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Tous droits réservés © Laval théologique et philosophique, Université Laval, 1995 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 6 fév. 2022 03:30 Laval théologique et philosophique Absolu/sujet. Le logique, le dialectique et le spéculatif Gwendoline Jarczyk et Pierre-Jean Labarrière Hegel aujourd’hui Volume 51, numéro 2, juin 1995 URI : https://id.erudit.org/iderudit/400912ar DOI : https://doi.org/10.7202/400912ar Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Faculté de philosophie, Université Laval ISSN 0023-9054 (imprimé) 1703-8804 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Jarczyk, G. & Labarrière, P.-J. (1995). Absolu/sujet. Le logique, le dialectique et le spéculatif. Laval théologique et philosophique, 51(2), 239–250. https://doi.org/10.7202/400912ar Laval théologique et philosophique, 51, 2 (juin 1995) : 239-250 ABSOLU / SUJET LE LOGIQUE, LE DIALECTIQUE ET LE SPÉCULATIF Gwendoline JARCZYK et Pierre-Jean LABARRIÈRE RÉSUMÉ : Hegel, de son propre aveu, a transcrit l'héritage de l'ontologie métaphysique (dont il n'excepte pas le transcendantalisme kantien) dans les canons d'une logique dont il a pro- fondément bouleversé l'intelligence. Avec le mouvement réflexif, qui s'impose alors à la base de son système, sont récusées d'un même mouvement l'abstraction d'un universel formel et vide et l'attention à une immédiateté seulement donnée qui ne serait pas saisie comme le corps d'effectivité de l'idée. D'où la clef de cet univers : la conviction de ce que le sujet (ou l'esprit) est structuré en lui-même de telle sorte que son effectuation historique, à même la contingence, fasse partie de son essence. Une « totalité-mouvement » qui, sans achèvement possible, identifie processuellement logique et histoire, absolu et contingence. L 9 intérêt que l'on porte à Hegel est soumis à d'étonnantes variations. Objet d'études et de références constantes dans le second quart de ce siècle, il a connu une éclipse au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en raison peut-être des interprétations aberrantes qui avaient fait de lui, en certains cercles, le chantre d'une domination pan-germanique. Bien vite délié de cette allégeance forcée aux courants nationalistes, et renouant avec une tradition plus ancienne, il vit son destin étroitement lié avec la philosophie « dialectique » de Marx et de ses successeurs. Mais curieusement, alors qu'une disgrâce, consécutive à l'effondrement des com- munismes, frappe actuellement cette pensée, Hegel ne semble pas entraîné par cette vague et connaît au contraire un regain d'actualité — surprenant, à tout prendre, en une époque dont la méfiance à l'égard du concept s'est nourrie d'une lecture parfois réductrice de son œuvre et de sa pensée. Hegel aujourd'hui. Une appréciation de son « actualité », comme aussi des promesses dont il peut encore être reconnu porteur, connaîtra d'importantes nuances selon qu'elle procède de tel ou tel milieu culturel. La vieille Europe fut longtemps marquée, en France surtout, par un intérêt dominant pour la Phénoménologie de l'esprit et pour les travaux de jeunesse ; une orientation qui s'est enrichie, depuis quelques décennies, d'un déchiffrement patient de la Science de la logique d'abord, 239 GWENDOLINE JARCZYK ET PIERRE-JEAN LABARRIERE puis du « Système » encyclopédique en son ensemble ; dans cette mouvance, la politique d'une part, l'art et la religion de l'autre, trouvent évidemment leur place — mais toujours avec le souci d'enraciner ces lectures « particulières » dans le mouvement fondateur de la Logique. Quant à la Phénoménologie, elle n'a pas été oubliée, et bénéficie pleinement de cette extension de l'angle de lecture. Ailleurs, et surtout outre-Atlantique semble-t-il, une tradition moins directement attentive à cette dimension « spéculative » serait tentée au contraire de passer l'« ontologie dialectique » par pertes et profits, et de ne retenir de cette philosophie que ce qui concerne le contenu de l'« Esprit objectif», singulièrement dans ses composantes éthico-politiques. À quoi il n'est pas malaisé de rétorquer que Hegel lui-même récuse cette sorte de coupure que l'on instaurerait entre l'effectivité his- torique et la « science du concept » ; ce qui, pour les lecteurs que nous sommes, se traduit par le fait que toute compréhension actualisante du « cercle herméneutique », dans son souci de reconnaître en Hegel un contemporain de nos questionnements (cercle « dialectique »), se doit de ne pas passer sous silence la première phase que requiert pareille intelligence : celle où l'on procède à une relecture de Hegel dans la distance, en respectant l'équilibre qu'il institua lui-même entre les différents moments de son système (cercle « ontologique »). C'est dans cet esprit que l'on tentera ici d'exprimer les relations entre « absolu » et « sujet » que Hegel met à la base de sa pensée ; cela dans l'esprit de notre récente édition française de la Phé- noménologie de l'esprit1 — persuadés de ce que cette première œuvre systématique contient en elle tout ce qui est requis pour comprendre les rapports que Hegel établit entre logique et histoire. I. LE SCHEME RÉFLEXIF La Phénoménologie de l'esprit est la narration du procès historique qui permet à la conscience, non point tant de « passer » du savoir immédiat qu'elle a d'abord d'elle-même et du monde au savoir véritable de la « Chose même », autrement dit « au connaître effectif de ce qui est en vérité »2, que de découvrir la profondeur réelle de la « certitude sensible » elle-même, en tant qu'elle est comprise dans la logique d'un « acte de parler qui a la nature divine de renverser immédiatement l'opinion, d'en faire quelque chose d'autre »3 ; par là en effet la certitude sensible se trouve libérée de toute sujétion à ce que l'on pourrait appeler un « absolu du premier degré » — le monde ou le moi — posé comme un terme extérieur auquel le savoir devrait se soumettre et sur lequel il aurait à se régler. Voilà qui implique un bouleversement de la compréhension que l'on a commu- nément des rapports entre sujet et objet. Pour un Hegel, la « révolution 1. G.W.F. HEGEL, Phénoménologie de l'esprit, Gallimard, 1993. 2. C'est le but que se fixe Hegel lorsqu'à l'automne 1805 il trace les premières lignes de l'« Introduction » à cette œuvre. Cf. Ph.G., G.W. 9, 53/1-2 (132/2-3) [références aux Gesammelte Werke, Felix Meiner, tome 9, Hamburg, 1980, et, entre parenthèses, à la traduction française citée ci-dessus, note 1]. 3. Ph.G., G.W. 9, 70/22 (158/17). 240 ABSOLU / SUJET copernicienne » qui fut l'œuvre de Kant ne modifia pas de façon fondamentale la logique traditionnelle qui présidait à l'établissement de ces relations. Dire en effet que le savoir n'a pas à se modeler sur l'objet mais que celui-ci au contraire doit être référé à l'esprit qui en connaît et aux capacités d'appréhension qui sont les siennes ne fait qu'introduire une variante dans une problématique inchangée, qui continue d'organiser en seconde instance une équation dont les termes sont présup- posés en leur extériorité d'origine. Or c'est cela précisément que Hegel entend remettre en cause : entre sujet et objet, entre connaissance et absolu, il postule quant à lui une réciprocité originaire, de nature authentiquement (onto)logique, qui met ces deux termes en situation de double « pré-supposition », sans nulle antériorité, ni chronologique ni même seulement logique, de l'un par rapport à l'autre ; c'est cela qui, chez lui, s'appelle la « réflexion » — un terme qui n'a pas seulement une portée noétique, mais qui touche à la constitution de la réalité dans sa dimension fondamentale d'existence et d'effectivité. Dans la Préface à la Phénoménologie, la pleine mesure de cette révolution se trouve donnée lorsque Hegel affirme : « Selon mon intellection [...], tout dépend du fait de saisir et d'exprimer le vrai, non comme substance, mais tout autant comme sujet4 ». Un point de vue dont il est dit en ce même passage qu'il devra « se justifier par la présentation du système lui-même » ; l'on sait comment la Science de la logique, en sa césure majeure articulant « Logique objective » et « Logique subjective », assurera effectivement cette conversion de la « substance » dans l'éco- nomie du « concept » (dont l'expression première et dernière est justement le « sujet »). Or cette identité substance/sujet est inscrite, dans la table des matières détaillée concernant le passage de la Préface qui vient d'être cité, sous un titre intercalaire qui identifie « substance » et « absolu », puisque l'on peut lire en cet endroit : « L'absolu est sujet »5 — ce qui nous ramène au titre de la présente étude. Sujet, l'absolu cesse donc d'apparaître en figure d'extériorité objective, comme un donné existant par lui-même dont le savoir aurait à s'emparer ; il est articulé en soi dans une dimension d'esprit qui le fait lui-même et l'autre de lui-même, à la fois universel dans son autonomie d'origine et décidément particulier uploads/Philosophie/absolu-sujet-le-logique-le-dialectique-et-le-speculatif-gwendoline-jarczyk-et-pierre-jean-labarriere.pdf
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- Publié le Jui 01, 2022
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