Manifeste pour un cerveau libre Préface de Serge Tisseron Depuis que nous savon

Manifeste pour un cerveau libre Préface de Serge Tisseron Depuis que nous savons que de nouveaux neurones naissent chaque jour dans notre cerveau, les livres qui vantent les mérites des neurosciences semblent suivre le même rythme dans les bacs des libraires… Mais celui d’Idriss Aberkane se distingue des autres. C’est moins un essai qu’un manifeste : un manifeste qui nous invite à faire d’un certain passé « table rase » pour prendre « le parti du cerveau ». Des divers fils rouges autour desquels sa pensée s’organise, j’en ai retenu trois. Le premier est l’économie de la connaissance. Alors que les flux financiers enrichissent certains et en appauvrissent d’autres, les flux de connaissance profitent à tout le monde. Le meilleur exemple en est cette monnaie introduite en Inde qui ne permet à son possesseur qu’une seule chose, payer quelqu’un qui lui donne des cours dans la matière de son choix. De telle façon que celui qui reçoit cet argent ne peut l’utiliser lui-même à rien d’autre qu’à obtenir à son tour un enseignement, et ainsi de suite depuis les personnes les moins éduquées jusqu’aux personnes qui le sont le plus. Chacun s’enrichit en outre non seulement des connaissances qui lui sont dispensées, mais aussi de celles qu’il donne, puisque l’effort d’expliquer bénéficie à celui qui le fait autant qu’à celui qui l’écoute. Ainsi s’établit une chaîne ininterrompue de transmissions vertueuses. Le second fil rouge qui traverse l’ouvrage d’Idriss Aberkane est l’empan : ce mot désigne, rappelons-le, la distance qui sépare l’extrémité du pouce de celle du petit doigt lorsque notre main est ouverte. Cette distance a été proposée à la Renaissance pour être une mesure à partir de laquelle construire un monde habitable par l’homme, c’est-à-dire un monde dont il puisse se saisir. D’autres « empans », autrement dit d’autres mesures de référence, ont été proposés dans l’Histoire, par les religions monothéistes d’abord et, après la Renaissance, par la philosophie des Lumières avec l’émergence de l’idée de démocratie. Chacune de ces approches a proposé, avec plus ou moins d’efficacité, un modèle du bonheur et de la liberté. Aujourd’hui, les travaux de neurosciences nous confrontent à une nouvelle forme d’empan : l’ouverture possible de notre cerveau et la façon dont il peut se saisir d’objets cognitifs à condition que ceux-ci soient présentés d’une certaine façon, exactement comme notre main ne peut se saisir d’un objet que s’il lui est présenté de manière correcte, on dit aujourd’hui « ergonomique ». L’empan de notre cerveau définit, par exemple, les conditions favorables à la mémorisation, les angles d’approche qui peuvent permettre de s’emparer d’un nouvel objet d’étude, etc. De la même façon que les dimensions du corps humain ont été érigées, à la Renaissance, en repères pour la construction des bâtiments, ce que nous savons aujourd’hui du cerveau devrait constituer les repères de la construction d’organisations adaptées à l’être humain, à commencer par celles dont la vocation est la diffusion des connaissances. uploads/Philosophie/ manifeste-pour-un-cerveau-libre.pdf

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