LES SEPT SCEAUX DES ÉLUS COENS I. – LA CLASSE DU PORCHE (suite)1 par Serge Cail

LES SEPT SCEAUX DES ÉLUS COENS I. – LA CLASSE DU PORCHE (suite)1 par Serge Caillet MAÎTRE SYMBOLIQUE UN GRADE AUX DÉCORS INCERTAINS L e grade de maître symbolique, souvent désigné comme « maître particulier », ou « maître particulier au premier degré de l’Ordre » – entendez de sa première classe – qui ne doit point être confondu avec le « maître particulier du porche », qui est, comme nous l’avons vu, le compagnon bleu, couronne la classe symbolique de l’Ordre des chevaliers maçons élus coëns de l’Univers. En l’absence de tout rituel détaillé connu, les notes de Saint- Martin extraites de sa copie du Cérémonial des initiations, nous seront donc particulièrement précieuses, parce qu’elles donnent les grandes lignes de l’ordination à la maîtrise, dans une ultime version du grade qui pourrait être définitive2. Quant aux catéchismes qui nous sont par- venus, ils se rapportent vraisemblablement à des versions primitives ou intermédiaires du grade de maître, ou peut-être des grades de maître : le « catéchisme de maître particulier élu coën » publié par Papus3 recou- pe partiellement le « catéchisme du maître particulier élu coën de l’uni- vers » publié par Antoine Faivre4, qui ne contient quant à lui que les réponses. Enfin, le « catéchisme du maître symbolique » extrait de la même pièce5, semble référer à un grade intermédiaire entre le compa- gnon symbolique et le maître particulier. Commençons donc par l’étu- de de ces catéchismes. Le grade de « maître particulier élu coën », qui, dans la version Faivre, suit immédiatement le maître symbolique et précède le maître élu, et qui, chez Papus, s’insère entre le compagnon et l’élu, contient des symboles spécifiques du grade définitif… d’apprenti symbolique : six circonférences, quatre branches, trois éléments. Présenté dans le temple dans l’attitude classique, sans métaux, ni nu, ni vêtu, et « privé de l’usa- ge des sens corporels et spirituels »6, le candidat a été placé « au centre de six circonférences, formant un carré long et quatre équerres par- faites »7. Retrouvant l’usage de la vue, il a perçu « une vaste lumière, un grand bruit effroyable et trois grandes colonnes »8 sur lesquelles il a observé « trois hiéroglyphes qui étaient séparément mis en forme de triangle sur chacune »9, qui symbolisent notamment les trois essences spiritueuses fondamentales. Pour mémoire donc. 1. Cf. « une école de prière et de vertu », Renaissance traditionnelle, n° 122, avril 2000, pp. 100-113; et les deux pre- mières parties du présent chapitre respecti- vement consacrées au grade d’apprenti symbolique, n° 125, janvier 2001, pp. 41- 63, et au grade de compagnon symbolique, n° 126, avril 2001, pp. 74-88. 2. Le Fonds Z, Cérémonial des initiations. Extrait de ce qui est contenu dans les grades de l’Ordre des élus coëns, pré-publication par Robert Amadou, diffusion CIREM, pp. 11-12. 3. Papus, Martines de Pasqually, sa vie, ses pra- tiques magiques, son œuvre, ses disciples, suivis des catéchismes des élus coëns, nouv. éd., Paris, Déméter, 1986, pp. 241-246. 4. Antoine Faivre, « Catéchisme coën », Les Cahiers de Saint-Martin, III, Nice, Bélisane, 1980, pp. 121-123. 5. Les Cahiers de Saint-Martin, op. cit., pp. 119-121. 6. Papus, Martines de Pasqually…, op. cit., p. 215. 7. Id., p. 215. 8. Id., p. 216. 9. Id., p. 216. N° 127 – juillet 2001  Seul point commun avec le grade de maître classique, la branche d’acacia, ou plutôt trois sortes d’acacia, en rapport avec les trois colonnes du temple (et avec les trois grades symboliques?) : « L’acacia franc désigne l’Élu spirituel; l’enté, ses disciples, et le sauvage désigne les profanes, immondes, errants et vagabonds, scandaleux parmi les humains d’Équité ». 10 Si le catéchisme de « maître symbolique » de la version Faivre, consacre quant à lui une large place à l’acacia, sous sa forme la plus noble désormais connue du maître, c’est que le titulaire du troisième grade du porche connaît celui qui est annoncé dans le onzième chapitre d’Isaïe, en vertu duquel il a été reçu à la maîtrise. La référence scripturaire est des plus claire, puisque ce poème annonce le Messie, rejeton sorti de la souche de Jessé, de la race de David, que saint Paul identifie naturelle- ment au Christ Jésus11, en vertu duquel le candidat à la maîtrise a été reçu, par le Grand Architecte lui-même. Le même catéchisme ajoute : « Je fus reçu Maître sur le tombeau de notre Maître qui est la terre. Je fus reçu en recevant une convention, par une cérémonie et une paro- le sacramentale; cette parole fut perdue et retrouvée et m’a été donnée […] ». 12 Cette pièce évoque encore neuf tours faits par le candidat en loge – quel rapport avec les neufs tours de l’apprenti? – qui se rapportent aux patriarches. Quant au nombre neuvaire, en voici selon le même document la signification : « Le nombre du Maître particulier est le Novaire. Il désigne 1., la sujé- tion du Maître particulier au travail de la matière comme être imparfait dans l’ordre; 2e. l’incertitude de ses opérations spirituelles temporelles; 3., la réintégration de ses principes et de son individu corporel ». 13 En revanche, on rechercherait en vain dans ce catéchisme la moindre référence explicite à l’architecte Hiram dont le mythe de la mort et de la résurrection s’est imposé très tôt dans la franc-maçonne- rie spéculative pour caractériser le grade de maître (à l’exception de cer- tains rites « égyptiens » plus tardifs qui mettent en œuvre le symbolis- me de la mort d’Osiris), instaurant d’ailleurs l’équivalence générale- ment admise aujourd’hui entre les grades bleus de tous les rites. Quelle est donc la place d’Hiram dans le système coën? DE MAÎTRE CHIRAM… En juillet 1766, le rapport du frère Zambault à la Grande Loge de France rapporte le tuilage par Martines en personne, d’un membre d’une loge parisienne « apocryphe », dont les réponses n’ont rien que de très classique, notamment sur le meurtre d’Hiram et le lieu de sa sépulture. De ces réponses, Martines semble alors se contenter, qui va jusqu’à se comparer lui-même au maître Hiram pour avoir comme lui 10. Papus, Martines de Pasqually…, op. cit., p. 245. Cf. aussi Les Cahiers de Saint- Martin, op. cit., p. 123. 11. Épître aux Romains, XV, 12. 12. Les Cahiers de Saint-Martin, op. cit., p. 119. 13. Id., p. 123. Renaissance Traditionnelle Serge Caillet  subi les assauts de frères indélicats14. Pourtant, dès l’année suivante, les Statuts généraux de l’Ordre mettent sévèrement en garde contre la réception des « Jébuséens », c’est-à-dire des maçons apocryphes qui propagent la légende du meurtre du personnage désigné communé- ment sous le nom d’Hiram, et que les coëns appellent, eux, Chiram : « Ceux de cette sorte ne seront jamais introduits dans nos assemblées qu’après un rigoureux examen sur les différents points de la maçonnerie, surtout sur la mort d’H[iram] et sur ses meurtriers. On leur fera jurer solennellement qu’ils renoncent à la vengeance de la mort d’un homme qui n’a jamais été dans le temple de Salomon et qu’ils abjurent toutes les erreurs qu’une secte toujours contraire à la vraie maçonnerie a voulu introduire […] Ceux qui auront eu le malheur d’adhérer à ces erreurs ne seront admis parmi nous en qualité de frères membres de notre ordre qu’après une longue épreuve. Il faudra les recevoir comme des profanes. »15 Une instruction coën insiste encore sur les erreurs des apocryphes et de leur grade de maître : « C’est, en effet, depuis cette époque que les ouvriers de cette classe ont fondé leur prétendu grade de soi-disant maître, en supposant que le maître Chiram avait été tué misérablement dans le Temple, du côté de la porte du septentrion, par trois scélérats compagnons. Dans quelle ignorance et dans quelle erreur ces hommes-là ne sont-ils pas de vou- loir fonder un ordre sur le mensonge! Puissent-ils un jour être éclairés des saintes lumières, afin qu’ils puissent voir physiquement que le très puissant maître Chiram n’a pas de plus grands meurtriers qu’eux- mêmes, étant les vrais compagnons qui le déchirent journellement par leurs prévarications et opérations matérielles. » 16 On ne saurait se démarquer plus clairement de la légende clas- sique, et l’œuvre majeure de Martines ne consacre d’ailleurs qu’une maigre ligne à Chiram, à propos du lieu : « où l’on construirait le temple du Seigneur, sur la montagne de Mor-ia, ce qui a été exécuté par Salomon, Chiram et Hiram, roi de Tyr. » 17 S’il conserve les trois principaux personnages, Martines en profi- te pour les associer à la symbolique du temple, pour lui ceux-ci ne sont rien d’autre que les trois piliers de la création du temple universel ou les trois principaux chefs qui gouvernent la terre : « Salomon est figuré par la colonne du septentrion; Hiram, roi de Tyr, par celle du midi; et Chiram par celle d’orient. » 18 « Salomon, par sa grande sagesse, eut la foi par l’intellect spirituel saint; Hiram eut l’entendement par l’esprit; et Chiram eut la connaissance par Dieu. uploads/Religion/ cail-let.pdf

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  • Publié le Mai 17, 2021
  • Catégorie Religion
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