L1 - Intro droit constit. – II La division du pouvoir - Sophie JEUSSEAUME 1 INS
L1 - Intro droit constit. – II La division du pouvoir - Sophie JEUSSEAUME 1 INSTITUT D’ENSEIGNEMENT À DISTANCE DE L’UNIVERSITÉ PARIS 8 VINCENNES-SAINT-DENIS II – LA DIVISION DU POUVOIR Cours de Mme Jeusseaume-Jossaud (Maître de conférences) LICENCE DE DROIT - 1ère année 2018 -2019 L1 - Intro droit constit. – II La division du pouvoir - Sophie JEUSSEAUME 2 Sommaire SOURCES ........................................................................... ERREUR ! SIGNET NON DEFINI. Section I - Le principe. .......................................................................................................... 3 §1 – Les origines. .............................................................................................................. 3 §2 – La mise en œuvre de la division du pouvoir. ............................................................ 5 §3 - Classification des régimes en fonction de la séparation des pouvoirs. ...................... 8 Section II - L’imbrication des trois pouvoirs. ....................................................................... 9 §1 - Le partage de pouvoir entre l’organe législatif et l’organe exécutif. ......................... 9 §2 – La situation du pouvoir judiciaire. .......................................................................... 12 TABLE DES MATIERES ........................................................................................................ 19 L1 - Intro droit constit. – II La division du pouvoir - Sophie JEUSSEAUME 3 L’idée de diviser le pouvoir, de le séparer en plusieurs missions et de le répartir entre plusieurs personnes est née du fait que le premier danger pour l’intérêt général est, bien sûr, la concentration du pouvoir entre les mains d’un seul homme ou d’une seule institution et le risque d’abus qui en découle. La division du pouvoir est donc un principe politique fondamental, basé sur la recherche d’une protection des gouvernés contre les gouvernants. Nous le verrons en détail (section 1). Ensuite nous verrons que, bien que la séparation des pouvoirs distingue clairement des missions et des organes différents pour les accomplir, l’étude des textes constitutionnels et de la pratique constitutionnelle révèle un degré non négligeable d’imbrication de ces trois pouvoirs (Section II). SECTION I - LE PRINCIPE. La séparation des pouvoirs1, ou division du pouvoir, est reconnue comme le socle nécessaire de toute constitution par l’article 16 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (DDHC) de 1789, qui dispose qu’une société qui ne détermine pas la séparation des pouvoirs « n’a pas de Constitution ». Le point de départ de la théorie de la séparation des pouvoirs est la distinction entre les différentes missions (on parle de séparation « fonctionnelle » ou « matérielle ») qui incombent au(x) détenteur(s) du pouvoir dans un Etat. La séparation des pouvoirs se traduit par la distinction d’au moins trois différentes missions, trois fonctions, au sein du pouvoir : - Pouvoir de légiférer, c’est-à-dire créer ou modifier (réformer) les lois - Pouvoir d’exécuter les lois, de les mettre en œuvre - Pouvoir de juger les conflits à l’aide des lois (et des autres règles juridiques applicables) S’y ajoute d’autres fonctions : le pouvoir de créer ou réformer la constitution et le pouvoir de créer ou réformer les règles internationales et plus généralement de mener les relations internationales. La suite logique de la réflexion sur la protection des hommes contre les abus de pouvoir est la séparation organique : non seulement les tâches sont différenciées, mais elles ne sont plus confiées à un titulaire unique (séparation dite « organique » ou « institutionnelle »). C’est pourquoi, chaque fois que possible, je vous demande de renoncer à l’emploi du terme « pouvoir », ambigu car doté de 2 acceptions, et de lui préférer un terme plus précis : soit celui de « fonction » (ou mission, ou compétence), soit celui d’ « organe ». §1 – LES ORIGINES. Nous allons voir d’une part l’origine historique, pragmatique de la séparation des pouvoirs et d’autre part l’approche philosophique. A - L’ORIGINE HISTORIQUE. L’origine de la séparation des pouvoirs se trouve dans l’histoire politique de l’Angleterre. Les Etats généraux, représentants la population anglaise, sont devenus un Parlement, composé d’une Chambre haute, dite Chambre des Lords, et d’une Chambre basse, la Chambre des Communes. Ils ont accru progressivement leur emprise sur les décisions du pouvoir royal, ce qui a abouti, de fait, à un 1 M.Troper « La séparation des pouvoirs et l’histoire constitutionnelle française » Thèse 1973. L1 - Intro droit constit. – II La division du pouvoir - Sophie JEUSSEAUME 4 partage du pouvoir. Le système politique anglais repose donc sur les trois composantes de la population que sont le monarque, l’aristocratie et la bourgeoisie. Concrètement, les parlementaires ont su utiliser le rapport de force entre eux et le Roi et ont procédé à un quasi chantage. En effet, ayant seuls la compétence d’autoriser la levée de l’impôt, ils se sont trouvés en position de contraindre le Roi à signer leurs pétitions qui devinrent ainsi de véritables lois du Royaume. Ainsi est né le partage de la fonction législative. Ce faisant, le Parlement a transformé considérablement la nature du régime et donné naissance au parlementarisme, qui sera étudié plus loin. On considère que la séparation des pouvoirs date de 1689 en Grande-Bretagne, car c’est à cette date que le souverain, Guillaume d’Orange, a renoncé définitivement au droit de faire les lois (Bill of Rights de 1689). A compter de cette date, la souveraineté est définitivement partagée entre trois institutions : les deux assemblées et le Roi. Il faut avoir conscience que cette philosophie d’un pouvoir divisé et partagé était tout à fait novatrice car elle s’est imposée après des siècles de confusion des pouvoirs, toutes les fonctions étatiques étant plus ou moins regroupées en la personne du Roi. Cette concentration du pouvoir n’était d’ailleurs pas niée par la royauté mais au contraire revendiquée comme une propriété de la souveraineté2, et de manière plus pragmatique, un gage d’efficacité et de stabilité. L’exemple anglais d’organisation du pouvoir a fait école partout dans le monde et de nombreux Etats s’en sont inspirés. Cependant, la séparation des pouvoirs n’a pas seulement une origine empirique, elle a aussi été pensée, théorisée. B – LES ORIGINES PHILOSOPHIQUES. L’expérience anglaise a suscité de nombreuses réflexions. Jean BODIN3, théoricien du la souveraineté et chantre du pouvoir royal, affirme déjà en 1576 que le pouvoir législatif est le critère de la souveraineté d’un Etat et que toutes les autres fonctions étatiques lui sont nécessairement subordonnées. Il est vrai que tous les pouvoirs découlent de la loi, sont une application de la loi, qu’il s’agisse de l’exécutif ou du judiciaire. Bodin souligne également l’importance des Etats généraux (réunion des représentants des trois états4 en une assemblée unique) dans une monarchie. John LOCKE écrit en 1690 un « Traité sur le gouvernement civil » destiné, malgré un titre abstrait, à avaliser la révolution anglaise de 1689. L’auteur y distingue trois fonctions de l’Etat : légiférer, exécuter les lois ainsi produites (cette fonction englobe l’exécutif tel que nous l’entendons aujourd’hui et le judiciaire) et enfin conduire les relations internationales, ce qu’il nommait le pouvoir fédératif. Pour Locke, la seule façon d’obtenir un équilibre entre l’exécutif et le législatif est de faire intervenir l’organe exécutif dans le processus législatif. Alors seulement l’exécutif n’est plus subordonné mais mis en position d’égalité avec le législatif. On remarquera au passage que la distinction des pouvoirs de Locke n’a pas été retenue telle quelle, puisque c’est la distinction entre exécutif pur et judiciaire qui a été érigée en summa divisio. On peut regretter que le pouvoir de conduire les relations internationales ait été relégué en position secondaire, alors qu’il est riche et mériterait d’être pleinement intégré dans la théorie de la séparation des pouvoirs. Aujourd’hui en effet, les traités et accords internationaux conditionnent une large part de 2 Voir le penseur majeur de la théorie politique de la souveraineté Jean Bodin « Les six livres de la République » 1576. 3 Jean Bodin, précité. 4 Noblesse, clergé et tiers-état. Ses trois groupes sociaux ont leur propre régime juridique. Ce système sera balayé par la proclamation de l’égalité entre les hommes par la DDHC du 26 août 1789. L1 - Intro droit constit. – II La division du pouvoir - Sophie JEUSSEAUME 5 la législation nationale et il est évident que celui qui détient le pouvoir de négocier avec les autres Etats a un pouvoir considérable, dans lequel le parlement intervient assez peu5. MONTESQUIEU écrit en 1748 « L’esprit des lois » et restera celui auquel la théorie de la séparation des pouvoirs est attribuée. Il fonde son travail sur la connaissance du système anglais et sa réflexion débute par le constat selon lequel tout homme détenteur d’un pouvoir est porté à en abuser. Il en déduit fort justement qu’il faut donc que le pouvoir arrête le pouvoir. D’où l’idée de le fractionner et d’attribuer chaque mission à différents organes puis d’organiser ce pouvoir de manière à ce que chacun d’entre eux puisse freiner et contrôler les autres. Montesquieu distingue au sein du pouvoir trois fonctions : le législatif, l’exécutif et le judiciaire. Pour lui, la séparation est avant tout celle des fonctions, c'est à dire qu’un même organe ne peut cumuler entièrement deux fonctions, par exemple être à la fois législatif et pouvoir exécutif. Cependant, il est tout à fait possible que des pouvoirs soient partagés, si bien qu’un organe peut détenir l’un des pouvoirs et participer à l’exercice d’un autre. uploads/Politique/ ii-la-division-du-pouvoir.pdf
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- Publié le Aoû 31, 2021
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