.pdf
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- Publié le Oct 12, 2022
- Catégorie Philosophy / Philo...
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