1 IV. CYCLICITÉ DE LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE : LE ROLE DE LA DETTE, DES INSTITUTI
1 IV. CYCLICITÉ DE LA POLITIQUE BUDGÉTAIRE : LE ROLE DE LA DETTE, DES INSTITUTIONS ET DES CONTRAINTES BUDGÉTAIRES Introduction L’orientation budgétaire peut réagir au cycle économique dans un sens proconjoncturel… Ce chapitre examine dans quelle mesure la politique budgétaire a exercé une influence stabilisatrice ou déstabilisatrice sur l’activité économique de la zone de l’OCDE ces deux dernières décennies, et étudie quelques-uns des facteurs institutionnels qui ont pu conduire aux résultats observés. Cette analyse est motivée par le fait que des interventions budgétaires discrétionnaires peuvent s’avérer procycliques ; c’est le cas en particulier d’un resserrement budgétaire en phase de récession. Ceci peut résulter d’un endettement public trop élevé pour être soutenable. Mais la procyclicité peut aussi être due à des problèmes de mise en œuvre ou au cadre institutionnel dans lequel s’inscrivent l’élaboration et l’application des politiques, notamment à certaines approches de la stabilité budgétaire fondées sur des règles, susceptibles de contrarier le jeu symétrique des stabilisateurs automatiques durant le cycle. … et les institutions sont susceptibles de contribuer à cet effet Dans ce contexte, ce chapitre commence par évaluer dans quelle mesure l’orientation de la politique budgétaire a été procyclique ou contracyclique dans la zone de l’OCDE et dans différents pays pris individuellement au cours de la période 1980-2002, les phases procycliques étant définies comme les périodes durant lesquelles les fluctuations des soldes budgétaires corrigés des variations cycliques ont évolué en sens inverse de l’écart de production (vers un excédent dans les phases de récession, et vice versa). Il utilise ensuite des données chronologiques nationales groupées pour évaluer jusqu’à quel point les stabilisateurs automatiques ont été neutralisés par des mesures discrétionnaires et comment le cadre institutionnel dans lequel les politiques sont élaborées et appliquées peut avoir influencé leur impact. Les facteurs institutionnels examinés sont le type de règle budgétaire adoptée1, l’importance de la pression fiscale, les rigidités des dépenses publiques, la cohésion politique du gouvernement et les systèmes et cycles électoraux. 1 . Le numéro 72 des Perspectives économiques de l’OCDE (décembre 2002) présente une vue d’ensemble des principales dispositions des règles budgétaires dans les pays Membres, en précisant la date de leur mise en œuvre. Voir le chapitre V du numéro actuel des Perspectives économiques, « Relations financières entre l’État et les collectivités territoriales », pour un aperçu des règles budgétaires au niveau infranational dans la zone de l’OCDE et dans certains pays non membres. 2 Résumé des conclusions Les principales conclusions qui se dégagent de ce chapitre sont les suivantes : Les problèmes de soutenabilité, associés à l’endettement, semblent être un déterminant clé du caractère procyclique de l’orientation budgétaire durant les phases de basse conjoncture. Abstraction faite des questions de soutenabilité de la dette, l’orientation de la politique budgétaire tend à être principalement contracyclique dans les périodes défavorables, mais certaines données pour la zone de l’OCDE révèlent un assouplissement procyclique discrétionnaire dans les périodes de haute conjoncture. Les aspects institutionnels du processus d’élaboration des politiques qui entraînent une forte stabilisation automatique à court terme, notamment un secteur public de grande dimension et une pression fiscale élevée, sont également susceptibles, au niveau politique, d’induire une politique budgétaire plus procyclique. Des taux de prélèvements obligatoires élevés autorisent une plus grande contracyclicité automatique, mais les réductions d’impôts mises en œuvre dans les phases d’expansion risquent de réduire les possibilités d’assouplissement contracyclique lors des récessions ultérieures. Les contraintes imposées par le Traité de Maastricht, puis par le Pacte de stabilité et de croissance, ne semblent pas avoir créé un biais nettement procyclique durant les phases de récession dans l’ensemble de la zone de l’Union économique et monétaire (UEM). Un resserrement budgétaire déstabilisateur pendant les phases de récession a un peu moins de chances de se produire en présence de rigidités des dépenses. Tel est le cas lorsque, par exemple, la masse salariale, plus difficile à comprimer que les dépenses d’équipement, représente une grande partie des dépenses publiques et que l’État est un gros employeur en comparaison du secteur privé. Les institutions politiques interviennent également : les mesures d’austérité procycliques indésirables sont semble-t-il moins fréquentes dans les pays dotés de gouvernements politiquement plus fragmentés et de systèmes électoraux fondés sur la représentation proportionnelle et non sur la pluralité (par exemple, scrutin majoritaire uninominal à un tour). Les cycles électoraux ont un rôle à jouer, puisque les programmes d’austérité proconjoncturels sont apparemment moins répandus durant les années électorales. 3 Graphique IV.1. Cyclicité de la politique budgétaire -8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 En pourcentage 1980 82 84 86 88 90 92 94 96 98 2000 02 A. Zone OCDE en pourcentage du PIB en pourcentage du PIB potentiel Solde financier Solde corrigé des variations cycliques Impact du cycle 1 -8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 En pourcentage 1980 82 84 86 88 90 92 94 96 98 2000 02 B. États-Unis -8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 En pourcentage 1980 82 84 86 88 90 92 94 96 98 2000 02 C. Japon -8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 En pourcentage 1980 82 84 86 88 90 92 94 96 98 2000 02 D. Union européenne -8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 En pourcentage 1980 82 84 86 88 90 92 94 96 98 2000 02 E. Grands pays de la zone euro 1. Les surfaces ombrées correspondent aux phases de ralentissement économique, définies comme les années où les changements de l’écart de production par rapport à l’année précédente ne sont pas positifs. 2. Allemagne, France et Italie. Source : OCDE 2 -8 -7 -6 -5 -4 -3 -2 -1 0 1 2 3 4 En pourcentage 1980 82 84 86 88 90 92 94 96 98 2000 02 F. Royaume-Uni 4 Cyclicité de la politique budgétaire L’orientation budgétaire varie considérablement d’un pays de l’OCDE à l’autre… Le solde budgétaire des administrations publiques sur l’ensemble de la zone a affiché des variations cycliques considérables depuis le début des années 80, sa composante corrigée des variations cycliques restant très proche de -4.0 pour cent du PIB jusqu’au début des années 90 et s’orientant beaucoup plus vers l’équilibre par la suite (graphique IV.1, partie A). Depuis 2000, on a observé une forte dégradation des soldes effectifs et corrigés des variations cycliques. Les différences régionales à l’origine de ces mouvements globaux sont restées significatives. En particulier, l’expérience du Japon contraste avec la réduction du déficit des États-Unis sur la même période et avec l’effort collectif d’assainissement budgétaire en Europe avant 1997, date limite de qualification pour le passage à la monnaie unique (parties B-D). Depuis 2000, l’assouplissement discrétionnaire de la politique budgétaire a été particulièrement marqué aux États-Unis et, dans une moindre mesure, au Royaume-Uni (partie F). Il a été moins spectaculaire en Europe continentale, mais s’est amorcé plus tôt – en 1999 – dans les grandes économies de la zone euro (partie E). … avec un biais procyclique dans certains cas Tandis que l’ajustement budgétaire a été contracyclique dans la zone de l’OCDE pendant de longues périodes, notamment de 1993 à 2000, dans certains pays il a parfois eu une action assez procyclique, comme en témoignent les périodes où les positions budgétaires corrigées des variations cycliques évoluaient en sens inverse de la composante cyclique du solde budgétaire2. C’est ce qui a été observé aux États-Unis sur la période 1982-86 et dans les grandes économies européennes durant la majeure partie de la période allant jusqu’en 1993. A l’inverse, la période d’austérité des années 90 est intervenue quand les écarts de production se comblaient aux États-Unis et en Europe, si bien que le dynamisme conjoncturel des recettes a été amplifié. Toutefois, l’orientation budgétaire dans les grandes économies de la zone euro a été procyclique en 2000, pour devenir contracyclique en 2001. Les expériences des différents pays sont contrastées Si l’on considère les évolutions par pays, l’orientation budgétaire a été contracyclique dans la moitié environ des pays étudiés (graphique IV.2). Dans ces pays, situés dans le quadrant supérieur, au cours de la période 1981-2002, les fluctuations annuelles de l’écart de production ont été corrélées positivement avec les variations annuelles du solde budgétaire corrigé des variations cycliques3. Pour les pays du quadrant inférieur, qui comprennent neuf des membres de l’UEM, un creusement de l’écart de 2 . La politique budgétaire a une orientation contracyclique quand elle contribue à amortir les effets des fluctuations du cycle sur l’économie. La procyclicité apparaît lorsque, dans une phase d’expansion, les dépenses augmentent et/ou les recettes diminuent, d’où une contraction du solde budgétaire. 3 . Ces corrélations, bien qu’instructives, peuvent être affectées par des erreurs de mesure résultant du fait que les soldes budgétaires corrigés des variations cycliques ne sont pas observés directement mais calculés en fonction de la sensibilité estimée au cycle économique des recettes fiscales et de certains postes de dépenses. Les biais imputables aux erreurs de mesure peuvent être atténués dans uploads/Politique/ cyclicite-de-la-politique-budgetaire.pdf
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- Publié le Aoû 08, 2021
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