BIBLIOTHÈQUE CLASSIQUE DE LA LIBERTÉ Collection dirigée par Alain Laurent DANS
BIBLIOTHÈQUE CLASSIQUE DE LA LIBERTÉ Collection dirigée par Alain Laurent DANS LA M:ËME COLLECTION Benjamin Constant, Commentaire sur l'ouvrage de Filangieri Wilhelm von Humboldt, Essai sur les limites de l'action de l'État Ludwig von Mises, Abrégé de L'Action humaine, traité d'économie Frédéric Bastiat, Sophismes économiques Yves Guyot, La Tyrannie collectiviste Jacques Necker, Réflexions philosophiques sur l'égalité LA LIBERTÉ ET LE DROIT La Bibliothèque classique de la Liberté se propose de publier des textes qui, jusqu'à l'orée de la seconde moitié du xx· siècle, ont fait date dans l'histoire de la philosophie politique en apportant une contribution essentielle à la promotion et l'approfondissement de la liberté individuelle - mais ne sont plus disponibles en librairie ou sont demeurés ignorés du public français. Collection de référence et de combat intellectuels visant entre autres choses à rappeler la réalité et la richesse d'une tradition libérale française, elle accueille aussi des rééditions ou des traductions inédites d'ouvrages d'inspiration conser- vatrice « éclairée », anarchisante, libertarienne ou issus d'une gauche ouverte aux droits de l'individu. Chaque volume de la collection est précédé d'une préface présentant le texte et son auteur, et s'achève sur une chrono- logie bio-bibliographique de l'auteur et un index sélectif. BRUNO LEONI LA LIBERTÉ ET LE DROIT Traduit de l'anglais par Charlotte Philippe Préface de Carlo Lottieri bibliothèque classique de la les belles lettres BRUNO LEONI ET LE « DROIT DE MARCHÉ» À l'intérieur de la philosophie du droit du vingtième siècle, Bruno Leoni est l'auteur qui a interprété le libéra- lisme classique de la manière la plus cohérente et la plus rigoureuse. Pour cette raison, sa présence a tou- jours été très originale et stimulante, authentiquement à contre-courant et capable de mettre en discussion les dogmes les plus établis. Savant polyédrique (juriste et philosophe, mais en même temps passionné de science politique, théorie économique et histoire des idées politiques), Leoni a ouvert au cours des années 50 et 60 la route à plusieurs orientations: du Public Choice à l'Economic Analysis of Law, jusqu'à l'étude interdisciplinaire de ces institu- tions -le droit, par exemple - qui se développent non sur la base de décisions imposées d'en haut, mais plutôt grâce à la capacité de s'auto-générer et d'évoluer du bas. Après sa mort - qui a eu lieu en 1967 dans des cir- constances tragiques - Leoni a été longtemps oublié sur le Vieux Continent, même s'il a continué à inspirer plu- sieurs protagonistes de la pensée libérale américaine. Tout cela n'est pas surprenant si on considère que son individualisme intégral n'est pas du tout en syntonie avec l'Europe contemporaine, mais plutôt avec la tra- 8 LA LIBERTÉ ET LE DROIT dition civile des États-Unis et surtout de ses tendances les plus libertariennes. La Liberté et le Droit et les autres écrits de Leoni sont marqués par une culture anglo- saxonne qu'il arrivait à absorber en profondeur grâce à ses intenses rapports avec les penseurs majeurs de cet univers intellectuel. L'évolution des idées de Bruno Leoni aurait été très différente sans la Mont Pèlerin Society, parce qu'à l'occasion de ces conférences internationales il a eu la chance d'entrer en contact avec des idées et des écoles de pensée très loin d'être bien acceptées par la culture qui dominait l'Italie à cette époque-là. Pendant plu- sieurs décennies, l'association créée par Friedrich A. von Hayek a été un extraordinaire lieu de contacts et d'échanges culturels pour ceux qui cherchaient à réflé- chir sur le libéralisme classique. S'il était resté enfermé dans le débat italien (à l'époque largement dominé par le marxisme, le néopositivisme, l'historicisme néo- hégélien et le solidarisme catholique), Leoni n'aurait jamais pu élaborer ses propres thèses et il n'aurait jamais obtenu l'originalité qui, au contraire, encore aujourd'hui nous pousse à lire ses œuvres et à en tirer beaucoup d'enseignement. En ce sens, il est intéressant de remarquer qu'un nombre de plus en plus important d'auteurs - et d'orientations les plus différentes - perçoit le caractère innovateur de sa pensée, qui, dans le cadre de la philo- sophie du droit, a développé une perspective tout à fait alternative aux modèles kelséniens du normativisme dominant et à l'inspiration socialiste qui continue à marquer les sciences sociales. En particulier, si au cours des deux derniers siècles le droit a été constamment identifié avec la simple volonté des hommes au pouvoir, une des contributions BRUNO LEONI ET LE " DROIT DE MARCHÉ » 9 majeures de Leoni est dans le fait qu'il nous a suggéré une autre manière de regarder les normes, en s'effor- çant de percer ce qu'il y a au-delà de la volonté arbi- traire des politiciens et au-delà d'une législation très souvent condamnée à rester lettre morte. Les réflexions de Leoni sur le droit nous aident aussi à comprendre les extraordinaires potentialités de la tra- dition « autrichienne» des sciences sociales, qui a eu son origine avec Carl Menger et qui a trouvé ensuite dans Ludwig von Mises, Friedrich A. von Hayek et Murray N. Rothbard ses interprètes les plus créatifs. Dans son étude du droit, il utilise l'individualisme méthodologique, les analyses sur la nature évolutive des institutions, la théorie de la valeur subjective et les thèses misesiennes sur le problème du calcul écono- mique ; et son travail démontre que la réflexion sociale tout entière peut tirer d'énormes bénéfices des ensei- gnements fondamentaux de l'école autrichienne. Lecteur attentif des économistes libéraux, et en par- ticulier admirateur de Mises, Leoni est connu surtout parce qu'il a élaboré une théorie du droit qui - contre Hans Kelsen et le positivisme juridique - a réévalué l'ancienne cam mon law anglo-saxonne, instaurant une analogie entre les règles de création jurisprudentielle et l'ordre spontané qui émerge sur le marché grâce aux innombrables accords des entrepreneurs et des consommateurs. Une de ses idées fixes est qu'il y a une syntonie entre marché et droit évolutif, d'un côté, et planification économique et législation, de l'autre. Une surévaluation du droit historique avait été caracté- ristique du Romantisme et, en particulier, de la culture allemande du XIXe siècle. Et pourtant chez Leoni la redé- couverte de certains thèses de Carl von Savigny n'a rien de conservateur ni de communitariste. 10 LA LIBERTÉ ET LE DROIT D'autre part, le droit évolutif est rapproché par Leoni du marché libre, et ce lien entre une économie libre et sans entraves et le droit spontané peut être expliqué, selon le juriste italien, par sa théorie de la « prétention» individuelle (en anglais, individual daim). Dans ses relations sociales, chaque individu avance des prétentions sur le comportement des autres sujets et, par exemple, les individus exigent de n'être pas agres- sés ou menacés. Le sens de sa reconstruction est que la norme qui empêche de faire violence à autrui n'est rien d'autre que le résultat de prétentions (largement diffu- sées) qui ont fini par imposer un certain type de com- portement et donc de prévisions raisonnables. Dans cette théorie, le système légal qui est au centre des analyses des théoriciens, et qui en général est inter- prété à partir d'une perspective « normativiste », doit être rapporté aux actions des particuliers: exactement comme le libre marché. Avec Leoni, en d'autres termes, nous avons une théorie individualiste de l'origine du droit qui adopte toute une série de thèmes de la socio- logie classique (et même du Romantisme juridique), mais à l'intérieur d'un cadre conceptuel qui est défini par les arguments les plus innovateurs des économistes autrichiens du XIXe et du Xxe siècle. L'action par laquelle nous exigeons un certain com- portement de nos interlocuteurs, en effet, rencontre d'autres 1 actions. Et pour Leoni c'est justement cet échange de prétentions qui renforce le droit, le jour où - par exemple - on renonce à agresser autrui en rece- vant la garantie de n'être pas agressés. Ce débat apparemment technique, qui voit Leoni s'opposer au positivisme juridique des normativistes (Kelsen et Hart, en particulier), se base sur une option idéologique très nette. Dans la vision léonienne du BRUNO LEONI ET LE « DROIT DE MARCHÉ» 11 droit, l'opposition au normativisme est étroitement liée à son refus du socialisme, qui est expression d'une mauvaise moralité et de la perverse volonté de mettre la réalité sociale sous le contrôle d'un petit nombre d'individus éclairés. En tant que libérat il s'oppose à l'arbitraire d'une législation artificielle qui, en raison de sa structure for- melle (elle est le simple produit de la volonté des légis- lateurs), est destinée à réduire progressivement les espaces de la liberté individuelle. Et en tant que philo- sophe du droit, il montre également que la certitude assurée par les ordres légaux qui ont leur modèle dans le code est seulement à court terme. Dans une société réglée par la loi écrite, en effet, nous ne connaissons que les normes qu'il faut respecter dans le présent et dans le futur immédiat, parce que le législateur est tou- jours en condition de modifier, bouleverser et - en fin de compte - subvertir l'ordre légal. Si on examine les conséquences à long terme de la législation, il faut admettre que - loin uploads/Philosophie/ la-liberte-et-le-droit-bruno-leoni-pdf.pdf
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- Publié le Dec 19, 2022
- Catégorie Philosophy / Philo...
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