18.- ENSEMBLE DOCUMENTAIRE SUR LA FIN DU FRANQUISME Document 1 : Article de San

18.- ENSEMBLE DOCUMENTAIRE SUR LA FIN DU FRANQUISME Document 1 : Article de Santiago Carrillo paru dans Le Monde diplomatique en mai 1975 Les derniers événements politiques en Espagne ont montré l’incapacité du régime instauré par Franco de s’ouvrir et se modifier par ses propres mécanismes. Rien d’étonant à cela : les loups font des petits loups mais pas de petites brebis. Dès qu’on a parlé de suffrage universel, M. Fraga Iribarne lui-même s’est vu refuser le droit d’association. C’est assez dire... Mais simultanément, devant l’évolution de l’ensemble de la société, le régime ne peut pas –non plus- se fermer davantage, retourner à ses origines fascistes terroristes, sans déclencher une commotion qui mettrait en danger trop de choses. Le voilà cantonné dans un immobilisme dans lequel s’entremêlent de façon étonnante les faiblesses et les excès répressifs, les invocations à l’ordre et le désordre, la dictature d’en haut et les parcelles de liberté arrachées d’en bas par la lutte de masse. En fait, non seulement l’abîme se creuse chaque jour plus profondément entre le pays légal et le pays réel, mais même des secteurs de l’appareil d’État se détachent du régime politique. L’immobilisme mène à des déchirements dramatiques à l’intérieur du bunker1. Aujourd’hui, il parait indéniable que le dernier remaniement ministériel a vu s’affronter le palais du Pardo2 et M. Arias Navarro, et que celui-ci s’est imposé au vieux Caudillo déclinant grâce à l’appui des chefs de l’armée. Par un de ces caprices coutumiers de l’histoire, le créateur du régime est devenu l’obstacle à sa survie. Pour que le régime se prolonge, il faut ravaler sa façade ; il faut proclamer l’impeachment3 de Franco et le remplacer par son succeseur, le prince Juan Carlos. C’est la tâche que se proposent M. Arias Navarro et tous ceux qui d’une façon plus ou moins avouée, sont de connivence avec lui. Mais comment le faire sans que l’impeachment sonne le glas4 non seulement pour Franco mais aussi pour le régime politique ? Comment imposer à Franco un départ qui apparaisse comme décidé de son propre gré ? 1 Bunker: l’ensemble de personnes et d’institutions voulant maintenir à tout prix les caractéristiques du régime franquiste, refusant toute ouverture. 2 Palais du Pardo: résidence du dictateur Francisco Franco tout au long de sa dictature 3 Impeachment: procédure aux États-Unis par laquelle le Président peut être renversé par le Congrès. À l’epoque, ce terme était souvent utilisé du fait de la menace d’impeachment du President des États-Unis Richard Nixon à cause du scandale Watergate 4 Sonner le glas: faire connaître que quelqu’un ou quelque chose est disparu, mort. On sonne le glas quand quelqu’un est mort. 1 Document 2 : Franco s’adresse à la foule le 1er octobre 1975 dépuis le Palais Royal lors de la manifestation contre les protestations internationales à cause des dernières fusillades du régime franquiste le 27 septembre 1975 1.- Présentation des documents Le document 1 est un document historique-circonstanciel et journalistique. Un commentaire politique du secrétaire général du Parti communiste, Santiago Carrillo, sur les caractéristiques de la dictature franquiste dans ses derniers moments. Le document 2 est un document témoin, iconographique et de source primaire, une photographie qui montre la dernière apparition publique du dictateur dans le balcon du Palais Royal lors de la manifestation du 1er octobre 1975 d’appui a la dictature et contre les protestations internationales à cause des denières fusillades du régime franquiste L’auteur du premier document est Santiago Carrillo (1915-2012), à l’époque secrétaire général du Parti communiste d’Espagne. Le Parti communiste est devenu tout au long de la dictature l’un des piliers de l’opposition au régime franquiste. Santiago Carrillo, en est son secrétaire général entre 1960 et 1982, l’époque où se sont produits de profonds changements dans la société espagnole et où sont apparus de nouveaux mouvements sociaux d’opposition, dont notamment le nouvel élan acquis par le mouvement ouvrier et le mouvement étudiant. Carrillo et le Parti communiste vont jouer aussi un rôle important dans la transition démocratique après la mort de Franco et malgré le refus des éléments les plus immobilistes du régime, la légalisation du Parti communiste devient une condition indispensable pour la mise en place d’un système démocratique. En 1982, en conséquence des mauvais résultats du Parti communiste dans les élections d’octobre de cette année, Santiago Carrillo démissionne comme secrétaire général du Parti communiste. Quant à la photographie, il s’git d’une photographie de presse, dont l’auteur nous est inconnu, qui montre la dernière apparition publique de Franco entouré du futur chef de l’État, le roi Juan Carlos I et des représentants des institutions du régime, notamment de l’Armée. 2 Le texte souligne surtout les contradictions internes du régime dans les dernières années de son existence. D’une part, la mise en place d’un processus de transition à la démocratie semblait incontournable pour atteindre l’insertion de l’Espagne dans son entourage européen. D’autre part, les secteurs immobilistes refusent n’importe quel type d’ouverture politique et même les secteurs qui prétendaient une certaine ouverture menaient à terme des projets tout à fait insuffisants pour aboutir à la mise en place d’un système démocratique. Cette contradiction se montre avec le maintien de Franco à la tête de l’État. Si ce maintien empêchait d’avancer vers la démocratie, l’élimination politique de Franco pouvait déboucher sur la disparition de toute la structure du franquisme, ce que ni les partisans du maintien du franquisme à outrance, le bunker, ni même les « réformistes » étaient disposés à consentir. La photographie, où Franco apparaît entourée des autorités du régime et notamment de la hiérachie de l’Armée, montre l’appui de celle-ci à la dictature, alors que la présence du prince Juan Carlos, a pour but de montrer qu’en tout cas le régime va continuer avec ses caractéristiques essentielles même après la disparition de Franco. 2.- Contexte historique. Il faut situer ces documents dans le contexte suivant. D’abord, les caractéristiques des derniers moments du régime, marqués par les incertitudes sur la succession de Franco et la continuité du régime, étant donné l’évident déclin physique du dictateur et les demandes aussi internes qu’internationales de transformation politique. La reprise des caractéristiques les plus répressives de la dictature qui va avoir lieu surtout à partir du gouvernement de Carrero Blanco et, après la mort de celui-ci, avec le gouvernement d’Arias Navarro, amènent à la prise des mesures comme le retour aux exécutions des condamnés par des motifs politiques où à la mise en place d’un décret antiterroriste qui suppose en fait l’établissement de l’État d’exception. Puis, les contradictions et les luttes internes entre les éléments les plus attachés à la dictature, ceux qui sont appelés le bunker, et les dits « aperturistas », tensions qui vont s’accroître dans les dernières années du régime. Enfin, la poussée de l’opposition qui, en plus, depuis juin 1974 a réussi à se rassembler dans des organisations unitaires telles la Junta Democrática de España ou la Plataforma de Convergencia Democrática, qui regroupent, la première, le Parti communiste et d’autres groupes et personalités de l’opposition démocratique et la seconde le Parti socialiste et encore d’autres groupes de l’opposition. Ces deux plateformes unitaires aboutissent finalement au début 1976 à la formation de Coordinación Democrática, organisme unitaire de toute l’opposition. 3.- Réflexion organisée sur la crise politique du franquisme. Si on peut dire que la crise finale du franquisme a lieu à partir de la fin des années 1960, c’est surtout à partir de 1973, quand on peut parler réellement de l’agonie finale du régime liée aussi á l’évident déclin physique du dictateur et à son abandon pour la première fois depuis la guerre civile de la direction du gouvernement, mettant à la tête de celui-ci l’amiral Carrero Blanco pour prépararer la succession. Pour analyser quels sont les éléments qui caractérisent cette agonie du régime on va utiliser un plan chronologique mettant en relief premièrement la tentative de Carrero Blanco d’assurer la continuité du régime et deuxièmement, après la mort en attentat de Carrero, soulignant l’échec d’Arias Navarro pour, d’abord, mettre en place un projet de réforme tout à fait insuffisante et, ensuite, essayer d’assurer à nouveau la continuité du régime moyennant la répression. 3 En juin 1973, Franco quitte pour la première fois depuis la guerre civile la direction du gouvernement et nomme à la tête du gouvernement l’amiral Carrero Blanco. Il s’agissait de préparer la succession et de garantir la continuité du régime. Le gouvernement de Carrero supposait un renforcement des aspects les plus répressifs du régime et se multiplient les actions contre la presse et l’opposition, notamment le mouvement ouvrier, comme montre le procès 1001 contre les dirigeants de Comisiones Obreras. Cependant, l’assassinat de Carrero le 20 décembre 1973 dans un attentat spectaculaire de l’ETA déconcerta aussi les dirigeants franquistes que les partis de l’opposition, et altère de fond en comble les prévisions de Franco provoquant l’incertitude sur la succession du régime. En effet, si le régime essaie de maintenir les prévisions de continuité avec la nomination de Carlos Arias Navarro, ministre de l’Intérieur dans le gouvernement de Carrero, comme nouveau président du gouvernement, on prend uploads/Politique/ commentaire-fin-du-franquisme.pdf

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