À propos des ruines de l’église du prieuré Saint-Romard à Châtelaillon u Denis
À propos des ruines de l’église du prieuré Saint-Romard à Châtelaillon u Denis BRIAND 24 La Lettre d’Archéaunis n°44 HISTOIRE ET ARCHÉOLOGIE À propos des ruines de l’église du prieuré Saint-Romard à Châtelaillon u Denis BRIAND L a découverte d’un document inédit du XIXe siècle a récemment relancé notre curiosité autour du passé du Vieux- Châtelaillon et en particulier pour l’histoire du prieuré Saint-Romard situé sur le promontoire. A cette occasion, nous avons donc reprit l’ensemble de la littérature traitant du site conventuel. Au demeurant, et malgré toutes les sources consultées, il s’est avéré assez difficile de se faire une idée géographique des lieux ou de se représenter l’aspect de l’église disparue dont parlent les différents auteurs. En effet, aucun des travaux publiés ne situent bien les lieux, ne produisent de plans ou ne donnent de documents permettant d’embrasser plus concrètement l’architecture de l’église. Aussi nous avons souhaité palier à ce manque en nous attachant à relocaliser précisément l’église du prieuré Saint-Romard, visiter les ruines grâce à l’iconographie connue, redécouvrir et décrire les restes architecturaux présents jusque dans la première décennie du XXe siècle. Précisons toutefois, que si notre propos n’est pas ici de réfuter à nouveau la légendaire présence de moines Camaldules 1, de présenter les vestiges archéologiques mis au jour à proximité (cimetière conventuel et autres sépultures 2, pierre de sépulcre 3, céramiques 4...), d’écrire l’histoire et les vicissitudes du prieuré de sa fondation à sa ruine, d’en étudier la vie (temps liturgiques, collège des moines et prieurs...) ou encore de mieux appréhender la gestion du prieuré (biens, revenus, charges...), nous tenterons quand même de dresser une simple synthèse chronologique des éléments dénichés au cours de notre démarche que ce soit dans la littérature, les notes ou les archives. Le site Outre par nos précédents travaux, le prieuré Saint-Romard nous est connu grâce aux apports de l’abbé Cholet, aux descriptions d’Yves Blomme, aux notes de Camille Gabet, Pierre Clion ou de Jean-Claude Bonnin, aux observations pertinentes d’Eric Birier, ou finalement par l’excellente monographie de Jean Métayer. Certes de nombreux autres auteurs ont écrit ou cité le site (parmi lesquels Louis 25 La Lettre d’Archéaunis n°44 a b c d e f é fig. 1 Emplacement des ruines de l’église du prieuré au Vieux-Châtelaillon, sur carte IGN, photo satellite et D.A.O. des lieux à la fin du XIXe siècle. (DAO : Denis Briand) a. Maison famille Sion b. Bâtiment des douanes c. Chai (ancienne auberge) d. Vestiges e. Maison famille Bonnaventure f. Ancienne métairie de la Minée (bâtiments remaniés en 1896) ì fig. 3 Extrait d’un dessin (23,8 x 31,2 cm) : « Chatelaillon », Osmond Romieux, 30 juillet 1892 : Aspect du hameau Saint-Romard et des ruines de la chapelle du prieuré depuis le Nord- Est (Collection D. Briand) ì fig. 2 Carte postale ancienne (9 x 14 cm) : « CHATELAILLON - Le vieux couvent des Camaldules » (éditeur RB, n°79) : vue du mur Nord depuis l’extérieur, vers 1900 (Collection D. Briand) 26 La Lettre d’Archéaunis n°44 é fig. 4 « Débris de la tour derrière la face Nord » (Croquis : Léopold Delayant, fin XIXe s.) (Médiathèque d’Agglomération - La Rochelle - Ms 336, Recueil Delayant f° 385) de Richemond, Ludovic Bruhat, Georges Barraud, Robert Fradin, Jean Flouret, Robert Favreau, François Sémur, Guy Renoux) mais aucun n’apporte d’élément nouveau. L’église du prieuré Saint-Romard est située sur le promontoire, au coeur du site dit du Vieux-Châtelaillon, culminant à une altitude d’environ dix mètres au-dessus du niveau de la mer. Les ruines, subsistant à la fin du XIXe siècle, sont au centre d’un petit village d’une dizaine de maisons, à l’angle du chemin allant de Châtelaillon à Port-Punay avec celui allant des marais au village des Boucholeurs. La chapelle primitive Dès le VIIIe ou IXe siècle, le site de Châtelaillon était semble-t-il christianisé ainsi que le laissent penser les sarcophages orientés mis au jour dans l‘environnement immédiat du prieuré 5. Eric Birrier y voit un ermitage chrétien 6 ce que confirme l’abbé Métayer en plaçant une hypothèse : « A l’époque mérovingienne, une chapelle a dû être construite pour recevoir et honorer le corps de saint Romard, jusqu’à son transfert à Saint-Savin pour éviter sa profanation par les pirates Vikings… » 7. Eric Birrier allait déjà lui aussi tout à fait dans ce sens en rappelant : « Le dernier vestige du Châtelaillon médiéval, le prieuré Saint-Romard, semble aussi avoir été le premier lieu de culte. La chronique de l’abbaye de Saint-Savin-sur-Gartempe raconte en effet que dans la deuxième moitié du IX e siècle, c’est-à-dire à l’époque des raids de Normands, plusieurs prieurés et abbayes y transportèrent les corps des saints locaux. Ce fut alors que des moines quittèrent Châtelaillon, emportant les reliques d’un certain Romard. En effet, le dernier autel du déambulatoire de l’église abbatiale de Saint-Savin porte toujours l’inscription suivante : Ac sancti Romardi martiris. » 8 Les vestiges de l’église romane C’est sur ce premier lieu de culte qu’a sans doute dû être édifiée une petite chapelle romane 9. Toujours est-il que de l’église de cette époque, seuls quelques maigres témoignages archéologiques et architecturaux nous sont parvenus : Il s’agit, tout d’abord, des vestiges d’une maçonnerie en arc de cercle qui apparait sur une carte postale du tout début du XIXe siècle mais aussi sur un dessin (1892) d’Osmond Romieux (fig. 2 et 3) : nous remarquons, en effet, un imposant fragment de muraille percé d’une grande baie près du mur gouttereau septentrional. Ce massif de murs mesure environ cinq mètres de hauteur sur cinq de longueur selon nos estimations. Le mur est donc incurvé (fig. 1, repère d) comme le relève l’architecte Antoine Brossard sur son plan de masse de 1862 (fig. 5), état 27 La Lettre d’Archéaunis n°44 28 La Lettre d’Archéaunis n°44 î fig. 6 “Façade Nord” (Dessin de l’abbé Cholet, 1860) (Médiathèque d’Agglomération - La Rochelle - Ms 75, Recueil de notes de l’abbé Cholet, f° 309) ë fig. 5 « Copie du plan des ruines de Saint-Romuald de Chatelaillon » (Abbé Cholet d’après le plan de Brossard, 12 juin 1862) (Médiathèque d’Agglomération - La Rochelle - Ms 1549, f°12) 29 La Lettre d’Archéaunis n°44 ç fig. 9 « Chatelaillon, Saint- Romuald, pierre encastrée dans le mur Ouest de la construction » (Musset) (Médiathèque d’Agglomération - La Rochelle - Ms 2613) ç fig. 8 « Pierre sculptée » (Cholet, 1860) (Médiathèque d’Agglomération - La Rochelle - Ms 1549, f°20) qui fait penser à Léopold Delayant qu’il s’agit là de la base d’une tour ronde 10. Plus pertinent, Pierre Clion observe pour sa part : « la portion de mur et la fenêtre pourraient être les restes de la première église, avec sa fenêtre romane ébrasée vers l’intérieur de ce qui pourrait être une abside » 11 avant d’ajouter : « On voit près de la face Nord du grand mur de la chapelle, les ruines d’une abside romane percée d’une baie, restes qui furent rasés depuis malheureusement, car ils devaient être ceux de l’église primitive » 12 Il rejoint par cette analyse l’idée de l’abbé Cholet qui voyait aussi dans ces murs les restes de l’église romane 13. Ce dernier, ayant pu observer in situ ces restes encore en place, ose même avancer une datation en affirmant que « la première église rappelle, par son style, le XIIe siècle » 14. Toutefois, le dessin qu’il réalise en 1860 (fig. 6) nous montre bien la petite baie cintrée mais il est difficile à notre tour de lui attribuer une datation. Malheureusement, le croquis que donne Léopold Delayant (fig. 4) est lui bien trop imprécis pour nous donner des informations complémentaires. Outre cette partie de muraille dans laquelle s’ouvre une fenêtre romane 15 sept éléments attestent bel et bien d‘une architecture romane disparue : Il s’agit tout d’abord de deux pierres romanes ornées 16 que l’on retrouve aujourd’hui toujours en réemploi dans la façade d’une maison construite en 1912. Pierre Clion, qui les a lui aussi remarquées, les décrit comme : « deux motifs d’époque romane, l’un décoré d’entrelacs, et l’autre de cercles en chaîne… » 17 (fig. 7, a et b). En archives, ensuite, nous retrouvons la trace d’une troisième pierre taillée et ce grâce aux notes de Georges Musset et de celles de l’abbé Cholet. Musset rapporte à son sujet (vers 1890) : « Saint-Romuald : dans le mur de l’église primitive se é fig. 7 (a et b) Les deux pierres encastrées en réemploi décoratif depuis 1912 dans la façade d’une maison moderne (Cl. D. Briand) a. b. ì fig. 10 Schéma des ruines gothiques de l’église du prieuré à la fin du XIXe siècle (DAO : D. Briand) d. Vestiges g. Travée 1/3, occidentale h. Travée 2/3, centrale i. Travée 3/3, orientale j. Contrefort Nord-Ouest k. Contrefort Sud-Ouest l. Contrefort Nord-Est m. à q. Colonnes gothiques g h i j k l d m n o p q î fig. 11 Plan de masse (Plan de l’abbé Cholet, 1860) (Médiathèque d’Agglomération - La Rochelle - Ms 75, Recueil uploads/Religion/ a-propos-des-ruines-de-l-x27-eglise-du-prieure-saint-romard-a-chatelaillon.pdf
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- Publié le Jul 20, 2021
- Catégorie Religion
- Langue French
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