Saint Jean de la Croix Lettres spirituelles traduction par l'abbé Jean Maillart
Saint Jean de la Croix Lettres spirituelles traduction par l'abbé Jean Maillart, jésuite. première édition numérique par abbaye-saint-benoit.ch deuxième édition numérique par jesusmarie.com fichier placé sous licence creative commons LETTRES SPIRITUELLES DU BIENHEUREUX JEAN DE LA CROIX PREMIÈRE LETTRE A un religieux qu'il conduisait en la vie spirituelle. — Il lui enseigne comment il doit détacher sa volonté du plaisir des créatures, et l'attacher à Dieu seul. DEUXIÈME LETTRE Aux carmélites déchaussées de la ville de Véas. — Il les exhorte à garder le silence, tant intérieur qu’extérieur. TROISIÈME LETTRE A la Mère Marie de Jésus, fondatrice et prieure des carmélites déchaussées de Cordoue, et autres religieuses de ce couvent. — Il traite du bon exemple qu'il faut donner, et de l'esprit intérieur avec lequel il faut agir dans la fondation des monastères. QUATRIEME LETTRE . A la même Mère prieure du couvent de Cordoue. — Il l'instruit de la manière de gouverner le temporel et le spirituel de sa communauté. CINQUIEME LETTRE A la Mère Éléonor de Saint- Gabriel, religieuse carmélite déchaussée du couvent de Cordoue. — Il lui enseigne à quitter son pays et ses proches pour faire la volonté de Dieu. SIXIEME LETTRE A la Mère Magdeleine du Saint- Esprit, religieuse du même couvent de Cordoue. — Il l'encourage à souffrir patiemment les incommodités qui se trouvent dans les nouvelles fondations. SEPTIÈME LETTRE A une demoiselle de Madrid, qui prit, peu de temps après, l'habit de carmélite déchaussée, et vécut saintement dans le couvent des Arènes, en la Nouvelle-Castille. — Il répond à trois questions qu'elle lui avait faites, sur les péchés qu'il faut pleurer, sur la manière de méditer la Passion de Jésus-Christ et sur la gloire du Paradis. HUITIEME LETTRE A la dame Jeanne de Pedraça, de Grenade. — Il lui donne des instructions pour se gouverner dans les aridités et dans les délaissements. NEUVIÈME LETTRE A la mère Anne de Jésus, carmélite déchaussée du couvent de Ségovie. — Il la console du chagrin qu'elle avait de ce que, dans le chapitre général, ce Père n'avait point été fait supérieur. DIXIÈME LETTRE A la mère Éléonor-Baptiste, prieure des carmélites déchaussées du couvent de Véas. — Il lui enseigne en quoi consistent la vie apostolique et l'abnégation religieuse. PREMIÈRE LETTRE A un religieux qu'il condui- sait en la vie spirituelle. — Il lui enseigne com- ment il doit détacher sa volonté du plaisir des créatures, et l'attacher à Dieu seul. La paix de Jésus-Christ, mon fils, soit toujours en votre âme. J'ai reçu la lettre de V. R., où vous me marquez que Notre-Seigneur vous a donné de grands désirs de l'aimer seul sur toutes choses, et où vous me demandez quelques avis pour arriver à cette fin. J'ai beaucoup de joie de ces saints désirs, et j'en aurai davantage si vous les mettez à exécu- tion. Pour cet effet, vous ferez réflexion que les goûts et les douceurs que l'âme sent, viennent or- dinairement de l'affection des choses qui lui pa- raissent bonnes, convenables, agréables et pré- cieuses. De sorte que sa passion se réveille, et sa volonté les espère; elle se plaît en elles lorsqu'elle les possède, elle craint de les perdre, et elle s'afflige lorsqu'elle en est privée. Ainsi la diversité de ses mouvements et de ses passions lui cause diverses inquiétudes. Afin que vous puissiez mortifier et éteindre ces différentes passions, vous devez vous persuader que rien de tout ce qui peut contenter le cœur n'est Dieu. Car, comme l'imagination ne peut se représenter Dieu, ni l'entendement le com- prendre, de même la volonté ne peut le goûter; et comme l’âme ne peut le posséder en cette vie tel qu'il est en son essence, de même toute la douceur et tout le plaisir, quoique sublimes, qu'elle goûte, ne peuvent être Dieu. En effet, elle ne peut rien dé- sirer qui ne soit un objet particulier et distingué des autres objets, comme elle ne peut rien connaître qu'en particulier et qu'en détail. C'est pourquoi, ne sachant pas ce que c'est que Dieu en lui-même, elle n'en peut avoir le goût; et toutes les puissances de l’âme ne sauraient l'atteindre, parce qu'il surpasse infiniment leur capacité. Il est donc nécessaire que l'âme qui veut s'unir à Dieu, étouffe 584 les sentiments de joie que les choses supérieures ou inférieures, temporelles ou spirituelles, lui peuvent imprimer, afin que, purifiée de la sorte, elle s'occupe uniquement à aimer son Créateur. Car, si la volonté peut en quelque façon embrasser Dieu et parvenir à son union, elle ne peut le faire par le moyen de ses passions, mais par le seul amour divin. Et parce qu'il n'y a aucune douceur dont la volonté est capable, qui soit véritablement cet amour, il n'y a aussi aucun sentiment propre à faire l'union de l’âme avec Dieu, hors l'opération de la volonté. Car l'opération de la volonté est fort dif- férente de son sentiment, puisque l'amour est cette opération par laquelle elle s'unit à Dieu, et elle ne s'unit point par le sentiment qui ne réside en l'âme que comme la fin et le terme de son opération. J'avoue bien que les sentiments peuvent exciter l'âme à aimer Dieu, lorsque la volonté ne s'y arrête pas et passe plus outre; mais si elle demeure atta- chée à ces sentiments, ils ne conduiront pas l'âme à Dieu, et ils la retarderont en son chemin. L'opé- ration de la volonté fait un effet contraire, elle en- gage tellement l'âme à aimer Dieu sur toutes choses, qu'elle met en lui seul toute son affection, toute sa joie, tout son goût, tout son plaisir, et qu'elle méprise tout le reste. C'est pourquoi celui que la douceur attire à l'amour de Dieu renonce incessamment à cette douceur pour aimer Dieu purement et sans goût; parce que s'il comptait sur les tendresses sensibles, il les regarderait comme la fin de son amour; et ainsi son amour se termi- nerait à la créature et non pas au Créateur. La vo- lonté doit donc se borner à l'amour de Dieu qui lui est incompréhensible, et non aux choses créées qui peuvent la toucher sensiblement. Elle aime se- lon les règles de la foi un objet certain, véritable, infiniment parfait, mais elle l'aime dans l'obscurité de ses connaissances et dans la privation de tout sentiment corporel. Ainsi celui-là tomberait dans un grand égare- ment, qui prendrait la privation des consolations spirituelles pour l'éloignement de Dieu, et l'abon- dance des délices intérieures pourra présence et pour ses faveurs particulières. Celui-là s'égarerait encore davantage, qui chercherait cette douceur en l'amour de Dieu, et qui s'y plairait. En obéis- sant à sa passion, il s'attacherait non pas à Dieu, mais au goût sensible ; il n'agirait plus selon la simplicité de la foi, ni selon la pureté de la charité divine. Son amour ne s'élèverait pas au-dessus de tout le créé, et sa volonté ne monterait pas jusques à Dieu, qui est inaccessible à tout ce qui est maté- riel. L'âme ne peut recevoir les aimables embrasse- ments du Seigneur que dans le dépouillement de tout le sensuel. Le roi-prophète semble nous insi- nuer cette vérité, lorsqu'il l'ait dire à Dieu : Ouvrez votre bouche, et je 485 la remplirai. Les sentiments délicieux ferment et serrent la bouche du cœur; l'amour pur l'ouvre et l'élargit, et alors Dieu la remplit, nourrit la volonté et apaise sa faim, Isaïe nous enseigne aussi que le cœur doit avoir soif de Dieu, pour boire ces eaux divines. Vous tous, dit-il, qui brûlez de soif, venez aux eaux, etc. Il invite en cet endroit à l'union di- vine tous ceux qui n'ont soif que de Dieu, parce qu'ils y trouveront de quoi l'étancher. Il est donc nécessaire que V. R., si elle désire arriver à la per- fection, et jouir d'une profonde paix d'esprit, consacre entièrement sa volonté à Dieu pour s'unir à lui, et qu'elle ne l'occupe nullement des choses créées. Je prie la divine Majesté de vous faire un aussi grand saint que je le souhaite. A Ségovie, le quatorzième d'avril. DEUXIÈME LETTRE Aux carmélites déchaus- sées de la ville de Véas. — Il les exhorte à gar- der le silence, tant intérieur qu’extérieur. Jésus et Marie soient en vos âmes, mes chères filles en Jésus-Christ. Votre lettre m'a donné beau- coup de consolation, je prie Notre-Seigneur de vous en récompenser. Si je ne vous ai pas écrit, ce n'a pas été faute de bonne volonté, car je ne désire rien tant que votre bien ; mais c'est que j'ai jugé qu'on vous a dit et écrit assez de choses, pour vous obliger à faire ce qu'on vous a enseigné; car c'est assurément ce qui est le plus nécessaire, puisque, si l'on souhaite quelque chose, ce n'est pas de par- ler et d'écrire, c'est de ne rien dire et de faire beau- coup. Les paroles dissipent l'esprit, le silence le re- cueille et lui donne de grandes forces pour aller à Dieu. C'est pourquoi lorsque quelqu'un a appris ce qu'il doit savoir pour avancer uploads/Religion/ saint-jean-de-la-croix-lettres-spirituelles.pdf
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Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jul 14, 2021
- Catégorie Religion
- Langue French
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