1 Maica Silouana Vlad Une mère spirituelle contemporaine « Tiens ton esprit en
1 Maica Silouana Vlad Une mère spirituelle contemporaine « Tiens ton esprit en enfer et ne désespère pas » Christine Artiga Article publié en trois parties dans la revue Apostolia1 PREMIERE PARTIE PUBLIEE DANS APOSTOLIA, JUIN 2013 N° 63 Une rencontre imprévisible Lors d’un récent pèlerinage en Roumanie avec l’association Axios de la Métropole roumaine, j’ai eu la grâce de rencontrer une mère spirituelle, mère Silouana, une figure que je ne m’attendais pas à voir dans un monastère orthodoxe. L’originalité de mère Silouana a été d’oser utiliser les découvertes des sciences humaines contemporaines en psychologie, biologie et neurosciences pour les mettre au service de l’anthropologie orthodoxe philocalique. Notre guide nous avait annoncé un entretien avec une mère spirituelle, mais je n’avais aucune idée de ce qui nous attendait. Mère Silouana est higoumène du monastère Saint-Silouane l’Athonite à Iasi. En 2001, soutenu par un projet de la métropole d’Olténie, elle fonde un premier centre de formation à Craiova. En 2006, ce centre est devenu une ONG et en 2008 lorsque le monastère a été transféré à Iasi en Moldavie, le centre a été lui aussi déplacé près du monastère. Ce centre de formation est aujourd’hui sous la bénédiction de la Métropole de Moldavie et de Bucovine. L’action de Mère Silouana a été dans un premier temps une action sociale qu’elle a menée auprès des prisonniers et des enfants abandonnés, puis en vieillissant elle s’est concentrée davantage sur le travail d’accompagnement thérapeutique dans l’Eglise. Mère Silouana nous a reçus dans l’église d’une paroisse proche du monastère. Pendant 2 heures, nous avons eu la joie de l’écouter nous présenter le travail qu’elle fait avec toute son équipe. Mais tout d’abord elle nous a raconté son parcours. Dès sa première phrase, dans une langue dépouillée de fioritures, elle a annoncé la couleur de son engagement : « Le vieil homme est encore vivant et il a peur, mais avec le don de Dieu, si je garde mon esprit dans l’enfer de mon cœur, alors je peux donner ma peur à Dieu et si mon courage est plein de peur, ma peur peut devenir l’énergie de mon courage » 1 Revue éditée par la Métropole roumaine d’Europe occidentale et méridionale 2 Le parcours personnel de mère Silouana : Mère Silouana a vécu sous le régime communiste. Elle n’a d’abord connu que l’athéisme. Déjà toute petite, elle a rencontré l’enfer. En observant son corps qu’elle percevait comme une usine à excréments, elle s’est rendu compte que de toutes les bonnes choses qu’elle mangeait, il ne restait que des choses sales. Elle ne voyait dans la vie qu’une lutte contre la saleté et la putréfaction. Elle voyait les gens travailler toute la journée, ils travaillaient pour manger et pour que « de l’autre côté » ne sortent que des excréments. Et tout ça pour quoi ? Pour mourir définitivement et sentir encore plus mauvais. Devant cette dure réalité, tout son optimisme s’évanouissait . Puis, curieuse, elle a commencé à lire, à apprendre des choses et à découvrir que la vie pouvait aussi donner de la joie. Elle s’est posé beaucoup de questions et elle est devenue philosophe. Et aujourd’hui c’est avec ironie qu’elle remercie le régime marxiste qui lui a permis de rencontrer la parole de Dieu. En effet, c’est en étudiant tout ce que le régime critiquait qu’elle a pu commencer à se tourner vers Dieu, à lire les écrits interdits sur Dieu, à découvrir la Bible. Elle découvrit qu’il y avait un choix à faire entre le Bien et le Mal et ne voulut faire que le Bien. Mais à la moindre tentation, tous ses beaux principes s’évanouissaient. Cependant, elle s’accrocha et choisit d’accepter tout ce qui lui arrivait, tout ce qu’elle avait à vivre. Elle dut faire un séjour en hôpital psychiatrique en raison de la gravité des troubles de son état psychique. Après un long traitement, elle connut une certaine sérénité, mais cette sérénité était très artificielle et au fil du temps elle se rendit compte que le traitement psychiatrique médicamenteux ne transformait rien. Elle décida alors d’accepter les douleurs qu’elle avait jusque-là fuies grâce aux médicaments et à ses constructions philosophiques et commença une psychothérapie. Le traitement médicamenteux avait jusqu’alors calmé le symptôme : le traitement avait évité l’explosion psychique mais le symptôme restait intact. La psychothérapie lui permit d’être accompagnée dans la traversée de ses souffrances et de pouvoir mobiliser petit à petit ce qui jusque-là était resté figé. Une amélioration de son état psychique ne tarda pas à se faire sentir. Les dons de Dieu Cependant, en même temps qu’elle poursuivait sa psychothérapie, elle sentait que tout son être criait vers Dieu, elle appela au secours. Assez rapidement la réponse est venue d’un père spirituel qui lui a dit qu’elle trouverait la réponse à toutes ses questions dans la prière : « Seigneur Jésus-Christ Fils de Dieu aie pitié de moi, pêcheur ! » » Elle qui s’était posée toutes sortes de questions hautement philosophiques, recevait une réponse tellement courte qu’elle tomba d’abord dans le désespoir. Mais la réponse de Dieu ne tarda pas à venir, car Dieu l’invita avec beaucoup de tendresse à entrer dans son propre enfer et elle connut Son amour et Sa lumière. C’est au cœur de l’enfer, alors qu’elle n’en pouvait plus, qu’elle était au bord de l’explosion qu’elle a entendu en elle : « Vas-y ! Explose ! ». Alors, tout à coup, la nuit a explosé et la lumière a surgi. C’est alors qu’elle comprit que son enfer avait été construit sur un don de Dieu pour pouvoir survivre jusqu’à sa rencontre avec Lui. Elle nous témoigne également d’un autre don de Dieu, celui d’avoir été le témoin de la douleur du monde. Au moment où elle traversait une rue très large avec trois voies dans un sens et trois voies dans l’autre et qu’elle se trouvait au milieu du carré de fleurs, alors que les voitures roulaient à toute vitesse dans les deux sens, elle ressentit, subitement, en elle, la « douleur de Dieu ». Cette impression sembla durer une éternité. Puis, tout s’est arrêté. Elle s’est retrouvée complètement épuisée. Cette douleur du monde était tellement puissante qu’elle crut qu’elle allait mourir. Cette « visitation » a changé quelque chose de très profond en elle, non pas dans son cerveau, mais dans 3 les cellules de son corps, et en même temps elle vécut l’expérience d’une confiance infinie en la miséricorde divine. Mère Silouana est donc passée de l’athéisme glacial et mortifère à la découverte du Royaume de Dieu. Ce passage s’est fait pour elle grâce aux découvertes conjointes de la prière du cœur, des pères de l’Eglise et des thérapies contemporaines. C’est dans ce creuset singulier où souffle l’esprit de notre temps que mère Silouana nous invite à entrer pour nous laisser transformer au plus profond de nos enfers. J’ai écouté mère Silouana avec ravissement, elle jonglait si facilement entre le spirituel et le thérapeutique et avec une telle fluidité que j’en étais sidérée. Oui, il était possible d’entendre une mère spirituelle profondément orthodoxe nous parler avec simplicité à la fois des découvertes des thérapies contemporaines et des Pères de l’Eglise. L’un n’excluait pas l’autre. C’est donc à partir de son expérience singulière que mère Silouana a construit tout son enseignement. Son expérience du monde séculaire sans Dieu n’est pas sans nous rappeler le monde dans lequel, nous occidentaux, sommes en train de vivre. L’enfer nous le voyons tous les jours sur nos écrans, dans nos journaux. Mais sommes-nous décidés à le voir au plus profond de notre cœur ? Nous ne saurons jamais la teneur de l’enfer qu’a pu vivre mère Silouana, mais son témoignage nous encourage à tenir notre « esprit en enfer et à ne pas désespérer » car le Christ s’est fait homme, Il est descendu dans l’enfer de chacun d’entre nous afin que nous puissions avec Son aide sortir de nos enfers et faire l’expérience d’une humanité transfigurée. DEUXIME PARTIE PUBLIEE DANS APOSTOLIA, JUILLET-AOUT 2013 N° 64-65 Dans le centre de formation de Iaçi, mère Silouana et son équipe proposent donc, toute une série de séminaires dont l’enseignement s’appuie à la fois sur l’anthropologie des Pères de l’Eglise et sur les nouvelles découvertes scientifiques en psychologie, biologie et neurosciences. L’enfer de la tunique de peau Dans ses séminaires, mère Silouana enseigne que nous naissons avec des structures psychosomatiques émotionnelles que nous héritons de nos parents et dont nous sommes inconscients. Au début, ces structures nous aident seulement à survivre. C’est ce que les Pères de l’Eglise appellent la tunique de peau. Cependant, notre être créé à l’image de Dieu est recouvert par la rouille de notre condition d’homme déchu. Vivre dans cette tunique de peau signifie vivre sans Dieu et c’est cela qui génère l’enfer. Pour sortir de cet enfer, il faudra être d’abord capable d’identifier cette tunique de peau et d’en accepter le contenu avec lucidité. Alors, ce contenu pourra se spiritualiser, se transfigurer et l’homme pourra retrouver en lui l’image de Dieu. C’est là uploads/Religion/ maica-silouana-vlad-apostolia.pdf
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- Publié le Mai 04, 2022
- Catégorie Religion
- Langue French
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