Un chemin mystique : le soufisme La majorité des musulmans appartient à l'ortho

Un chemin mystique : le soufisme La majorité des musulmans appartient à l'orthodoxie sunnite, qui considère facilement les autres mouvements, à l'intérieur de l'Islam comme des groupes schismatiques ou hérétiques. Toutefois, la position sunnite à l'égard du mouvement mystique du soufisme est plus nuancée. C'est que le soufisme ne se situe absolument pas dans une lige juridique ; c'est, au contraire, une sorte de protestation contre tout le formalisme du droit en milieu islamique, protestation qui donne la priorité à une religion du coeur beaucoup plus qu'à la discipline extérieure, à l'amour authentique de Dieu beaucoup plus qu'aux pratiques rituelles réglementées, aux valeurs de la contemplation et de l'ascèse beaucoup plus qu'à celles des conquêtes militaires et du luxe mondain. Les origines du soufisme S'il est possible de préciser des repères historiques pour les grands prophètes ou pour les fondateurs de religion, dont les doctrines manifestent l'ordonnancement d'une pensée à un moment donné de l'histoire de l'humanité, il est, en revanche, pratiquement impossible de fixer un point de départ temporel et même géographique au soufisme. C'est un mouvement dont on ignore le nom du ou des fondateurs, dont on ne connaît même pas le lieu des premiers enseignements ; peut-être le soufisme préexistait-il à l'Islam ? mais, en tout état de cause, l'Islam lui a donné sa pleine dimension, et le soufisme apparaît effectivement comme une attitude musulmane authentique, en dépit de toutes les influences extérieures qui ont pu s'exercer sur lui tout au long de son évolution. Il était nécessaire à l'Islam, religion de type juridique, de se doter d'un véritable sentiment mystique, sans lequel aucune religion ne peut subsister. Le terme de soufisme , vient de souf , qui désignait un vêtement de laine grossière, non teintée. Ce vêtement était porté en signe de pénitence, notamment par ceux qui se rendaient en pèlerinage à La Mekke. A l'origine, il n'était donc pas le vêtement distinctif d'une sorte de confrérie religieuse ; il était simplement le signe d'un croyant qui se mettait en quête de Dieu par un dépouillement intérieur et dont le vêtement grossier était une manifestation externe. Dès les premiers siècles de l'Islam pourtant, le souf devient un vêtement religieux vénéré, comme ayant été celui des grands prophètes, comme Moïse et surtout Mahomet. Mais, comme l'habit ne fait pas le moine, le souf ne fait pas le soufi ! Seuls, certains mystiques adopteront ce vêtement comme le signe distinctif de leur recherche religieuse. Et, dans la mentalité populaire, celui qui porte la robe de bure est très souvent considéré comme un sage, connotation qui a parfois fait dériver le terme de soufi de la sagesse grecque, la Sophia . Il convient d'ailleurs de remarquer que, dans une certaine mesure, le soufisme s'apparente à cette sagesse grecque qui recommandait aux hommes, et particulièrement à ceux qui se voulaient philosophes, de se connaître eux-mêmes. Pour celui qui se met à la recherche de Dieu, animé d'une véritable passion pour ce Dieu unique, il est nécessaire de se saisir tout entier avant d'entreprendre de s'abandonner tout entier dans le dépouillement de toutes les vanités, dans la solitude et la méditation. Vraisemblablement, à l'imitation du monachisme chrétien, le soufisme passa d'abord par une phase de l'ascétisme individuel entièrement libre avant d'atteindre la phase communautaire. Le maître expérimente d'abord sur lui- même le chemin qui le conduira à la rencontre de Dieu, avant de communiquer aux autres cette voie, par son enseignement. La parenté entre la mystique musulmane et la mystique chrétienne est indéniable : il y a manifestement eu des contacts entre les moines chrétiens, que Mahomet lui-même tenait en très haute estime, et les fidèles musulmans assoiffés d'une vie spirituelle qui ne pouvait pas s'épanouir dans le cadre assez étroit du juridisme islamique. Mais, si l'influence du christianisme est certaine dans les origines du soufisme il convient de noter que le monachisme musulman n'est pas une simple copie du monachisme chrétien. Les aspects mystiques du Coran Malgré les influences étrangères à l'Islam qui se sont manifestées dans l'évolution du soufisme, celui-ci plonge ses racines dans le Coran. Celui-ci recommande et prescrit diverses pratiques ascétiques qui doivent permettre à l'homme de purifier son coeur afin d'entrer en relation authentique avec son Dieu. Le soufisme a donc voulu développer toutes les valeurs spirituelles, qui se trouvaient inscrites dans le Livre de la révélation faite à Mahomet, et que l'Islam officiel avait quelque peu négligé dans la formulation dogmatique de la religion musulmane. C'est d'ailleurs la lecture, la récitation et la répétition des nombreuses sourates de ce Livre qui a pu orienter toute l'existence mystique des soufis. La première sourate, la Fatiha, qui ouvre l'ensemble du Coran, sert également à introduire de nombreux actes du culte, mais elle est aussi une grande introduction à tous les thèmes de la méditation, invitant les croyants à s'ouvrir plus complètement à la contemplation du mystère du Dieu unique, miséricordieux. C'est à lui, le maître de l'univers, que reviennent l'honneur, la gloire et la louange. Toute ascension spirituelle peut prendre son appui sur cette seule sourate, dont les sept versets sont considérés par les mystiques comme les sept dons de Dieu : la création, la miséricorde, le jugement, le secours, le chemin droit, les bienfaits et les châtiments. La Fatiha qui ouvre la prière du croyant lui permet ainsi d'avancer dans une meilleure pénétration du mystère même de Dieu, jusqu'à parvenir à une union intime avec sa volonté. Certains textes du Coran sont également des invocations adressées à Dieu, constituant de véritables hymnes à sa louange : O Dieu ! souverain du Royaume : tu donnes la royauté à qui tu veux et tu enlèves la royauté à qui tu veux. Tu honores qui tu veux et tu abaisses qui tu veux. Le bonheur est dans ta main, tu es, en vérité, puissant sur toutes choses. Tu fais pénétrer la nuit dans le jour et tu fais pénétrer le jour dans la nuit. Tu fais sortir le vivant du mort et tu fais sortir le mort du vivant. Tu donnes le nécessaire à qui tu veux, sans compter (Sourate III, 26-27). La souveraineté infinie de Dieu sur le monde est en même temps un appel qui se trouve adressée à l'ensemble de l'humanité, et particulièrement aux croyants, d'entrer en relation d'amour avec lui. D'ailleurs, la révélation même qui a été adressée à Mahomet est le point de départ privilégié de cette rencontre d'amour que Dieu lui-même a prévu avec l'humanité qu'il a créée. Et cette rencontre d'amour entre Dieu et l'homme a été inaugurée dans la rencontre qui peut et doit se faire pour le croyant entre la lecture du texte sacré et sa propre expérience intérieure. Le Coran n'est pas un livre comme les autres ; en tant que livre sacré, en tant que Parole même de Dieu, il mérite non seulement le respect, mais surtout l'étude, la méditation, la récitation... Cette étude incessante du texte même donne naissance à une interprétation, à une herméneutique, c'est-à- dire à une lecture de la révélation par l'expérience de l'homme comme à une lecture de cette expérience par la lecture de la Parole de Dieu. A la manière des autres textes révélés, le Coran se livre à plusieurs manières d'interprétation : son texte peut être lu de manière littérale et il permet au croyant de se lancer dans le formalisme juridique, rituel et moral, en prenant appui sur la lettre même de la Révélation ; son texte peut aussi être lu dus une optique historique, plaçant le croyant dans la voie de la plus pure tradition qui s'oppose à tout changement dans le cadre de la religion ; son texte peut enfin être lu de manière symbolique, conduisant le croyant sur les chemins de la mystique ou de la théologie. La théologie apparaît comme une activité de l'esprit qui justifie intellectuellement les fondements de la foi, tandis que la mystique est une véritable expérience de vie : il ne s'agit plus seulement d'affirmer la foi, de manière simplement intellectuelle, il s'agit davantage de la justifier par l'existence même du croyant. Celle-ci devient alors le lieu de vérification de l'authenticité des affirmations de la foi. La méditation du texte coranique n'est plus simplement une activité intellectuelle, même si celle-ci demeure nécessaire pour l'énonciation première de la foi ; elle est un appel à l'action de l'homme. Il n'est pas possible, au croyant, d'affirmer intellectuellement sa foi, sans que celle-ci n'ait d'incidence immédiate sur son comportement. L'union avec le Dieu transcendant, par l'amour que celui-ci porte à tout homme, et par la réponse d'amour que le croyant retourne à Dieu, s'exprime dans l'engagement de toute l'existence humaine. Aussi, en Islam, comme dans les autres religions, cette conversion à la vie mystique apparaît comme un idéal héroïque puisqu'il s'agit de miser toute sa vie sur l'affirmation de la foi et sur la certitude d'une possibilité pour l'homme d'être parfaitement uni à Dieu. Il importe à celui qui se lance sur les chemins de la vie mystique de se maîtriser totalement lui- même, uploads/Religion/ un-chemin-mystique-le-soufisme.pdf

  • 60
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Jui 08, 2021
  • Catégorie Religion
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.1026MB