Haute Ecole Pédagogique de Fribourg Quel est le jugement moral d’un enfant sur
Haute Ecole Pédagogique de Fribourg Quel est le jugement moral d’un enfant sur une question à caractère éthique et dans quelle mesure ce jugement sera divergent ? Rebecca Short Travail effectué sous la supervision de Monsieur Samuel Heinzen Avril 2018 Rebecca Short Travail de Bachelor / 2018 2 Remerciements Je tiens avant tout à remercier mon tuteur M. Samuel Heinzen pour ses conseils avisés et son soutien. La disponibilité et la confiance dont il a fait preuve à mon égard m’ont permis d’avancer sereinement dans ce travail de recherche. Je remercie également les deux enseignantes qui ont accepté de me confier leur classe. Enfin, je remercie mes relectrices à l’œil aiguisé et aux conseils porteurs, Laeticia et Line. Résumé Cette recherche porte sur le jugement moral de l’enfant face à des situations comportant un dilemme moral et s’intéresse notamment au caractère divergent que son jugement peut revêtir, s’insérant ainsi dans une démarche qui se veut de favoriser le développement de la pensée créatrice. Le cadre conceptuel est structuré en deux parties : une première introduction à la notion de jugement moral, puis la présentation des deux courants principaux à avoir étudié cette notion : Kohlberg et Gilligan. Notre travail de recherche a pour buts d’une part de montrer quels sont les caractéristiques principales du jugement moral émis par un enfant de neuf ans sur des questions éthiques, en s’appuyant sur les critères évoqués par Kohlberg et Gilligan. D’autre part, il s’agit d’étudier le potentiel de la pensée divergente des enfants, en s’intéressant à la forme qu’elle prend. Notre démarche s’inscrit dans un mode de recherche qualitatif et consista en une récolte des opinions et des arguments d’enfants de deux classes de 6e Harmos sur des questionnements d’ordre éthique, simples et complexes (d’ordre déontologique ou comportant un dilemme moral) et de les classer selon la teneur de leurs arguments. Il ne s’agissait pas d’étudier la valeur morale de leur argumentaire, mais seulement sa composition, selon les critères sélectionnés. Notre recherche a permis de mettre en évidence les caractéristiques éthiques sur lesquelles s’appuient à la fois les jugements moraux des enfants et leurs jugements qualifiés d’anticonformistes. Mots-clés Développement moral de l’enfant - pensée créatrice - pensée divergente et anticonformiste - réflexion autonome - dilemmes éthiques. Rebecca Short Travail de Bachelor / 2018 3 TABLE DES MATIERES Introduction ............................................................................................................................... 4 Cadre conceptuel ..................................................................................................................... 15 Introduction à la notion de jugement moral ........................................................................ 15 Les deux courants principaux : Kohlberg et Gilligan ............................................................ 19 Questions de recherche ........................................................................................................... 26 Hypothèse ................................................................................................................................ 27 Méthode ................................................................................................................................... 30 Présentation et Analyses des résultats ................................................................................... 37 1er dilemme dit « du petit pain » .......................................................................................... 39 2e dilemme dit « du portefeuille » ....................................................................................... 41 Premières conclusions à la question de recherche « quel jugement moral un enfant de neuf ans aurait-il tendance à formuler ? » ........................................................................... 42 Arguments considérés comme anti- conformistes ou alternatifs ........................................ 43 Conclusions à la question de recherche « quel est le potentiel créatif de la pensée morale d’un enfant de neuf ans ? » .................................................................................................. 46 Conclusion ................................................................................................................................ 47 Limites de la recherche ............................................................................................................ 48 Déclaration sur l’honneur........................................................................................................ 50 Références bibliographiques ................................................................................................... 51 Annexes .................................................................................................................................... 55 Rebecca Short Travail de Bachelor / 2018 4 INTRODUCTION Former le citoyen de demain, tel est le défi auquel l’enseignement public s’attèle. Quoi de plus évident ? A quoi servirait une école qui ne serait pas en adéquation avec les besoins de la société ? La machine doit tourner, les enfants d’aujourd’hui seront les citoyens responsables de demain, capables de participer au mieux à la vie communautaire, au sein d’un pays certes, mais surtout au sein de la grande famille des êtres humains. Puisque nous vivons en démocratie, il est nécessaire que chaque enfant, futur citoyen, développe des valeurs et des compétences lui permettant de participer activement et de manière constructive à la vie démocratique du pays. C’est en ce sens que la Conférence intercantonale de l’instruction publique (CIIP) pour la Suisse romande et le Tessin a révisé ses objectifs et ses finalités en 2003. Ainsi, la CIIP déclare, entre autres, assurer « le développement de connaissances et de comportements de citoyen et d’acteur social ainsi que le développement de la faculté de discernement et d’indépendance de jugement ». En effet, si la vie démocratique permet au citoyen d’agir selon son libre-arbitre, de prendre position sur des débats, de soumettre ses idées aux votations et de choisir son métier, tout en le soumettant à la législature du pays, il apparaît essentiel que l’individu soit capable de penser par lui-même. A quoi bon bénéficier de la liberté de penser si l’individu ne possède pas l’autonomie suffisante pour l’exploiter ? Celui qui possède des droits doit également être en mesure de les utiliser, sans quoi nous lui retirons toute possibilité d’assumer ses responsabilités. Nous pourrions tout autant en dire de ce qui concerne les devoirs. Il revient à l’état et à l’enseignement publique de veiller à ce que chaque citoyen en soit instruit. De même, si l’individu ne fait qu’imiter un comportement, pouvons-nous délibérément parler de jugement propre et indépendant ? Ce serait l’échec de la démocratie, et donc de l’école. Ce qui fait la force même d’un pays démocratique, c’est la dynamique de renouveau perpétuel, qui s’adapte à l’évolution des besoins au fil du temps. Etre capable d’observer la mouvance des besoins et d’y ajuster son comportement et les lois, demande à la fois de la finesse dans le jugement et de la créativité dans l’adaptation. Cela aussi, l’instruction publique l’a cerné et fait mention d’entraîner les élèves à « la réflexion, la collaboration, la communication, la démarche critique et la pensée créatrice » (CIIP, 2003). Le Plan d’Etudes Romand (CIIP, 2010) prévoit donc d’assurer la « formation générale » de l’élève au « Vivre Ensemble et à l’exercice de la démocratie ». Entre idéaux et réalité du terrain, reste Rebecca Short Travail de Bachelor / 2018 5 à savoir si l’école parvient réellement à développer chez l’élève sa capacité de jugement indépendant et sa souplesse d’esprit. Parallèlement, l’école se doit de préparer l’enfant au monde de demain, comme nous l’avons déjà évoqué. Toutefois, si nous vivons une époque d’innovations fulgurantes et de changements perpétuels, les méthodes d’enseignement, elles, n’ont presque pas évolué depuis le XIXe siècle et l’invention du téléphone. L’expert en éducation Sir Ken Robinson résume ce propos dans sa vidéo « Changing Education Paradigms » (2010) et appuie l’idée que la plupart des pratiques enseignantes persistent à enseigner les matières scolaires séparément et l’enseignement des domaines scientifiques est beaucoup plus valorisé que l’enseignement des domaines artistiques ou de la gestion des émotions, par exemple. Cette conception de la scolarité et de l’enseignement s’est construite sur le modèle économique du XXe siècle, lorsque la concurrence entre les entreprises demeurait relativement faible et que leur gouvernance reposait sur une hiérarchie verticale, où patrons possédaient le savoir et ouvriers effectuaient les ordres, sans trop de remises en question. Or, les machines ont aujourd’hui remplacé l’homme dans la plupart des tâches mécaniques et l’ouvrier doit bien plus apprendre à gérer et améliorer leur rendement, afin de répondre au mieux à la concurrence croissante. Le marché économique voit émerger de plus en plus de start up et de free-lance indépendants et les modes de gouvernances horizontales apparaissent comme l’avenir du management au sein des entreprises, ainsi que le soutient le professeur Gary Hamel dans sa conférence « Reinventing the Technology of Human Accomplishment ». Nous retrouvons par exemple une structure de management horizontal au sein des entreprises Blablacar, Harley Davinson, l’agence de voyage Flight Centre ou Spotifiy. Le fonctionnement de Spotify, par exemple, se base sur l’indépendance de nombreuses unités, de petites équipes indépendantes de quatre à six personnes qui fonctionnent comme une mini start-up, capable d’être tout à fait indépendante et possédant tous les outils pour développer, créer, tester et produire. Chaque membre y a un rôle bien défini et chaque initiative est prise en considération. Toutefois les équipes se limitent à un champ d’action, un domaine plus particulier. Elles sont ensuite regroupées en tribus, chacune étant responsable d’un domaine plus large, tel que l’infrastructure des serveurs du site web. Chaque tribu comporte une unité dominante responsable de maintenir les meilleures conditions de travail possibles pour les autres membres. Une tribu ne comporte pas plus de cent membres, car au-delà apparaît une Rebecca Short Travail de Bachelor / 2018 6 tendance aux règles et aux politiques plus restrictives, plus de bureaucratie ou des couches managériales superflues. Lors d’interactions entre les tribus, ce sont directement les membres des unités qui sont à l’œuvre. Ensuite, il existe une autre forme de regroupement appelée guilde, qui rassemble par exemple tous les designers de chaque unité. Nous voyons donc une forme de suppression de la hiérarchie, où tous les membres sont sur un même pied d’égalité, où les privilèges tant salariaux que décisionnels d’un supérieur hiérarchique n’existent plus et où toute initiative est bienvenue et peut porter ses fruits (Kinberg et Ivarsson, 2012). L’école ne doit donc plus tout à fait uploads/Philosophie/2018-tb-fr-shortrebecca.pdf
Documents similaires










-
41
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jul 05, 2021
- Catégorie Philosophy / Philo...
- Langue French
- Taille du fichier 1.5345MB