ACTUALITÉS SCIENTIFIQUES ET ÎNDUSTHÎEIUBS 107 7 P U B L I C A T I O N S DE L '
ACTUALITÉS SCIENTIFIQUES ET ÎNDUSTHÎEIUBS 107 7 P U B L I C A T I O N S DE L ' I N S T I T U T I N T E R N A T I O N A L DE P H I L O S O P H I E PARIS Editeur : Raymond BAYER ' • Proft^seur d« PKuosupliJe & la Sorboose, Co-Admliiistratea: ponoaaeat de l'Institut Internaticn^l de PMIoeopb}* NATURE DES PROBLÈMES EN PHILOSOPHIE (EntieUens d'été — LUND 1947) n .. LOGIQUE ET SCIEÎfCE PARIS H E R M A N N &. 0 « Ediîeuriï 6, Ru* do la Soîbonne, 6 . 1949 SÉANCE DU 10 JUIN 194; T H È M E n LA NATURE DES PROBLÈMES • EN LOGIQUE - Communications : < I. FERDINAND G O N S E T H (Zurich), n. ARNOLD R E Y M O N D (Lausanne) Introduction à la discussioii : CH. P E R E L M A N (Bruxelles) Discussion M. Ch. PEEELMAX. — J'ai été assez embarrassé en cherchant à établir un contact entre les exposés de M. Reymond et de M. Gonseth de façon que la discussion sur le thème proposé puisse s'engager d'une façon cohérente. J'ai pensé qu'en repre- nant les rapports de la logique classique et de la logique moderne avec les conceptions de la raison et de la vérité qu'elles impli- quent, les problèmes philosophiques soulevés par la logique sont les mieux mis en lumière. Les logiciens, depuis Axistote, avaient une tendance à consi- dérer l'évidence comme l'instrument caractéristique de la raison, lui permettant d'établir les axiomes ou les bases du raisonnement. Les axiomes purement formels, qui ne concer- naient pas le monde extérieur (sensible ou mathématique) étaient considérés comme les lois mêmes de la raison. C'est ainsi que, dans leur esprit, les lois de la logique formelle nous précisaient la structure même de notre raison. Dans cette conception, il y avait donc une liaison intime entre la logique et la raison. Cette conception a été celle de tous les logiciens formalistes jusqu'à, et y compris, Frege, qui est le véritable père de la logique moderne. Notons, en passant, que la logique qualifiée de russellienne ne fait qu'exposer, à part de minimes modifica- tions, les thèses énoncées par Frege plusieui's années auparavant, dans un symbolisme plus accessible emprunté à Peano. Frege basait ses axiomes et ses règles de déduction sur une évidence rationnelle qui lui était fournie grâce à une sorte d'intuition intellectuelle. Notons que les conceptions de Husserl, qui faisait état dans ses « Logisch-psychologische Untersu- changen - > d'un idéalisme tout à fait opposé à sa deuxième manière ont été influencées d'une façon décisive par la critique de Frege, à tel point que Husserl a interrompu son œuvre 48 ENTRETIENS DE LUND primitive et Fa reprise dans un tout autre esprit dans les « Logische TJntcrsuchungen ». Je crois que c'est la découverte par Russell, en 1903, du célèbre paradoxe qui porte son nom, qui a porté un coup fatal à l'usage de l'évidence rationnelle en logique. En effet, ce paradoxe a montré aux logiciens que, à partir de propositions considérées comme évidentes, en appliquant des règles de déduction qui ne le sont pas moins, on pouvait aboutir à deux formules qui, symboliquement, étaient incompatibles, car l'une était la néga- tion de l'autre. Cet échec de l'évidence n'a peut-être pas influencé Frege lui-même, mais a favorisé l'application par la généralité des logiciens contemporains d'une méthode qui ne tiendra plus compte dans ses développements de l'intuition intellectuelle, mais qui s'inspirera de' l'enseignement fourni par Hilbert dans ses «Fondements de la géométrie». Cette méthode, qui consistera dans la formalisation de la logique, cherchera à présenter les axiomes et les règles de déduction comme des suites de symboles et des opérations sur les symboles, en ne faisant jamais intervenir dans le calcul des considérations relatives au sens de ces symboles. Un système formalisé ne porte donc que sur des formes sensibles et des transformations purement formelles, donc contrôlables empiriquement, que l'on peut leur faire subir. On comprend que dans un pareil calcul l'intuition sensible joue un rôle primordial, celui accordé par les logiciens classiques à l'intuition x-ationnelle. Si un système logique ne concerne que des signes et des opérations sur des signes, rien ne devrait plus limiter l'esprit inventif du logicien dans la construction de systèmes logiques. On est libi'e de construire des systèmes logiques comme on le désire : c'est le principe de la tolérance énoncé par Carnap dans sa « Logische Syntax der Sprache ». Nous sommes libres de construire des logiques multiples, qui ne sont rien d'autre que des langages différents. Mais alors quel rapport existe-t-il entre ces nombreuses logiques et ce qu'on appelle la raison ? L'ancienne conception des rapports entre la logique et la raison est périmée. Peut-elle être remplacée par une nouvelle ? Je me permettrai de faire une suggestion à ce propos. Ne pourrait-on pas retrouver des lois de la raison dans les condi- l A NATURB DES PROBLÈMES EN LOOIQUE 49 tions qui rendent possible l'utilisation de n'iïnporte quel symbolisme ? En effet, pour qu'on puisse se servir d'un sym- bolisme, il faut admettre le caractère pcrriïane;i.t, invariable, des symboles, il faut admettre la possibilité de distinguer et d'identifier les symboles dont on se sert : ne retrouve-t-on pas ici, à propos du fornuilismc de la logique moderne, les anciens principes aristotéliciens d'identité et de contradiction, dans une forme renouvelée ? On pourrait entendre par lois de la raison ces conditions préalables à la construction et à l'utilisation de tout symbolisme quel qu'il soit. Que devient dans la logique moderne la notion de vérité ? Dans quel sens peut-on encore parler de la vérité des axiomes si on considère ces axiomes comme des suites de signes sans signification ? Est-ce encore faire de la musique que de jouer sur un piano dont les touches ne sont pas en contact avec des cordes qu'elles font vibrer ? Que devient la notion de vérité quand il s'agit de propositions qui n'ont pas de sens ? Que devient la notion de symbole même, s'il s'agit de figures qui ne représentent rien ? N'est-ce pas le caractère même d'un langage quelconque que de désigner quelque chose ? Les logiciens modernes admettent évidemment que pour que leurs systèmes aient un sens, constituent une logique dans le sens complet du mot, il faut qu'ils puissent être interprétés, que l'on puisse trouver un sens à leurs formules. ^lais ce pro- blème de l'interprétation ne fait plus partie de la logique for- melle qui se contente de fournir des instruments susceptibles d'être interprétés différemment. D'ailleurs, toute interpré- tation suppose déjà l'existence de propositions considérées comme vraies et dont les axiomes ne seraient qu'une expression formalisée. L'interprétation d'un système formalisé suppose que l'on admet déjà Texistence de propositions dont la vérité ne dépend pas du système que l'on veut interpréter. Cette scission de la logique en deux parties, l'une concer- nant la formalisation et l'autre concernant l'interprétation, aura pour effet d'éliminer de la logique formelle des préoccu- pations qui relèvent de la théorie de la connaissance. Si la logique formelle influence encore les réflexions philosophiques, c'est dans le même sens dans lequel le font toutes les autres sciences, en rendant contraires à l'esprit, à la méthode et aux résultats obtenus par elles certaines affirmations que des philo- 50 ENTRETIENS DE LÎJND sophes seraient tentés de prendre à kur compte et en suggérant des fonctions philosophiques qui sont dans leur ligne de déve- loppement. A propos do la logique réelle des problèmes impliqués par la connaissance du monde extérieur, M. Reymond nous a exposé l'attitude d'Aristote et celle des stoïciens. Ces deux attitudes sont contraires à l'esprit de la science moderne et conduisent à des impasses. Dans la mesure où les Stoïciens se refusent à formuler des propositions universelles, ils rendent toute science impossible. Dans la mesure où Aristote admet une connaissance des genres et des espèces qui correspondrait à tine hiérarchie ontologique des concepts, sa conception ne parvient à expliquer qu'à l'aide d'un artifice l'existence de l'erreur et le caractère progressif de toute seien^ce naturelle, qui fait que l'erreur, c'est-H-dire la perfectibilité, fait partie de sa structure même. La conception moderne de l'induction cherchera à éviter ces deux impasses. Il est facile de montrer que tout jugement, les jugements concernant des êtres individuels comme les autres, dans la mesure où il contient des concepts, suppose l'existence de jugements universels. Quand je dis « ce cheval court », je ne puis comprendre le sens du mot « cheval » qu'en connaissant au moins une proposition universelle dont le mot « cheval » serait le sujet. Et cette proposition universelle, comme tout jugement universel concernant la nature, peut être interprétée comme le produit logique d'un jugement d'existence et de la négation d'un jugement d'existence. Quand je dis « tous les cygnes sont blancs », je n'affirme rien d'autre que « il existe des cygnes blancs et il est faux qu'il existe des uploads/Philosophie/ nature-des-proble-mes-en-philosophie-entieuens-d-x27-e-te-lund-1947.pdf
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- Publié le Dec 15, 2022
- Catégorie Philosophy / Philo...
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