New Europe College Yearbook 2005-2006 RALUCA ALEXANDRESCU JÓZSEF BENEDEK LIVIU

New Europe College Yearbook 2005-2006 RALUCA ALEXANDRESCU JÓZSEF BENEDEK LIVIU CHELCEA Rodica-Gabriela Chira RADU DUDÃU BOGDAN IANCU MIHAIL NEAMÞU CORINA L. PETRESCU ANCA STERE Copyright © 2009 – New Europe College ISSN 1584-0298 NEW EUROPE COLLEGE Str. Plantelor 21 023971 Bucharest Romania www.nec.ro Tel. (+4) 021 327.00.35, Fax (+4) 021 327.07.74 E-mail: nec@nec.ro Editor: Irina Vainovski-Mihai RALUCA ALEXANDRESCU Née en 1975, à Bucarest Doctorante avec une thèse sur la pensée politique roumaine du XIXe siècle, Université de Bucarest, auprès de l’Institut de Recherches Politiques, et à l’Université de Bologne Assistant, Faculté de Sciences Politiques, Université de Bucarest Assistant éditorial por la revue Studia Politica, Romanian Political Science Review, de l’Institut de Recherches Politiques de l’Université de Bucarest Membre de l’Association des Chercheurs Francophones en Sciences Humaines, Bucarest Participation à des colloques scientifiques internationaux Articles parus dans revues scientifiques 19 LES INCERTITUDES DE LA DÉMOCRATIE SUR LA MODERNISATION POLITIQUE ET LA PRODUCTION INTELLECTUELLE DE LA DÉMOCRATIE AU XIXE SIÈCLE ROUMAIN Un an avant la révolution de 1848 dans les Principautés roumaines, les diplomates français acrédités a Iassy et a Bucarest manifestaient leur agoisse quant à un danger qui gueterait les grandes familles roumaines et l’influence exercée par la France dans cette région. Il s’agit d’une politique de découragement des études en France des jeunes boyards moldaves ou valaques, comme le note anxieusement le consul Codrika à l’attention du ministre François Guizot : « Plusieurs journaux ont annoncé que le gouvernement moldave a proposé à l’Assemblée générale une loi qui déclare déchu de ses droits civils et politiques tout sujet moldave qui fera son éducation en France. Aucune proposition de ce genre n’a encore été portée à l’Assemblée, réunie en ce moment à Iassy, mais elle s’ccupe d’organiser un système d’instruction publique dont quelques dispositions, notamment l’ouverture du cours d’un degré supérieur, pour lesquels on ferait venir des professeurs de l’étranger, jointes à l’offre faite par le gouvernement russe de plusieurs place gratuites dans les écoles des cadets, en faveur des jeunes moldaves, sont regardées comme le commencement de l’éxecution d’un plan, ayant réellement pour but de détourner les familles aisées d’envoyer leurs enfants compléter leur éducation dans nos écoles »1. Sans avoir une forte attache dans la réalité des faits, car les jeunes boyards ont bel et bien continué de faire leurs études à Paris ou ailleurs, ce petit extrait des rapports consulaires français témoigne d’un certain état d’esprit qui dominait déjà, d’une manière claire, les tendances intellectuelles des Moldaves et des Valaques dans cette période. Ces 20 N.E.C. Yearbook 2005-2006 tendances vont dans la direction d’une absorbtion programatique des faits et des gestes culturels français, qui vont même – comme on l’apprend toujours des rapports consulaires redigés dans cette période2 – jusqu’à la volonté d’implanter le programme d’études français dans certaines écoles des deux Principautés. En ignorant quelques fois les prétentions du protectorat russe, qui, selon les observations des diplomates français3, était à l’origine de cette politique officielle menée par les Princes de la Moldavies et de la Valachies, ceux-ci vont eux-mêmes déployer des intenses dilligences afin de faire admettre leur progénitures dans les grandes écoles française. Le cas du Prince Bibesco, qui arrive finalement à voir son fils se faire admettre, par intervention du roi de France4, à l’Ecole militaire de Saint-Cyr, est suggestif dans ce sens. Ces petits remarques découvertes dans les rapports consulaires redigés à la veille de la révolution de 1848 constituent un bon exemple d’un phénomène qui s’accélère à l’époque ; il s’agit d’une hâte toujours croissante d’immersion de la culture politique et historique roumaine dans une actualité occidentale qui montre, par sa présence même, les décalages criants de développements. C’est une question dont les membres de cette génération devenaient de plus en plus conscients, car Alecu Russo notait, en faisant le point sur cette période, que la Moldavie avait vécu en 16 ans, de 1835 en 1851, « plus qu’en 500 ans, depuis sa fondation par Dragos et jusqu’à l’époque de nos parents »5. C’est le signe que, déjà, la génération de 1848 était devenue consciente du tournant constitué par la pratique des voyages et d’expérience de l’Occident, pratique qui avait été suggérée par un des boyards éclairés de la génération précédente, Dinicu Golescu6. Celui-ci avait été peut-être le premier a donner voix à ce « complexe de l’Occident »7 qui hantera ensuite plus qu’une génération d’intellectuels roumains, en situant finalement les fondations du débat sur la modernisation dans la découverte d’une « attitude juste » envers les modèles formateurs pour la culture démocratiques roumaine. En effet, la problématique de la formation des jeunes intellectuels à l’étranger8 s’impose avec une acuité croissante. Comme Paris est d’habitude à l’époque leur destination principale, on ne saurait s’interroger sur l’avènement de la modernité politique roumaine sans questionner la portée de cette influence majoritairement française dans cette période et les résultats, dans la compréhension de la « démocratie » à travers les outils intellectuels fournis par la culture française9. 21 RALUCA ALEXANDRESCU En même temps, saisir la modernité politique roumaine de la seconde moitié du XIXe siècle à travers le discours intellectuel de l’époque pose d’emblée un problème de choix méthodologique ; d’autre part, cette démarche exige une explication de la lecture possible de cette modernisation à travers les aventures conceptuelles de la démocratie. En vérité, pourquoi faire une interprétation de ces phénomènes par l’intermédiaire d’une analyse de la démocratie? Ou encore: quelle serait la pertinence, pour une enquête concernant la production intellectuelle de la démocratie et la modernisation politique, le grand débat de 1848, qui a mis ensemble des concepts tellement épars et diffus dans leur compréhension démocratique tels que la Nation (identifiée ou même quelques fois remplacée par le Peuple) et la la Révolution, dans le discours politique et dans l’avènement d’une certaine démocratie à la roumaine10? La proposition de lecture que j’avance ici va dans une direction qui est celle, plutôt, de la démocratie manquée, d’un concept qui a été associé par la plupart des auteurs de 1848 à des valeurs et identités collectives, choix lourd en conséquences pour le développement de la démocratie et du parlementarisme roumain au XIXème et, pourquoi pas, aussi du XXème11. Le révolutionnaire Nicolae Balcescu, participant aussi à l’épisode transylvain de 1848, beaucoup plus violent que celui que les Principautés en avaient été les témoins, écrivait rempli d’une admiration presque religieuse, en 1851 : « Horia saisit la hâche dans ses mains et, en la trempant dans du sang hongrois et allemand, ecrivit avec elle les droits de la nation roumaine et le programme politique et social de ses révolutions futures »12 La « démocratie » roumaine entre deux régimes d’historicité13 Je ne me propose naturellement pas de répondre d’une manière exhaustive à ces questions qui représentent, en fait, un malaise intellectuel chronique face aux incertitudes de la modernité roumaine14. Mon but est seulement de reprendre à nouveau frais ces questions et de proposer une lecture faite dans une perspective méthodologique différente – l’histoire conceptuelle. J’essaye d’appliquer cette lecture à quelques représentants de la génération matricielle de 1848 et tenant compte des liens qu’ils développent ou, au contraire, ils oublient, dans la génération précédante, celle de Ionica Tautul ou, encore, de Dinicu Golescu. 22 N.E.C. Yearbook 2005-2006 L’interrogation en mirroir de ces deux générations n’a aucunément comme fondement un certain fond évolutioniste qui se proposerait de montrer comment, d’une génération à l’autre, la pensée politique roumaine s’est enrichie de nouveaux concepts et de nouvelles inteprétations par rapports à ceux déjà existents. Ou bien comment la logique interne d’hérédité de cette pensée roumaine a pu faire s’accroître la cohérence intellectuelle du portrait culturel de la « démocratie » roumaine. Bien au contraire. Je suis partie d’un constat général concernant les sens de la modernité15 comme puisant dans une nouvelle perception du temps, en général, et du temps historique, en particulier; il y a, d’une part, l’histoire jusqu’à la Révolution Française, agissant comme articulation du présent et du futur, et il y a, d’autre part, le changement produit a cette époque-là, dans le caractère manipulable de l’histoire16: on abandonne ce temps linéaire et continu, source d’inspiration pour les générations présentes, et on commence à vivre l’histoire dans ses articulations diagnosticables et prédictibles17. Ce travail, la génération de 1848, qui se situe aussi aux racines du parlementarisme roumain du XIXème siècle, ne l’a jamais vraiment fait, en remplaçant l’ouvrage du discours conceptuel en ouvrage uniquement de la réalité ou du passé historique18. Tandis que, pour la modernité occidentale d’après a révolution de 1848, ce travail exercé sur le futur transforme le discours avec l’histoire dans un discours pour l’histoire, dans ses côtés maniables prédictibles à l’aide, surtout au XIXe siècle, de ce que l’on appelle la nouvelle science. Comme le remarquait l’historien allemand, la genèse de l’Etat moderne pourrait alors se retrouver dans la lutte incessante contre les prophéties religieuses et politiques de tout ordre19. En utilisant les catégories métahistoriques de l’« expérience » et de l’« attente », on pourrait alors rechercher « comment dans chaque présent, les dimensions temporelles du passé uploads/Politique/ raluca-alexandrescu-stiinta-politica-centru-cercetare.pdf

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