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Introduction Introduction Introduction Introduction Introduction L e recours de plus en plus fréquent au thème de la justice, son occurrence obstinément récurrente dans les discours des gouvernants ne risquerait-il pas de lui faire perdre son potentiel transformateur ? Sa reprise obligée ou systématique par différents intervenants dans le domaine, des responsables politiques aux agences de coopération en passant par cette entité quasi mythique que représente aujourd’hui la société civile, pourrait-elle conduire à sa banalisation ? Le danger n’est pas imaginaire à considérer les usages en cours qui dépouillent de sa substance un thème pourtant particulièrement porteur. Parmi ceux qui réfléchissent ou qui travaillent sur la problématique de la réforme de la justice, beaucoup ignorent par provision méthodologique ou par parti pris idéologique, les liens entre justice politique, justice et Etat de droit, justice et démocratie. Nombreux sont ceux qui ne voient dans la réforme de la justice qu’un simple effort d’adaptation de la norme au fait, dans le meilleur des cas, ou, n’y perçoivent, au pire, qu’un pur exercice technique de modification de la norme. Cette lecture justifie qu’on cherche à associer, dans l’entreprise en question, des experts internationaux aux compétences éprouvées, à des experts nationaux, mieux imprégnés des réalités locales. Tout se passe ainsi comme si, dans l’entreprise de la réforme de la justice, il ne s’agissait pas d’un rapport au pouvoir, fût-ce à un tiers-pouvoir 1. La réforme de la justice en Haïti ou les affres d’un défi 1 L’expression est de Denis Salas , « Le tiers-pouvoir », qui la reprend de Marcel Gauchet, « La révolution des pouvoirs ». 2 Recueil Général des lois et Actes du Gouvernement d’Haïti, Linstant DE PRADINE, Paris, 1866, A. durant-Pédonne-Lauriel, 2eme édition, tome I, 1804-1808, p. 100. Ces attitudes continuent de faire florès alors que l’analyse du cas haïtien n’a de cesse de révéler l’impossibilité de poser la question de la réforme de la justice dans la distante sérénité ou l’obligeante neutralité du discours de la coopération, tant sa crise s’énonce toujours au regard de l’opinion publique dans des termes qui discréditent son mode d’emploi. La réforme de la justice en Haïti pourra-t-elle être ce destin tranquille qu’on lui prépare dans des cabinets ministériels ou dans des bureaux de consultation ? Peut-elle se penser sans être rapportée à la configuration de l’Etat ? I. De l’idée de la réforme de la justice I. De l’idée de la réforme de la justice I. De l’idée de la réforme de la justice I. De l’idée de la réforme de la justice I. De l’idée de la réforme de la justice à sa mise en abîme à sa mise en abîme à sa mise en abîme à sa mise en abîme à sa mise en abîme L’idée de la réforme de la justice en Haïti s’est installée véritablement dans le discours so- cial à partir des années 86, comme un des effets de la chute de la dictature des Duvalier et de l’entrée dans la période dite de transition vers la démocratie. Pour autant, les gouvernants ont éprouvé très tôt la nécessité de prise de mesures tendant à une amélioration de la justice. Déjà, Dessalines, le premier chef d’Etat haïtien, avait dès 1805 produit un plaidoyer en faveur de l’arbitrage comme instrument de résolution efficace des conflits2. Plus près de nous, sous la dictature même, l’existence d’une commission de refonte des codes a pu traduire l’ambition de dépasser la désuétude des normes en vigueur. On peut à bon droit souligner le caractère parcellaire de ces orientations. Mais, en dépit de Patrick Pierre-Louis Patrick Pierre Louis est professeur de Droit Constitutionnel et de Philosophie Politique à l’Université d’Etat d’Haïti. Il dirige également l’Institut pour la Démocratisation de la Justice (IDEJUS), rattaché au Réseau des Ongs en Amérique latine et les Caraïbes pour la démocratisation de la justice. ce fait, les ambitions limitées qu’elles portaient n’ont jamais été suivies d’effets. Dans la pratique, elles n’ont eu d’autre réalité que le cercle de leur propre assertion et se sont épuisées dans l’éclair de leur énoncé. Or, ce qui se joue à partir de 1986 est l’expression de l’entrée en scène de nouveaux acteurs 3, obligeant à la pris en compte des revendications formulées en termes de justice. Dès lors, ce ne sont plus les gouvernants qui ont eu l’initiative ou le monopole du discours sur la justice développé à des fins d’établissement de la légalité étatique, mais bien les demandes citoyennes qui ont forcé le discours politique officiel à s’infléchir en intégrant la problématique de la réforme de la justice. Pendant quelques années, le discours officiel, par opportunisme politique, se donnera comme une simple paraphrase de ce discours revendicatif. Pour faire vite, on pourrait dire que ces demandes se sont articulées autour de deux axes dont le premier se fonde sur la justice sociale et dont l’autre est de nature exclusivement politique, renvoyant notamment à la nécessité de la mise en place d’un Etat respectueux des droits et libertés fondamentaux. C’est cette deuxième dimension qui s’est d’abord cristallisée à la surface du discours des dirigeants en raison de sa rentabilité politique immédiate. Une Commission Nationale de Vérité et de Justice (CNVJ) a ainsi été mise en place et a produit un rapport dont les conclusions sont autant de recommandations 3 Pierre-Louis, P. Emergence de nouveaux sujets de droit : le cas haïtien en perspective in « L’Astrée », Revue de Droit Pénal et des Droits de l’Homme, Paris : Imprimerie du Rectorat de Paris-Sorbonne, avril 1999, No. 7. 4 Cette commission a été mise en place en 1997 par le Ministère de la Justice afin de produire, à son intention, un document de politique générale. soulignant la nécessité d’une réforme du système judiciaire. Mais c’est surtout la Commission Préparatoire à la Réforme du Droit et de la Justice (CPRDJ)4 qui, dans son rapport, a exprimé sans équivoque l’impossibilité de délier la réforme de la justice d’une analyse des caractéristiques de l’Etat. Pourtant, deux ans après, le rapport « Justices » du PNUD confirmait l’échec des différentes interventions de la communauté internationale en matière de justice. Le Gouvernement Préval/Alexis dans son bilan de gestion publique, allait admettre en février 2001 l’échec de ses interventions dans ce secteur. Cet aveu partagé pourrait être porteur de promesses pour repenser le système de justice. Toutefois, l’unanimité dans le constat d’échec ne devrait pas cacher les difficultés. Le risque est grand qu’à nouveau, ce constat ne soit réinvesti dans le discours politique à de pures fins de propagande. II. Quelle réforme de la justice? II. Quelle réforme de la justice? II. Quelle réforme de la justice? II. Quelle réforme de la justice? II. Quelle réforme de la justice? « Chassez la perspective structurelle, la « Chassez la perspective structurelle, la « Chassez la perspective structurelle, la « Chassez la perspective structurelle, la « Chassez la perspective structurelle, la politique revient au galop » ! politique revient au galop » ! politique revient au galop » ! politique revient au galop » ! politique revient au galop » ! Les propositions du rapport de la Commission Préparatoire à la Réforme du Droit et de la Justice (CPRDJ) induisaient une conception de la réforme articulée en termes structurels. Or, ce diagnostic n’a pas été repris dans les actions du Ministère de la Justice qui s’est cantonné dans une approche somme toute traditionnelle et n’a pas su opérer de rupture avec La réforme de la justice en Haïti ou les affres d’ un défi - Patrick Pierre-Louis La réforme de la justice en Haïti ou les affres d’ un défi - Patrick Pierre-Louis La réforme de la justice en Haïti ou les affres d’ un défi - Patrick Pierre-Louis La réforme de la justice en Haïti ou les affres d’ un défi - Patrick Pierre-Louis La réforme de la justice en Haïti ou les affres d’ un défi - Patrick Pierre-Louis le passé. Plutôt que de concevoir et de formuler une politique en la matière qui serait susceptible de canaliser les différentes interventions sur le terrain, le Ministère s’est engagé dans une série d’actions qui, pour importantes qu’elles semblaient être, ne pouvaient permettre de saisir la globalité de l’entreprise de réforme. Ces actions se sont inscrites fondamentalement, soit dans un cadre exclusivement normatif (proposition d’un ensemble de lois sur la magistrature où l’assemblée des participants s’est révélée une chambre d’entérinement des projets élaborés sans implication des acteurs judiciaires), soit dans un cadre fonctionnel (relèvement des salaires des magistrats, distribution de motocyclettes aux juges de paix...etc). Dans le premier cas, le Ministère a adopté une approche normativiste (il s’agit essentiellement de changer les normes), qui a pour conséquence d’escamoter la dimension globale de la réforme et ses relations avec les caractéristiques de l’Etat. Dans l’autre, le Ministère a repris à son compte un diagnostic spontané (il s’agit de prendre des mesures concrètes) consistant à répondre à l’urgence et susceptible de produire des résultats immédiats. Le destin de cette approche a été d’être récupérée à des fins de propagande politique, car elle cède à une vision uploads/Politique/la-reforme-de-la-justice-en-haiti-ou-les-affres-d-x27-un-defi-661.pdf
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- Publié le Apv 24, 2021
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