29 BIBLID [1699-3225 (2015) 19, 29-130] EXEMPLARIA CLASSICA Journal of Classica

29 BIBLID [1699-3225 (2015) 19, 29-130] EXEMPLARIA CLASSICA Journal of Classical Philology 19, 2015, pp. 29-130 ISSN 1699-3225 PLUTARQUE, DE ISIDE ET OSIRIDE, CHAPITRES 1-11: UN COMMENTAIRE JEAN-FABRICE NARDELLI Marseille jnardellis36@numericable.fr SUMMARY Many factors conspire to estrange schol- ars from the prologue to Plutarch’s treatise On Isis and Osiris. Now that we have G. Roskam’s thorough literary and philosoph- MGEPWXYH]XMQILEWGSQIXSF]TEWWXLIðJX] years of beating around the bush that have IPETWIHWMRGI+[]R+VMǭXLWGSQTPIXIHLMW large-scale edition (1965). Instead, this ar- XMGPISǬIVWERMRHITXLRI[HIXEMPIHGSQ- QIRXEV]SRXLIðVWXIPIZIRGLETXIVW[MXL EJYPPGSRGPYWMSRXLEXKEXLIVWMXWQEMRðRH- ings and attempts to show how Plutarch peers through his weird prolegomena and what value attaches to them. KEYWORDS Plutarch; Osiris; Isis; Egyptian religion; Isiac mysteries Fecha de recepción: 5/07/2015 *IGLEHIEGITXEGMÔR]ZIVWMÔRðREP   RÉSUMÉ Pour moult raisons, le prologue du trai- té plutarchéen Isis et Osiris n’est pas de ces textes qu’on fréquente volontiers. Dans le sillage de la riche étude littéraire et phi- losophique de G. Roskam, le moment est venu de rattrapper les deux générations d’attentisme qui ont suivi le bouclage de PEQSRYQIRXEPIÊHMXMSRHI+[]R+VMǭXLW (1965) en commentant à nouveaux frais et sur une vaste échelle les chapitres 1 à 11. 9RIGSRGPYWMSRÊXSǬÊIVIRHGSQTXIHIRSW TVMRGMTEPIWXVSYZEMPPIWIXWqIǬSVGIHIGIVRIV la personnalité de Plutarque dans ses cu- rieux prolégomènes et quelle peut être leur valeur. MOTS-CLÉS Plutarque; Osiris; Isis; religion égyptienne; mystères isiaques -PIWXJVETTERXGSQFMIRPqI\TPMGEXMSRHIGIHMǭGMPISTYWGYPIRqETPYWTVS- gressé après avoir culminé dans une édition commentée de grande classe +[]R+VMǭXLW ÁPEUYIPPIPEQSRSKVETLMIHI,ERMRqENSYXITEWFIEYGSYT 3REWMTIYVÊñÊGLMWYVPEGVMXMUYIHYXI\XIIXWSRMRXIVTVÊXEXMSRUYIPIWXVE- ductions annotées reproduisant une Vorlage sont moins décevantes et rendent de meilleurs services que les deux éditions les plus ambitieuses de la dernière JEAN-FABRICE NARDELLI ExClass 19, 2015, 29-130 ISSN 1699-3225 30 génération1. Le présent commentaire entend changer la donne en reconsidé- rant une portion de l’œuvre très généralement négligée pour son allure dé- cousue2 et pour sa doctrine philosophique apparemment confuse. Voulant EZERGIVEYHIPÁHI+[]R+VMǭXLWNqEMÊPYHÊXSYWPIWTEWWEKIWWYVPIWUYIPW il était encore possible aujourd’hui de se contenter de ses notes, particuliè- VIQIRXEYGLETMXVITSYVQqMRXÊVIWWIVEY\HMǭGYPXÊWUYqMPIWXPSMRHqEZSMV toutes aperçues ni solutionnées; il restait en outre un certain nombre d’incer- titudes de traduction à lever et de faux-sens perpétués d’édition en édition à VIGXMðIV9RGSQQIRXEMVIHYHÊFYXHY<<-e siècle doit sans aucun doute re- ñÊXIVWSRÊTSUYI WERWGÊHIVEY\WMVÉRIWHIWETTVSGLIWÁPEQSHIHERWPIXVEM- tement des œuvres littéraires à caractère religieux, on ne pouvait ignorer la Quellenforschung, globalement esquivée chez Hopfner mais portée à un haut HIKVÊHIWSTLMWXMGEXMSRTEV+[]R+VMǭXLWTYMW,ERMIXTEVPEWYMXITIYSY prou laissée pour compte. Il convenait donc de mettre au point le problème des sources plutarchéennes lorsqu’il était loisible de solution sans négliger ce facteur-clé que constitue la personnalité littéraire et philosophique de l’auteur. %ZIGWIWFMFPMSKVETLMIW WEVÊñI\MSRWYVPqÊXEFPMWWIQIRXHYXI\XI PqSVMIRXEXMSR selon les cas traditionnelle ou décapante de ses analyses mythographiques; et son dialogue constant avec la documentation parallèle gréco-romaine et égyptienne, mon travail ambitionne de doter les hellénistes, les égyptologues et les historiens de la philosophie des éclaircissements nécessaires pour com- prendre et apprécier les attendus de méthode par lesquels Plutarque entame WSRXVEMXÊ0qIWTSMVGEVIWWÊÊXEMXHqSǬVMVYRFSRMRWXVYQIRXHIXVEZEMPTVÊWIR- tant à chacun de ces trois publics, sous la forme d’une annotation détaillée et dense quoique équilibrée, le status quaestionis des autres disciplines de ma- RMÉVIVIRSYZIPÊIIXZMZMðÊI3. Sans s’assujettir aux avis des experts, on a tout 1 Discussion de la Budé de Froidefond et de l’editio maior de García dans mon ‘Black Athe- na Fades Away: A Consideration of Martin Bernal’s Linguistic Evidence’, ExClas 17, 2013, 355-6 note 170; voir aussi la mise au point infra, note 9. 2 G. Roskam, ‘Plutarch’s Yearning After Divinity: The Introduction to On Isis and Osiris’, Classical Journal 110, 2014-2015, 213-39, ci-après ‘Roskam’, a raison d’y trouver une unité d’inspiration et de méthode, sinon une composition serrée. Il est dommage qu’il ait manqué le PMZVIHIZER2YǬIPIRGMXÊTPYWFEW GLETMXVI) GIWHIY\XMXVIWWSRXGIUYqSRETVSHYMXHI meilleur depuis longtemps sur le prologue de notre opuscule. Il ne s’agit toutefois pas là d’ini- tiations; ce travail est bien fait notamment chez J. Alvar, Romanising Oriental Gods. Myth, Salvation and Ethics in the Cults of Cybele, Isis and Mithras0I]HI&SWXSR   3 Cette volonté de vulgarisation sur un triple niveau a déterminé le choix d’un style de cita- tion aussi explicite et direct que possible, rappelant celui de ‘Black Athena Fades Away’. Outre le non-abrègement des titres de revues savantes, citons la réduction des sigles et des abréviations au minimum (type FGrHist), hormis pour les textes cunéiformes uniquement disponibles sous forme autographiée dans les grandes collections assyriologiques; la préférence octroyée à des études de cas ou des synthèses fraîches plutôt qu’aux articles des encyclopédies de référence (on trouvera de ce fait l’ANRW mais pas la RE, le Lexikon der Ägyptologie, le Reallexikon der Ägyptischen Religionsgeschichte de Bonnet ni le Reallexikon der Assyriologie und Vorde- rasiatischen Archäologie); une attitude souple vis-à-vis de la philologie ou de la lexicographie PLUTARQUE, DE ISIDE ET OSIRIDE, CHAPITRES 1-11: UN COMMENTAIRE ExClass 19, 2015, 29-130 ISSN 1699-3225 31 examiné d’un œil neuf, en y ajoutant le bonus d’une connaissance des lettres mésopotamiennes4 que n’ont jamais les égyptologues ou les philosophes et non-grecques ainsi que des parallèles textuels helléniques (il n’était pas indiqué d’accabler le lecteur sous les références, les loci similesSYPIWVIRZSMWEY\HMGXMSRREMVIW IRðRPEVITVS- duction aussi généreuse que nécessaire des textes primaires (pour la littérature grecque) ou des traductions autorisées (pour la documentation proche et moyenne-orientale, le cas échéant avec PqSVMKMREP )RIǬIXRM,STJRIVUYMWIHÊJEYWWIWYVWSRETTEVIMPHIVÊJÊVIRGIWHERWPIWRSXIWMR- JVETEKMREPIWRM+[]R+VMǭXLWRqEMQIRXFIEYGSYTGMXIVPIWWSYVGIWERGMIRRIW ,ERMPYMQËQI se montre encore trop allusif dans son déploiement de ces dernières — tous les trois indiquent où se trouvent les comparanda ou les traditions parallèles et le cas échéant ils les reproduisent, davantage qu’ils ne les exploitent, et ils ne donnent presque jamais clairement à voir au lecteur ce qu’il est loisible d’en tirer pour expliquer les propres mots de Plutarque. Priorité a donc été donnée à l’analyse de ses motivations et aux rapports que le Chéronéen pouvait entretenir avec chacune de ses sources ponctuelles, par delà la simple illustration de ses propos. On ne sera donc pas étonné du développement important pris par certaines notes; dans un cas tout particulièrement épineux, où nous ne pouvions nous résoudre à la compression car nous nous estimions mieux placé que nos prédécesseurs avec notre triple statut de classiciste, de sémitisant IXHIGYRÊMJSVQMWXISREVÊHMKÊYRI\GYVWYWIRG]GPSTÊHMUYIHERWPIWJSVQIW)RðRPqEQTPMXYHI bibliographique n’ayant pas non plus préoccupé mes devanciers, alors que Roskam la revendique dans ses commentaires plutarchéens, elle a été recherchée lorsqu’elle présentait de l’intérêt à un titre ou un autre; à chacun d’en juger. L’espoir caressé quoique pas totalement réalisé d’être trop QMRYXMIY\HERWRSWI\TPMGEXMSRWTPYXÕXUYqSFWGYVSYÊZEWMJWITEWWIHINYWXMðGEXMSR0qEYXIYVHI ces lignes n’a que trop rencontré, durant sa phase de préparation, de déformations et de contre- WIRWGSQQMWTEVHIWGPEWWMGMWXIWWYVPIWRSXIWÊK]TXSPSKMUYIWHI,STJRIVSYHI+[]R+VMǭXLW Il ne connait également que trop bien les paraphrases tronquées ou fallacieuses d’égyptologues sur les parties proprement grecques de leurs commentaires. La haute vulgarisation passait donc aussi par l’exposition de détails souvent fastidieux mais qui seront appréciés par telle ou telle TEVXMIHIQSRPIGXSVEX4PYXEVUYIIWXYREYXIYVWYǭWEQQIRXTIYJEQMPMIVIXEPEQFMUYÊHERWWSR expression, les outils disponibles pour éclairer sa langue sont assez anciens ou rudimentaires, pour ne pas nous retenir d’exposer ce que seuls savent ou soupçonnent les spécialistes des Mora- lia. Last but not least, s’agissant d’un polymathe familier d’Homère, d’Hésiode et des poètes, ce que n’est aucun de ses interprètes modernes, il y avait avantage à faire porter sur ses citations le regard d’un connaisseur de la littérature grecque archaïque et classique. Entre ces options QÊXLSHSPSKMUYIWIXPIWI\MKIRGIWHIRSXVISTYWGYPIMPEVÊWYPXÊYRGSQQIRXEMVIEWWI^HMǬÊVIRX de ceux qui existent. 4 J’espère avoir prouvé non seulement qu’elle n’est pas inutile dans l’examen d’un texte égyptologique, mais encore et surtout qu’elle contribue à la plus grande précision et à une acribie supérieure du travail de commentaire. Malgré l’impact bien moindre de l’Égypte sur la langue, la culture et les belles-lettres grecques par rapport à la Mésopotamie ou l’Anatolie indo-européenne (‘Black Athena Fades Away’, 294-5, 315-7, 341-54, 362-7; etc), le Moyen- Orient ancien formait un continuum où il est risqué de pratiquer des démarcations rigides par grands domaines linguistiques au motif qu’on ne les maîtrise pas tous ou qu’on ne souhaite guère s’aventurer hors de sa sphère de compétences, lorsqu’on se penche sur des œuvres inter- culturelles en langue grecque comme le livre 2 d’Hérodote, le livre 1 de Diodore ou le De Iside et Osiride. Mieux vaut risquer d’errer en terrain non familier, si le lecteur est pourvu des moyens bibliographiques et autres d’approfondir, que de s’imposer des œillères par prudence ou pusillanimité dans l’élucidation de ces textes; l’utilité de l’étude qu’on propose en est restreinte, quand bien même nul ne s’en avise sur le moment, et tôt ou tard ces restrictions se paient cher (F. Paschoud localise ainsi Ctésiphon et le Naarmalcha chez (Libanios-)Ammien-Zosime sans s’enquérir des témoignages écrits émanant de la Perse: A. Oppenheimer, Babylonia Judaica in the Talmudic Period;MIWFEHIR    JEAN-FABRICE NARDELLI ExClass 19, 2015, 29-130 ISSN 1699-3225 32 dont ceux qui la possèdent ont mieux à faire que s’occuper de Plutarque. De la même façon, le Lesetext imprimé dans les lemmes est éclectique; il dédaigne aussi d’atticiser la morphologie. Abréviations: BABBITT = F. C. Babbitt, Plutarch. Moralia, V, « Loeb Classical Library », Cambridge, Mass.-Londres 1936; FROIDEFOND = C. Froidefond, Plutarque. Œuvres morales, V.2 Isis et Osiris, « Collection HIW9RMZIVWMXÊWHI*VERGIœ '9* 4EVMW +%6'®%!1+EVGÎE:EPHÊW Plutarco. Obras morales y de costumbres1EHVMH  WYVPIXI\XIHI+[]R +VMǭXLW +%6'®%maior = Plutarco De Iside et Osiride. Introducción, texto critico, traducción y comentario, Pise-Rome 19955; GÖRGEMANNS = H. Görgemanns, Plutarch. Drei religionsphilosophische Schriften², 8YWGYPYQ7EQQPYRKœ&IVPMR2I[=SVO  QSHMðIPIXI\XIHI+EVGÎE maior +;=2+6-**-8,7!.+[]R+VMǭXLWPlutarch’s De Iside et Osiride. Edited with an Introduction, Translation and Commentary, 'EVHMǬ  ,34*2)6!8,STJRIVPlutarch über Isis und Osiris, II uploads/Philosophie/ plutarcite-pdf.pdf

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