1 GUILLAUME de S.THIERRY LETTRE aux Frères du Mont-Dieu (Lettre d’or) Présentat

1 GUILLAUME de S.THIERRY LETTRE aux Frères du Mont-Dieu (Lettre d’or) Présentation Cette « Lettre », adressée aux Chartreux du Mont-Dieu, lieu proche de Signy, (monastère cistercien où vit Guillaume depuis 1135), doit être considérée comme faisant partie des « Traités spéciaux » entrant dans la catégorie générale des « Traités sur la Charité », au même titre que - Le Traité de S. Bernard sur « Les degrés d’humilité et de l’orgueil » ; - Le Traité de S. Bernard sur « La Conversion, adressée aux Clercs » ; - Le Traité d’Aelred de Rievaulx, « De l’Amitié Spirituelle ». Ces Traités (ou « Lettre », quant à Guillaume), visent en effet « des aspects particuliers de la Charité », selon l’expression et les catégories de Dom Anselme Le Bail. La « Lettre/Traité » de Guillaume de S. Thierry, appelée par la Tradition « Lettre d’or », a été mise sous divers noms (Bernard de Clairvaux, Guigues, 5ème Prieur des Chartreux) avant d’être réattribuée à Guillaume de S. Th. Le titre donné à l’étude de Dom A. Le Bail sur le sujet : « Un Directoire des trois Etats de l’homme » (animal, rationnel, spirituel), est expressif du contenu. L’orthodoxie de la doctrine – même si Gerson, ce théologien et mystique du XVème s. dans la mouvance de la Devotio Moderna , l’a contestée –, fut toujours considérée en haute estime ; son expansion et son usage, son autorité, furent incontestables. Dans le cadre d’une « Histoire littéraire de l’Ordre de Cîteaux », à la suite de Dom A. Le Bail, nous pouvons seulement affirmer ceci :  Vers 1144, Guillaume, Abbé émérite de S. Thierry, simple moine chez les cisterciens de Signy depuis 1135, fit plusieurs séjours à la Chartreuse du Mont- Dieu. Il y trouva une admirable mise en pratique de ‘la vie solitaire’, ce qui l’incita à écrire cette Lettre, après avoir, dans un Prologue, dédié ses écrits antérieurs à cette communauté fervente afin d’encourager les novices à persévérer dans cet état de vie.  Cette « Lumière Orientale » (Orientale Lumen), transportée en cette froide région de l’Ardenne Belge, l’édifia et le combla de joie, espérant qu’il pourrait en être de même dans les monastères cisterciens de l’Ordre Nouveau, fondé à Cîteaux en 1098. Il s’avère, qu’en fait, écrite à des Chartreux, cette Lettre vise, dans l’intention de Guillaume, ses « frères cisterciens », afin de favoriser chez eux un effectif retour à la contemplation de l’Orientale Lumen. 2 I- L’objet de la Lettre Dans cette Lettre/Traité, se trouvent juxtaposés des recommandations, des exposés doctrinaux, des exercices de pratique ascétique, c'est-à-dire autant d’exhortations inhérentes à ‘la vie solitaire’ et particulièrement adaptés à une vie cartusienne. En plusieurs endroits, Guillaume donne à son exposé un ton apologétique marqué pour soutenir cette forme de vie (cf. §§ 1-11 ; 36-41). Le vocabulaire est choisi : vie ‘solitaire’ n’est pas vie ‘singulière’, et la notion de ‘cellule monastique’, est l’opposé de celle de ‘cellule carcérale’. En fait l’auteur cistercien, par l’entremise des solitaires du Mont-Dieu, s’adresse à ses frères de Signy et, au-delà, à tout l’Ordre Cistercien ainsi qu’à tout chercheur de Dieu. Pour effectuer cette quête de Dieu, l’homme doit d’abord rentrer en soi, vivre devant Dieu et avec Dieu, sous Son Regard ; ce qui amène Guillaume à présenter un cadre de recherche de Dieu sous-tendu par la doctrine des trois degrés de l’ascension de l’homme vers Dieu et des trois Etats (animalis, rationalis, spiritualis ; cf. §§ 27-45). La vie solitaire n’est cependant pas directement l’objet de la Lettre, selon Dom A. Le Bail ; son dessein propre est de décrire les trois étapes de la vie de l’homme dans son retour vers Dieu, celle du commençant, celle du progressant, et celle de l’élévation à la perfection. Si le thème est commun dans la Tradition spirituelle, le tour guillemnien est original :  Le ‘commençant’ est ‘homo animalis’, mû dans ses actions par le jugement et le commandement d’un autre homme (l’Abbé, le Prieur, ou le Maître des novices).  Le ‘progressant’ se dirige vers le discernement de sa propre raison, apte à discerner par elle-même l’action divine : il est l’homme devenu progressivement ‘rationnel’ (homo rationalis).  Le ‘parfait’ est mû par l’Esprit de Dieu, son propre esprit étant devenu un même esprit avec celui de Dieu (cf. 1 Co 6, 17) : il est l’homo spiritualis. Ces trois Etats doivent donc être distingués (cf. §§ 41-45). Cet écrit de Guillaume se rattache aux Traités de l’Amour de Dieu parce qu’il a pour dessein de montrer comment l’homme, créé à l’image de Dieu, parvient à restaurer en lui la parfaite ressemblance, par la conformité au vouloir divin, dans l’unité d’esprit avec Dieu, réalisée par l’Esprit-Saint. Cette ‘unité d’esprit’, dira Guillaume, ‘est l’Esprit-Saint’ (§ 263). « Lorsque d’une manière ineffable, inimaginable, l’homme de Dieu mérite de devenir, non pas Dieu, certes, mais cependant ce qu’est Dieu : l’homme étant par grâce ce que Dieu est en vertu de Sa Nature » (ibidem). Ceci est bien la finalité de tous les Traités de la Charité au XIIème s. A la catégorie des Etats (animal, rationnel, spirituel) se retrouvent les degrés de l’amour qui prendront le nom ‘d’appétit’, d’ ‘amour’, de ‘dilection’, de ‘charité’ (cf. §§ 234-235). Mais la forme de ce Traité « Sur la Charité », sera celle d’un « Directoire » (d’une Règle de vie), puisqu’il mentionne des exercices déterminés à pratiquer en chacun des trois Etats. 3 II- Fragmentation de l’Exposé A- Billet d’Envoi (en 15 §§). B- La Lettre : a- Liminaire : §§ 1-14 b- Appel à l’humilité : §§ 15-20 c- Exhortation à la persévérance : §§ 21-26 Première Partie : « L’homme animal » (§§ 27-186) A- La Cellule : §§ 27-45 B- Le commencement de l’homme animal : - la parfaite obéissance : §§ 46-69 - les progrès de l’homme animal : le corps réduit en servitude ; §§70-89 - La perfection de l’homme animal ; l’habitude du bien devenu plaisir ; §§ 90-93 C- Les exercices du solitaire : §§ 94-139 D- Problèmes relatifs à la vie solitaire : §§ 140-186. Deuxième Partie : Le rationnel et le spirituel ; §§ 195-248 et 249-300 A- Synthèse des trois Etats : §§ 187-194 B- L’homme rationnel ou progressant : §§185-248 C- L’homme spirituel ou le ‘parfait’ : §§ 249-300. * III- Lecture synchronique de la Lettre/Traité Quoiqu’il en soit des deux éléments constitutifs (Lettre et Traité) mis en évidence par Dom Jean Déchanet (voir SC 223, pp. 36-37), il convient de lire cursivement cette Lettre comme un tout, sans la fragmenter, car ce fut l’intention de l’auteur. 4 La Première Partie, qui traite des commencements de l’homme animal animé du désir de se convertir, a été retouchée par Guillaume pour être intégrée dans la partie « Lettre ». La formation de l’homme animal – par l’obéissance, la soumission du corps, et l’habitude à pratiquer le bien – se trouve mise en parallèle avec les principes fondamentaux de la vie solitaire (solitude dans la cellule ; fuir l’oisiveté par le travail pratiqué sous le regard des trois gardiens - Dieu, la conscience, le père spirituel ; garder la stabilité). La Seconde Partie de la Lettre commence par la recommandation de la pratique d’exercices spirituels et corporels (§§ 105-139), propre à la vie anachorétique et se poursuit par la reprise de la question des ‘cellules’, puis par celle des moyens de subsistance des solitaires, par le travail de leurs mains. On peut donc aisément percevoir que les débuts d’une vie monastique doivent se vivre dans une union étroite et indissociable entre solitude avec Dieu et pour Dieu, et vie commune (stabilité) : deux lieux fondamentaux pour la formation de l’homme animal ; solitude et communion sont le cadre indispensable à la formation de qui cherche l’union à Dieu. Ainsi formé, l’homme animal pourra dès lors vivre l’amour de Dieu dans l’oraison nourrie par la lectio et la méditation des Ecritures (§§ 169-186). Ce sera la phase initiale et transitoire pour faire passer l’homme animal à l’Etat d’homme rationnel, les trois Etats restant imbriqués les uns dans les autres. D’où la synthèse inaugurale du passage à la rationalité (§§ 187-194). En cet Etat rationnel, vont se conjuguer L’ouverture de la raison à Dieu (§§ 195-197) ; Le développement de l’anima et de l’animus vers l’Etat rationnel (§§ 198-211) ; L’acquisition des vertus (§§ 213-230) ; L’ordonnancement des puissances de l’âme (§§ 230-233) ; L’essor de la volonté convertie après la conversion du jugement de la raison (§§ 234- 248). De cet homme rationnel va naître l’homme spirituel. Sera distingué dans la phase de croissance La conformation progressive, par l’Esprit-Saint, de l’homme à Dieu dans l’unité d’esprit (§§ 249-267). L’accès par grâce au don de la contemplation, de clarté en clarté (§§ 268-275), dans une purification du cœur, un progrès dans l’amour, et le repos en Dieu. Le progrès du spirituel qui s’achemine vers une plus grande ressemblance à Dieu par l’adhésion uploads/Religion/ les-lettres-d-x27-or-guillaume-de-saint-thierry.pdf

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  • Publié le Jan 07, 2023
  • Catégorie Religion
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