PETIT DICTIONNAIRE PHILOSOPHIQUE Sous la direction de M. Rosentahl et P. Ioudin

PETIT DICTIONNAIRE PHILOSOPHIQUE Sous la direction de M. Rosentahl et P. Ioudine Le Petit dictionnaire philosophique est conforme à l'édition abrégée du texte russe publié par les Editions politiques d'Etat (Moscou, 1955). Edition électronique réalisée par Vincent Gouysse à partir de l’ouvrage paru en 1955 aux Editions en langues étrangères de Moscou. Les portraits ainsi que les termes grecs ne sont pas reproduits dans cette édition, ces derniers étant signalés par […]. Edité avant l’officialisation du triomphe des révisionnistes soviétiques, cet ouvrage ne comporte pas de révision flagrante des principes du marxisme- léninisme, à l’exception de quelques appréciations anti-matérialistes sur la Chine maoïste — en particulier l’incompréhension du caractère révisionniste et nationaliste bourgeois des thèses sur la « démocratie nouvelle ». (Voir notre étude « Impérialisme et anti-impérialisme ».) http://www.communisme-bolchevisme.net http://www.marxisme.fr 2 A ABELARD Pierre (1079-1142). Philosophe et théologien français du moyen âge. Professait le conceptualisme (V.) dans la lutte engagée autour de la question philosophique fondamentale — celle du rapport de la pensée à l'être — qui a pris dans la scolastique la forme de la « querelle des universaux » (V.). Dans son livre « Sic et Non », il demande de limiter la foi par des « principes rationnels » et met en évidence les contradictions irréductibles dans les conceptions des autorités de l'Eglise. Pour son époque, ce livre avait une valeur progressive. Les conceptions d'Abélard ont été condamnées par l'Eglise. ABOVIAN Khatchatour (1805-1848). Grand écrivain arménien, démocrate et pédagogue, fondateur de la nouvelle littérature et de la nouvelle langue littéraire arméniennes. La culture démocratique russe, ses représentants tels que Griboïédov, Biélinski (V.) et autres, avaient exercé sur lui une heureuse influence. On doit à Abovian le roman « Les plaies de l'Arménie » (écrit en 1840, paru en 1856) et d'autres oeuvres où il décrit l'héroïsme du peuple arménien en lutte pour sa libération nationale, contre les conquérants persans et turcs. Abovian préconisait le droit de l'homme à la liberté, notamment à la liberté nationale. Concevant la liberté comme une conséquence de l'égalité naturelle des hommes, il rejette la morale chrétienne de la non-résistance au mal et soutient l'idée de l'action populaire. Dans ses écrits, il dénonce la cruauté des exploiteurs féodaux, des popes et des moines, des riches, il montre le réveil de l'esprit de protestation des paysans serfs. Cependant, le faible développement de la lutte de classes en Arménie dans les années 30 et 40 du XIXe siècle n'a pas permis à Abovian d'en venir au démocratisme révolutionnaire, d'exiger le renversement du régime du servage par la révolution. Ses idées philosophiques accusent une tendance matérialiste. S'il n'ose pas encore dénoncer les mensonges religieux et idéalistes selon lesquels le monde aurait été créé par Dieu ou par « l'esprit universel », il n'en porte pas moins une grande attention aux hypothèses scientifiques sur l'origine du système solaire, du monde animal et végétal. Par toute son œuvre, il s'efforce de fixer l'attention des hommes sur les « choses d'ici-bas », et c'est avec une ironie non dissimulée qu'il parle du « monde de l'au-delà ». L'esprit n'est pour Abovian que la propriété de certains corps. « L'arbre est, il existe, mais il n'en a pas conscience ; l'animal en a conscience, mais confusément ; l'homme est, il existe, il a pleinement conscience de son existence parce qu'il pense. » L'âme de l'homme n'est que la propriété de son corps, elle naît et disparaît avec lui, ce qui rend futiles les propos sur le « monde de l'au-delà ». L'immortalité de l'homme, c'est son œuvre. Abovian se rend compte que ses idées ont une orientation antireligieuse et anti-idéaliste, mais il n'en dégage pas lui-même de conclusions athéistes, ce qui témoigne du caractère contradictoire de ses vues philosophiques. Les tendances matérialistes de sa philosophie apparaissent avec un relief particulier dans sa façon de résoudre le problème de la connaissance. Les objets du monde réel sont la source de la connaissance. « Nous devons commencer par distinguer les objets par les sens, pour en concevoir ensuite l'ordre par la pensée. » « Vérifie par l'expérience avant de t'enfermer dans ta chambre », disait-il. L'art est pour lui le reflet de la vie, il exige que la littérature arménienne abandonne les sujets religieux et puise son inspiration dans la vie du peuple, qu'elle exalte sa sagesse, son héroïsme, sa vaillance et sa noblesse d'âme. La mission suprême de l'art est de servir le peuple. L'une des idées maîtresses de l'œuvre d'Abovian est celle de l'amitié indestructible entre le peuple arménien et le peuple russe. ABSTRACTION SCIENTIFIQUE (lat. abstractio — isolement). Opération par laquelle notre esprit, après avoir distingué les caractères essentiels d'un groupe de faits, les sépare des propriétés secondaires pour les généraliser. Les résultats de cette généralisation, qui se fait au moyen de l'abstraction scientifique, trouvent leur expression dans les notions et les catégories scientifiques. « Des mots comme matière et mouvement ne sont que des abréviations, dans lesquelles nous réunissons d'après leurs propriétés communes beaucoup de choses différentes, perceptibles par les sens » (Engels : « Dialectique de la nature », P. 1952, p. 238). L'abstraction scientifique nous donne une idée plus ample et plus profonde de la réalité que les sensations immédiates. Lénine note que la représentation n'est pas à même, par exemple, de saisir un mouvement de 300 000 km à la seconde, tandis que la pensée en est capable. Au moyen des abstractions scientifiques, la connaissance passe de la perception des choses isolées à la généralisation d'une masse de faits, en formulant des concepts, des catégories, des lois qui reflètent les liens essentiels, internes des phénomènes. Seule la généralisation théorique permit à la pensée humaine de dégager l'essence des phénomènes, les lois de leur développement. Comme l'indique Lénine, la généralisation la plus élémentaire, la première et la plus simple formation de notions, approfondit la connaissance des rapports objectifs du monde. Ainsi, l'observation directe donne l'impression que les prix des marchandises sur le marché capitaliste sont déterminés, en dernière analyse, par l'offre et la demande. En réalité ils sont fonction de la quantité de travail socialement nécessaire à la production de ces marchandises, autrement dit, de la valeur. La notion de valeur élaborée par Marx au moyen d'une abstraction scientifique, reflète avec justesse et profondeur les rapports sociaux réels de la production marchande. Marx indique que « l'analyse des formes économiques ne peut s'aider du microscope et des réactifs fournis par la chimie; l'abstraction est la seule force qui puisse lui servir d'instrument » (« Le Capital », L. I, t. 1, P. 1938, p. 18). L'énorme importance des abstractions, pour connaître l'essence des phénomènes, a été soulignée par Staline dans « Le marxisme et les problèmes de linguistique » (V.). Ainsi, le vocabulaire, pris en lui-même, ne constitue pas encore la langue. C'est seulement lorsqu'il est mis à la disposition de la grammaire qu'il acquiert une importance considérable. La grammaire confère à la langue un sens cohérent. Faisant abstraction du particulier et du concret, dans les mots et les propositions, elle prend ce qu'il y a de général dans les modifications et les combinaisons des mots et en tire des règles, des lois grammaticales. La grammaire est le résultat d'un long travail d'abstraction de la pensée humaine, l'indice d'immenses progrès de la pensée. 3 Conscients du grand rôle des abstractions scientifiques dans la connaissance du monde, les philosophes réactionnaires de nos jours luttent contre elles, nient que toute abstraction scientifique soit un reflet de l'essence objective des phénomènes dans la conscience. Ils font valoir qu'il n'est pas possible de voir, de palper, de photographier les abstractions, comme c'est le cas pour les choses et les phénomènes concrets. Ils en viennent ainsi à nier la réalité de la matière, de la valeur, de la plus-value, etc. Les philosophes réactionnaires s'appliquent à dissimuler que les abstractions résultent de la généralisation des propriétés essentielles d'une masse de faits individuels. Les abstractions reflètent ce qu'il y a de général dans les objets, or le général n'a pas et ne peut pas avoir un aspect directement sensible. Le général n'existe que dans et par le particulier. Critiquant les métaphysiciens qui séparaient le particulier et le général, Engels écrivait : « C'est toujours la vieille histoire. D'abord, on fait des abstractions des choses sensibles, et ensuite, on veut les connaître par voie sensible, on veut voir le temps et flairer l'espace » (« Dialectique de la nature », P. 1952, p. 238). L'impossibilité de connaître le général autrement que par l'abstraction, ne signifie pas qu'il n'est pas réel, qu'il n'existe pas. La loi de la gravitation universelle ne peut être photographiée pas plus que la valeur, mais cela ne permet pas de nier sa réalité. Il importe de distinguer les conceptions matérialiste et idéaliste de l'abstraction. L'abstraction scientifique, matérialiste, est diamétralement opposée à l'abstraction idéaliste qui détache la pensée humaine de la réalité objective. Accidence (lat. accidens). Propriété momentanée, passagère, non essentielle d'une chose. Ce terme est d'un usage fréquent dans la scolastique du moyen âge, et aussi dans la philosophie uploads/Philosophie/ petit-dictionnaire-que-moscou-1955.pdf

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