ARNAUD DESJARDINS Le vedanta et l’’inconscient À la recherche du soi III La Tab

ARNAUD DESJARDINS Le vedanta et l’’inconscient À la recherche du soi III La Table Ronde 7, rue Corneille, Paris 6e Sommaire Lettre aux lecteurs de mes livres.............................................................................................4 1. Qui suis-je ?........................................................................................................................5 2. Vedanta vijnana, la science du vedanta.............................................................................33 3. Manonasha, la destruction du mental ...............................................................................71 4. Chitta shuddhi, la purification de l’inconscient................................................................105 5. Vasanakshaya, l’érosion du desir......................................................................................140 6. Yoga asanas, le travail sur le corps..................................................................................165 7. Tolerance et syncretisme ................................................................................................182 Lettre aux lecteurs de mes livres C omme « À la Recherche du Soi » dont il est la suite, ce livre a été écrit à partir de causeries enregistrées. J’ai transcrit celles qui répondaient le mieux aux questions qui me sont le plus souvent posées par des correspondants connus et inconnus, auxquels un emploi du temps rempli ne me permet pas de répondre personnellement. Il y est souvent question de « Swâmiji ». Ce swâmi est Sri Swâmi Prajnânpad, mort en 1974, et qui fit mon « gourou ». Il y est aussi question parfois du « Bost ». Le « Bost » était la maison où je résidais et où se ré- unissaient quelques personnes qui avaient entrepris un travail de connaissance de soi. Ce nouveau livre est une façon de partager avec vous tout ce que je considère comme important. Les pages qui suivent ne sont pas un exposé systématique du vedanta. Elles ont la spontanéité de causeries et de réponses. Les mêmes idées se retrouvent dans plusieurs chapitres, envisagées selon di- vers points de vue et insérées dans des contextes différents. Comme je m’adressais à un petit audi- toire et non à une seule personne, je parlais « au pluriel » et cette forme a été conservée dans le livre. Comme Les Chemins de la sagesse et À la Recherche du Soi, Le Vedanta et l’inconscient est un témoignage sur un enseignement oriental vivant, tel que l’a compris et tel que le transmet un Occidental. A. D. UN Qui suis-je ? V ous souhaitez vous transformer, vous souhaitez vous « libé- rer », vous souhaitez vous « éveiller ». Vous voulez vous engager sur un chemin, vous de- mandez l’aide d’un guide, vous assistez à des réunions, vous posez des questions. Vous vous considérez comme des disciples. Vous n’oubliez qu’une chose. C’est que vous n’êtes pas unifiés. Je vous parle, vous m’écoutez. Qui m’écoute ? À qui, en vous, est-ce que je m’adresse ? Vous savez tous qu’il était inscrit au fronton du temple de Delphes le fameux « Connais- toi toi-même » et c’est sur ce précepte que Socrate avait fondé son enseignement. Vous connaissez probablement aussi un texte célèbre de Shankaracharya que j’ai parfois cité et qui dit : « Je ne suis ni le mental, ni l’intellect, ni les émotions, ni l’ego, ni ce qui mange, ni ce qui est mangé, chidanandarupa, shivoham, shivoham. Je n’ai d’autre forme que la conscience et la béatitude, je suis Shiva, je suis Shiva. » Vous savez aussi qu’à notre époque le grand sage Ramana Maharshi enseignait ce qu’on appelle en anglais self-inquiry, se poser, non pas intel- lectuellement mais vitalement, la question : « Qui suis-je ? » Je voudrais attirer votre attention sur un point. Si cette question « qui suis-je ? » est en effet fondamentale, elle est faussée parce que l’on connaît la réponse théorique : je suis l’at- man, le Soi, le Self, et qu’on a une certaine idée de cet atman, supra-mental, transcendant, échappant au temps, échappant à la multiplicité. Dans les débuts du chemin – et ces débuts du chemin dans certains cas sont longs – il y a un tel fossé apparent entre la perfection illimitée de cet atman et votre confusion, vos em- portements, vos souffrances, votre désarroi, que toute tentative de saisie de l’atman est vaine. Vous pouvez vous demander : « Qui suis-je ? », mais si vous avez cette arrière-pensée : « Je suis le Soi, je suis l’inconditionné, je suis l’informel, je suis l’éternel, je suis l’absolu » – ce qui est vrai métaphysiquement – cela ne constituera pas un chemin réel pour vous. Sans re- mettre en cause le moins du monde l’enseignement qui affirme que vous êtes déjà, même si vous n’en êtes pas conscients, cette réalité immuable et non affectée, redescendons plus bas et posez-vous la question : « Qui suis-je ? » Ne pensez pas que je suis en train de mettre en doute Bhagavan Shri Ramana Maharshi, que je vénère autant que des milliers et peut-être des millions d’hindous et d’Européens au XXe siècle, ni son enseignement ; mais je voudrais que vous vous posiez la question « qui suis-je ? » d’une façon plus immédiate que métaphysique. « Vraiment, mais qui suis-je ? Mais qui suis-je donc ? » Et observez. Vous avez lu, entendu de la bouche d’Arnaud que 6 vous êtes semblables à un kaléidoscope dont l’image change, se compose, se dé-compose, se re-compose, selon des chocs extérieurs. Vous êtes multiples, comme tout l’univers, puisque vous êtes à l’image de l’univers, et vous êtes changeants, comme tout l’univers, puisque vous êtes à l’image de l’univers. Mais vous n’en êtes pas encore suffisamment imprégnés et vous continuez à vous considérer comme à peu près unifiés (avec des émotions passagères), et à peu près stables (avec certains changements suivant l’âge). Posez-vous bien la question : « Mais qui suis-je ? Celui ou celle de ce matin, celui ou celle d’hier, celui ou celle de la semaine dernière ? » et observez. Bien des fois, vous avez pris une décision et, quand il a fallu exécuter cette décision, vous ne compreniez plus pourquoi vous l’aviez prise. Bien des fois, vous avez voulu une chose et, quand cette chose s’est réali- sée, vous n’étiez plus celui qui l’avait tellement voulue. Chacun doit regarder ceci pour soi. La première constatation est celle de cette instabilité, le contraire de l’immuabilité. La seconde constatation est celle de cette complexité, le contraire de la simplicité. Pendant longtemps, un être humain est vraiment fait de pièces et de morceaux, psychologiquement, mentalement, émotionnellement. La première étape, c’est d’abord de perdre des illusions bien ancrées – qu’on peut perdre très vite intellectuellement, mais qu’on ne perd pas vitale- ment – sur une prétendue unité et une prétendue stabilité. Quand vous aurez observé que vous (pratiquement) vous n’existez pas, la question « Qui suis-je ? » prendra un sens concret. Pas : « Je vais méditer, méditer, demander qui suis-je, frapper à la porte du cœur, et un jour l’atman va se révéler. » Non, tout de suite, la question se pose, et tout de suite, des éléments de réponse vont commencer à venir. « Mais qui suis-je donc ? » La question est toute simple. On dirait que c’est un postulat : « Je sais qui je suis : je suis untel », et on commence à énoncer des valeurs permanentes : « Toute ma vie je serai Arnaud Desjardins, sauf si je choisis un pseudonyme et que je change de nom ; toute ma vie je serai fils de un tel et une telle. » Et puis ? Vous allez trouver en effet quelques données qui, elles, ne changent pas et qui font croire à cette permanence et à cette identité. Quand vous aurez suffisamment constaté que vous ne pouvez pas compter sur vous-même, que celui qui écrit une lettre n’est pas celui qui reçoit la réponse, quand vous aurez un peu entrevu la complexité des demandes et des refus non conciliés de la pensée, du corps, de l’émotion et du sexe, quand vous aurez un peu découvert la profondeur de l’incons- cient, vous serez vraiment amenés à vous poser, comme une question pour laquelle il n’y a pas besoin de faire référence au vedanta : « Mais, vraiment, qui suis-je ? Qu’est-ce qui est moi ? Qu’est-ce que c’est, moi ? Ça ? Ou ça ? Ou encore ça ? » Si vous vous engagez dans le chemin en croyant que vous pouvez dire imperturbablement « je » ou « moi », vous vous trompez. Ce n’est pas seulement dans le silence immobile de la méditation et de la rentrée en soi-même que vous pouvez poser la question : « Qui suis-je ? » C’est à propos des vicissi- tudes de l’existence et en relation avec les événements qui vous arrivent, les décisions que vous avez à prendre, les actions que vous accomplissez. Je me souviens m’être posé cette question à deux périodes de ma vie : l’une sous l’in- fluence de ce que je connaissais de l’enseignement de Ramana Maharshi, à Tiruvanamalaï même, dans la salle où Bhagavan avait résidé dans son corps physique, et, plusieurs années après, d’une façon beaucoup plus terre à terre, à l’ashram de Swâmiji, avec cette impression terrible : « Je ne trouve absolument pas qui je suis. » Je vois des contradictions et je vois com- ment je me modifie. L’image du kaléidoscope m’est venue à l’esprit d’elle-même comme l’image saisissante de ma propre condition. 7 Est-ce qu’il uploads/Philosophie/ soi-3-vedanta-et-inconscient.pdf

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