LES RITES FUNÉRAIRES à l'épreuve de la laïcisation Études de Ludovic VIÉVARD -

LES RITES FUNÉRAIRES à l'épreuve de la laïcisation Études de Ludovic VIÉVARD - FRV100 juillet 2013 RITUELS FUNÉRAIRES, VILLE ET CIMETIÈRES Les rites funéraires à l’épreuve de la laïcisation Ludovic Viévard Pour la Direction de la prospective et du dialogue public (DPDP) du Grand Lyon juillet 2013 GRANDLYON Prospective www.millenaire3.com 1 Novembre 2013 Sommaire Ce qu’il faut retenir ................................................................................................................... 4 « Dis-moi comment tu enterres tes morts, je te dirai qui tu es ».................................................. 7 1. Comment articuler les cadres laïcs et religieux ? ..................................................................11 1. 1. Qu’est-ce qu’un rite ?...................................................................................................11 1. 2. Rites funéraires ou funérailles......................................................................................12 1. 3. Différentes dimensions des rites funéraires ..................................................................13 Dimension sociale...........................................................................................................13 Dimension individuelle ....................................................................................................15 Dimension religieuse.......................................................................................................17 Dimension anthropologique.............................................................................................20 1. 4. Rites funéraires ; quels invariants ?..............................................................................21 Accompagnement et séparation deux effets attendus de la plupart des rites funéraires.....22 1. 5. Quelles disparités irréductibles entre les différentes religions ?.....................................25 1. 6. Cadre et contexte laïc funéraire de la République française..........................................26 Historique du développement du cadre laïc .....................................................................26 Le cadre laïc est-il limitant ? Le cas du Grand Lyon .........................................................30 ENJEU 1 : La cohérence entre la loi et la pratique, la question de l'égalité entre les communautés et les territoires.................................................................................................36 Quelle cohérence de la loi ?............................................................................................36 Quelle égalité des territoires et des confessions ?............................................................38 En conclusion.................................................................................................................39 2. Les évolutions des rites et leur laïcisation : vers de nouveaux rituels ?..................................42 2.1. Quelles sont les principales évolution des rites ?...........................................................42 La laïcisation et affaiblissement du religieux : vers une déritualisation de la mort ?............42 Des évolutions auxquelles s’adaptent les religions...........................................................46 Un recul de la prise en compte sociale de la mort ............................................................48 La mort, un phénomène privé et individuel.......................................................................49 La crémation : le retour d’un choix qui déstabilise ............................................................51 2.2. Comment articuler évolution des rites et invariants ? .....................................................52 Évolution et répétition : la dialectique évolutive du rite......................................................52 L’hypothèse d’un renversement de paradigme.................................................................54 ENJEU 2 : Comment rendre possible l’expérimentation, l’invention, le « bricolage », à l’articulation du laïc et du religieux, qui révèlent l’expression de nouveaux besoins ou d’un besoin de ritualité autre ? ...................................................................................................................56 2.3. L’avènement de nouveaux rites ?..................................................................................56 Un rite laïc est-il un rite ?.................................................................................................56 Reconstruire le sens et les rites ? Qui et comment ?........................................................59 Conclusion : vive le bricolage sérieux ? ...........................................................................68 Annexe 1 – Interviews.............................................................................................................70 Vincent Cao, Pagode bouddhiste de Sainte-Foy-lès-Lyon ....................................................71 GRANDLYON Prospective www.millenaire3.com 2 Novembre 2013 Nathalie Giaconia et Élisabeth Bernard, Pastorale sacramentelle et liturgique de Lyon .........76 Richard Wertenschlag, Grand rabbin régional, Lyon.............................................................81 Kamel Kabtane, Recteur de la Grande Mosquée de Lyon.....................................................86 Laurent Blanchard, Responsable lyonnais des Pompes Funèbres Générales (PFG).............91 Gaëlle Clavandier, Sociologue au Centre Max Weber, Université de Lyon............................97 Annexe 2 – Circulaire de 2008 sur la Police des lieux de sépulture.........................................107 Bibliographie.........................................................................................................................118 GRANDLYON Prospective www.millenaire3.com 3 Novembre 2013 Ce qu’il faut retenir ENJEU 1 : La cohérence entre la loi et la pratique, la question de l'égalité entre les communautés et les territoires  Un rite est une série de gestes et de paroles qui ordonnent le temps et l’espace social. Il répond aux crises en instaurant un sens qui réfère aux récits fondateurs et sacrés. Les rites funéraires appartiennent à la catégorie des rites dits de passage et comptent une dimension temporelle qui articule trois types de rites : rites d’accompagnement, rites de marge et rites de réintégration. Ils sont performatifs et comportent une dimension sociale et individuelle.  Dans leur dimension sociale, les rites funéraires permettent de prendre acte de la disparition d’un des membres de la communauté, d’apaiser les angoisses collectives liées à sa mort et de resserrer les liens entre les vivants face au deuil. Dans leur dimension individuelle, les rites funéraires assurent également une fonction anxiolytique en fixant la place et le rôle de chacun dans le temps.  Les rites funéraires religieux traduisent une conception de la mort comme passage. Ils permettent d’établir un lien entre ici et l’au-delà et organisent les modalités optimales de la transition : accompagner, passer, renaître. In fine, le rite vise à séparer les morts et les vivants en assignant une place à chacun.  Dans le discours des responsables religieux de l’agglomération lyonnaise, les invariants des rites que l’on peut relever tiennent à ce double mouvement, à la fois collectif et individuel, d’accompagnement et de séparation, qui reflète la dimension anthropologique du rite. Toujours dans le discours des responsables religieux de l’agglomération, très peu de différences irréductibles ont été relevées, hormis le traitement fait au corps (crémation, thanatopraxie).  Lorsque difficultés il y a dans l’organisation de la ritualité funéraire, elles sont moins liées à la confrontation des religions entre elles qu’à la confrontation des religions avec le cadre laïc. Celui-ci s’est lentement mais fermement constitué et impose des limitations d’ordres différents, hygiéniques ou de principe. Il a peiné à faire une place aux communautés religieuses minoritaires, notamment celles issues de l’immigration. Aujourd’hui, dans la métropole lyonnaise, des progrès significatifs ont été faits qui tiennent à une volonté et des efforts partagés par les cultes et le cadre laïc. Entre « accommodements raisonnables » et concessions, le territoire offre une situation apaisée. Pour autant, les responsables religieux souhaiteraient disposer de plus de liberté et se heurtent au cadre légal ou au refus des communes.  Des exemples pris dans le Grand Lyon témoignent de difficultés dans l’application de la loi. Ces difficultés tiennent au fait que la pratique s’appuie sur des circulaires qui s’écartent de la loi stricto sensu. Cela créé des flous d’autant plus complexes à gérer que les maires sont en première ligne et sont placés dans une situation d’« insécurité juridique ». Pour les responsables religieux, la logique du carré confessionnel voudrait que celui-ci soit géré par les communautés, ce qui est parfois le cas dans la pratique, mais qui contrevient à la loi. GRANDLYON Prospective www.millenaire3.com 4 Novembre 2013 Cet écart entre l’esprit et la lettre fait naître des inégalités entre les communes et les communautés religieuses. Il y a ici une forme d’opacité, une zone grise entre la loi et les arrangements, qui favorise l’arbitraire des situations, et qui a du mal à s’accorder avec le principe républicain d’égalité devant la loi. A l’évidence, la question du funéraire fait ressortir ici des enjeux d’identité qui dépassent la stricte ritualité, fut-elle coupée du sacré. ENJEU 2 : Comment rendre possible l’expérimentation, l’invention, le « bricolage », à l’articulation du laïc et du religieux, qui révèlent l’expression de nouveaux besoins ou d’un besoin de ritualité autre ?  Parmi les principales évolutions que connaissent les rites, il faut citer la laïcisation et l’affaiblissement du religieux. De nombreuses raisons permettent de l’expliquer au nombre desquelles l’influence de la pensée Moderne et l’évolution des modes de vies. Les temps du rite se contractent et sont moins marqués. Certains auteurs évoquent une « déritualisation » tandis que d’autres parlent de transformation. De fait, si les rites évoluent, il semble qu’un besoin de ritualité demeure.  Face à la pression des usages, les religions s’adaptent, notamment la religion catholique, qui est la plus remise en question. Les officiants acceptent de plus en plus d’entrer en négociation avec les familles, tout en s’attachant à rappeler le sens du rite traditionnel.  Des rites moins marqués témoignerait-il d’une mort devenue taboue ? Non répondent les sociologues. Au mieux, elle fait l’objet d’un déni, lequel serait finalement une constante historique tant jamais la mort n’aurait été acceptée par aucune société. En revanche, si les rites se transforment, c’est que la prise en charge de la mort a changé, perdant de sa dimension collective au profit d’une dimension individuelle. La sphère de l’intime s’impose et une demande de personnalisation est patente. Finalement, l’enjeu du rite est de parvenir à s’approprier sa mort. « Réussir sa mort », c’est produire une cérémonie qui évoque le défunt, pour dire, au-delà de sa seule appartenance à la communauté des hommes, ce qu’il était. Ainsi la singularité se trouve-t-elle sacralisée.  Après plus de 1000 ans d’interdiction, la crémation se développe à très vive allure. Elle introduit un bouleversement profond en ce qu’elle offre une alternative à l’inhumation, et parce qu’elle nécessite de réinventer en partie des rites funéraires.  Mais réinvente-t-on les rites ? Les invariants auxquels ils réfèrent pourront conduire à penser que seules ses formes évoluent tandis que les structures demeurent. Toutefois, si les rites reflètent les fondements des sociétés où ils naissent, il est alors possible que des changements de paradigmes puissent en transformer la structure. D’un rite de passage, la mort pourrait alors relever d’autres types de rites dès lors qu’elle n’est plus conçue comme une transition.  La question de l’invention des rites et de leur laïcisation pose problème. Un rite laïc existera si on accepte qu’un rite ne réfère pas seulement au sacré. Dans le cas contraire, on fera le choix d’autres concepts pour la prise en charge de la mort, comme cérémonie, dispositif, etc. GRANDLYON Prospective www.millenaire3.com 5 Novembre 2013  On constate que plusieurs catégories d’acteurs sont à l’origine de nouvelles prises en charge de la mort. Les professionnels des pompes uploads/Religion/ rites-funeraires-et-laicisation-v2 1 .pdf

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  • Publié le Nov 24, 2021
  • Catégorie Religion
  • Langue French
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