91 Annales d’Université Valahia Targoviste, Section d’Archeologie et d’Histoire
91 Annales d’Université Valahia Targoviste, Section d’Archeologie et d’Histoire, Tome XV, Numéro 1, 2013, p. 91-115 ISSN: 1584-1855; ISSN (online): 2285–3669 Sur le caractère cultuel des représentations plastiques néo-énéolithiques de l’espace carpato-danubien Constantin-Livian Rădoescu* *L’Université “Constantin Brâncuşi” de Târgu-Jiu, Faculté des Relations Internationeles, Droit et Sciences Administratives, rue de Griviţa, nr.1, Târgu-Jiu, dép. de Gorj, e-mail: lradoescu.utgjiu@yahoo.com Abstract: About the cultual character of the neo-eneolithic plastic representations to the carpatho- danubian region. The spiritual life of prehistoric communities seems to be a combination of cultuale practices, of the most diverse, integrated into a system of ideas and religious beliefs, articulated around symbols that were worshipped by the community as a whole. Spiritual connotations of neo-eneolithic art are linked not only by magico-religious practices, but also by the capacity of plastic representations of giving force to the symbolism they relieve in the process of institutionalizing the new beliefs. Key words: neo-eneolithic art , cultual character, hypostases of Divinity, cultural markers. Résumé: Sur le caractère cultuel des représentations plastiques néo-énéolithiques de l’espace carpato- danubien. La vie spirituelle des communautés préhistoriques paraît un mélange de pratiques cultuelles des plus diverses, intégrées dans un système d’idées et de croyances religieuses articulées autour de certains symboles vénérés par toute la communauté. Les connotations spirituelles de l’art néo-énéolitique ont à faire non seulement aux pratiques magiques-religieuses mais aussi à la capacité des représentations plastiques de transmettre de la vigueur au symbolisme que les nouvelles croyances dégagent au cours du processus de l’institutionalisation. Mots-clés: art néo-énéolithique, caractère cultuel, hypostase de la Divinité, marqueurs culturels. Au fil du temps, la plastique anthropomorphe a généré d’amples discussions à l’égard de sa signification, les modalités d’interprétation proposées reflétant un certain point de vue pertinent (P. Ucko, 1962; 1968; 1996; A. Fleming, 1969; C. Louboutin, 1990; M. Pavlovič, 1990; M. Voight, 1991; D. W. Bailey, 1994; 1996; J. Marcus, 1996; M. Conkey, R. Trigham, 1995; G. Haaland, R. Haaland, 1995; 1996; R. Treuil, 1992; F. Draşovean, 1998; M. Conkey, 2001; K. Băčvarov, 2006; A. Niculescu, 2010; B. Watson, 2010). Ainsi, l’analyse de la signification et de la fonctionnalité des représentations plastiques néo-énéolithiques partait, le plus fréquemment, de la premise que celles-ci n’étaient que des modèles des divinités ultérieurement découvertes (D. W. Bailey, 1994), réunies dans un panthéon dominé par la figure de “la Grande Mère”, surprise dans de variables hypostases (J. Mellaart,1967; Vl. Dumitrescu, 1968; S. Marinescu-Bîlcu, 1977; D. Monah, 1997; B. Erdogu, 2009). Tandis que D. W. Bailey affirme que ces artefacts représentent un moyen d’exprimer l’identité individuelle et de groupe (D. W. Bailey, 2000) et P. F. Biehl les associe aux transformations multiples auxquelles les collectivités humaines sont soumises à travers le temps (P. F. Biehl, 1996; 1997; 2006), d’autres opinions soulignent la liaison logique entre les représentations anthropomorphes et la vie religieuse de ces communautés-là (N. Kalicz, Constantin-Livian Rădoescu Tome XV, Numéro1, 2013 92 1970; M. Voight, 1991; R.-R. Andreescu, 2002; V. Voinea, 2005; E. Blake, 2005). En étroite corrélation avec les manifestations spirituelles de la communauté, la plastique anthropomorphe reflète l’existence d’une pensée symbolique, évidemment liée à la polyvalence de l’archétype de la Grande Déesse (E. Neumann, 1974; R. Tringham, 1993; L. Meskell, 1998; 2000). La modalité de déchiffrer un tel système de mythes et de croyances, illustré par tels artefacts, ne peut pas constituer un argument qui certifie l’existence d’une certaine religion - au sens classique du mot -, présentant un panthéon au centre duquel soit placée une divinité dominante. D’ailleurs, on ne pourrait pas négliger aussi le rôle que la magie aurait pu jouer au cadre de certaines pratiques rituelles mais, au cas où tous les deux systèmes auraient coexisté, la façon d’établir la fonctionnalité de ce type de représentations plastiques devient d’autant plus difficile (F. Draşovean, 1998; M. Augé, 1995). Une analyse détaillée concernant les modalités et les techniques d’exécution des représentations plastiques peut clarifier certains aspects liés à la signification de leur modélisation et de leur utilisation en but de rite ou peut offrir des données sur le statut des personnages qu’elles incarnent (D. Gheorghiu, 2010). La présence de certains restes végétaux dans la pâte dont les figurines anthropomorphes étaient modélisées, d’habitude des graines (Vl. Dumitrescu, 1934, fig. 13/7; O. Höckmann, 1991, fig. 1/1-2), représente une habitude ancienne liée à la sacralité des occupations agricoles, tandis que l’assimilation de la terre à Mater Genitrix, lors de la pratique des rites magiques-religieux qui symbolisaient „la fécondation” de la divinité, était une forme de magie sympathique (J. G. Frazer, 1980, I). La solidarité entre la fertilité de la terre et la fécondité féminine constitue une syntèse mytique-rituelle qui suppose non seulement l’identification de la terre avec la matrice et du travail agricole avec l’acte générateur mais aussi de la charrue avec le phallus, ce qui explique le grand nombre de rites liés aux cérémoniaux agraires (M. Eliade, 1992). L’un des plus fréquents scénarios agricoles qui concerne la régénération de la vie présente dans les grains déposées d’une manière rituelle dans la terre implique le déchaînement des forces régénératrices de la végétation contrôlée de la Grande Divinité (l’incarnation de la féminité), douée des attributs de la vie et de la mort. La régénération périodique des forces sacrées nécéssite un sacrifice des représentants humains ou animaliers du pouvoir personnifié dans la récolte (M. Eliade, 1992), qui, au fil du temps, a été remplacé par le cérémonial du „dieu dévoré”, en fait, une consommation rituelle de l’esprit du blé, représenté comme une figurine anthropomorphe (J. G. Frazer, 1980, IV; D. Monah, 1997). La valeur sacramentale des offrandes utilisées lors de ce scénario agraire s’est perpétuée grâce à l’assimilation et à la revalorisation de certains symboles et traditions archaïques, compte tenu du nouveau message chrétien qui transforme les dieux en saints (M. Eliade, 1986). Les thèmes iconographiques transposés en argile, en pierre, en os ou en métal prouvent la préoccupation des créateurs de valorifier une large gamme de matières premières, compte tenu non seulement des possibilités de les façonner toute de suite mais aussi de la charge symbolique dont elles ont été „douées”. Les figurines en os, dont on retrouve le prototype pendant le VIIIe millénaire av. J. C., à Jerichon (J. Cauvin, 1972, fig. XI/I), apparaissent au nord du Danube, au cadre de la culture Boian, à Cernica (G. Cantacuzino., S. Morintz, 1963, fig. 27/7) (fig. 1/1), à Petru-Rareş (D. Berciu, 1966, fig. 189/5) et sont fréquemment utilisées au cadre des communautés gumelnitiennes (R.-R. Andreescu, 2002, pl. 40-50) (fig. 1/2, 3, 5-7) et salcutiennes (E. Comşa, 1995, fig. 62-64) (fig. 1/4). Le plus souvent, les pièces transposent des personnages féminins mais, compte tenu du schématisme et de la variété typologique, il est assez difficile de déchiffrer leur fonctionnalité cultuelle, puisque ces pièces peuvent refléter des thèmes religieux déjà consacrés dans la plastique en argile ou elles peuvent représenter d’autres thèmes nouveaux, issus de la multiplication des formes d’expression artistique. Les statuettes plates ont été considérées des représentations de petits enfants, parfois langés, qui étaient portées de jeunes filles pour accomplir un culte de la fértilité (E. Comşa, 1995) ou bien étaient des représentations de certaines divinités envisageant les rites de la régénération (M. Gimbutas, 1989). On attribue généralement un rôle apotropaïque aux figurines prismatiques, étant utilisées comme amulettes, les représentations convexes ayant le même caractère protecteur. La diversité et la complexité de la vie Sur le caractère cultuel des représentations plastiques néo-énéolithiques de l’espace carpato-danubien Tome XV, Numéro 1, 2013 93 spirituelle néo-énéolithique sont illustrées aussi par une catégorie de pièces à part, façonnées en os et en marbre, connues sous la dénomination d’idoles „en violon” (fig. 1/5). Ce type de statuettes, extrêmement schématisées, a paru pour la première fois lors du Néolithique des Cyclades et a évolué du point de vue stylistique jusqu’à l’époque du Bronze, visant notamment les contextes funéraires (V. Voinea, 2008). Elles ont été considérées des protections pour les bras ou des pièces utilisées à allonger la corde de l’arc (D. V. Rosetti, 1934) mais leur plus probable utlisation concernait, paraît-il, le domaine musical (E. Comşa, 1995). L’utilisation du même terme pour d’autres types de représentations anthropomorphes existentes dans l’espace égéen- anatolien et du Sud-Ouest des Balkans, dont „le corps” ne conserve pas la forme rectangulaire, a suscité d’amples polémiques concernant la modalité de les encadrer du point de vue typologique et de leur fonctionnalité (S. Marinescu-Bîlcu, 1980; D. Monah, 1997; V. Voinea, 2008). La dénomination d’idoles „en violon” est utilisée pour désigner les pièces façonnées en os ou en marbre, rencontrées dans les cultures Gumelniţa-Karanovo VI, Sălcuţa et Cernavoda I qui suggèrent, probablement, d’éventuelles hypostases de la Grande Déesse. Dans le milieu cucuténien, des pièces qui ressemblent à une boîte de violon ont été découvertes à Truşeşti, à Hăbăşeşti, à Cucuteni- Cetăţuia, à Drăguşeni etc. et, selon le nombre des perforations, elles pouvaient être suspendues ou cousues sur des vêtements, leur valeur apotropaïque étant toujours conservée (D. Monah, 1997, fig. 258/2-19, 259/1-4). Les statuettes anthropomorphes en or ont étaient considérées, à l’instar des idoles „en violon”, des représentations féminines extrêmement schématisées, illustrant l’image uploads/Religion/ 7-lradoescu.pdf
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- Publié le Aoû 04, 2021
- Catégorie Religion
- Langue French
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