LE MONDE HINDOU ET LE SEXE: Symbolisme, attitudes, pratiques Author(s): André P

LE MONDE HINDOU ET LE SEXE: Symbolisme, attitudes, pratiques Author(s): André Padoux Source: Cahiers Internationaux de Sociologie, NOUVELLE SÉRIE, Vol. 76, LE SEXUEL (Janvier- Juin 1984), pp. 29-49 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40690090 . Accessed: 13/06/2014 11:54 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact support@jstor.org. . Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Cahiers Internationaux de Sociologie. http://www.jstor.org This content downloaded from 62.122.79.31 on Fri, 13 Jun 2014 11:54:19 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions LE MONDE HINDOU ET LE SEXE Symbolisme, attitudes, pratiques par André Padoux RÉSUMÉ L'Inde a toujours fait une place importante au sexe : kâma est un des « quatre buts de Vhomme ». C'est plus spécialement le domaine de la femme. Celle-ci, très présente dans le monde hindou, y a une image ambivalente : séduisante, maternelle en même temps qu'inquiétante. Cette image, en même temps que la valorisation, typiquement indienne, du corps, a des conséquences dans Vattitude de Vhomme indien envers la femme et le sexe et se retrouve dans le monde du mythe et dans la religion, où la Déesse a un rôle important. SUMMARY The role of sex and sexual activity was always recognised in India : kâma is one of the « four aims of human life ». It is, more specifically, the proper field of women. Woman is intensely present in the Hindu world where she appears as both seductivej maternal, and dangerous, hence a particular attitude of Indian men to women and to sex. This, as well as the emphasis put on the body, which is also something typically Indian, appears also in myth and in religion, where the Goddess is a dominant figure. On ne peut guère espérer passer en revue en quelques pages de façon relativement objective et équilibrée les divers pro- blèmes qu'évoque le titre de cet article. Il faudrait au moins un volume collectif pour aborder les principaux d'entre eux, volume qu'on peut d'ailleurs s'étonner qu'il n'ait (si je ne me trompe) jamais été entrepris. Il n'est en effet guère de grande civilisation où le symbolisme sexuel ait été aussi largement utilisé qu'en Inde dans le domaine métaphysico-religieux, guère de pays aussi, semble-t-il (ici il faut être prudent) où, avec ce Cahiers internationaux de Sociologie, vol. LXXVI, 1984 This content downloaded from 62.122.79.31 on Fri, 13 Jun 2014 11:54:19 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions 30 André Padoux symbolisme et ses valeurs (où est la cause ? où est l'effet ?), la préoccupation sexuelle paraisse aussi présente. On ne pourra donc ici que se limiter à quelques réflexions et à quelques faits glanés, de façon d'ailleurs non systématique, sur l'ensemble du vaste champ de l'anthropologie du sexe en Inde1, en tâchant à la fois de donner une impression d'ensemble cohérente et d'éviter des généralisations abusives. Dans l'Inde brahmanique puis hindoue2, le sexe et son activité semblent avoir toujours été très présents et très naturellement intégrés dans la représentation de l'homme et du monde. Il n'en forme pas une part fâcheuse et indésirable, à dissimuler ou condamner. Il n'en est pas non plus un aspect qu'on passe sous silence parce qu'il n'a pas d'importance ou parce qu'il inquiète. Au contraire, peu de chose, dès l'époque védique, est plus frap- pant, quand on lit les textes, que l'abondance, l'omniprésence parfois des images, du symbolisme, sexuels. Sans doute ne faut-il pas trop simplifier. Il ne faut pas négliger notamment les for- mules de certaines Upanishads qui prônent l'abstinence (mais encore est-ce une référence au sexe). Il faut aussi penser au bouddhisme (né vers 500 av. J.-C), pour qui le monde est souffrance et tout plaisir sensuel, et surtout sexuel - cause et effet de l'attachement au monde - est par là même à éviter. On peut cependant dire d'une manière générale et sans véritable inexactitude que le sexe semble une référence constante et que s'il est parfois condamné, il ne l'est pas en tant que tel, mais dans ses effets. Il n'est jamais le péché. Il n'est qu'un plaisir parmi d'autres (même s'il est de plus de conséquence). Il est aussi et surtout ressenti comme une dimension spécialement importante de l'homme - et d'ailleurs du divin - , comme une pulsion fondamentale. Qu'il soit donc exalté, seulement admis, réglementé, déprécié ou exclu, le sexe reste une partie naturelle- ment intégrante, une composante essentielle, de l'univers indien- hindou. 1. Je limite ici ce champ au monde « hindou », qui va des Védas à l'hin- douisme actuel. La référence religieuse restant essentielle car le religieux est englobant : il détermine l'idée que l'Indien - et surtout l'hindou - a de lui-même, son comportement et sa place dans la société. Je laisse de côté le bouddhisme, qui a été historiquement important, mais qui a presque disparu, ainsi que d'autres religions ; sans parler de l'Islam, présent en Inde depuis plus de mille ans et qui y compte aujourd'hui plus de 60 millions de fidèles. Mais le monde hindou est très largement majoritaire en Inde et il est ce qu'il y a de plus « indien » : c'est finalement à lui (même pour les non-hindous et les incroyants) que se ramène la civilisation indienne. 2. On distingue habituellement dans la religion entre une période ancienne « brahmanique », qui va du Véda aux premiers siècles de notre ère et une période « hindoue », allant de ce moment-là à nos jours et que caractérise notamment la disparition des rites solennels védiques, sans d'ailleurs qu'il y ait entre ces deux périodes de coupure nette : il y a encore des rites védiques. This content downloaded from 62.122.79.31 on Fri, 13 Jun 2014 11:54:19 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions Le monde hindou 31 L'orthodoxie brahmanique - ancienne8 mais toujours vivante - reconnaît quatre buts, hiérarchisés, à la vie de l'homme : d'abord moksha*, la délivrance du flot des existences, puis le dharma, Tordre socio-cosmique, Variha, tous les intérêts matériels et enfin le kâma, le désir, le plaisir ou la pratique de l'amour. Kâma apparaît ainsi comme étant, à sa propre place, une fin aussi légitime que les trois autres. Mais il dépasse aussi son but : il est englobant. C'est en effet parce qu'on désire qu'on agit, même si c'est en vue du renoncement et de la vie future. Dans l'hymne cosmogonique du Rig-Vèda (X, 129), le désir est le premier mouvement apparaissant en l'Un primordial, né lui-même de l'ardeur (tapas) : il y est la semence première de la conscience. Dans les cosmologies shivaïtes, icchâ, pulsion, volonté ou désir, est de même, la première énergie à apparaître dans la divinité : c'est cette volonté-désir qui produit la mani- festation cosmique, fruit de ce désir né dans l'absolu. Dans la plupart des mythes cosmogoniques, védiques comme tantriques, c'est d'une union sexuée que naît le monde : nous le verrons. Dès lors, les dieux se comportant comme les hommes, le désir, au plan humain, sera l'expression normale de Yego, ce qui le fait agir, le point central du psychisme, la source des actes de l'homme vivant en ce monde. Le désir, certes, n'est pas forcément sexuel. Mais il n'est pas indifférent que le mot kâma désigne aussi et plus spécialement le désir sexuel. Celui-ci apparaît donc comme ayant pour l'hindou (et plus encore peut-être pour la femme hindoue) une importance particulière. On va voir, dans ces conditions, le sexe occuper une place spécialement importante dans l'univers intérieur de l'hindou, informé par sa tradition, cependant que, dans la perspective métaphysico-religieuse de cette même tradition, la dichotomie sexuée va apparaître comme un aspect fondamental de la nature et du jeu de l'énergie - divine, cosmique et vitale - animant l'univers : cela se trouve dans les systèmes métaphysiques comme dans les mythes, avec des conséquences sur les pratiques reli- gieuses fondées sur ces croyances. Il nous faut donc, pour tâcher de mettre un peu d'ordre dans la matière de cet exposé, jeter un coup d'œil successivement sur ces deux plans : celui des hommes et de la société, puis celui, paradigmatique, où agissent les dieux et auquel tentent de se conformer les hommes, plans qui d'ailleurs interfèrent sans cesse. 3. Les Lois de Manou dateraient peut-être du n* siècle av. J.-C. Ces Lois représentent un des cas où le brahmanisme se prolonge de nos jours : il régit toujours la vie sociale et certains des rites des hautes castes. 4. Je n utilise pas ici la transcription « scientifique » du sanskrit, mais une orthographe plus proche de la prononciation des termes. This content downloaded from 62.122.79.31 on Fri, 13 Jun 2014 uploads/Religion/ le-monde-hindou-et-le-sexe-by-andre-padou.pdf

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  • Publié le Jan 04, 2021
  • Catégorie Religion
  • Langue French
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