LA CONSCIENCE ET L'INCONSCIENT INTRODUCTION : « CONNAIS-TOI TOI-MÊME » « Connai
LA CONSCIENCE ET L'INCONSCIENT INTRODUCTION : « CONNAIS-TOI TOI-MÊME » « Connais-toi toi-même », disait la maxime inscrite au fronton du temple de Delphes. Que signifie se connaître soi-même, comment y parvenir et qu’y découvre-t-on ? Mais tout d’abord pourquoi nous pose-t-on la question ? N’avons-nous pas conscience de ce que nous faisons et ne le savons-nous donc pas ? Sans doute nous savons ce que nous faisons, nous mettons consciemment en œuvre des moyens pour arriver à des fins auxquelles nous avons pensé. Mais est-ce vraiment « savoir » ? Savons-nous réellement ce que nous faisons, ce que sont les choses que nous disons savoir, ce qui nous pousse à les désirer et à les faire, et enfin qui nous sommes nous-mêmes ? Habituellement investis dans nos actions, nous n’avons pas coutume de nous poser ces questions. Pourtant elles surgissent lorsque notre réussite ou notre responsabilité est mise en question. Si nous échouons, si nous transgressons une loi, morale ou sociale, nous devons aussitôt en rendre raison et en appeler à notre conscience. L’automate plus ou moins conscient que nous avons pu être dans nos activités redevient un sujet conscient appelé à répondre de ses actes, à réfléchir véritablement, c'est-à-dire à se prendre lui-même pour sujet de réflexion.. Le fait de pouvoir réfléchir et répondre de ses actes est conditionné par plusieurs éléments et recouvre plusieurs domaines que nous allons analyser et problématiser. Être un sujet conscient de ses actes peut se comprendre du point de vue psychologique. Nous examinerons ce niveau en nous demandant ce qui définit et constitue la spécificité de la conscience humaine : ce sera l’étude du sujet psychique. Nous verrons dans un deuxième temps dans quelle mesure le sujet est dépendant d’autrui aussi bien pour se constituer que pour être reconnu comme tel. La réflexion et la conscience de soi suffisent-elles pour découvrir qui (ou ce que) nous sommes au fond ? C'est ce que nous mettrons en question et qui nous amènera dans un troisième temps à la découverte de l'inconscient. I) LA CONSCIENCE PSYCHIQUE A) DE LA CONSCIENCE ANIMALE À LA CONSCIENCE HUMAINE 1) La conscience spontanée, principe d’unité et de synthèse. On peut caractériser la conscience comme un savoir qui accompagne les actes d’un individu, et qui fait qu’il sait ce qu’il est en train de faire, pourquoi il le fait, comment il le fait. Tout être vivant se repère dans son milieu, entretient des relations avec lui, distingue l’utile du dangereux, acquiert certaines expériences, évolue, s’adapte ou disparaît. La complexité de ces relations peut être caractérisée comme une conscience, plus ou moins développée selon la place dans l’échelle des êtres. On nomme conscience spontanée ce savoir plus ou moins élaboré qui accompagne tous les actes d’un individu. On peut en voir les traces dès qu’il y a une intention individuelle et un rapport d’un individu avec son milieu. Bergson développe l’idée selon laquelle la conscience est immanente à tout ce qui vit, est mémoire, puissance de choix et liberté. Cette puissance de choix est inversement proportionnelle à l’automatisme mécanique grâce auquel les êtres vivants les plus rudimentaires réagissent. La matière obéit à des lois fixes, nécessaires ; la vie, dit Bergson, est imprévisible et libre. Le rôle de l’être vivant est de créer. Comme pour créer l’avenir il faut préparer le présent en utilisant ce qui est passé, la conscience apparaît comme ce qui établit le lien entre les expériences passées et le donné présent, en même temps qu’elle anticipe. Dans ce cas, l’être vivant le plus sommaire, comme l’amibe qui se projette elle-même sur une particule nutritive, possède une forme de conscience. Cette conscience constitue le principe d’unité de l’individu, qui fait que l’individu sait confusément ce qu’il doit faire, ce qui est bon pour lui, et qui dirige en quelque sorte toutes ses actions. Chez l’animal cette conscience reste rivée au présent ou tout au moins à l’avenir immédiat, à l’expérience directe, à ce simple sentiment de soi qui lui permet de persévérer dans son existence, à réagir aux différents stimuli du monde extérieur. 2) La conscience réfléchie – Texte 2 Si la conscience en restait au stade animal, nous n’en parlerions même pas. Chez l’homme la conscience acquiert une dimension supplémentaire, elle est conscience de soi, d’un soi pris comme objet de réflexion. Chacun de nous se saisit lui-même, parle de lui-même, se sait distinct du monde, peut même se retirer en lui-même pour se séparer du monde. Dès que l’enfant dit « Je », il s’élève au-dessus de tout animal. Il ne http://christiandelmas.fr CONSCIENCE ET INCONSCIENT 1 sait plus seulement confusément qu’il existe, il peut en parler, extérioriser son existence. Il prend conscience de lui-même et là il y a un redoublement : l’enfant qui parvient à dire « je » se découvre sujet, c’est lui qui décide, demande, mais il se découvre en même temps, il se regarde, se reconnaît, reconnaît l’objet qu’il est lui-même pour lui-même et pour les autres. L’enfant réfléchit : il se voit lui-même, à travers les autres d’abord, puis en lui-même. C’est lorsqu’il s’atteint lui-même qu’il « ré-fléchit ». Avant, s’il pense, il ne fait que penser unilatéralement. C’est ce qui fait que l’on nomme cette conscience de soi : conscience réfléchie. La conscience manifeste une duplicité : lorsque je me demande quelque chose, je suis celui à la fois celui qui questionne et celui qui répond, le sujet du questionnement et le sujet questionné : j’existe en quelque sorte doublement et nous verrons les conséquences que cela aura sur notre vie morale. On peut déjà un peu anticiper : je peux vouloir deux choses contraires en même temps. Je peux aussi ne pas vouloir savoir, et chercher à me mentir à moi-même. Ce sera la mauvaise foi. La duplicité de la conscience doit se comprendre en deux sens (encore une autre duplicité) : - un sens objectif positif (cf. la duplicité du langage) et - un sens péjoratif (la langue « fourchue », la possibilité du mensonge, de la trahison). Quoiqu’il en soit, j’ai toujours conscience d’exister comme une seule et même personne. Mon identité est une et unique, et, même si je peux ressentir un dédoublement, une partie de moi se rapporte toujours à l’autre, au sujet. Lorsque je passe du sommeil à la veille, de l'inconscience à la conscience, c’est entièrement, d’un coup. Avant, je ne suis pas conscient, après, d’un seul coup je m’éveille et je suis conscient. La conscience demeure en moi une et indivisible. Cette conscience, qui est principe d’unité pour nous-mêmes, nous confère du coup une double existence. Comme le dit Hegel Texte 3 « l’homme, parce qu’il est esprit, a une double existence [...] il existe aussi pour soi, il se contemple, se représente à lui-même, se pense et n’est esprit que par cette activité qui constitue un être pour soi ». Cette existence de la conscience est double, théorique et pratique : - théorique, au sens premier de contemplation, parce qu’il peut s’observer, se regarder, se voir, parce qu’il peut se pencher sur lui-même pour prendre conscience de lui, se représenter, se reconnaître dans ce qu’il tire de son propre fond. - pratique, parce qu’il se retrouve lui-même à l’extérieur, en changeant la réalité. Il enlève au monde son caractère étranger, en profite, y retrouve une forme extérieure de sa propre réalité. Cette double existence permet de distinguer l’homme de l’animal : si l’animal sait se repérer dans son environnement, s’il sait choisir ce qui lui convient et fuir ce qu’il sait dangereux, il n’accède pas à ce savoir qui se redouble et qui se dit. Nous ne savons pas ce que les animaux pensent en eux-mêmes, et ce qu’ils communiquent. Certains animaux développés communiquent manifestement de manière élaborée. Pourquoi ne posséderaient-ils pas la conscience réfléchie? 3) La spécificité de la conscience humaine Comme nous le montre Hegel, l’animal ne transforme pas son environnement, ne le marque pas du sceau de son esprit ; il le marque, en délimitant son territoire par exemple, mais en s’y adaptant. Au contraire, l’homme adapte son environnement à sa conception, à son idée. On oppose souvent les sociétés dites civilisées, techniquement avancées, qui transforment et soumettent leur environnement à leurs besoins et à leurs conceptions (religieuses, théoriques) et les peuplades primitives qui s’adaptent à leur environnement sans pouvoir véritablement le transformer et s’y intègrent. Mais, si l’architecture et l’urbanisation portent bien la trace d’une organisation géométrique (théorique et à ce titre spirituelle), même chez les primitifs, l’environnement est humanisé (par une projection anthropomorphique), peuplé d’esprits auxquels on fera appel pour les activités quotidiennes. La différence entre l’animal le plus développé et l’homme le moins développé réside dans la dimension noétique (théorique, technique puis scientifique) et/ou spirituelle (animiste, religieuse). On n’a jamais vu un animal tracer un cercle ou une droite à l’aide d’instruments conçus à dessein pour en vérifier quelques propriétés. Même si certains animaux effectuent naturellement des ronds, et des lignes, ils n’en traceront pas de géométriques. Marx dit que « ce qui distingue uploads/Science et Technologie/ conscience-et-inconscient.pdf
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- Publié le Jan 17, 2022
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