PRESSE - Naissance et développement de la presse écrite Article écrit par Pierr
PRESSE - Naissance et développement de la presse écrite Article écrit par Pierre ALBERT Prise de vue L'histoire de la presse a une double vocation. Elle doit d'abord décrire la croissance du monde des périodiques depuis ses origines, analyser les facteurs de son développement, apprécier l'influence des journaux sur la vie des sociétés et sur le comportement des individus : elle doit identifier et suivre le courant particulier de la presse dans le flot de l'histoire générale. Elle est ensuite, et en même temps, une science auxiliaire de l'histoire, car les journaux, archives de la vie quotidienne, sont une source essentielle pour les historiens de toute vocation qui ne peuvent reconstituer valablement le passé sans recourir à leur témoignage. Ses difficultés sont grandes. Écho de toutes les activités des hommes et agent d'influence pour toutes les forces politiques, économiques, sociales et spirituelles, la presse exige, pour être analysée, une sorte de compétence encyclopédique. Les collections de journaux, qui sont la matière première de leur histoire, forment une masse énorme dont le dépouillement demande un temps et des efforts démesurés. Une en apparence, la presse est en réalité insaisissable dans sa globalité : elle se diversifie en un ensemble hétérogène de catégories aux fonctions différentes et en une infinité de publications concurrentes. Son histoire s'émiette dans les destins particuliers de dizaines de milliers de titres et s'éparpille dans le récit d'une multitude d'épisodes. Les facteurs qui ont commandé l'évolution de la presse sont comparables dans tous les pays, mais chaque nation, selon les conditions et les circonstances spécifiques de sa propre histoire, a orienté son évolution, façonné les structures de son marché et modelé son journalisme de manière irréductiblement originale : le recours au passé est donc dans le domaine de la presse encore plus indispensable que dans les autres secteurs des sciences sociales pour comprendre les réalités du présent. I-Les grandes étapes de l'évolution des marchés de la presse Au-delà des spécificités nationales et avec, il est vrai, de notables décalages dans le temps, tous les pays occidentaux ont connu une évolution comparable dont les étapes furent d'abord très directement influencées par la libéralisation progressive de leur régime politique. Ce n'est qu'une fois libérée de la tutelle administrative que la presse put se développer sans entrave : les facteurs commerciaux l'emportèrent alors et c'est dans un marché concurrentiel où la demande ne cessait de croître et où l'offre s'adaptait aux attentes du public qu'elle connut son âge d'or. La presse contemporaine, héritière des gazettes du XVIIe siècle, est donc bien la fille du libéralisme et de la démocratie parlementaire. Dans les pays où l'Ancien Régime n'a pas été abattu, les progrès de la presse furent beaucoup moins importants. Dans la première étape qui s'étend jusqu'à la fin de la monarchie absolue, la presse resta un phénomène social de faible ampleur. Le contrôle gouvernemental très strict sur les organes et les contenus, des moyens de production encore artisanaux limitaient l'audience des périodiques à la frange étroite des privilégiés de la fortune et de la culture. La fin de l'Ancien Régime ouvrit la seconde étape et précisa les principes de la liberté du journalisme : l'allégement progressif, mais non régulier, du contrôle de l'exécutif et du judiciaire sur le « quatrième pouvoir » permit l'élargissement du lectorat à l'ensemble de la classe des notables, qui se confondait en partie avec celle des électeurs censitaires et de la bourgeoisie aisée ; ce premier essor correspond à la mécanisation des presses, avec les débuts de la publicité commerciale, des chemins de fer et du télégraphe. La troisième étape qui, grosso modo, va de pair avec l'instauration du suffrage universel commence dans la seconde moitié du XIXe siècle. Elle aboutit à généraliser la lecture du journal à presque toutes les classes de la société : c'est l'ère du journal pour tous. Cette transformation de la presse en produit de consommation courante, résultat de la démocratisation politique, est aussi favorisée conjointement par l'industrialisation de la fabrication des journaux, les progrès de l'instruction qui font du journal le prolongement naturel de l'école, la généralisation du chemin de fer, l'extension de la publicité et des réseaux du télégraphe au monde entier. Les entreprises de presse acquièrent alors leur autonomie. C'est l'âge d'or du quotidien, qui a acquis une sorte de monopole dans la transmission des nouvelles, dans l'expression des opinions et dans la vulgarisation des connaissances, des idéologies et des modes de toute nature. Cette étape a été celle de la diversification de la presse, dont les prémices se situent à la fin du XIXe siècle et qui se terminera avec les années cinquante du XXe siècle. La photographie se généralise dans les journaux mais surtout dans les magazines populaires qui finissent, grâce à l'héliogravure et à l'offset, par constituer un second marché parallèle à celui des quotidiens et déjà, en plus d'un sens, concurrent. La radiodiffusion, à partir des années trente, va briser le monopole de la presse écrite. La quatrième étape commence avec la seconde moitié du XXe siècle. L'expansion accélérée de la télévision bouleverse le marché des médias. Si dans beaucoup de pays la presse quotidienne sait trouver les moyens de résister à la concurrence de l'audiovisuel et des magazines, dans d'autres au contraire la presse quotidienne a lentement perdu de son audience et semble, aujourd'hui, à la recherche d'un nouvel équilibre. II-Les ancêtres de la presse périodique La communication sociale est un des besoins essentiels de toute société organisée. On peut donc trouver des formes équivalentes au journalisme dans les sociétés les plus anciennes. Avec l'invention de l'écriture a été conservée la trace d'écrits d'actualité : correspondances administratives, inscriptions lapidaires célébrant les grands événements, récits de voyageurs, annales... À la fin du XVe siècle, à la suite de la découverte de la typographie par Gutenberg vers 1440-1450 et de l'organisation presque concomitante des postes d'État, naquirent les premières feuilles volantes imprimées, inspirées par l'actualité, qui, sous le nom latin de relationes, allemand de Zeitungen, italien de corantes ou gazzeta, français d'occasionnels, racontaient de grands événements militaires, diplomatiques ou des cérémonies officielles. Plus tard, dans le XVIe siècle, on connut les canards, récits de faits divers criminels, catastrophiques ou merveilleux et, avec la Réforme, les pamphlets, libelles, placards ou chansons de polémiques politiques ou religieuses. Ces feuilles volantes, diffusées par colportage plus ou moins clandestin ou même en librairie, survécurent longtemps, et les canards ne disparurent qu'à la fin du XIXe siècle, tués par la presse populaire. La presse périodique tire aussi ses origines des avvisi, correspondances que des nouvellistes appointés expédiaient régulièrement à chaque courrier, depuis Venise, Rome et autres centres du commerce ou de la diplomatie modernes. Ces nouvelles à la main circulaient dans les cercles restreints et elles fournirent souvent une partie de la matière des premières gazettes périodiques : elles survécurent jusqu'à la fin du XVIIIe siècle au moins ; nos « lettres confidentielles » en sont les lointaines héritières. Après les almanachs, qui furent dès le milieu du XVe siècle les premiers imprimés périodiques, on connut dès la fin du XVe siècle des chronologies, recensions des événements notables survenus dans l'année ou le semestre écoulé, dans le style des anciennes annales. Les premiers périodiques d'actualité naquirent dans les Pays-Bas et en Allemagne entre 1597 et 1605 et s'y multiplièrent ensuite. L'agitation politico-religieuse des premières années du XVIIe siècle, puis la guerre de Trente Ans (1618-1648), en accroissant le besoin de nouvelles, en multiplièrent le nombre. Elles adoptèrent très vite le rythme hebdomadaire le mieux adapté à celui des courriers. En France, la Gazette naquit tardivement en mai 1631. Elle était, sous la plume de Théophraste Renaudot, au service de Richelieu qui avait besoin pour soutenir sa diplomatie et sa politique intérieure d'un instrument de propagande et de réplique aux feuilles venues de l'étranger. III-Le système de presse de l'Ancien Régime La presse périodique est donc née, un siècle et demi après l'invention de l'imprimerie, du besoin d'information des classes aisées et de la volonté des gouvernements d'utiliser ce moyen nouveau de propagande. Dans des régimes politiques qui entendaient imposer le respect de valeurs orthodoxes et qui n'admettaient le débat politique que dans le cadre étroit des conseils institutionnels, la presse fut soumise d'entrée à un système préventif du privilège (c'est-à-dire d'autorisation préalable) et de la censure. La législation condamnant la rédaction, l'impression et la diffusion d'écrits non autorisés était très sévère. En France, la Gazette, organe officieux, était la seule à pouvoir fournir des informations politiques. Elle finit en 1762 par devenir tout à fait officielle et prit le titre de Gazette de France sous le patronage des Affaires étrangères ; elle fut alors bi-hebdomadaire. Elle eut jusqu'à 12 000 abonnés en 1780. À côté d'elle, d'autres publications obtinrent un privilège qui délimitait assez précisément la spécialité de leur contenu et leur interdisait en principe d'aborder les sujets de grande actualité. En plus des publications professionnelles spécialisées, l'essentiel de ces journaux limitait leur champ d'information à la vie culturelle, non sans pourtant aborder les grands problèmes de l'heure par le uploads/Politique/ naissance-et-de-veloppement-de-la-presse-e-crite 1 .pdf
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- Publié le Fev 22, 2021
- Catégorie Politics / Politiq...
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