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d §L," clossiq uereurrffi et la SERVITUDE VOLONTAIRE *gy.lg"i#.,3sfsRÏi;kpT.*,s*..'f *#lf#Hfi 3 taire T}'a pas f,ni de hanter nos vies. Inutile de rejeter la faute sur les oppresseurs de tout poil qui nous écraseraient à notre corps défen- dant: c'est aux asservis que s'adresse le penseur humaniste pour interroger cet étrange plaisir de la soumission que nous achetois au prix de notre liberté. En effet, cet asservissement n'est pas une fata- lité: si c'est en nous que s'emacine la tyrannie, c'est enicrutant nos désirs les plus obscurs que nous pourrons la déloger. La portée révo- lutionnaire du Dis cours dela servihtde volantaire nous est expliquée par Frédéric Gros: en montrant que ce n'est pas le pouvoir qui ciee l'obéissance, mais l'obéissance qui crée le pouvoiï, l'âmi de Montaigne renverse la perspective traditionnellement adoptée en philosoptlie politique. Dans le cahier central, Miguel Benasaÿag anafyse les ,rou- velles formes de domination économique et technologique qui se nourrissent de notre senrilité et nous propose quelqueJ pistes pout s'en libérer. La Boétie Février 2O15 Philosophie magazine n'80 / 79 ffi cms sique rr** L Boétie etta sensitude wtontaire / Par Frédéric Gros Professeur de philosophie politique à Sciences'Po Paris, il conduit une vaste réflexion fondée sur la notion d'autorité, dont iltrouve la source chez La Boétie, et sur la notion de pouvoir, dans le sillage de Michel Foucault dont il est spécialiste. ll a notamment publié lËtats de violence. Essai sur la fin de la guerre (Gallimard, 2OOG), Ma rcher. U ne ph i losophie (Carnets Nord, 2OO9) et Le Principe Sécurité (Gallimar d, 2012). ll est également l'éditeur des derniers cours de Foucault au Collègede France. e traité de La Boétie violemment nous appelle, nous provoque, nous convoque à repenser l'urigrue dupolinque, ce secret par lequel nous acceptons d'obéir. Étrange texte pourtant, dont le statut précis nous échappe encore aujourd'hui: essai brillant d'un jeune homme doué, abusant d'artifices rhétoriques à la manière des sophistes antiques, qui s'ingéniaient à défendre dans d'étincelantes pirouettes de style des thèses éminem- ment paradoxales, afln de démontrer leur art? Ou bien pamphlet risqué, dénonçant publiquement et courageu- sement les répressions étatiques ? On hésite. La Boétie, au moment de la rédaction de son traité, n'est âgé que de 16 ou L8 ans, ce qui pourrait laisser croire à un pur exercice de style. En même temps, la date supposée de sa composition (autour de 1549\la fait coÏncider avec les massacres des paysans de Guyenne qui s'étaient insurgés contre la gabelle (f impôt sur le sel). Le destin même du texte est singulier. I1 commence à exister clandestine- ment: on se repasse Ie brûlot entre intellectuels circons- pects, comme un secret inavouable qu'on transmet précautionneusement. Sa première existence publique est clairement le fruit d'une instrumentalisation poli- tique: les huguenots le font paraître anonymement en 1,574, dans leur pamphlet, le Rweille'Maüin, sous le titre Le Contr'lJn. Par la suite, la parution du traité fut encore un geste politique, depuis les éditions de Félicité Robert de Lamennais ou de Pierre Leroux au XIX" siècle, jusqu'au travail de7976mené par MigUelAbensour dans Ia collection « Critique de la politique » (Payot), s'entou- rant de Pierre Clastres et de Claude Lefort. Mais qu'y a-t-il donc, dans ce texte, d'à ce point périlleux, scandaleux et presqu e insoutenable? Le traité se présente dans ses premières pages - les plus incan- descentes - Comme l'expression d'une vertigineuse stupéfaction. Certes, il existe une rhétorique connue de f indignation politique: qu'on se souvienne de la condamnation chez Platon des tyrans cruels et vautrés dans la luxure, ou encore, chez Tacite et Suétone, du portrait à charge des empereurs romains sanguinaires. La pensée politique depuis toujours s'émeut des despotes abj ects, mas s acrant leurs suj ets s ans vergogne, soumettant les populations à un joug de fer. Avec La Boétie pourtant, la surprise, pour le lecteur, provient de I'objet même de f indignation: comment le peuple, demande l'auteur, peut-il, à ce point, se laisser dominer ou, plus encore, mettre autant de ferveur à servir celui qui le méprise et l'accable? L'énigme du politique se déplace: il ne s'agit pas d'interroger la monstruosité des soifs inextingUibles de domination, mais de mesu- rer une capacité à endurer, accepter ou mêrne aimer sa servitude. On entend dans ce texte résonner le constat amer de Spinoza dans son Traité théologico-politique, déclarant qu'il envoittant et tant chaque jour qui com- battent pour leur servitude comme s'ily allait de leur salut. Et il faudrait presque parler alors d'une « révolu- tion copernicienne » dans la pensée politique: ce n'est pas, dirait La Boétie, le pouvoir qui crée l'obéissance mais l'obéissance qui crée le pouvoir. Se réveiller d'un sommeil dogmatique I1 faudra bien entendu dépasser ce simple renverse- ment abstrait. Le traité de La Boétie ne se résume pas à cette exclamation, même si c'est par elle qu'il demeure intempestif, inactuel, en avance sur nos explications. Les explications en effet font l'objet de disputes, d'évalua- tions : la raison analytique s'en empare et froidement les évalue. L'exclamation, elle, continue à nous saisir, à nous brutaliser dans nos habitudes de pensée, nos assurances confortables. Or ce discours, avant que de déployer des raisons, est d'abord une indignation rageuse, UII cri. Sa jeunesse tient dans cette volonté defaire scandale: il s'agit bien de nous faire sursauter, de nous réveiller d'un som- meil dogmatique. Ce qu'ily a de proprement stupéflant dans le rapport de servitude politique, c'est le déséqui libre incompréhensible et indépassable sur lequel il repose. Mystère du rapport d'obéissance: ce sont des E milliers qui ploient sous lavolonté d'un seul, une masse E énorme est soumise auxvolontés d'un petit nombre. La Ë disproportion est à ce point éclatante qu'eIle exige, dira Ï Simone Weil, en Commentant le texte, la formulation 3 80 lPhilosophie magazine n'86 Février2Ol5 LA BCÉI EN 6 DATES Æ W §ffi§ffi Naissance à Sarlat, dans le Périgord Æ ffi w. §ffi#W-§ffi## Rédaction du Discours de la servitude volontaire Æ W §ffiffiffi Mort dans le Médoc due à une épidémie de peste ou de dysenterie Æ ffi §ffi34 Publication du Discourspar les protestants sous le titre Le Contr'Un ÆÆ WW §ffiffi& §ffiffip Conseiller Rencontre au parlement avec Montaigne de Bordeaux à Bordeaux B trffiipàrM0 nê? n aoüit t563, suf ,son lit de rilorto [â . Boétieconfieà son ami Montaigne une ultime mission: l'édition de ses une p$ês.§enon tenue? Montaignê,,'' ., se dérobe une première fois, en 1571 : ilfait paraître les traductions et poèmes de son amidéfunt mais pas le Discours,ni le Mémoire touchant I'Edit de janvier'1562, ,, t:r,tt . , t, ,, : ,, , guiappellèàünereforme de l'Ëglise'''' Ces æuvres, justifie-t-il, ont «« la façon trop déticate et mignarde pour les abandonner au grossier et pesant air d'une si mal pliisantà,rtafragilê'baixdàsaint- cè r.màih; enr5zdna Eüa'B ffi i ràffi ffi ' âpâiæ rcsgo a* on. ô'est donc dans les Essars dédiés à la mémoire de « làmï lelpMsdoüx,leplu§rhffitT Ie plus;:;,:: ,, intime »»,qu'il se resout à publier lencombrant ,pamphlet;Or,fessai « De I'amitié», pubffi " en ffiO,re$Ibccasion d'u ne CUr.ieuse'ÿOË f , o@ethôo'mâEe'a tâeoetie +ü,' la rCélèbfê.foirnute << parç:güe Ctéi:tait tsi;:, ;.|;, inffi Aqe g itnoijrsêraâioutéé,. ,' ull! êure rlê'Gaston,Bnnonce I "ins On' 6.u D,is.i âÿafi t de botter en.toucheii<« i§ srle,:süis'déffi de le loger ici, expiiguffi : Ba feei, q ü e tfa l tt:o uué q u e cai oiiMà'rle uêr*ffi e n tu m i è re, ef'à ÿ,âl fin, pei!Ce :micherchent à rioiùolAl'et à:ihan§eiiEatae noffe potice. » Dæit H hüguenotE §ê'ffi entre-temps âerff@àeHnô$êirhâ,h pr:ésecoffi 'r<§ffiiiàltépailui : èn§onen;11,gçE;'psmàiie"rà,4'exel.eità seùteneir;-Côffihtcô ,ffi rebuffade? Moffirgrc-a-t ilv0ulu pr son afirf dUneinstrumentalisatiôn ipotitlqUe I Ou faut{l chercher à son refus des motifs môins,ho'b ? dê$ puissante theü e sainffi hê,L I'ex-ma g ist rat avaiflnteiêi,à',eofisêffi , oü pô@iàÿar. caseons q uA LaBAffi oütr-êàonn*Wàn «'hi ' t e ptùs equ ia ieae[§ffi eEÈrii»ft s'etài[' æuvres, Qufil n'a pâs eu le temBs pub fauché par ra à 3aênàiO.ffiteü,' i' des Esçarb ne publiera jamais le Discours. Trah is-on posthü ffi ? ôü metmoMâgê o'n tèimYg1Qrq a li mente r* nÿ les plus folles, faisant de Montaigne le véritable auteur du Discoursou de La Boétie la victime d'un empoisonnement... Le Dlsco urs a pourtant été l'occasion de la ..prernlêieà,e.c,ôl êntre les deux hommes. Lorsqu'ils se rencontrent à Bordeaux, Montaigne a déjà lu le sulfureux écrit ou juiiste Èàiidôüffiéileion6fi '," en lui son a/fer ego.Pour La Boétie, leurs pâ§,tr-ô- Par.,Blathit e,Lêquin É. o o d'une « pltysique sociale » inédite, et dont les lois sont déci dément irréductibles à celles de la physique naturelle, puisqu'elle veut que le léger, le faible, l'isolé l'emporte sur le plus lourd, le plus fort, le plus nombreux. Le phé- nomène du pouvoir tient dans cette arithmétique impossible : « Si dansla rue unhomme sebat contre vinÿ, il sera sans doutelaissé pour mort surle pavé. Mais sur un signe d'unhommeblanc,vinÿcooliesannamitespeuventêtreÿappés a coups de chicotte,l'un aprèsl'autre, par un ou deux cheTs d'équtpe » (Simone Weil, Méditation sur l'obéissance et la liberté). Le dominant n'est jamais assez puissant pour écraser à lui seul tout un peuple. 11 faut donc uploads/Politique/ servitude-volontaire-la-boetie.pdf

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