Philosophie morale et politique Cours de Blondin Cissé Bibliographie sommaire Q
Philosophie morale et politique Cours de Blondin Cissé Bibliographie sommaire Qu’entendons-nous, pour commencer, par philosophie politique ? Il faut déjà faire savoir qu’il y a équivoque entre le politique (mise en forme, incarnation et matérialité de l’Etat et du pouvoir à travers une chair, une forme objective comme les institutions et ayant comme fonction de rassembler les hommes en tant que société, Lefort) et la politique (appareils idéologiques de l’Etat notamment de satisfaire à leurs vœux dans les limites de l’Etat qui se manifeste par un appareil répressif de l’Etat pour garantir la paix et la sécurité en l’occurrence), mais la grande distinction se situe surtout sur la différenciation à faire entre la science politique et la philosophie politique, examinant chacune la nature de la communauté politique ? La philosophie politique depuis ses origines en Grèce se définit dans sa nature de saisine de l’Etat en politique. En quoi cela dès se distingue-t-elle tant de la science politique, paradoxe, car étant l’étude scientifique de la politique, et posant la question de savoir si l’on pourrait appliquer la même méthodologie que les autres sciences positives ? La science politique tente par là de saisir formellement cette communauté politique. Il convient d’appréhender tout d’abord ce que désigne la notion de communauté politique. Aristote, dans Politique, va constituer l’ouvrage fondamental à cette insinuation conceptuelle, afin de nous permettre d’entamer une réflexion sur la communauté politique, qui donc se distingue des autres communautés. Celle-ci se constitue avec un ensemble de règles permettant au sujet de discuter, de délibérer sur leur représentation du sensible. Pour avoir une idée de la communauté politique, il est nécessaire de camper l’idée d’Etat, de même que l’état de nature. Rousseau commence par dire que l’état de nature n’a jamais existé et n’existera probablement jamais, mais que c’est un moment qui a permis à l’humanité de comprendre sa propre position. Celui-ci devient même une nécessité. André Levejoy, commentateur de Rousseau, dira ceci : « l’état de nature n’a pas existé mais que Rousseau parvient par un langage objectif à faire de cette fiction une réalité presque impérieuse ». Chez Rousseau donc, il y a des intuitions qui montrent que toute sa bibliographie était destinée à préparer Du contrat social. Il s’agit d’un état de guerre donc, sachant que les désirs sont limités – trois selon Rousseau nourriture, femelle, repos – car il n’y a pas de loi qui vaille, ce qui vaut de facto la loi du plus fort. Et comme l’homme vivra dans un conflit généralisé du fait des contradictions, il se conduira dans une disposition manifeste à l’homicide volontaire. Hobbes déjà disait dans Léviathan que « l’homme est un loup pour l’homme ». Ainsi, c’est bien l’état civil, avec Rousseau, qui garantit la survie de l’humanité : « le plus fort n’est jamais assez fort pour rester le plus fort, s’il ne transforme sa force en devoir ». L’Etat permet la sécurité, un contrat synallagmatique. Au livre VI du Contrat social, Rousseau résume la mise en place de l’Etat, disant : « trouver une forme d’association qui protège et défend chaque individu … ». Il ne signe donc pas de l’Etat la fin de la liberté de l’homme. Freud viendra par la suite contredire ce point de vue, bien que Rousseau disait qu’en se conformant à la loi qu’on s’est soi-même prescrit, on préserve sa liberté. Et donc la communauté que met en place l’Etat va vivre avec ses règles pour qu’un espace pacifié se constitue. Dès lors, qu’est-ce qui, avant d’en voir les caractéristiques, motive une communauté politique ? Le Corpus Christi, communauté du Christ, renvoie à une logique paroxystique liée à l’union, peut être opposée à celle politique, qui se caractérise par l’idée de désunion, de même que celle de déliaison. L’espace du politique définit une communauté qui, autrement dit, vient interrompre le fantasme de l’espace commun, qui a une logique fusionnelle. Ainsi, la pluralité est en jeu ; la communauté politique permet de mettre en scène des acteurs. Aristote définit la communauté politique en vue d’un bien précis. Celui-ci est supérieur au bien revendiqué par les autres formes de communautés. Il ne se construit donc pas de la même manière que les autres biens identificatoires. Par exemple, une confrérie religieuse est composée d’individus partageant le même type de croyances, convergeant vers un pôle, ce qui n’est guère le cas de la communauté politique. Max Weber appelle communarisation une identité qui peut être d’ordres linguistique, géographique, religieux ou autres ; cette forme changerait au Sénégal, ou la communauté confrérique est de plus en plus en train de devenir un espace de transfiguration, plutôt que de figuration, autorisant le débat contradictoire, se transformant ainsi en un champ politique. Toute communauté répète la consubstantiation divine du Corpus Christi ; parce que le Christ s’est sacrifié, et donc il devient nécessaire de comprendre en communauté le kum, la koïna donc la fraternité : l’idée de fusion apparaît clairement dans l’eucharistie. Revenons-en à l’opposition entre philosophie politique et science politique ? Le champ de la politique est avant tout un champ de l’imprévisibilité, à savoir qu’il ne peut y avoir de science formelle en politique, et la possibilité de toujours ouvrir des commencements, puisqu’il s’agit à des individus dans un espace de délibérer, discuter afin de trouver des solutions. La philosophie politique se différencie ainsi de la science politique, en tant qu’elle est critique et instruite, dont la finalité est d’éclairer et d’élucider l’agir politique : la politique ne peut être assujettie à la rationalité des fonctions sociales (exemple économie), des sciences formelles (Hannah Arendt, Qu’est-ce que la politique ?). Quelles sont les expériences qui peuvent conférer un sens au vivre ensemble ? Telle est la question que se pose la philosophie politique. Elle va dès lors s’armer de moyens pour constituer une société effective et performative. En cela, la philosophie politique ne propose pas, contrairement à la science politique, une réponse ou un modèle de connaissances, à partir de lois ou de modèles explicatifs. Son objet est la compréhension de la nature des choses politiques, en tant que tentative de saisir la structure fondamentale de l’état par la pensée, par le déploiement d’une interrogation constamment remise en question et renouvelée, en adéquation avec la nature même de la philosophie, interrogation constante; elle cherche à rendre intelligible les conditions d’instauration de l’espace politique, qui se doit d’être perpétué. La philosophie politique s’occupe de ce fait de l’espace public politique. « Toute communauté politique est constituée en vue du bonheur des hommes », selon Aristote. De ce fait, nous pouvons dire de la philosophie politique qu’elle est une interrogation sur le mode d’institution du social, et sur sa propre institution : elle réfléchit. Il nous semble nécessaire de commencer à fixer quelques préalables. La pensée philosophique du politique ne naît pas du néant ; elle s’effectue depuis une expérience politique concrète. Celle-ci est la démocratie. La démocratie est un régime de l’indéterminé, en tant qu’opposition de sensibles, car il ne met pas en scène aucune autorité éternelle (« la démocratie commence lorsque tombe la tête du roi », Lefort) ; Claude Lefort : « la démocratie substitue à la notion d’un régime réglé par des lois, d’un pouvoir légitime, un régime fondé sur la légitimité du débat [contradictoire], sur le légitime et l’illégitime – débat nécessairement sans garant et sans terme. » (in Essai sur le politique, Seuils, p.53). L’espace politique d’où elle émerge nécessite une communauté politique offrant plusieurs alternatives de débats. Certains principes définissent la communauté politique (lexis et praxis dans le discours ; les actes avant d’être faits doivent être annoncés), construite autour de la pluralité et une multitude de perspectives et c’est ce qui explique « l’humaine condition politique » (« l’homme est un animal politique », Aristote). Le principe qui organise ce débat est en ce sens anarchique (refus de la logique archique qui impose un principe, un arkhé). Dans Le viol des foules par la communauté politique, Serge Katchoutine montre que ce ne sont que dans les masses compactes, donc durant les discours, dans les régimes totalitaires, que la peur se dissipe. « On demeure l’obligé du monde, même si l’on en a été chassé ». (Hannah Arendt, à propos des juifs, Les origines du totalitarisme). Référence à l’expérience de Milgram en psychologie sociale. Les spécialistes en politique d’aujourd’hui précisent bien, en matière d’espace public, celui de la politique, mais bien sûr, ceux-ci sont souvent dementis car la politique est l’espace de la terra incognita (Arendt), étant une invention ; ce qui régit la politique c’est l’imprévisibilité et a natalité, donc toujours le pouvoir des commencements, cette possibilité qu’a l’homme de toujours pouvoir entreprendre. Il y a des brèches susceptibles de permettre à la pensée politique de se redéfinir. Habermas, ou encore Taylor, ont théorisé l’agir politique comme étant toujours europocentrique, et donc qu’il existe d’autres tensions qui n’ont rien à voir avec les théories de l’Occident. Il appartient à la modernité, et à chaque génération de définir sa propre tension avec l’agir politique. Ainsi, uploads/Politique/ philosophie-morale-et-politique.pdf
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- Publié le Mai 31, 2021
- Catégorie Politics / Politiq...
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