L’ANCRAGE HISTORIQUE La reconnaissance du droit syndical en France s’est faite

L’ANCRAGE HISTORIQUE La reconnaissance du droit syndical en France s’est faite avec l’adoption de la loi Waldeck Rousseau sur les libertés syndicales en 1884. Suite à cette reconnaissance, la première Centrale syndicale française de tendance communiste, la Confédération générale du travail (CGT) fut créée en 1895. Les premières sections syndicales CGT qui ont vu le jour à partir de 1898 en Algérie étaient exclusivement réservées aux colons étant donné que le Code de l’indigénat en vigueur interdisait aux Algériens d’adhérer à toute association ou organisation. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, le nombre d’ouvriers algériens émigrant en France pour chercher du travail s’était accru, atteignant les 23.000 émigrés en 1923. N’étant pas soumis au Code de l’indigénat en France, les ouvriers algériens adhéraient de plus en plus à la CGT. Celle-ci accueillait en effet ces travailleurs non qualifiés qui la rejoignaient directement une fois sur le sol français. Arrivés des villages et montagnes déshérités, ils fuyaient une double persécution : la première en tant que travailleurs et la deuxième, de par leur appartenance à un pays maintenu sous le joug colonial. De nombreux leaders syndicaux ont émergé de cette population ouvrière essentiellement constituée de travailleurs de l’industrie et l’action syndicale s’est ainsi renforcée en dépit de l’Etat colonial qui n’a eu de cesse de saboter son action et de la pénaliser. Cette situation a participé à l’émergence d’une tendance radicale au sein de la CGT, en particulier au lendemain de la Révolution bolchévique de 1917. En effet, l’influence des idées marxistes léninistes appelait à la révolte conte le capitalisme et l’impérialisme ainsi qu’au soutien des mouvements de libération et à l’autodétermination des peuples colonisés. Le développement de cette tendance radicale s’est accentué au point de créer une scission au sein de la CGT, divisée depuis 1921 en deux Confédérations : la Confédération générale du travail (CGT), modérée et la Confédération générale du travail unitaire (CGTU), de tendance marxiste-léniniste, regroupant la majeure partie des ouvriers ayant émigré en France et les ayant formés au militantisme syndical revendicatif. L’arrivée du Front populaire au pouvoir en France a consacré l’unification de toutes les forces de gauche et permis la réunification de la CGT et de la CGTU. Le Front populaire abrogea le Code de l’indigénat, ce qui permit de lever l’interdiction faite aux Algériens de se syndiquer. Dès lors, ils adhérèrent en force à la CGT et la section CGT d’Alger comptabilisa un nombre record de plus de 250.000 adhérents. Cependant, avec la fin de la Deuxième Guerre mondiale et les événements tragiques du 8 mai 1945, que la CGT s’était gardée de condamner ouvertement, une rupture avec les syndicats français se produisit. Une réflexion au sein du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD) sur la nécessité de fonder une centrale syndicale algérienne s›ensuivit et le nombre d’adhérents à la section d’Alger chuta alors à 80.000 militants. Quelques années plus tard, en perte de vitesse en Algérie, la CGT décida de créer une organisation syndicale algérienne, avec une direction algérienne, ce qui se concrétisa en juin 1954 par la création de l’Union générale des syndicats algériens (UGSA). Lakhdar Kaidi qui revendiquait désormais l’égalité des droits entre travailleurs algériens et français en prit la tête. Après le déclenchement de la révolution, l’UGSA finit par adopter les revendications révolutionnaires nationalistes, comprenant que le problème n’était pas uniquement d’ordre économique et social mais politique. Cette évolution lui valut sa dissolution par le Gouverneur général Robert Lacoste en 1956. Durant cette même année, des dissensions ont émergé au sein du Mouvement national entre Messalistes appartenant au Mouvement national algérien (MNA) dirigé par une grande figure du nationalisme algérien et les Centristes du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD), ayant créé le Front de libération national (FLN). Ces dissensions se reflétèrent sur le mouvement syndical avec la création d’une 2 centrale syndicale distincte pour chaque tendance. Les Messalistes, créèrent l’Union des syndicats des travailleurs algériens (USTA) le 20 février 1956, suivis quatre jours après par le Front de libération nationale (FLN) qui annonça la création de l’UGTA le 24 février 1956. L’USTA affirmait représenter toutes les travailleuses et tous les travailleurs algériens, indépendamment de leurs origines, religion ou opinions. N’ayant pu s’implanter en Algérie, elle s’organisa en France, où elle parvint à rassembler beaucoup d’Algériens de l’émigration dans sa Fédération des travailleurs émigrés en France qui comptait alors plus de 25.000 adhérents, attirant 80% des émigrés algériens syndiqués à la CGT. Celle-ci ne fut jamais dissoute. Quant à l’UGTA, elle se donna pour rôle de mobiliser la classe ouvrière algérienne en faveur de la lutte de libération nationale. Elle organisa à cet effet une grande manifestation de solidarité avec le FLN, le 1er mai 1956, au cours de laquelle son leader Aissat Idir fut arrêté, puis assassiné lors de son incarcération. Un autre moment fort de la lutte du Mouvement syndical algérien en faveur de la libération du pays fut l’appel à une grève générale de huit jours, en janvier 1957, suivie massivement mais sauvagement réprimée par les autorités françaises. Dès lors, l’activité syndicale passait au second plan pour laisser place à la lutte armée pour l’Indépendance nationale, priorité de tous les militants nationalistes. LE MOUVEMENT SYNDICAL APRÈS L’INDÉPENDANCE Au lendemain de l’indépendance du pays, l’UGTA se reconstruisait en tentant de résister à toute mainmise politique de l’Organisation dont l’activité syndicale avait été encore une fois reléguée au second plan après la lutte pour l’autonomie vis-à-vis du Parti et de l’Etat. A l’indépendance, l’UGTA s’employa à se réorganiser en recréant ses structures centrales et ses sections au niveau local. La crise politique de l’été 1962 entre le Gouvernement provisoire et l’Armée des frontières, fut une première épreuve dans la construction de la relation de l’UGTA à l’Etat. L’indignation de l’UGTA face au conflit fratricide et sa position affichée en faveur de l’arrêt immédiat des affrontements et de l’effusion de sang, de même que la menace qu’elle brandissait d’une grève générale au cas où l’un des deux protagonistes s’emparait du pouvoir par la force, lui valut l’hostilité déclarée de Ahmed Ben Bella. Ce dernier était l’allié civil de l’Armée des frontières, sortie triomphante du conflit et il avait été nommé à la tête de l’Etat, notamment suite aux déclarations de la Centrale syndicale revendiquant son autonomie par rapport au Parti et à l’Etat. Cette hostilité eut des répercussions sur le premier Congrès de l’UGTA ainsi que sur le second. Ben Bella intervint personnellement dans les travaux et le choix des candidats pour s’assurer d’une direction subordonnée. Quelques semaines après le second Congrès acquis à Ben Bella, un nouvel événement politique relança les hostilités entre l’UGTA et le pouvoir politique. Il s’agit du renversement de Ben Bella à la suite du coup d’Etat en juin 1965 de Houari Boumediene, alors Ministre de la Défense. Perçu comme un retournement libéral et antisocialiste du régime, ce coup de force contribua à détériorer de nouveau les relations entre l’UGTA et le pouvoir. Quelques mois plus tard, l’UGTA publia un rapport offensant et très critique à l’égard de la gestion du pays en général et de la tutelle partisane qu’on tentait de lui imposer. Le ton du rapport était loin de refléter l’ambiance totalitaire imposée par le régime. Parmi les critiques acerbes des valeureux militants syndicaux déterminés et inébranlables, il convient de mentionner les phrases suivantes : « Nous devons reconnaître que les rapports uniques qui nous relient au Secrétariat exécutif du Parti depuis sa création se limitent à des ordres, des interdictions, des menaces … Cependant, nous n’avons jamais été convoqués à des réunions visant à discuter et résoudre les problèmes concernant la lutte contre le chômage, la formation des militants, ou encore les ressources nécessaires à l’application de l’autogestion dans l’agriculture, l’industrie et le commerce … Les seules directives émanant du Parti sont les suivantes : l’interdiction de voyager à l’intérieur du pays sans informer le Secrétariat exécutif, de tenir un congrès sans autorisation préalable, de faire grève sans autorisation du Parti, ou encore l’interdiction de publier le moindre document, y compris sur la « Révolution et le travail » par l’organe du Syndicat, sans autorisation du Parti ». Le rapport conclut que l’Organisation syndicale vacillait entre deux courants à cause de la politique totalitaire du régime. Elle devait en effet soit choisir le chemin de la soumission au Parti en perdant toute crédibilité, soit persister sur le chemin de la résistance et de la critique en subissant la répression du pouvoir. Cette position claire et sans équivoque démontre qu’au lendemain de l’indépendance, l’UGTA était l’une des rares organisations tenant tête au régime autoritaire, au moment où toutes les formes d’opposition étaient écartées et éliminées. Afin de reprendre le contrôle sur l’UGTA, le régime du Président Boumediene adopta une politique à deux volets. D’une part, il insuffla une politique de polarisation basée sur un discours politique ainsi que des choix économiques et sociaux favorables aux ouvriers parmi lesquels la gestion socialiste des entreprises, la gratuité des soins, la démocratisation de l’enseignement primaire, le statut général du travailleur uploads/Politique/ les-syndicats-en-algerie.pdf

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