3. L’inclusion des femmes dans la sphère religieuse l’Eglise catholique joue un
3. L’inclusion des femmes dans la sphère religieuse l’Eglise catholique joue un rôle important ds la vie de tous les sujets du roi de France au début du XVIe s * elle offre un cadre temporel (calendrier liturgique) et spatial (la paroisse) * elle enseigne ce qu’elle estime être les vérités de la religion chrétienne (pastorale chrétienne : importance de l’Ecriture et de la Tradition, du péché originel, de la foi et des œuvres, des miracles, de la communion des saints, du Purgatoire) * elle administre les sacrements (les 7 sacrements) et prépare les hommes et les femmes à la mort chrétienne et à l’au-delà (importance du purgatoire et des indulgences) * elle distingue fortement le clergé (séculier et régulier) et les fidèles, les hommes et les femmes (le clergé séculier est purement masculin et célibataire), les élites et le commun peuple (les religieuses proviennent essentiellement de la noblesse) la Réforme est le grand événement du XVIe s : * au début du XVIe s, on trouve en France un courant réformateur que les historiens appellent « l’évangélisme chrétien » (ses principaux représentants sont Lefèvre d’Etaples et Guillaume Briçonnet) ; pour les tenants de l’évangélisme chrétien, il faut mieux faire connaître l’Evangile aux laïcs, traduire la Bible en vulgaire, éliminer les abus du clergé ; un phénomène bien connu est la multiplication des lisants-écrivants chez les laïcs des deux sexes, qui accroit la demande de traduction en vulgaire de la Bible et d’explication de la religion (c’était aussi une idée d’Erasme, assez proche de l’évangélisme chrétien) * en 1517, Luther publie ses 95 thèses qui ébranlent toute la chrétienté : ** le cœur de la Réforme luthérienne est *** le sola fide (justification par la foi seule et non, comme chez les catholiques, par la foi et les œuvres) *** le sola Scriptura (l’Ecriture sainte, Ancien et Nouveau Testament, nous dit tout ce que nous pouvons savoir de la divinité, alors que les catholiques pensent y accéder par l’Ecriture mais aussi par la Tradition, ie tous les commentaires des théologiens au fil des siècles) ; d’où l’abandon du culte des saints (de la communion des saints, de la prière aux saints, de la croyance au Purgatoire), *** le sacerdoce universel (tout le monde est prêtre, le sacerdoce n’est pas réservé à qqes-uns) *** la croyance en la consubstantiation (ds l’eucharistie, le pain et le vin sont à la fois pain et vin et corps et sang du Christ, à la place de la transsubstantiation des catholiques, pour qui le pain et le vin disparaissent et ne sont plus que corps et sang du Christ) ** le luthéranisme se diffuse surtout ds le monde germanique mais aussi en France (la sœur de François 1er, Marguerite d’Angoulême, sans jamais devenir luthérienne, a lu très tôt des écrits de Luther et a essayé de protéger les luthériens français quand la persécution a commencé) * à partir des années 1530, un Picard, Jean Calvin, développe son propre type de réforme, plus radical encore que le luthéranisme ** refus de la consubstantiation comme de la transsubstantiation (les calvinistes croient à la « présence réelle », en fait une présence symbolique du Christ dans le pain de la Cène), prédestination (chacun est prédestiné de toute éternité à son salut ou à sa damnation), suppression des évêques (maintenus dans le luthéranisme) remplacés par un système presbytéro-synodal fondé sur les 4 fonctions de pasteur, docteur, ancien et diacre ** Calvin finit par s’installer à Genève pour fuir la persécution : à partir de là, le calvinisme va être le protestantisme le plus répandu dans le royaume de France, où il se diffuse très vite, en particulier ds les villes et la noblesse (40% des nobles sont réformés vers 1559-1562), malgré les mesures répressives très dures prises par Henri II 31. Les huguenotes (« huguenot » et « huguenote » sont les mots qu’on utilise en français pour désigner les calvinistes ; on utilise aussi « réformé », qui a dc un sens plus étroit que « protestant ») 311. Les huguenotes au XVIe s un lieu commun du MA, réactivé par le XVIe s, est la propension des femmes à donner ds les hérésies : car les femmes sont des êtres faibles et débiles * dès les années 1970, Natalie Zemon DAVIS s’est demandé si la Réforme avait exercé sur les femmes un attrait particulier ; elle s’est également demandé quelles nouveautés la Réforme avait pu apporter à la vie des femmes ; elle rappelle les hypothèses de ses prédécesseurs : ** le sociologue allemand Max WEBER, ds sa Sociologie des religions, suggère que les prophéties qui ne parlent ni de guerre ni de politique et les mouvements religieux à dimension orgiaque, émotive ou hystérique, intéressent particulièrement les femmes ; Natalie Zemon DAVIS réfutera ce point en montrant que les femmes du XVIe s qui se sont intéressées au protestantisme y ont vu non une incitation à l’orgie et à l’émotivité mais un appel à la vie intellectuelle et au contrôle de soi ** l’historien britannique Keith THOMAS, spécialiste des sectes anglaises du XVIIe s, souligne que plus il y a, ds un mouvement religieux, d’égalité spirituelle entre les sexes, plus les femmes y participent ** un autre historien britannique, Lawrence STONE, de même que l’historien français Robert MANDROU, souligne que les femmes qui se sentaient particulièrement inutiles et recluses (les femmes de l’élite, les femmes de maîtres de métier) trouvaient une échappatoire ds la conversion religieuse ** Patrick COLLINSON, grand spécialiste britannique des puritains, pense que les femmes de la gentry et les épouses de marchands auraient été prédisposées par leur éducation et par une vie sociale assez libre à accueillir favorablement le calvinisme ** Roland BAINTON, biographe US de Luther, pense que les effets du protestantisme ont été favorables aux femmes : la suppression du célibat ecclésiastique et la définition du mariage comme école de bonne conduite auraient entraîné ds les rapports entre époux protestants plus d’amitié et d’égalité qu’il ne s’en trouvait à la même époque entre époux catholiques * ds la France urbaine du début du XVIe s, les femmes suivent très fidèlement la conduite sacramentelle de leur mari ** à Lyon, cette conduite est variable : *** ds les élites, on se rend régulièrement à la messe, on se confesse et on communie pour Pâques ; ds le reste de la population, ce n’est pas vrai de tout le monde (les paroisses sont surchargées et les clercs ne sont pas tjrs très attractifs) *** mais tout le monde fait baptiser ses enfants, se marie à l’église et la plupart des gens font appeler le prêtre à l’article de la mort pour recevoir l’extrême onction ; bcp de gens font un testament où ils précisent l’organisation de leurs funérailles (processions et cérémonies) et les messes à dire pour le repos de leur âme (messes de fondation : il faut prévoir plusieurs mois de salaire d’un tisserand ou d’une domestique ; bcp plus encore pour les plus riches qui allouent une somme importante à la création d’une chapellenie [un prêtre se consacrera à temps plein à la célébration de messes de fondation pour un individu et sa famille]) ** globalement, l’organisation de la vie religieuse est bien moins développée pour les femmes que pour les hommes ; et les citadines ont moins d’occasions que les hommes de manifester collectivement leur piété ; certes, elles participent avec eux aux processions de la Fête Dieu, ou aux processions appelant la protection divine contre une épidémie ou la famine *** mais les femmes sont bcp moins nb que les hommes ds les confréries (qui sont associées aux corporations ; une confrérie regroupe des hommes ayant le même métier et qui doivent s’entraider en cas de coups durs : elle organise les funérailles de ses membres et vient en aide à leurs veuves et leurs orphelins) ; à Rouen, pour la 1ère moitié du XVIe s, 6 confréries sur 37 mentionnent la présence de femmes et tjrs en petit nb ; il existe à Lyon en 1500 une confrérie de femmes mais elle a disparu en 1540 ; les jeunes gens célibataires s’organisent souvent en confrérie de saint Nicolas mais les filles n’ont pas l’équivalent (elles prient sainte Catherine mais sans créer entre elles une confrérie) *** la vie monastique elle-même est bien plus masculine que féminine (les couvents de femmes recrutent par ailleurs exclusivement dans les couches supérieures de la population) ** autrement dit, la piété des femmes est plus individuelle et informelle *** elles récitent leur chapelet toute seule, elles sont souvent seules lorsqu’elles déposent un cierge à l’église ou rendent visite au saint d’un sanctuaire voisin ; la grossesse et plus encore l’accouchement sont les temps forts de ce culte des saints (on prie la Vierge ou sainte Marguerite pour que tout se passe bien, que Dieu écarte le danger et que l’enfant vienne au monde vivant et en bonne santé) *** mais certaines femmes alphabétisées vont plus loin : elles lisent la Bible et des uploads/Religion/ femmes-france-moderne-religion-3.pdf