Philosophie, Devoir maison n°1 Jean-Paul Sartre, La Nausée Jean Paul Sartre (19

Philosophie, Devoir maison n°1 Jean-Paul Sartre, La Nausée Jean Paul Sartre (1905-1980) apparait comme un intellectuel engagé. Il commence sa carrière de professeur dans un lycée et, en 1938 publie son premier roman philosophique : La Nausée d’où cet extrait est tiré. Sartre est peut-être plus connu pour ses œuvres romanesques et théâtrales que pour son œuvre de philosophe. Cependant, toute sa production littéraire n’est qu’une illustration de ses thèses philosophiques. Les hommes sont seuls et libres : Sartre a tiré toutes les conséquences de ce constat sur la condition humaine : L’homme se définit par ses actions et son existence (existentialisme). Dans un monde dépourvu de tout sens, il est seul (il n’y a pas de Dieu) et condamné à être libre. Il est par conséquent responsable de lui-même. Publié en 1938, ce premier roman « La Nausée » est écrit sous la forme d'un journal intime. Antoine Roquentin, trentenaire, intellectuel et solitaire. Il remarque un changement qui s'opère en lui : ses sensations sont faussées, il éprouve alors un sentiment d'étrangeté et de dégoût. Sa nausée va croissant, apparaissant d'abord face à des objets d'une quotidienne banalité, s'étendant ensuite aux personnes rencontrées et envahissant progressivement tout son rapport au monde. Dans cet extrait, ce personnage nous lie intimement à lui et son dégout pour l’existence. Ce qui frappe dans un premier temps c’est, en effet, le sentiment d’angoisse qui envahit le personnage. Il semble lutter désespérément contre celle-ci. Cette lutte acharnée soulève alors une question qui articulera notre démarche d’analyse : La pensée, la commandons-nous réellement ou bien la subissons-nous simplement ? Sartre, pose donc dans un premier temps une vision éternelle, incessante, circulaire du mouvement de la pensée, omniprésente qui trahit donc son angoisse de penser. Cette pensée qu’il l’oppresse ne serait donc que son Moi. C’est ensuite qu’il exprime l’opposition formelle entre vivre et exister. Une existence basée sur l’âme en opposition au corps, une existence dont seul l’homme serait responsable et qui affirmerait avant tout sa liberté. De façon romancée, Sartre pose dans cet extrait dès le premier paragraphe une pensée qui apparaît telle un serpentin. C’est cette pensée, circulaire contre laquelle son personnage lutte : « Cette espèce de rumination douloureuse ». Oui, le personnage témoigne son angoisse de penser. Elle se présente comme l’idée pesante de « ruminer », de repenser sans cesse. Elle apparait comme une douleur désagréable, un goût indéfinissable qui laisserait en chacun de nous l’angoisse et le vertige d’exister. Il est vrai que, qu’on TB On pourrait considérer qu’il s’agit d’une version existentialiste des Méditations métaphysiques de Descartes, plus particulièrement ici de la première méditation qui, par la méthode du doute hyperbolique (Descartes doute de tout, de l’existence de son corps, du monde, des autres) parvient à cette seule certitude : « Je pense donc je suis » Ici c’est « je pense donc j’existe » Tb mais cela supposait d’avoir d’abord introduit la pensée, ce processus douloureux. TB. Vous exposez et écrivez très bien les enjeux du texte. Il s’agit là d’un très bon travail. Oui. Ecriture dynamique, très agréable à lire. l’entende au sens général de philosopher ou au sens plus restreint de « raisonner », penser commence souvent par une négation: un rejet des apparences, une mise en doute de nos certitudes. Tenter de découvrir l’absolu, la vérité intelligible qui se cache derrière l’illusion des choses. Penser sans cesse, tenter de soulever le voile, ce voile qui recouvrirait le monde environnant des choses dans lequel nous évoluons. Penser c’est donc commencer par nier ce qui parait évident, vrai réel, certain. Toute pensée, remet en cause, déconstruit, fait douter. Ici, le personnage se refuse à penser, il exprime clairement son désir d’en finir avec elle et d’inhiber l’existence dans laquelle ses pensées l’entrainent. « Si je pouvais m’empêcher de penser » : Pourtant on ne peut renoncer à penser (c’est d’ailleurs ce que nous prouve le personnage en démontrant qu’il n’a pas la capacité de stopper ses pensées) puisque cela voudrait dire renoncer à l’existence, et donc à nous-mêmes. « Mais la pensée, c’est moi qui la continue, qui la déroule. J’existe. Je pense que j’existe. Oh le long serpentin, ce sentiment d’exister et je le déroule tout doucement… ». Et c’est cette pensée qui comme le serpentin se déroule, apparaissant comme éternelle. Elle avance, s’enchaîne, s’accélère même, parfois c’est une suite, une succession de pensées à laquelle il n’y a de fin. La perspective d’un arrêt soudain, brutal de cet huileux engrenage semble impossible. Aspiré dans ce tourbillon-spirituel, l’Homme ne peut que se laisser emporter. Une pensée, en amène une autre, et ainsi de suite. Successivement les pensées s’enchainent sans que l’on ne puisse stopper leur mouvement. Tel un train elles voyagent en nous sans ne jamais disparaître. Et cette idée de « fumée », de brouillard qui permettrait alors au personnage de gagner cette bataille contre lui-même n’est qu’illusoire. Roquentin est sa pensée et la refuser l’entraîne en quelque sorte à ne l’accepter que plus. Selon Platon, l’âme serait éternelle face au corps mortel : « On n’en finira donc jamais ». La pensée, le Moi semble être subit par le personnage de Sartre. Malgré tout on ne peut porter un regard que de simple soumission face à la pensée, elle ne commande pas réellement puisque « ma pensée c’est Moi ». Roquentin tente de laisser s’affronter sa volonté et sa pensée. Pourtant toutes deux, se recoupent puisque la volonté est mienne, elle se fondrait donc avec le Moi pour ne former qu’un. La possibilité que l’une puisse l’emporter sur l’autre n’est que mirage. Ligne 5, « Il ne faut pas que je pense que je ne veux pas penser. Parce-que c’est encore une pensée», en effet, chaque volonté, décision prise par Roquentin se rapproche de son Moi, sa pensée c’est lui, sa volonté aussi. Il ne peut tenter de commander son âme en pensant, puisque vouloir ramène à son Moi, à sa volonté et donc à sa pensée. Le personnage voudrait cesser de ruminer mais c’est impossible : exister, être un homme, ce serait donc faire l’expérience du dégoût, de la souffrance d’exister : c’est la saveur de la « rumination douloureuse ». Mais pourquoi cette rumination serait- elle douloureuse ? Sartre disait « l’homme est condamné à être libre ». Ce paradoxe semble nous éclairer sur la question. Cette Toujours TB écrit. Très pertinent. Il reste qu’ici, du moins au début du texte, nous ne sommes pas encore dans le questionnement philosophique, celui-ci n’est possible qu’à partir de la révélation de l’indissociabilité de la pensée et de l’existence. Il eut fallu travailler sur ce « j’existe « sur la dimension tout aussi harassante, terrifiante de l’existence. Oui ; mais il eut été intéressant d’interroger ce processus de la pensée, de se demander si seul le moi pense, s’il n’y aurait pas des pensées qui s’originent dans le psychisme inconscient ? (soit la perspective freudienne que Sartre rejette) TB Belles formule et idée que celles de la pensée comme cheminant en nous, nous traversant. B Oui telle est son ambigüité mais peut-être aussi une difficulté du texte, de la conception sartrienne. TB TB pensée «condamnerait à être libre». Et condamner n’est-ce pas quelque chose d’infligé? La pensée serait donc la base de l’existence, du Moi, alors pourquoi la percevoir avec douleur? « Seuls et condamnés les hommes sont. » Mal à l'aise devant l'existence des choses, devant sa propre existence Roquentin semble la considérer comme une faiblesse de l'être. Puisqu'il n'y a pas de Dieu pour concevoir, pour lui donner une âme prédéterminée, puisqu'à la naissance, l'homme n'est rien, son avenir lui appartient entièrement, ce qu'il est, ce qu'il deviendra. L'homme détermine alors, lui-même, son essence. Il n'est pas ce qu'il a voulu être mais plutôt le résultat de ses choix, il est donc responsable de ce qu'il est. L'existence serait la condition préalable à l'essence, ainsi l’existence précèderait l’essence. L'homme existerait comme seul vrai maître de ses pensées et de ses croyances : et cette contingence de l’existence permettrait d’expliquer en partie l’angoisse du personnage face à celle-ci. L’Homme est donc paradoxalement condamné à la liberté d’’où l’angoisse de Roquentin devant sa propre liberté, devant le pouvoir immense qu’elle lui confère. Les hommes sont seuls et libres face à des choix. Il n’existerait donc pas de nature humaine. Choisir, son «essence », choisir, et devenir responsable de ce choix par la suite. Sartre à travers son personnage traduit le malaise de l’Homme devant le fait d’exister. Face à cette liberté de choisir, et donc la peur de « mal » choisir, notre Moi pourrait avoir envie de fuir cette responsabilité, de renoncer à la pensée « Si je pouvais m’empêcher de penser ». Ce frisson face à la liberté de l’existence humaine, ne traduirait-elle pas aussi la fatalité du personnage devant la transcendance d’un monde intelligible qui reste inaccessible ? L’absolu, le monde intelligible reste et demeure coute que coute transcendant au monde sensible. Et cet absolu inaccessible n’est-il pas que plus désespérant uploads/Philosophie/ pdf-la-rumination-douloureuse-de-roquentin.pdf

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