26 1 L'appellation est courante, même si en toute rigueur, puisqu'il ne s'agit

26 1 L'appellation est courante, même si en toute rigueur, puisqu'il ne s'agit pas d'une véritable dis-ci pline spécifique, on devrait parler de « didactique des langues-cultures en milieu scolaire ». le concept de « langue- culture », lui aussi. pose bien entendu problème, mais il n'entre pas dans l'objet du présent article. La didactique des langues-cultures ./ , etrangeres entre méthodologie et didactologie par Christian Puren IUFM de Paris. Université Paris-III Introduction La didactique des langues-cultures étrangères (DLCE) est une discipline constituée qui peut se définir à partir de quelques éléments fondamentaux qui, dans le cas particulier de la « didactique scolaire des langues-cultures étrangères .' (DSLCE), sont les suivants: un domaine l'enseignement/apprentissage scolaire des langues-cultures les acteurs les apprenants, les enseignants (individus, associations, syndi- du domaine cats), les éditeurs et auteurs de matériels, les responsables politiques, administratifs et pédagogiques de l'institution sco- laire, les parents d'élèves (opinion publique et associations), les formateurs, les inspecteurs, les didacticiens un objet le double processus conjoint d'enseignement et d'apprentissage des langues-cultures un projet l'amélioration du processus d'enseignement/apprentissage scolaire des langues-cultures une problématique un ensemble interrelié de questions fondamentales: qui? (l'en- seignant), à qui? (les apprenants), pourquoi? (les objectifs), quoi? (les contenus), avec quoi? (les moyens), dans quelles conditions? (l'environnement), comment? (la méthodologie) des outils des concepts spécifiques organisés en configurations plus ou théoriques moins étendues Comme les disciplines constituées, la DLCE s'alimente aussi de l'analyse des produc- tions attestées de son propre domaine; dans le cas de la DSLCE, ce sont les politiques linguistiques, l'organisation des cursus, les textes officiels, les pratiques et résultats d'enseignement/apprentissage, les matériels didactiques, les programmes de formation et enfin les articles et ouvrages de recherche. Comme elles, la DLCE s'intéresse enfin aux produits d'autres disciplines dites « connexes» parce qu'étudiant des parties de son objet ou adoptant des perspectives différentes vis-à-vis de son objet. En ce qui concerne la DSLCE, les principales peuvent être regroupées sous quatre rubriques: 1) les « sciences de l'éducation " qui étudient les éléments communs à l'enseigne- ment/apprentissage de toutes les disciplines scolaires : institution scolaire, probléma- tique éducative, méthodes générales de la pédagogie, relations interpersonnelles et dynamique de groupe ... ; 2) les « théories de l'apprentissage " qui étudient les phénomènes mentaux à l'œuvre dans l'apprentissage de la langue; 3) les « linguistiques », qui étudient la langue ; 4) l' « anthropologie culturelle " dénomination englobante souvent utilisée par commo- dité par les didacticiens de langues, mais qui juxtapose les disciplines très diverses qui doivent être mobilisées dans la description des multiples dimensions de la culture: his- toire, géographie, sociologie, économie, littérature, histoire de l'art, histoire des idées, ... Une telle définition de la DLCE/ DSLCE mériterait à elle seule de longs développements et justifierait de longs débats, parce que (et ces différentes raisons sont liées entre elles) elle concerne une discipline relativement jeune dont la conception n'est pas encore par- faitement « stabilisée· même parmi ses propres spécialistes, qui n'est pas encore tota- lement reconnue en tant que telle au sein de l'Université', et qui est soumise à des pres- sions « annexionnistes . de la part d'autres disciplines mieux reconnues - en particulier les sciences de l'éducation et les sciences du langage. Cette discipline, enfin, n'a com- mencé que très récemment, depuis la création des IUFM en 1991, à intervenir sur un domaine, celui de la formation des enseignants, que depuis son émergence se parta- geaient entièrement les universitaires (pour la formation dite « académique .) et les ins- pecteurs (pour la formation dite « pratique . ). Ainsi, certains spécialistes de pédagogie considèrent que la DLCE, comme les didactiques des autres disciplines scolaires, est une simple branche d'une « didactique générale . dont ils seraient les seuls représentants patentés, et certains linguistes cherchent à la mainte- nir dans l'état de dépendance où elle se trouvait dans les années 1960-1970, à l'époque où elle était encore appelée « linguistique appliquée ». Les enjeux réels de ces revendica- tions territoriales ne sont pas seulement théoriques (même si ce sont bien sûr ceux que leurs auteurs mettent exclusivement en avant), mais institutionnels et même corporatistes puisqu'il s'agit aussi, très concrètement, de capter un maximum d'étudiants pour un maxi- mum d'heures de cours dans les cursus de formation d'enseignants de langues ... C'est dans un tel « environnement non permissif . (pour reprendre un concept de straté- gie militaire à la mode ... ) que la DLCE affronte des mouvements inverses auxquels elle 27 l Il n'existe pas de section « didactique des langues » au CNU (Conseil National des Universités, l'une des instances de recrutement des enseignants universitaires). de sorte que les didactidens se présentant à des postes de professeurs ou maître de conférences doivent se faire accepter d.ms des disciplines connexes telles que les sciences du langage. les sections de langues, les sciences de l'éducation ou encore la communication. 28 l « Responsabilité» pleine et entière, et non « maîtrise » pleine et entière: cette distinction est tout à fait essentielle dans la conception que les didacticiens de langues ont de leur discipline. qu'ils veulent autonome et non indépendante, et moins encore autarcique. 4 On me pardonnera le néologisme. doit résister pour conserver la pleine et entière responsabilité' de l'objet qu'elle s'est donné et du projet qu'elle s'est fixé: 1) d'un côté son englobement' dans une problématique plus large, qui serait celle de l'enseignement en général, et de l'autre son démembrement en une multitude de problé- matiques parcellarisées telles que l'enseignement/apprentissage du lexique, de la gram- maire, de la phonétique, de la littérature, de l'histoire ... 2) d'un côté la théorisation externe, qui la ferait dépendre hiérarchiquement de recherches effectuées dans une perspective non didactique (comme cela s'est passé dans les années 1960·1970 avec deux types d'applicationnisme externe, psychologique et linguistique), et de l'autre l'empirisme interne, qui la réduirait à n'être qu'un ensemble plus ou moins cohérent et raisonné de techniques de classes. La thèse que je défends pour ma part est que la meilleure stratégie pour résister à ces dérives est de construire cette DLCE sur la base de sa nature complexe: ses consti· tuants fondamentaux (voir tableau supra) sont en effet eux-mêmes constitués d'éléments nombreux, différents, hétérogènes (cf. par exemple la liste des acteurs, des questions fondamentales et des produits de son domaine), en partie opposés (enseignement vs apprentissage, bien sûr, mais aussi, par exemple, les intérêts et stratégies souvent divergents des différents acteurs), variables (l'enseignement et l'apprentissage comme processus, mais aussi, par exemple, l'environnement, soumis à des modifications per- manentes et en partie aléatoires), non objectivables parfaitement (l'enseignant et les élèves font eux-mêmes partie du milieu dans lequel ils agissent et interagissent) ; ces éléments et leurs constituants étant si constamment et étroitement interre/iés, enfin, que l'ensemble fonctionne avec une cohérence propre, de telle sorte que l'on pourrait rajou- ter à la définition de la DLCE la nature fondamentalement systémique de son approche. Je me propose, dans le présent article, d'illustrer la complexité de la DLCE par la des- cription des trois niveaux qu'il me semble nécessaire de distinguer à l'intérieur de cette discipline, et qui sont précisément ceux qu'elle s'est donnés au cours de son propre développement historique. Dans le cas de la DLCE, ce sont les niveaux méthodologique, didactique (dans le sens restreint du terme) et didactologique. Le ntveau méthodologique À l'origine, la DLCE s'est constituée dans l'enseignement scolaire français à partir du seul niveau méthodologique, c'est-à·dire à partir de l'ensemble des questions portant sur le « comment? ". Dans la perspective de c'entration sur l'enseignant qui était celle de l'époque, il s'agissait seulement du « comment enseigner la langue? ». L'instruction fon- datrice de la DSLCE, celle du 13 septembre 1890, pose en ces termes le principe de son autonomie par rapport aux deux objectifs dont elle était auparavant dépendante comme la didactique des langues mortes, celui de la formation intellectuelle (l'appren- tissage de la langue comme gymnastique mentale) et celui de la formation littéraire (l'ap- prentissage de la lecture des textes littéraires) : « Une langue s'apprend pour elle-même et par elle-même, et c'est dans la langue, prise en elle-même, qu'il faut chercher les règles de la méthode» (je souligne). Un tel statut central accordé à la méthodologie peut être considéré comme un effet mécanique de l'application des nouvelles méthodes actives à l'enseignement des langues, le moyen principal utilisé désormais étant homo- logue à l'objectif: à partir de la fin du XIX' siècle, c'est d'abord en faisant parler la langue étrangère en classe qu'on demande aux professeurs d'enseigner à la parler. On retrouve ce statut central de la méthodologie dans toute l'histoire de la DLCE jusqu'à ces dernières années, qui peut se parcourir à travers une succession de méthodologies constituées différentes (directe, active et audiovisuelle), mais par lesquelles les spécia- listes ont constamment cherché à construire le même type de cohérence couvrant l'en- semble des questions concernant le « comment enseigner? » : globale, forte, universelle et permanente. On le retrouve aussi dans le modèle de formation dominant pendant toute cette uploads/Philosophie/ la-methodologie-de-la-didactique-puren-1999.pdf

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