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La théorie du concept de Stevan Harnad Résumé Pour Harnad, différentes représen

La théorie du concept de Stevan Harnad Résumé Pour Harnad, différentes représentations entrent en jeu dans le processus de la catégorisation (p. ex. iconique, catégorielle et symbolique). Toutes ces représentations sont provisoires et approximatives. Mais alors que les représentations iconiques et catégorielles sont d'ordre analogique, la représentation symbolique est d'ordre numérique. En utilisant des réseaux neuronaux pour simuler l'apprentissage des catégories, Harnad démontre sa vision dynamique de la conceptualisation. Par la suite seront présentées les opérations nécessaires à la catégorisation. Finalement, Harnad fait un lien entre le langage et la cognition par le sensorimoteur. Bien que sa théorie soit très utile pour expliquer les fondements du langage, Harnad n'apporte rien de nouveau quant au rapport entre le concept, la décision et la conscience de soi. 1. Introduction 1.1 Le concept en psychologie Pour beaucoup, le concept est la clé de voûte de toutes les connaissances. En effet, certains psychologues comme d’Almeida, Fodor et même Harnad pensent que le concept est le lien entre le langage et la cognition. En effet, c'est parce qu'on a un concept de « table » qu'on est capable d'identifier une table lorsqu'on en voit une et même de produire le son « table » pour nommer la chose. Certains philosophes, comme Kant, pensent même que le concept est essentiel à la conscience de soi (Kant, 2001). Mais, pour les philosophes contemporains, avoir un concept ne se résume pas à avoir une « représentation » statique pour chaque mot, en fait avoir un concept serait une capacité sensorimotrice adaptative. Harnad fait partie de ces personnes qui possèdent cette vision dynamique du concept et qui utilisent la méthodologie utilisée en intelligence artificielle pour mieux comprendre la cognition des êtres vivants. On reproche pourtant à ces philosophes de manquer de précision : si la conceptualisation est un processus dynamique, alors quelles sont les fonctions et structures nécessaires à la conceptualisation? Est-ce qu'un animal peut conceptualiser les objets qu’il perçoit? Comment la conceptualisation participe-t-elle aux autres opérations de la cognition (p. ex. : raisonnement, décision, inférence)? Si le concept a un lien avec le langage, quelle est la nature de ce lien? Ce texte va essayer de déterminer quelles réponses Harnad peut donner à ces questions fondamentales. 1.2 La conceptualisation est de la catégorisation Si l'on utilise la définition de Fortin et Rousseau (2005), « le concept est [ce] qui nous permet de catégoriser », alors il est essentiel de savoir ce que l’on entend lorsqu’on parle de catégorisation. De plus, il semble qu'Harnad fasse partie de ces auteurs qui ne font pas de distinction entre les termes « catégorie » et « concept ». On pourrait postuler que la théorie de la catégorisation soit une théorie de conceptualisation. 1.3 Que doit-on exiger d'une théorie du concept? Selon Harnad, une théorie du concept doit expliquer sous quelles conditions un agent cognitif peut identifier les choses (communication personnelle, 19 février 2007). Pour ce faire, il faut que la théorie du concept indique quelles structures et quels processus peuvent expliquer comment un organisme est capable d'apprendre à catégoriser et à classer des classes d'« entrées »1 en détectant les invariants2 dans leurs projections sensorielles3 et comment des propositions sur l'appartenance à une catégorie permettent de former des catégories d'objets que l'agent n'a jamais rencontrés avant (Harnad, 1996a). 1.4 Qu'entend Harnad par catégorisation? Puisque pour savoir comment un agent identifie les choses, il faut comprendre comment il apprend à catégoriser, pour expliquer la conceptualisation il faut comprendre la catégorisation. « La 1 “ensemble d'informations destinées à être traitées”ATILF 2 “en math et physique, en parlant d'une propriété ou d'une relation invariantes est ce qui reste le même après transformations” 3 Il semble qu'Harnad parle de la correspondance fonctionnelle entre le cerveau et certaines parties de l'organisme, comme les projections de la rétine sur le cortex strié, définition médicale qu'on peut retrouver dans le Medline Plus, Merriam- Webster. catégorisation est une interaction systématique différentielle entre un agent sensorimoteur autonome adaptatif et son monde » (Harnad, 2005b). Différentiel étant donné que ce n'est pas une sortie différente pour chaque entrée, au contraire, c'est plutôt une sortie différente pour chaque sorte d'entrée (Harnad, 2005b). Il y a donc catégorisation lorsque la même sortie est produite systématiquement en présence d'une sorte particulière d'entrée (Harnad, 2005b). 1.5 Comment se forment les catégories? On peut affirmer qu'Harnad parle de trois niveaux de représentations qui semblent correspondre à trois types de configurations de l'information (Harnad, 1987). 1.6 Qu'est-ce qu'une représentation? Selon Harnad (1999), une représentation est un « changement interne fonctionnel ou structural ». 2. La catégorisation d'Harnad est une forme supérieure de cognition La théorie de la catégorisation correspond à une théorie représentationnelle dans le sens classique du terme (Meunier, 2006). Les représentations sont en effet généralisantes donc englobent une multitude d'expériences et elles sont toutes compositionnelles. 2.1 La représentation iconique (IR) La première représentation est de type iconique au sens percéen4 du terme (Harnad, 1987), il s'agit en fait de multiples représentations analogiques5 très similaires des projections sensorielles 4 Il semble qu'ici iconique soit utilisé sans son sens percein qui est un type de signe qui opère par la similitude de fait entre deux événements Source Laboratoire d'Analyse et de Traitement Informatique de la Langue Française sous le mot icône 2e sens.(“Symbolic Grounding and the Symbolic Theft Hypothesis” chap. 9 of Simulating the Evolution of Language (2002) p.2 5 Qu'entend Harnad par analogiques? Voici la définition du Grand Dictionnaire : Se dit de toute donnée variant de façon continue ou dont la représentation se fait sous la forme d'une grandeur physique continue pouvant prendre une infinité de valeurs, ainsi que des procédés et des appareils basés sur ce type de donnée. Note: Le son, la voix, les images, les couleurs sont des phénomènes analogiques, comme d'ailleurs la plupart des phénomènes naturels. Les ordinateurs actuels étant des appareils numériques, il faut donc transformer les données analogiques (comme le son ou les images) en données numériques, pour qu'elles puissent être comprises et traitées. proximales d'objets et d'événements distaux (Cangelosi & Harnad, 2002). Les représentations iconiques sont reliées entre elles par la similarité physique de leurs configurations (Harnad, 1987). 2.1.1 Les représentations iconiques sont provisoires et approximatives (Harnad, 1982a). Les représentations iconiques préservent la forme physique (Harnad, 1987). Elles sont des approximations, car elles perdent de l'information due à la limite de capacité des capteurs (Harnad, 1987). Par définition, une représentation iconique ne peut qu'être une approximation puisque rien dans le système nerveux n’est continu. Même si la représentation iconique préserve la forme physique, il y a toujours une perte d'information entre l'objet et la représentation (Harnad, 1987). Remarquons que les représentations iconiques sont reliées entre elles seulement par une similitude dans leur configuration physique, elles ne partagent pas nécessairement une même catégorie (Harnad, 1987). Par exemple, le cygne et le canard ont de grandes similitudes. C'est seulement la représentation catégorielle qui va décider quelles caractéristiques sont plus pertinentes que d'autres, alors que les représentations iconiques vont simplement les superposer ensemble. Ou bien, de la même façon, les différentes variétés de champignons ont entre elles de grandes similitudes, leurs représentations iconiques vont se superposer, alors que leurs représentations catégorielles vont les discriminer. Cela dit, d’après Harnad, les représentations iconiques sont utiles, même idéales, pour de la discrimination relative dans laquelle un agent cognitif aurait simplement à faire des jugements tels que « pareil », « différent » (Harnad, 1987). Pourquoi idéales? Harnad semble suggérer que la catégorisation fait perdre de l'information que donnaient les représentations iconiques. En effet, ces dernières n'ont jamais été filtrées. Affirmation qui semble se confirmer dans la perception des phonèmes chez les bébés : leurs discriminations semblent plus fines lorsqu'ils sont plus jeunes. Alors qu'à 6 mois, les enfants japonais sont capables de discriminer les sons « r » et « l », à 12 mois, ils développent une spécificité du langage qui les rend ensuite incapables de faire une telle discrimination (Werker & Tees, 2005). On pourrait conclure que lorsqu'ils étaient bébés, les enfants japonais n'avaient que des représentations iconiques de « r » et de « l », mais à 12 mois, ils ont acquis des représentations catégorielles de ces deux sons. Les représentations iconiques gardent la structure spatiotemporelle (Harnad, 1987). 3. La représentation catégorielle (CR) 3.1 Les représentations catégorielles sont provisoires et approximatives Elles sont provisoires, car les règles de classification peuvent changer si elles ne sont plus adaptées au contexte (Harnad, 1987). En effet, les règles de classification sont basées sur la fiabilité des invariants. Si après plusieurs essais et erreurs, les règles de classification échouent à leur tâche de discrimination entre les membres d'une catégorie et les non-membres, alors l’organisme va chercher d'autres règles de classification plus adaptées (Harnad, 1987). Les règles de classification sont des tentatives de conclusion après de multiples expériences. En d’autres mots, les règles de classification ne sont que des généralisations découlant de plusieurs cas particuliers (Harnad, 1987). Rappelons qu'une représentation est un changement soit dans la fonction ou soit dans la structure. Alors que la représentation uploads/Philosophie/la-theorie-du-concept-de-stevan-harnad.pdf