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La dispute de Barcelone Éditions Verdier 11220 Lagrasse Retrouver ce titre sur Numilog.com Retrouver ce titre sur Numilog.com Na . hmanide Rabbi Moïse ben Na . hman La dispute de Barcelone suivi du Commentaire sur Ésaïe 52-53 Traduit de l’hébreu par Éric Smilévitch Archives du texte traduites du latin par Luc Ferrier Introduction des traducteurs Verdier/poche Retrouver ce titre sur Numilog.com www.editions-verdier.fr © Éditions Verdier, 1984. isbn : 978-2-86432-540-6 issn : 1952-2134 Retrouver ce titre sur Numilog.com Il est évident que l’homme n’a pas foi en ce dont il n’a pas connaissance. Na . hmanide Retrouver ce titre sur Numilog.com Retrouver ce titre sur Numilog.com Introduction La dispute de Barcelone est l’une des plus célèbres controverses judéo-chrétiennes. Bien qu’elle ne s’étende que sur quatre journées, son retentissement dans le monde juif ainsi qu’au sein de la chrétienté fut considérable, et les réactions qu’elle suscita se déploient en réalité sur plusieurs années : ordonnances royales, procès, bulles pontificales, etc 1. La dispute eut lieu au mois de juillet 1263 et ne s’acheva vraiment qu’avec le départ contraint de rabbi Moïse ben Na . hman pour la Palestine en 1267. Mais les ramifications que ces quatre journées ont développées s’enracinent encore plus profondément dans l’histoire des relations entre juifs et chrétiens. Cette dispute fut en effet l’occasion pour l’Inquisition de lancer ses premières menées concrètes contre la religion juive et ceux qui lui étaient fidèles. La prédication dans les synagogues et les quartiers juifs, la demande réitérée du pape d’interdire aux juifs les fonctions publiques et, surtout, la mise en place d’une censure chrétienne des textes rabbiniques destinée à les expurger de toute mention jugée « blasphématoire » envers Jésus et le christianisme, constituent la trame 1. Les principaux documents latins relatifs aux suites juri­ diques et politiques de la dispute de Barcelone ont été traduits plus loin dans les « Archives du texte ». 9 Retrouver ce titre sur Numilog.com d’une politique que l’Église a menée sur plusieurs siècles et qui s’acheva en Espagne par l’expulsion de 1492. Non qu’il faille imputer à ces quatre journées de controverse la responsabilité d’une telle politique, mais elles illustrent et, en même temps, orientent le tournant que connurent les relations entre juifs et chrétiens au cours du xiiie siècle. De fait, celles-ci ont toujours été de nature polémique, dès l’origine du christianisme – il suffit de lire les Évangiles pour s’en convaincre. Cependant, la forme et surtout l’enjeu de ces polémiques ne sont pas demeurés constants ; ils ont évolué, suivant en cela l’évolution générale de l’attitude chrétienne envers les juifs et leur tradition. Durant le haut Moyen Âge, les discussions et les controverses sont fréquentes. Les débats sur les problèmes théologiques, les questions mutuelles, les joutes oratoires reflètent exactement la situation de concurrence réciproque dans laquelle se trouvent placés judaïsme et christianisme. Il revient à chacun de réfuter le point de vue de l’autre en témoignant de la supériorité du sien. La nature et l’enjeu de ces discussions changent lorsque l’Église s’en­ gage plus avant dans le domaine politique ; là, concur­ rence signifie nécessairement conflit, le rival devient ennemi et la contradiction menace. Concrètement, à partir de la controverse de 1240 à Paris, on ne discute plus, on dispute publiquement à l’ombre de l’Inquisi­ tion : la théologie y sert d’appendice à la politique 1. De 1. Sur la dispute de 1240 à Paris, on lira le petit opuscule de I. Lœb : La Controverse sur le Talmud sous saint Louis, Paris, 1881 (extrait de la Revue des études juives I, II, III) et l’ana­ lyse de J. Katz dans Exclusiveness and Tolerance, Oxford, 1961, p. 106-113. Les faits sont les suivants : en 1239, Nicolas Donin, apostat juif, dénonce le Talmud devant le pape 10 Retrouver ce titre sur Numilog.com ce tournant, les controverses de 1240 à Paris et de 1263 à Barcelone sont l’exact reflet ; c’est à travers elles que, pour la première fois, l’Inquisition intervient dans les relations entre juifs et chrétiens. Elles sont, à la fois, les passives occasions dont se saisit l’Église pour pousser le judaïsme sur le terrain politique – celui du pouvoir royal – et, en même temps, le lieu où se décident les orientations nouvelles du christianisme à l’égard de la tradition juive. Car c’est le résultat pratique – l’effica­ cité – des disputes de 1240 à Paris et de 1263 à Barcelone qui détermine l’attitude chrétienne vis-à-vis de cette tradition, c’est-à-dire vis-à-vis du Talmud qui en est la pièce essentielle. La dispute de Paris à l’époque de saint Louis visait une condamnation du Talmud ; elle s’acheva deux ans plus tard par un autodafé. La dispute de 1263 à Barcelone vise la récupération du Talmud et sa possible utilisation dans la prédication auprès des juifs ; son échec contraint l’Église à y renoncer et à s’en­ gager unilatéralement dans une politique de censure et de condamnation de la tradition juive. C’est dire Grégoire IX. Celui-ci adresse alors une bulle aux évêques et aux rois de France, Angleterre, Castille, etc. pour faire saisir les exemplaires du Talmud et examiner leur contenu. Seule la France, semble-t-il, donna suite à ces recomman­ dations. Une enquête fut organisée à Paris qui s’acheva par une controverse entre Nicolas Donin et quatre rabbins français, dont rabbi Yehiel de Paris. Le Talmud fut condamné et les exemplaires saisis furent brûlés à Paris en 1242. La relation latine de la controverse a été publiée et traduite par I. Lœb (op. cit.) ; la relation hébraïque a été éditée pour la première fois dans les Tela Ignea Satanae de Wagenseil en 1681, on la trouve rééditée dans Otsar Vikou. him de J. D. Eisenstein (New York, 1928 ; rééd. Jérusalem, 1969). 11 Retrouver ce titre sur Numilog.com l’importance de cette dernière dispute, elle témoigne très précisément de la limite à l’intérieur de la tradition rabbinique au-delà de laquelle le christianisme ne peut plus s’avancer : leur frontière mutuelle. Pour saisir les mécanismes de la dispute de Barcelone il faut imaginer une pièce de théâtre d’un genre un peu particulier ; formellement, les disputants s’accordent pour aborder successivement trois thèmes : si le Messie est déjà venu, s’il est homme ou Dieu, qui détient vrai­ ment la Torah 1 ? Chaque personnage a un rôle à jouer : il y a le maître juif, le converti, le roi, les ecclésiastiques (dominicains et franciscains) et une foule bigarrée de juifs et de non-juifs – nobles aragonais, habitants de Barcelone et des faubourgs. Ces personnages dispo­ sent d’un répertoire : le Talmud, et doivent improviser grâce à celui-ci une argumentation susceptible de faire triompher leur cause. Bien entendu le jeu est truqué : le converti – Paul Christiani – a préparé arguments et textes à l’avance et il dispose d’emblée de l’assentiment de la majeure partie du public. Le seul « artiste » en l’occurrence est rabbi Moïse ben Na . hman ; c’est à lui de faire preuve d’une adresse et d’une sûreté suffisantes pour retourner contre son adversaire les conditions défavorables dans lesquelles il a été placé au départ. Mais le jeu s’arrête là ; le maître juif et ses coreligion­ naires savent pertinemment que si la pièce tourne en leur défaveur ils ne remporteront pas que les huées de la foule. Une autre composante, l’Inquisition, qui 1. Le procès-verbal latin ajoute une quatrième question, à savoir si le Messie « a souffert et est mort pour le salut du genre humain ». Cet article n’est que partiellement abordé au cours de la dispute ; voir le commentaire de Na . hmanide sur Ésaïe 52-53 traduit plus loin. 12 Retrouver ce titre sur Numilog.com apparaît dans la personne de Raymond de Pennafort, est là pour leur certifier que, gagnant ou perdant, celle- ci finira mal. Aucun des principaux protagonistes de la dispute n’intervient donc à titre privé ; derrière Na . hmanide, Paul Christiani et Jaime Ier se profilent la communauté juive, l’Église et la monarchie. Personnes singulières, leur situation concrète en regard du groupe ou du corps dont ils sont issus, donne à leur présence à Barcelone une portée au plus haut point « publique ». Les relations tissées entre les protagonistes et les liens qu’eux-mêmes ont noués avec ceux qu’ils représentent confèrent au déroulement de la dispute une valeur exemplaire. Personnage central de la dispute, Na . hmanide est une figure prestigieuse du judaïsme espagnol au xiiie siècle. Son autorité est reconnue non seulement par les juifs mais aussi par Jaime avec lequel il entre­ tient des relations privilégiées 1. Dès 1211, ses écrits le font connaître et il devient rapidement un maître de premier ordre en matière de halakha (juridiction) ; commentateur de renom de la Torah, mais aussi caba­ liste, ses multiples activités font de lui un personnage central dans les communautés juives de la péninsule ibérique. Il est même probablement nommé grand rabbin de Catalogne en 1264, à la mort de Jonas ben Abraham de Gérone. La renommée et l’autorité 1. Ainsi, lorsque en 1232 un différend uploads/Philosophie/ la-dispute-de-barcelone-editions-verdier-11220-lagrasse.pdf

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